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EXTRAIT - TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco

  • N° journal 8442
  • Date de publication 12/07/2019
  • Qualité 100%
  • N° de page

Audience du 6 juin 2019
Lecture du 19 juin 2019

Recours en annulation de l'Ordonnance Souveraine n° 6.803 du 21 février 2018, publiée au Journal de Monaco le 23 février 2018, portant admission de M. J.F. C., Lieutenant de police à la Direction de la Sûreté Publique, à la retraite d'office à compter du 24 février 2018.
En la cause de :
Monsieur J.F. C. ;
Élisant domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit Avocat-défenseur ;
Contre :
L'État de Monaco, représenté par le Ministre d'État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIÉ, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France.
LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,
…/…
Après en avoir délibéré :
Sur les conclusions à fin d'annulation
1. Considérant que, sur la proposition motivée émise par le conseil de discipline le 17 janvier 2018, M. J.F. C. a été admis à la retraite d'office par Ordonnance Souveraine n° 6.803 du 21 février 2018, avec effet au 24 février 2018 ;
Sur la légalité externe
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs « Doivent être motivées à peine de nullité les décisions administratives à caractère individuel qui : (…) - 2° - infligent une sanction » ;
Considérant que la proposition du conseil de discipline se prononce sur la matérialité des faits, sur leur qualification disciplinaire, sur la nature et le degré de la sanction ; qu'il ressort des termes de la décision attaquée que son auteur s'est approprié les motifs de la proposition du conseil de discipline ; qu'il n'est pas contesté que M. C. a été destinataire de cette proposition ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;
4. Considérant que l'article 45 de la loi n° 975 portant statut des fonctionnaires dispose : « Le conseil de discipline comprend six membres : - trois, dont le président, sont désignés par le ministre d'État ; - trois sont désignés par les représentants des fonctionnaires au sein de la commission administrative paritaire compétente et doivent être titulaires d'un grade au moins égal à celui du comparant » ; qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article 1er de l'arrêté ministériel n° 77‑126 relatif aux commissions administratives paritaires, « chaque commission comprend huit représentants de l'Administration, dont le président, et huit représentants élus des fonctionnaires, les uns et les autres étant également répartis entre membres titulaires et membres suppléants » ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, lorsque le nombre des membres élus de la commission administrative paritaire compétente titulaires d'un grade au moins égal à celui du comparant est inférieur à trois, les représentants des fonctionnaires au sein de cette commission sont tenus de compléter le conseil de discipline en recourant à la désignation de fonctionnaires extérieurs à cette commission, titulaires d'un grade au moins égal à celui du comparant et présentant des garanties d'impartialité ;
5. Considérant que, en l'espèce, seuls deux des huit représentants des fonctionnaires membres de la commission administrative paritaire de la catégorie B, dont relève M. C., étaient titulaires d'un grade au moins égal à celui du comparant, à savoir le grade de lieutenant de police ; que c'est donc à juste titre que, réunis le 9 novembre 2017, les représentants des fonctionnaires au sein de cette commission ont, après avoir écarté la désignation de l'un de ces deux membres au motif qu'il était le supérieur hiérarchique direct du requérant, complété le conseil de discipline en recourant à la désignation de fonctionnaires extérieurs à la commission ; que rien ne leur interdisait de faire précéder cette désignation d'un tirage au sort parmi les fonctionnaires de police de l'État relevant de la catégorie B et ayant un grade au moins égal à celui de lieutenant de police, à l'exception de ceux placés en congé de maladie de longue durée ou en congé de longue maladie et de ceux qui exerceraient une autorité hiérarchique directe sur le comparant ; que l'argument selon lequel ce tirage au sort n'a pas suivi la procédure prévue à l'article 23 de l'arrêté n° 77-126 précité est inopérant dès lors que cet article 23 régit le remplacement des membres des commissions administratives paritaires et non la composition des conseils de discipline ; qu'en conséquence le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du conseil de discipline doit être écarté ;
6. Considérant que l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (…) » ; qu'il en résulte que confier à l'administration la poursuite et la répression disciplinaire des fautes commises par un fonctionnaire n'est pas contraire à cette Convention pourvu que l'intéressé puisse saisir de toute décision prise ainsi à son encontre un tribunal offrant les garanties de son article 6 §1, c'est-à-dire habilité à exercer un plein contrôle sur ladite décision ;
7. Considérant que la sanction prise à l'encontre de M. C. n'a pas été décidée par un tribunal, au sens de l'article 6 de la Convention, mais à l'issue d'une procédure purement administrative qui ignore la distinction entre fonction de poursuite et fonction de répression ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette procédure n'est pas contraire à l'article 6 §1 précité dès lors que M. C. a saisi le Tribunal Suprême auquel il appartient de contrôler la matérialité des faits reprochés, leur qualification et la proportionnalité entre, d'une part, la gravité de ces fautes et, d'autre part, la gravité de la sanction dont il a fait l'objet et, s'il y a lieu, d'en réparer les conséquences dommageables ; que le moyen tiré de la violation dudit article 6 §1 doit donc être écarté ;
8. Considérant que le principe d'impartialité s'impose à toute autorité administrative ;
9. Considérant qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que, préalablement à la réunion du conseil de discipline, son président, certains de ses membres ou l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ont publiquement pris position sur la matérialité et la gravité des faits reprochés au requérant ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré du défaut d'impartialité doit être rejeté ;
Sur la légalité interne
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé le conseil de discipline, que M. C. a durablement omis de déclarer aux différents services compétents l'évolution de sa situation personnelle et en particulier de sa résidence, et ce alors même qu'il lui avait été rappelé l'obligation d'une telle déclaration ;
11. Considérant d'une part, qu'il résulte de l'article 1er de l'Ordonnance Souveraine n° 5.160 du 5 janvier 2015 que seules les personnes condamnées aux sanctions pénales qu'il énumère, pour des faits commis antérieurement au 10 décembre 2014, bénéficient de l'amnistie ; que les faits reprochés à M. C. n'entraient pas dans le champ de l'amnistie ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'Ordonnance Souveraine n° 5.160 du 5 janvier 2015 ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant d'autre part, que, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus au point 7 et conformément à l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient au Tribunal Suprême d'exercer un plein contrôle sur les sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires de l'État ;
13. Considérant que, eu égard à sa qualité de lieutenant de police, à son ancienneté dans les services de police de la Principauté, à la mise en garde dont il a fait l'objet en 2004 et aux fonctions exercées pendant plusieurs années au service des résidents de la Direction de la Sûreté Publique, les faits sur lesquels est fondée la décision attaquée sont constitutifs de manquements aux devoirs de moralité et de probité qui s'imposent à tout fonctionnaire de nature à justifier la sanction de mise à la retraite d'office dont il a fait l'objet ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité et de publication
14. Considérant que le rejet des conclusions d'annulation présentées par M. C. ne peut qu'entraîner le rejet de ses conclusions indemnitaires ainsi que, en tout État de cause, les conclusions tendant à la publication de la présente décision ;
Décide :

Article Premier.

La requête de M. J.F. C. est rejetée.

Art. 2.

Les dépens sont mis à la charge de M. J.F. C.

Art. 3.

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.
Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,
V. Sangiorgio.

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Version 2018.11.07.14