Séance privée solennelle tenue le 23 juin 2006 au Conseil National à l'occasion de la visite officielle de S.A.S. le Prince Albert II.
Le vendredi 23 juin 2006, à 16 heures, S.A.S. le Prince Souverain a assisté à une séance privée solennelle tenue par le Conseil National, en présence des Membres du Cabinet Princier, des Membres du Gouvernement et de Hautes Personnalités représentant les différents Corps Constitués et Services administratifs du pays.
A cette occasion, S.A.S. le Prince Albert II a inauguré la Salle des Anciens Présidents du Conseil National, dans laquelle sont présentées leurs photographies.
S.A.S. le Prince Souverain a été accueilli en ces termes par M. Stéphane VALERI, Président du Conseil National :
« Monseigneur,
C’est un immense honneur et une grande joie pour moi, de présider aujourd’hui cette séance privée solennelle, à l’occasion de la première visite officielle de Votre Altesse, en qualité de Prince Souverain, au Conseil National.
Le souhait que Vous avez manifesté, moins d’un an après Votre accession au Trône, de Vous rendre auprès de notre Assemblée, nous comble et nous honore.
Tous les Conseillers Nationaux ici présents sont profondément heureux de pouvoir prendre part à cet événement exceptionnel dans la vie du Conseil National. Tous se joignent à moi pour Vous exprimer la joie et l’émotion qui sont les nôtres, de Vous accueillir aujourd’hui dans l’enceinte de notre Parlement.
Vous connaissez, Monseigneur, l’attachement profond qui a de tous temps uni le peuple monégasque à ses Princes. Permettez-moi, au nom de notre Institution, de Vous en apporter un nouveau témoignage en Vous assurant de l’indéfectible fidélité de la représentation nationale à Votre Personne et à la Famille Princière. La symbiose entre les Monégasques et leur Souverain a toujours été et sera toujours le ferment et la force de notre Pays.
Par cette visite officielle, Vous avez tenu à manifester l’estime dans laquelle Vous tenez l’institution parlementaire et l’importance que Vous accordez au rôle et à l’action du Conseil National.
Nous sommes particulièrement sensibles à ce geste qui témoigne de Votre attachement à l’esprit démocratique de nos Institutions. Celles-ci, sans ressembler aux autres modèles européens, assurent dans la fidélité à nos traditions, le respect de cette valeur fondamentale que nous partageons avec tous les Etats de droit. Notre Parlement en est la preuve : il existe à Monaco une vie publique démocratique, dont le Conseil National est à la fois l’expression et le garant, à laquelle les Monégasques sont attachés et qui s’exerce pleinement, dans le respect et la fidélité au Prince.
Cette réalité, souvent ignorée de l’extérieur, nous avons réussi depuis 2003, à la faire connaître et reconnaître.
L’action des Conseillers Nationaux, dans toutes les instances interparlementaires où ils sont présents, y a contribué, que ce soit au sein de l’UIP, de la Francophonie, de l’OSCE, du Conseil de l’Europe, ou au travers de ma participation aux Conférences mondiale et européenne des Présidents de Parlement, de l’organisation à Monaco de la première Conférence des Parlements des Petits Etats d’Europe, ou bien encore des rencontres régulières avec nos homologues français et italiens.
Le récent accueil chaleureux les 12 et 13 juin dernier, de notre délégation, à Paris, et le salut reçu en séance publique de tous les groupes politiques de l’Assemblée Nationale française, sont la preuve que ce travail porte ses fruits.
Comment ne pas se féliciter également de l’adhésion en octobre 2004, de Monaco au Conseil de l’Europe, voulue par nos Souverains, défendue par notre Conseil National et intervenue dans le respect de nos spécificités, alors que tant de sceptiques, après 6 ans d’attente, n’y croyaient plus. Je n’ai rien à ajouter à la conclusion de l’article de notre quotidien local, le 17 juin dernier, je le cite : « Les Rapporteurs du Conseil de l’Europe s’affirment satisfaits de l’évolution du pays et lui décernent une bonne note. On est passé au stade de l’apriori favorable. On y aurait guère cru il y a quatre ans ».
