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TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco - extrait - Audience du 9 juin 2023 - Lecture du 23 juin 2023

  • N° journal 8650
  • Date de publication 07/07/2023
  • Qualité 100%
  • N° de page

Recours tendant à l’appréciation de validité de la décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat indiquant que l’appartement de quatre pièces situé au premier étage de l’immeuble, sis XXX, propriété de Mme J. G., relève des dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000, modifiée, relative aux conditions de location de certains locaux à usage d’habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947.

En la cause de :

M. P. R., représenté par Mme XXX agissant en qualité d’administratrice judiciaire de ses biens en vertu d’un jugement du XXXX du Tribunal de première instance, puis par Mme XXXX, en vertu d’un jugement du XXXX du Tribunal de première Instance ;

et Mme M. G.

Ayant élu domicile en l’étude de Maître Patricia REY, Avocat-Défenseur près la Cour d’appel de Monaco, substituée par Maître Arnaud CHEYNUT, Avocat-Défenseur près la même Cour, et plaidant par Maître Clyde BILLAUD, Avocat près la même Cour ;

Contre :

L’État de Monaco, représenté par le Ministre d’État, ayant pour Avocat-Défenseur Maître Alexis MARQUET et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation de France ;

LE TRIBUNAL SUPRÊME

Siégeant et délibérant en assemblée plénière,

…/…

Après en avoir délibéré :

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que par bail à loyer du 16 octobre 2014, enregistré le 20 octobre suivant, Mme J. G. a loué à Mme M. G. un appartement situé au premier étage de l’immeuble « XXXX », édifié avant 1947 ; que par jugement du 28 mai 2020, le Tribunal de première instance a sursis à statuer sur la demande du Procureur Général tendant à voir constatée la nullité du bail et a renvoyé Mme G. et Mme M. G. à saisir le Tribunal Suprême d’un recours en appréciation de validité d’une décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat indiquant que l’appartement en cause relevait des dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000, modifiée, relative aux conditions de location de certains locaux à usage d’habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 ; qu’à la suite du décès de J. G. le 3 avril 2020, le Tribunal de première instance, après avoir autorisé XXXX, en tant qu’administratrice judicaire des biens  de M. P. R., fils de Mme G., à accepter la succession de cette dernière, l’a aussi, par jugement du 13 juillet 2021, autorisée à reprendre la procédure pendante devant lui et à intenter une action devant le Tribunal Suprême en appréciation de validité de la décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le Ministre d’État

2. Considérant que l’article 16 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 précitée dispose : « Les recours en appréciation de validité et les recours en interprétation sur renvoi doivent être formés dans les deux mois de la date à laquelle la décision de la juridiction judiciaire est devenue définitive ».

3. Considérant que si la requête du 7 décembre 2021 présentée par M. P. R., représenté par l’administratrice judiciaire de ses biens, et par Mme M. G. sollicite improprement « l’annulation » de la décision du Directeur de l’Habitat, elle est cependant fondée sur les décisions du Tribunal de première instance renvoyant les parties à saisir le Tribunal Suprême, en application du 3° du B de l’article 90 de la Constitution, pour que puisse être appréciée la validité de cette décision administrative ; qu’elle doit dès lors être regardée comme un recours en appréciation de validité ;

4. Considérant que les requérants soutiennent, sans être contredits, que le jugement du 28 mai 2020 du Tribunal de première instance renvoyant Mme J. G. et Mme M. G. à saisir le Tribunal Suprême d’un recours en appréciation de validité de la décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat, n’a jamais été signifié et n’est donc pas définitif ; que, par suite, le Ministre d’État n’est pas fondé à soutenir que la requête serait tardive ;

5. Considérant que le Tribunal de première instance ayant renvoyé Mme M. G. à saisir le Tribunal Suprême d’un recours en appréciation de validité de la décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat, le Ministre d’État n’est pas fondé à soutenir qu’elle serait dépourvue d’intérêt à agir dans le cadre de la présente instance ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par le Ministre d’État doivent être écartées ;

Sur la validité de la décision du 2 juin 2017 du Directeur de l’Habitat

7. Considérant, en premier lieu, que, en application du 4°) de l’article 2 de l’Ordonnance Souveraine du 28 avril 2014, la Direction de l’Habitat est chargée de veiller au respect des dispositions de la loi n°1.235 du 28 décembre 2000, modifiée, et de ses textes d’application ; qu’il ressort des pièces du dossier que par courrier du 22 mai 2017, Mme XXXX a adressé au Directeur de l’Habitat une demande de renseignement relative au régime juridique de l’appartement de Mme J. G. ; que par lettre du 2 juin 2017, le Directeur lui a répondu que ce logement relève des dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et l’a informée que sa Direction se tenait à sa disposition pour tout renseignement qu’elle jugerait utile ; que la décision attaquée ne procède pas au classement de l’appartement dans l’une des catégories prévue par l’Ordonnance Souveraine n° 77 du 22 septembre 1949 relative au classement et au prix de location des immeubles d’habitation ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cette décision aurait été prise par une autorité incompétente ;

