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TRIBUNAL SUPREME de la Principauté de Monaco - Décision du 6 novembre 2001

  • No. Journal 7521
  • Date of publication 16/11/2001
  • Quality 100%
  • Page no. 1700
Recours en annulation de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le ler septembre 1947.

En la cause de :

- l'Association des locataires de Monaco, dont le siège social est 18, rue de la Turbie à Monaco, agissant poursuites et diligences de son Président, M. J-L. D., et de son Vice-président, M. T. P.,

ayant élu domicile en l'étude Me GARDETTO, Avocat-Défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par la SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;

Contre :

- S.E. M. le Ministre d'Etat de la Principauté de Monaco, représenté par Me Didier ESCAUT, Avocat-Défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;


LE TRIBUNAL SUPREME

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière constitutionnelle,

Vu la Constitution, et notamment son titre III et son article 90.A.2° ;

Vu le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966, et notamment son article 11-1, rendu exécutoire par l'ordonnance souveraine n° 1.330 du 12 février 1998 ;

Vu l'ordonnance souveraine n° 2.984, modifiée, du 16 avril 1963 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu l'ordonnance du 8 octobre 2001 par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience du Tribunal Suprême du 6 novembre 2001 ;

Ouï M. Pierre DELVOLVE, membre titulaire du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Me LYON-CAEN, Avocat aux Conseils, pour l'Association des locataires de Monaco ;

Ouï Me MOLINIE, Avocat aux Conseils, pour le Ministre d'Etat ;

Ouï M. le Procureur Général en ses conclusions ;

Sur le moyen tiré de la violation du droit au logement ;

Considérant que le droit au logement reconnu par l'article 11-1 du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966 ne fait pas partie des libertés et droits consacrés par le titre III de la Constitution au regard desquels le Tribunal Suprême peut être saisi de recours en application de l'article 90.A.2° de la Constitution ; que l'Association requérante ne peut donc invoquer le droit au logement pour demander l'annulation de la loi attaquée ; que le moyen doit être rejeté ;

Sur le moyen tiré de la violation du principe d'égalité

Considérant que si, en vertu de l'article 32 de la Constitution, "l'étranger jouit dans la Principauté de tous les droits publics et privés qui ne sont pas formellement réservés aux nationaux", il est loisible au législateur de ne pas traiter tous les étrangers de la même manière dès lors qu'ils ne se trouvent pas tous dans la même situation au regard de l'objet direct des dispositions qu'il adopte ; que, s'agissant de la détermination des personnes protégées par les dispositions relatives aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation, le législateur a pu tenir compte d'une part des liens particuliers de certains ressortissants étrangers avec la Principauté, d'autre part des exigences résultant des caractères géographiques particuliers du territoire de celle-ci ;

Considérant que, selon l'article 3 de la loi attaquée,

"Sont protégés au titre de la présente loi ;

"1) les personnes de nationalité monégasque ;

"2) les personnes nées d'un auteur monégasque ;

"- les conjoints, veufs ou veuves, de Monégasques ayant un enfant monégasque à charge ;

"- les personnes non monégasques divorcées de Monégasques ; ayant, à charge ou non, un enfant monégasque né de cette union ;

"- les conjoints non monégasques veufs ou veuves de Monégasques, ayant un enfant non monégasque à charge né de cette union ;

"3) les personnes nées à Monaco qui résident à Monaco depuis leur naissance, à condition que celle-ci soit intervenue après vingt années au moins de résidence à Monaco d'un de leurs auteurs.

"Pourront toutefois être dispensés de la condition de naissance à Monaco les personnes qui, tout en remplissant les autres conditions, seraient nées hors de la Principauté pour des raisons médicales, exceptionnelles ou de force majeure dont les circonstances seront appréciées cas par cas" ;

Considérant qu'en comptant parmi les personnes protégées les ressortissants non-monégasques répondant aux critères définis aux paragraphes 2 et 3 de l'article 3, le législateur a tenu compte de leurs liens particuliers avec des Monégasques ou avec le pays ; que la particularité de ces liens, eu égard aux caractères géographiques particuliers du territoire, est en rapport direct avec l'objet de la loi ; qu'ainsi le législateur a pu limiter à ces ressortissants le bénéfice de la protection, et ne pas l'étendre à tous les étrangers habitant à Monaco ; que le moyen tiré de la violation du principe d'égalité n'est pas fondé en ce qui concerne l'article 3 ;

Considérant toutefois que, selon l'alinéa 2 de l'article 6, "la qualité de personne protégée au sens de l'article 3 ne peut être reconnue aux personnes de la catégorie 3, dont les ressources dépassent un plafond dont le montant est fixé chaque année par ordonnance souveraine", que la condition de ressources n'est imposée ni pour les personnes de nationalité monégasque ni pour les ressortissants non monégasques de la catégorie 2 ; que l'ajout de conditions supplémentaires pour les ressortissants non monégasques de la seule catégorie 3 n'est motivé ni par une différence de situation ayant un rapport direct avec l'objet de la loi ni par les caractères géographiques particuliers du pays ; que la condition de ressources est prévue par l'article 34 de la loi pour l'octroi de l'allocation différentielle de loyer sans faire de différence entre les catégories de personnes protégées ; qu'ainsi en établissant une condition de ressources pour les seules personnes de la catégorie 3, l'alinéa 2 de l'article 6 a violé le principe d'égalité et doit être annulé ;

DECIDE :

Article ler : L'alinéa 2 de l'article 6 de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les dépens sont partagés par moitié entre les parties.

Article 4 : Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'Etat.

Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.


Le Greffier en Chef,
B. BARDY.
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