Monseigneur, je Vous suis très reconnaissant d’avoir accepté, avant l’ouverture de la présente séance solennelle, d’inaugurer la salle située à l’entrée de cet hémicycle, qui portera désormais le nom de « Salle d’Honneur des Anciens Présidents ». Par cette initiative, j’ai tenu à rendre hommage à ces hommes qui, tout au long du XXe siècle, ont contribué à faire de notre Institution ce qu’elle est aujourd’hui.
Il nous revient, à mes collègues et à moi-même, depuis 2003, de poursuivre cet héritage. Nous le faisons avec la volonté que le Conseil National s’acquitte du rôle qui est le sien, en exerçant pleinement ses prérogatives, dans le respect de celles du Gouvernement Princier, au mieux des intérêts des Monégasques et de Monaco.
Ni chambre d’enregistrement, ni chambre d’opposition, le Conseil National se doit d’être un partenaire indépendant et d’entretenir avec le Gouvernement, tout en défendant ses convictions avec fermeté, un dialogue basé sur la recherche permanente du consensus sans lequel, à Monaco, rien n’est possible.
Nous sommes convaincus que l’équilibre de nos Institutions, tel que nous le pratiquons aujourd’hui, constitue le bon équilibre pour Monaco. Il consacre la prééminence de la Personne du Prince et son rôle essentiel en tant que Chef de l’Etat. Il implique parallèlement, pour l’élaboration de la loi, un accord des volontés du Gouvernement, représentant le Prince, et du Conseil National, élu par les Monégasques. Cet accord des volontés découle aussi naturellement de ce qui est notre objectif commun : l’intérêt général du Pays.
Pour que cet équilibre fonctionne, il faut que chacun soit dans son rôle. Cela signifie que certaines velléités qui ont pu s’exprimer ça et là, d’imposer par l’affrontement au Gouvernement Princier le programme du Conseil National, n’ont évidemment pas lieu d’être dans notre système institutionnel. Cela signifie aussi que dans un souci de meilleure concertation, le Gouvernement doit accepter d’associer plus étroitement le Conseil National au choix et à la mise en œuvre des grandes orientations politiques, sur lesquelles notre Assemblée est naturellement amenée à se prononcer au moment de la discussion budgétaire.
Dans ce domaine, le Conseil National peut être une force de propositions pour permettre au Gouvernement d’améliorer ses projets, en prenant davantage en compte la dimension sociale et humaine à laquelle le Conseil National, assemblée élue, est par nature plus sensible. Pour qu’il puisse jouer ce rôle de façon constructive, il faut que son droit à l’information, et son avis, soient respectés.
Les Monégasques nous ont élus pour défendre certaines valeurs et mener à bien certaines priorités qui se reflètent parfaitement dans les grandes orientations que Votre Altesse a définies pour notre Pays.
Ainsi, Vous avez émis le souhait que le développement et la prospérité économique de Monaco ne constituent pas une fin en soi mais profitent à tous. Nous avons toujours eu à cœur, dans le cadre de notre dialogue institutionnel avec le Gouvernement, de défendre ces valeurs humaines de solidarité et de justice sociale, sans lesquelles notre Pays risquerait de devenir une nation sans âme.
D’abord et avant tout dans le domaine du logement de nos compatriotes, dont Vous savez combien il constitue une question essentielle pour la population face aux problèmes que posent les contraintes géographiques de notre petit Pays.
Dans ce domaine plus que tout autre, l’Etat doit jouer son rôle pour garantir que tous les Nationaux aient droit de cité et droit de vie à Monaco. L’effort de construction sans précédent entrepris par le Gouvernement depuis trois ans et dont on peut voir déjà les premiers résultats, témoigne que, sous l’impulsion du Conseil National, les besoins légitimes des Monégasques ont été pris en compte.
