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TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco - Extrait - Audience du 23 septembre 2022 - Lecture du 7 octobre 2022

  • N° journal 8614
  • Date de publication 28/10/2022
  • Qualité 100%
  • N° de page

Recours en annulation pour excès de pouvoir de la décision du 29 mars 2021 du Ministre d’État refusant à la société M. Z. R. E.  l’autorisation d’exercer l’activité de transaction immobilière, gestion immobilière, administration et syndic d’immeubles en copropriété.

En la cause de :

La société M. Z. R. E ;

M. M. Z. ;

M. H. Z. ;

M. J-C. A. ;

Ayant élu domicile en l’étude de Maître Pierre-Anne NOGHES-du MONCEAU, Avocat-Défenseur près la Cour d’appel de Monaco, et plaidant par ledit Avocat-Défenseur ;

Contre :

L’État de Monaco, représenté par le Ministre d’État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation de France ;

LE TRIBUNAL SUPRÊME

Siégeant et délibérant en assemblée plénière,

…/…

Après en avoir délibéré :

1. Considérant que, par une décision du 29 mars 2021, le Ministre d’État a refusé à la société M. Z. R. E., M. M. Z., M. H. Z. et M. J-C A. l’autorisation d’exercer l’activité de transaction immobilière, gestion immobilière, administration et syndic d’immeubles en copropriété ; que les requérants demandent au Tribunal Suprême d’annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Ministre d’État

2. Considérant qu’aux termes de l’article 17 de l’Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963, modifiée, sur l’organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême : « Le recours est introduit par une requête signée d’un avocat-défenseur, contenant l’exposé des faits, les moyens et les conclusions. Elle est accompagnée de la décision attaquée ou de la réclamation implicitement rejetée. (…) » ;

3. Considérant qu’ainsi que l’affirme lui-même le Ministre d’État dans ses écritures, la demande d’autorisation a été présentée collectivement par les quatre requérants ; qu’il ressort des pièces du dossier que si chacun des requérants a reçu une lettre de notification, ces lettres sont rédigées en termes identiques ; que le Ministre d’État a ainsi rejeté leur demande collective par une décision unique dont les requérants ont demandé au Tribunal Suprême, par une requête collective, l’annulation pour excès de pouvoir ; qu’au demeurant, il ressort des pièces de la procédure que le Ministre d’État a produit les lettres de notification adressées à chacun des requérants ; que, par suite, le Ministre d’État n’est pas fondé à soutenir que seule la requête de M. A. serait recevable, les trois autres requêtes ne l’étant pas faute de production de la décision attaquée, en méconnaissance de l’article 17 de l’Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963 ; que la fin de non-recevoir partielle qu’il oppose ne peut donc qu’être écartée ;

Sur les conclusions à fin d’annulation

4. Considérant, d’une part, que l’article 5 de la loi du 26 juillet 1991 modifiée, concernant l’exercice de certaines activités économiques et juridiques, applicable à la demande d’autorisation présentée par les requérants, dispose : « L’exercice des activités visées à l’article premier par des personnes physiques de nationalité étrangère est subordonné à l’obtention d’une autorisation administrative. / (…) / Il est donné notification par le Ministre d’État par lettre recommandée avec demande d’avis de réception postal, cinq jours ouvrables à compter du dépôt du dossier tendant à l’obtention de l’autorisation d’exercer une des activités visées à l’article premier, soit de la recevabilité de la demande d’autorisation, soit de l’irrecevabilité de la demande lorsque le dossier est incomplet. / L’autorisation d’exercer doit être délivrée par décision du Ministre d’État, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la recevabilité de la demande. /(…) Si aucune réponse n’est notifiée à l’expiration du délai, l’autorisation est réputée avoir été délivrée. L’autorisation, délivrée par décision du Ministre d’État, détermine limitativement les activités qui peuvent être exercées, les locaux où elles seront déployées et mentionne, s’il y a lieu, les conditions de leur exercice. / L’autorisation est personnelle et incessible. / (…) » ;

5. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 12 juillet 2002 sur les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce : « L’autorisation prévue à l’article premier est accordée aux personnes physiques qui satisfont aux conditions suivantes : / 1° - justifier de leur aptitude professionnelle dans les conditions fixées par ordonnance souveraine, / 2° - justifier du cautionnement d’un établissement bancaire ou financier destiné à garantir le remboursement des fonds, effets ou valeurs déposés selon les modalités fixées par ordonnance souveraine, dans les conditions précisées à la section II. / 3° - justifier de la souscription d’un contrat d’assurance contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle, dans les conditions fixées à la section III, / 4° - offrir toutes garanties de moralité professionnelle. / L’autorisation administrative est délivrée aux personnes morales si : / - elles-mêmes satisfont aux conditions prévues aux chiffres 2° et 3° ci-dessus, / - les personnes physiques qui les administrent satisfont aux conditions prévues aux chiffres 1° et 4° ci-dessus. / Les personnes qui assurent la direction de chaque établissement, succursale ou agence doivent également satisfaire aux chiffres 1° et 4° ci-dessus » ;

