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Loi n° 1.457 du 12 décembre 2017 relative au harcèlement et à la violence au travail.

  • N° journal 8361
  • Date de publication 22/12/2017
  • Qualité 100%
  • N° de page

ALBERT II
PAR LA GRÂCE DE DIEU
PRINCE SOUVERAIN DE MONACO


Avons sanctionné et sanctionnons la loi dont la teneur suit, que le Conseil National a adoptée dans sa séance du 5 décembre 2017.

Chapitre I
Dispositions Générales
Article Premier.


Les dispositions de la présente loi s'appliquent à toute personne physique employée, de manière contractuelle ou statutaire, par une autre personne physique ou par une personne morale de droit privé ou de droit public ainsi qu'à cet employeur, sous réserve de l'article 4-4 du Code pénal.
Les stagiaires relèvent également des dispositions de la présente loi.
Au sens de la présente loi, la relation de travail est celle, de droit privé ou de droit public, qui lie l'employé à son employeur ou aux autres employés de ce dernier.
Pour l'application de la présente loi, est assimilée à l'employeur la personne qui, par convention avec une autre, bénéficie de la mise à disposition d'un employé de cette dernière.

Art. 2.


Nul ne doit se livrer au harcèlement, au chantage sexuel et à la violence au travail.
Le harcèlement au travail est le fait de soumettre, sciemment et par quelque moyen que ce soit, dans le cadre d'une relation de travail, une personne physique à des actions ou omissions répétées ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail portant atteinte à sa dignité ou se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale.
Le chantage sexuel au travail est le fait, éventuellement répété, dans le cadre d'une relation de travail ou d'une procédure de recrutement, d'user envers une personne physique de toute forme de pression grave dans le but d'obtenir d'elle un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur ou d'un tiers.
La violence au travail est le fait de menacer ou d'agresser, physiquement ou psychiquement, une personne physique dans le cadre d'une relation de travail.

Art. 3.


Aucun employé ne saurait encourir de sanction disciplinaire ni faire l'objet de la part de son employeur d'une mesure ayant pour objet ou pour effet d'affecter défavorablement le déroulement de sa carrière pour avoir subi ou refusé de subir l'un des faits mentionnés à l'article 2, pour en avoir témoigné ou pour l'avoir relaté.
Toute sanction ou toute mesure prise en méconnaissance des dispositions du précédent alinéa est nulle et de nul effet.

Art. 4.


Tout employé ayant commis ou incité à commettre les faits mentionnés à l'article 2 est passible de sanctions disciplinaires.
Tout employé ayant délibérément fait une fausse déclaration portant sur la commission ou la non commission par autrui de l'un de ces faits est également passible de sanctions disciplinaires.

Art. 5.


L'employeur prend toutes mesures nécessaires propres à faire cesser les faits mentionnés à l'article 2 dont il a connaissance.
Il met en place des procédures appropriées destinées à prévenir de tels faits et, le cas échéant, les identifier et y mettre un terme. À cette fin, il peut désigner, au sein de son entreprise, un référent chargé de recueillir le signalement de l'un des faits visés à l'article 2\. Il informe de cette désignation l'ensemble des salariés.
La désignation d'un référent est obligatoire pour tout employeur personne morale de droit public, toute société qui exploite un monopole concédé par l'État et toute personne qui emploie habituellement plus de dix salariés. Dans ces cas, et outre l'information prévue à l'alinéa précédent, l'employeur informe également de cette désignation les délégués du personnel et les délégués syndicaux lorsque ceux-ci ont été élus ou désignés dans l'entreprise.
Le référent institué par l'État est un fonctionnaire ou un agent contractuel de l'État.
Le référent est désigné pour une période d'une année et peut être reconduit dans ses fonctions.
Le référent transmet le signalement cosigné par l'auteur de la déclaration à l'employeur, lequel est tenu d'informer par écrit le référent et l'auteur de la déclaration des suites données à ce signalement.
L'employeur met à disposition du référent les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission.
Il fixe la procédure d'instruction du signalement.
Le référent ne peut être licencié par son employeur en raison de l'exercice de sa mission. Tout licenciement le concernant est soumis aux dispositions de l'article 16 de la loi n° 459 du 19 juillet 1947 portant modification du statut des délégués du personnel et de son texte d'application.