Reste la question du logement de ceux que nous appelons les « enfants du Pays », et envers lesquels Votre Altesse a maintes fois manifesté par le passé Son affection.
Les Monégasques sont attachés au maintien en Principauté de ces amis et de ces frères qui sont une partie intégrante de l’identité et de l’âme de notre Pays. Une solution à long terme est nécessaire pour le logement de notre population stable. Sur ce sujet, il nous faudra encore argumenter et convaincre, et nous nous y emploierons.
Sur un autre plan, Vous connaissez, Monseigneur, l’attachement du Conseil National à faire évoluer le droit des femmes en Principauté, dans le sens de l’égalité de traitement qu’elles sont en droit d’attendre d’une société moderne. Depuis trois ans, beaucoup d’efforts ont été faits sur le plan législatif, pour rattraper certaines injustices dons les femmes étaient victimes et cette action doit se poursuivre.
Tout comme Votre Altesse, le Conseil National est très attaché au développement harmonieux de la Principauté, à la promotion de notre jeunesse et à la protection de nos aînés, qui entrent en droite ligne dans les devoirs de la société modèle que Vous appelez de Vos vœux. Dans ces domaines aussi, les avancées ont été nombreuses.
Parce que le dynamisme économique de la Principauté profite à tous, nous avons conscience de la priorité qui s’attache à continuer d’assurer et à conforter dans l’avenir, la prospérité de Monaco. Nous partageons, Monseigneur, la volonté que Vous avez exprimée de diversifier notre économie en privilégiant l’implantation d’activités à forte valeur ajoutée, la création de pôles d’excellence dans des secteurs porteurs pour la Principauté et la dynamisation de la place financière.
Pour promouvoir notre économie, il nous faut un cadre juridique que nous sommes en train de moderniser, il nous faut des hommes, mais il nous faut aussi des locaux.
Dans ce domaine aussi, l’exigüité de notre territoire rend nécessaire une intervention de l’Etat pour mettre à disposition des entreprises, par des baux à durée indéterminée, une infrastructure suffisante et adaptée au besoin de stabilité qui conditionne la vie des affaires et les investissements. C’est une priorité.
Je voudrais pour finir appeler l’attention de Votre Altesse sur l’urgence qui s’attache à moderniser les conditions de travail et les règles de fonctionnement de notre Institution, pour les adapter aux nouvelles réalités dans lesquelles s’exerce, aujourd’hui, le mandat des Conseillers Nationaux.
Les textes qui régissent notre Assemblée ont plus de quarante ans. Ils sont en complet décalage avec les profondes mutations qu’a connues le Conseil National, en particulier depuis la révision constitutionnelle d’avril 2002 et la modification de la loi électorale, qui garantit le pluralisme et qui se traduit désormais par la cohabitation de différentes sensibilités politiques dans cet hémicycle. Parallèlement, la fonction et la charge de travail des élus, dont le nombre est passé de 18 à 24, se sont développés, en proportion de l’essor de notre Pays, du dynamisme de ses activités locales et de son développement à l’international.
Ces évolutions nécessitent de doter notre Assemblée d’un cadre de gestion plus moderne, plus souple et mieux adapté au travail de l’Institution aujourd’hui, tel que nous l’avons conçu dans la proposition de loi votée par le Conseil National en juin 2005.
Dans le même ordre d’idée, tous les Conseillers Nationaux ici présents sont profondément reconnaissants à Votre Altesse de Son intervention personnelle, voici quelques mois, pour que notre Assemblée s’installe dans un nouveau bâtiment, plus grand et plus fonctionnel, à l’emplacement de l’ancienne Ecole du Rocher, dont les travaux vont démarrer avant la fin de cette année.
Je voudrais en conclusion vous dire ma foi en l’avenir de Monaco, sous la conduite de Son Altesse Sérénissime le Prince Albert II, dont nous partageons totalement la vision d’un pays ouvert sur le monde, un pays moderne, éthique, généreux, mais voulant défendre son identité, ses spécificités, tout ce qui fait que nous sommes fiers de l’exception monégasque.