8. Considérant, en second lieu, que la législation fait coexister trois régimes de location de locaux à usage d’habitation construits ou achevés antérieurement à 1947 : le régime de droit commun auquel ont été rendus les locaux de toutes les catégories affectés pour la première fois à la location à compter du 25 juin 1970 par la loi n° 888, le régime d’exception issu de l’Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 remplacée par la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, et le régime dérogatoire au régime d’exception institué par loi n° 887 du 25 juin 1970 pour les locaux de catégories 1, 2A ou 2B devenant vacants à compter du 1er octobre 1970 ou 1971 ;

9. Considérant que le régime d’exception issu de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, a notamment pour objet, dans le but de permettre aux Monégasques et aux personnes ayant des liens particuliers avec la Principauté de se loger à Monaco, d’une part, d’imposer aux propriétaires de déclarer leurs biens vacants et de les offrir à la location et, d’autre part, d’encadrer le choix du locataire en faveur des personnes protégées dans l’ordre de priorité fixé par la loi, le montant des loyers ainsi que les conditions de renouvellement du bail et d’exercice, par le propriétaire, de son droit de reprise ; que l’article 1er de ladite loi, dans sa version applicable, prévoit que sont soumis à ses dispositions les locaux à usage d’habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 à l’exception, notamment, d’une part, de ceux qui relèvent de la loi n° 887 du 25 juin 1970 et,  d’autre part, de ceux qui, antérieurement à la loi du 28 décembre 2000, ont été libérés par le départ du dernier occupant, lorsque plus de deux ans avant le jour où son occupation a pris fin, celui-ci en était propriétaire par dévolution successorale ou les avait acquis à titre gratuit ou onéreux et n’était pas entré dans les lieux par l’exercice d’un droit de rétention ou de reprise ;

10. Considérant d’une part, concernant la première des exceptions prévues par la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000, modifiée, que, par la loi n° 887 du 25 juin 1970, le législateur n’a institué au profit des locaux de catégorie 1 et 2, sous-catégorie A et B, un régime dérogatoire que pour les biens de catégorie 1 devenant vacants à compter du 1er octobre 1970 et pour les biens de catégorie 2, sous-catégories A et B devenant vacants à compter du 1er octobre 1971 ; qu’il ressort des pièces du dossier, et qu’il n’est pas contredit, que l’appartement du 1er étage de l’immeuble, sis 5, rue des Violettes à Monaco, loué par Mme G. à Mme G. le 16 octobre 2014, qui était composé à l’origine de trois logements distincts, est devenu vacant avant le 1er octobre 1971 ; qu’il ne relève donc pas du régime dérogatoire de la loi n° 887 du 25 juin 1970 au régime d’exception de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 ;

11. Considérant, d’autre part, concernant la seconde des exceptions prévues par la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, qu’il n’est pas contredit par les requérants qu’après le regroupement des trois appartements du 1er étage de l’immeuble, l’appartement ainsi créé a été occupé par les époux G. jusqu’au 30 septembre 1975, date à laquelle ils ont procédé à un échange avec leur fille Jeanine, laquelle est devenue propriétaire de l’appartement par voie successorale les 11 décembre 1990 et 17 avril 1998 et l’a occupé à une date postérieure au 12 juillet 2002 ; que dès lors, si Mme G. est bien devenue propriétaire de l’appartement en cause par dévolution successorale plus de deux ans avant le jour où son occupation a pris fin et si elle n’est pas entrée dans les lieux par l’exercice d’un droit de rétention ou de reprise, la libération de l’appartement n’est pas intervenue antérieurement  à l’entrée en vigueur de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 ; que, par conséquent, l’appartement loué par Mme G. à Mme G. ne relève pas non plus de la seconde exception à l’application de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 ;

12. Considérant, dès lors, qu’en estimant que le logement détenu par Mme J. G. et loué à Mme M. G. relevait des dispositions de la loi du 28 décembre 2000, le Directeur de l’Habitat n’a pas entaché sa décision d’erreur de droit ;

13. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la requête de M. R. et Mme G. doit être rejetée ;

Décide :

Article Premier.

La requête de M. P. R. et Mme M. G. est rejetée.

Art. 2.

Les dépens sont mis à la charge de M. R. et Mme G..

Art. 3.

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d’État.

Pour extrait certifié conforme à l’original délivré en exécution de l’article 37 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,

V. Sangiorgio.

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