Art. 6.


Il incombe à la personne qui allègue être victime d'un fait mentionné à l'article 2 d'établir, par tous moyens conformes à la loi, les faits qui permettent d'en présumer l'existence.
Après avoir analysé lesdits faits, il appartient au juge d'estimer si, pris dans leur ensemble, ceux-ci constituent un faisceau d'indices graves, précis et concordants permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, d'un chantage sexuel ou de violence au travail. En tout état de cause, il incombe au défendeur de prouver que les faits ainsi établis ne sont pas constitutifs d'un harcèlement, d'un chantage sexuel ou de violence au travail et que lesdits faits résultent d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, chantage sexuel ou violence au travail.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Chapitre II
De l'action devant le Tribunal du travail
Art. 7.


Le Tribunal du travail connaît de tous les différends nés sur le fondement de l'article 2, à l'exception de ceux impliquant des fonctionnaires ou des agents de l'État, de la Commune ou des établissements publics.
Il ne peut en connaître par voie de conciliation, à moins que la personne qui allègue être victime d'un fait mentionné audit article ne le requière expressément.

Art. 8.


Le Tribunal du travail est saisi par voie de requête adressée au Président de son Bureau de jugement ou, conformément au second alinéa de l'article précédent, de son Bureau de conciliation.
Le Secrétaire du Tribunal convoque les parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal. Pour le reste, la procédure applicable est celle prévue par la loi n° 446 du 16 mai 1946, modifiée.

Art. 9.


Le Tribunal du travail peut, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser un fait mentionné à l'article 2.
Ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées conformément à la procédure de référé prévue par la loi n° 446 du 16 mai 1946, modifiée.

Art. 10.


Celui qui agit devant le Tribunal du travail en invoquant, dans l'intention de nuire, les dispositions de la présente loi, peut être condamné à une amende civile dont le montant ne peut excéder trois mille euros, sans préjudice des dispositions du second alinéa de l'article 4, des dommages et intérêts qui pourraient être réclamés par le défendeur ou des sanctions pénales encourues.

Chapitre III
Dispositions applicables aux fonctionnaires et agents des services publics
Art. 11.


Tout fait mentionné à l'article 2 commis par un fonctionnaire ou un agent de l'État, de la Commune ou d'un établissement public constitue une faute personnelle au sens de l'article 3 de la loi n° 983 du 26 mai 1976.

Art. 12.


Conformément à l'article 5 et aux dispositions légales statutaires applicables, l'employeur, personne morale de droit public, doit protection à ses fonctionnaires et agents lorsqu'ils sont victimes de faits mentionnés à l'article 2.
L'employeur est, à cet effet, subrogé aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des faits mentionnés à l'article 2, la restitution des indemnités qu'il aurait versées à titre de réparation. Il dispose à ce titre d'une action directe qu'il peut exercer par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale.

Art. 13.


S'il est établi que l'employeur, personne morale de droit public, n'a pas satisfait à l'obligation mentionnée au premier alinéa de l'article 5, les dispositions de l'article 4 de la loi n° 983 du 26 mai 1976 sont applicables.

Chapitre IV
Des sanctions pénales
Art. 14.


Le fait de harcèlement au travail défini au deuxième alinéa de l'article 2 est puni de six mois à deux ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal, ou de l'une de ces deux peines seulement.
Le fait de chantage sexuel au travail défini au troisième alinéa de l'article 2 est puni des mêmes peines.
Le fait de harcèlement au travail défini au deuxième alinéa de l'article 2 ne peut être poursuivi sur le fondement de l'article 236-1 du Code pénal.

Art. 15.


Le minimum de la peine d'emprisonnement encourue au précédent article est porté au double lorsque l'infraction a été commise par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice.
Il en est de même lorsqu'elle a été commise sur une personne dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance étaient apparents ou connus de son auteur.
La présente loi est promulguée et sera exécutée comme loi de l'État.
Fait en Notre Palais à Monaco, le douze décembre deux mille dix-sept.

ALBERT.

Par le Prince,
Le Secrétaire d'État :
J. BOISSON.

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