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TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco - EXTRAIT

  • N° journal 8510
  • Date de publication 30/10/2020
  • Qualité 100%
  • N° de page

Audience du 28 septembre 2020
Lecture du 13 octobre 2020

Recours tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté ministériel du 24 juillet 2018 autorisant M. S. P. à exercer la profession d'expert-comptable et de la décision implicite de rejet de la demande d'admission de M. M. A. au tableau de l'Ordre des Experts-Comptables de Monaco ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 17 septembre 2018.

En la cause de :
M. M. A. ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Sarah FILIPPI, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître André BONNET, Avocat au barreau de Marseille ;

Contre :

L'État de Monaco, représenté par le Ministre d'État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;
En présence de M. S. P., intervenant au soutien du Ministre d'État ;
Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Dominique FOUSSARD, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;

LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,

…/…

Après en avoir délibéré :

1. Considérant que, selon les articles 1er et 5 de la loi n° 1.231 du 12 juillet 2000 relative aux professions d'expert-comptable et comptable agréé, l'exercice de ces professions est subordonné à une autorisation administrative, délivrée par arrêté ministériel, après avis motivé du conseil de l'Ordre des Experts-Comptables et comptables agréés ; qu'en application de l'article 4 de la même loi et sur proposition du conseil de l'Ordre réuni le 28 février 2017, le nombre maximal des experts-comptables et des comptables agréés susceptibles d'être autorisés à exercer a été porté de 32 à 35 par l'Ordonnance Souveraine n° 6.323 du 27 mars 2017 ;
2. Considérant que, sur proposition du Conseil de l'Ordre des experts-comptables et sur délibération du Conseil de Gouvernement en date du 11 juillet 2018, le Ministre d'État a, par arrêté du 24 juillet 2018, retenu la candidature de M. S. P. et implicitement rejeté celle de M. M. A. pour exercer la profession d'Expert-Comptable ; que l'arrêté autorisant M. P. à exercer cette profession a été publié au Journal de Monaco le 3 août 2018 ; que, par lettre du 17 septembre 2018, M. A. a formé un recours gracieux qui a été implicitement rejeté ; que M. A. demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté ministériel autorisant M. P. à exercer la profession d'expert-comptable, du refus implicitement opposé à sa candidature et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

Sur la procédure

3. Considérant que si le mémoire de M. A., enregistré le 23 juin 2020, a été produit après la clôture de l'instruction, le Président du Tribunal Suprême a décidé de soumettre ce mémoire au contradictoire et a ainsi rouvert l'instruction ; qu'en l'absence de nouvelle clôture de l'instruction, celle-ci a été close à l'audience ;