6. Considérant qu’il appartient au juge de l’excès de pouvoir de donner aux décisions qui lui sont déférées leur exacte qualification ; qu’en l’espèce, il ressort des pièces du dossier que le 9 octobre 2021, les requérants ont adressé à la Direction de l’Expansion Économique une demande d’autorisation d’exercer l’activité de transaction immobilière, gestion immobilière, administration et syndic d’immeubles en copropriété ; que, par lettre du 26 novembre 2020, la Direction a notifié aux requérants la recevabilité de leur demande d’autorisation ; que le silence ensuite gardé par l’Administration sur cette demande pendant un délai de trois mois a fait naître, le 26 février 2021, une décision implicite d’acceptation ; que par une décision expresse du 29 mars 2021, le Ministre d’État a rejeté la demande d’autorisation présentée par les requérants ; que cette décision doit être regardée comme une décision de retrait de la décision implicite d’acceptation née le 26 février 2021 ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’autorisation a été retirée aux motifs, d’une part, que les pétitionnaires ne présentaient pas les garanties de moralité professionnelle exigées par l’article 3 de la loi du 12 juillet 2002 et, d’autre part, que l’activité d’agent immobilier était suffisamment représentée sur le territoire monégasque ;

8. Considérant qu’aux termes de l’article 32 de l’Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963, modifiée, sur l’organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême : « Le Tribunal peut, avant de statuer au fond, ordonner toutes les mesures d’instruction qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité » ;

9. Considérant que le Tribunal Suprême se prononce sur les questions en litige au vu des éléments versés au dossier de la procédure par les parties ; qu’il incombe à ces dernières d’apporter, à l’appui de leurs prétentions, tous les éléments nécessaires ; que s’il y a lieu, dès lors, pour le Tribunal Suprême d’écarter des allégations insuffisamment étayées, il ne saurait toutefois exiger de l’auteur du recours qu’il apporte, en toute circonstance, la preuve des faits qu’il avance ; qu’il revient, le cas échéant, au Tribunal Suprême, avant de se prononcer sur une requête assortie d’allégations sérieuses non démenties par les éléments produits en défense par l’Administration, de prescrire, sur le fondement de l’article 32 de l’Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963, les mesures d’instruction propres à lui procurer les éléments de nature à lui permettre d’établir sa conviction, en particulier en exigeant de l’Administration la production de toute pièce en sa possession susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur ;

10. Considérant que la circonstance, invoquée par l’Administration, que l’agence M. Z. avait mentionné exercer en Principauté alors qu’elle ne disposait d’aucune autorisation serait de nature à fonder l’appréciation selon laquelle la société M. Z. R. E. ainsi que ses gérants et associés, eu égard aux liens qui les unissent et au caractère collectif de leur demande, n’offriraient pas toutes garanties de moralité professionnelle exigées ; que toutefois, alors que les requérants ont contesté l’exactitude d’un tel motif, le Ministre d’État n’a pas produit les pièces sur lesquelles il a fondé son appréciation ;

11. Considérant qu’il y a lieu, en conséquence, en application de l’article 32 de l’Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963, de prescrire une mesure d’instruction aux fins d’inviter le Ministre d’État à produire tous les éléments permettant au Tribunal Suprême d’exercer son contrôle de légalité de la décision attaquée, notamment le dossier de demande d’autorisation présenté par les requérants ainsi que toute pièce sur laquelle l’Administration s’est fondée pour retenir que l’agence M. Z. avait mentionné exercer en Principauté alors qu’elle ne disposait d’aucune autorisation ;

Décide :

Article Premier.

Le Ministre d’État est invité à produire dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision le dossier de demande d’autorisation présenté par les requérants ainsi que toute pièce sur laquelle l’Administration s’est fondée pour retenir que l’agence M. Z. avait mentionné exercer en Principauté alors qu’elle ne disposait d’aucune autorisation.

Art. 2.

Les dépens sont réservés.

Art. 3.

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d’État.

Pour extrait certifié conforme à l’original délivré en exécution de l’article 37 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,

V. Sangiorgio.

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