Sur les conclusions d'annulation

En ce qui concerne la légalité externe

4. Considérant, en premier lieu, que c'est à tort que, pour refuser de produire l'extrait du procès-verbal de la délibération du Conseil de Gouvernement du 11 juillet 2018 relatif au choix de M. P., le Ministre d'État s'est fondé sur les dispositions de l'article 24 de l'Ordonnance Souveraine n° 3.413 du 29 août 2011, lesquelles ne s'appliquent qu'aux relations entre l'Administration et l'administré ; qu'il ressort cependant des pièces soumises au contradictoire postérieurement à la mesure d'instruction que le conseil de l'Ordre des Experts-Comptables s'est prononcé lors de la réunion du 27 juin 2018 sur les différentes candidatures ; qu'une réunion organisée le 28 juin 2018 a réuni le Conseiller de Gouvernement-Ministre des Finances et de l'Économie, le Commissaire du Gouvernement près l'Ordre des Experts-Comptables et des représentants de l'Ordre ; qu'au cours de cette réunion, ont été examinées toutes les candidatures en attente ; qu'à l'issue de cette réunion, il a été décidé de retenir la candidature de M. P. ; que le Commissaire du Gouvernement a été chargé de préparer la délibération à soumettre à la validation du Conseil de Gouvernement et le projet d'arrêté ministériel ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le Gouvernement Princier n'aurait pas disposé de l'ensemble des informations nécessaires pour se prononcer ; que le détournement de pouvoir ou de procédure allégué par M. A. n'est pas davantage établi ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qui est soutenu par M. A., la procédure au terme de laquelle M. P. a été autorisé à exercer la profession d'expert-comptable n'est entachée d'aucune irrégularité de nature à entraîner l'illégalité des décisions attaquées ;
6\. Considérant, en dernier lieu, d'une part, que la décision de rejet d'une candidature à l'exercice de la profession d'expert-comptable en Principauté ne constitue pas le refus d'une autorisation au sens du 3° de l'article 1er de la loi du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs ; que ni les dispositions de cette loi, ni aucune autre disposition législative n'imposent la motivation de la décision par laquelle le Ministre d'État écarte une candidature à l'exercice de la profession d'expert-comptable en Principauté ;
7. Considérant, d'autre part, que le rejet d'un recours gracieux contre une décision qui n'a pas à être motivée n'a pas non plus à être motivé ;
8. Considérant que, dès lors, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées seraient insuffisamment motivées ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne

9. Considérant qu'il appartient au Ministre d'État d'appliquer, dans la délivrance des autorisations d'exercice de la profession d'expert-comptable, les conditions posées par la loi, interprétées conformément à la Constitution, et les lignes directrices qu'il a, le cas échéant, élaborées pour la mise en œuvre de la loi ;
10. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que le Ministre d'État s'est fondé sur des éléments d'appréciation conformes aux conditions légales et lignes directrices de différenciation des demandes d'autorisation d'exercice de la profession d'Expert-Comptable énumérées dans la lettre du 19 mai 2015 du Conseiller de Gouvernement-Ministre des Finances et de l'Économie, tout en respectant son obligation d'appréciation particulière de chaque situation ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des conditions de mise en œuvre des critères mentionnés dans la lettre du 19 mai 2015 doit être écarté ; d'autre part, que les appréciations portées sur les candidatures, eu égard à l'expérience de M. S. P. en Principauté en matière comptable et à ses attaches avec celle-ci plus importantes que celles de M. A., ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. A. doit être rejetée, y compris et en tout état de cause ses conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à la suppression de passages injurieux ou diffamatoires

12. Considérant que, en vertu de l'article 23 de la loi n° 1.047 du 28 juillet 1982 sur l'exercice des professions d'avocat-défenseur et d'avocat, ces derniers « ne peuvent avancer aucun fait grave contre l'honneur ou la réputation des parties à moins que la cause ne l'exige » ; que, selon le second alinéa de ce même article, la juridiction saisie de la cause peut ordonner la suppression des écrits injurieux ou diffamatoires ; que les passages des écritures de M. A. dont la suppression est demandée par M. P. sur le fondement de ces dispositions n'ont pas excédé les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse ; que, dès lors, ils ne peuvent être regardés comme justifiant l'usage par le Tribunal Suprême des pouvoirs conférés par ces dispositions ;

Sur la demande de condamnation pour recours téméraire

13. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner M. A. à l'amende prévue par l'article 36 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963, modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour recours abusif

14. Considérant qu'aucune disposition ne permet au Tribunal Suprême de condamner au paiement de dommages-intérêts pour recours abusif ; que, par suite, la demande présentée par M. P. tendant à ce que le requérant soit condamné à lui verser une somme de 3.000 euros pour requête abusive doit, en tout état de cause, être rejetée ;

Décide :

Article Premier.

La requête de Monsieur M. A. est rejetée.

Art. 2.

Les demandes présentées par Monsieur S. P. sont rejetées.

Art. 3.

Les dépens sont mis à la charge de Monsieur M. A..

Art. 4.

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.
Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,
V. SANGIORGIO.

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Version 2018.11.07.14