Au-delà des légitimes débats au sein de notre Assemblée, qui sont le reflet de la vitalité de notre démocratie et de la diversité d’opinion des Monégasques et de leurs élus, nul ne doit douter de l’union du peuple monégasque autour de Son Prince et de nos valeurs essentielles.
Tous les Monégasques, conscients de l’importance du bien-être dont ils bénéficient, fiers de leur identité et déterminés à la faire comprendre et respecter par tous, sont particulièrement attachés à leur petite mais si chère patrie.
Conscients du bonheur que nous avons de vivre dans ce pays et des devoirs qui nous incombent envers lui, Vous savez pouvoir compter, Monseigneur, sur l’attachement indéfectible des Monégasques et de leurs élus et sur leur soutien déterminé à Votre action à la tête de l’Etat pour assurer la prospérité et préparer l’avenir de Monaco.
Vive le Prince,
Vive les Monégasques,
Et Vive Monaco ! ».
En réponse S.A.S. le Prince Souverain S’exprimait en ces termes :
« Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,
Je suis heureux de Me retrouver dans cette enceinte tant je garde en mémoire Ma dernière visite, aux côtés du Prince Rainier, Mon Père, à l’occasion du 50e anniversaire de Son règne. J’attache, vous le savez, de l’importance au rôle du Conseil National et c’est à ce titre que j’ai souhaité vous exposer l’action que j’ai engagée pour Monaco ainsi que Ma vision de nos institutions.
Il y a bientôt un an, le 12 juillet 2005, nous avons, avec l’ensemble de la famille monégasque, célébré Mon avènement. Ce jour-là, j’ai souhaité vous faire partager les principes fondamentaux qui Me guideront. Depuis, nous sommes entrés directement dans l’action et après avoir constitué Mon Cabinet, j’ai défini trois orientations majeures.
Tout d’abord, j’ai œuvré au développement de notre politique internationale. Il importait en effet que j’agisse rapidement en ce domaine vital pour la Principauté et dont j’assure l’entière responsabilité.
Ainsi, en vue de renforcer les relations diplomatiques avec nos principaux partenaires, j’ai, dès le 8 novembre dernier, rendu visite au Président de la République française puis effectué des déplacements officiels au Saint-Siège et en Italie.
En outre, dans le but de conforter la place de Monaco, Etat souverain, partout dans le monde, je me suis également rendu dans d’autres pays comme le Royaume-Uni, la Russie ou la Slovénie. Je poursuivrai ce programme tout au long de l’année 2006, puis en 2007, et je participerai aussi activement aux sessions des organisations multilatérales auxquelles nous appartenons.
Ensuite, de nombreux travaux ont été initiés, à Ma demande, pour soutenir l’essor économique de notre pays : diversification des activités de la place financière, promotion des activités touristiques, au travers notamment de la S.B.M., des ports ou d’événements culturels et d’affaires, recherche de nouvelles activités, dans les secteurs des technologies et de la santé en particulier.
Sur le plan intérieur enfin, j’ai, au cours de ces derniers mois, validé les objectifs et les caractéristiques d’un nouveau projet d’extension de notre territoire dont j’aurai, dans quelques jours, l’immense plaisir d’annoncer officiellement le lancement. Par cette opération ambitieuse, je veux exprimer Ma vision d’une Principauté en croissance, respectueuse de l’environnement et prête à promouvoir de nouvelles activités culturelles et économiques.
Je me suis également attaché à définir les axes d’une politique abordant nombre d’aspects de la vie quotidienne qu’il s’agisse de celle des enfants, des personnes âgées ou handicapées, des relations du travail ou encore de notre cadre de vie. Pour son amélioration, ont été définies avec Mon Gouvernement de nouvelles mesures allant dans le sens du développement durable et de la préservation de notre environnement.
Telles sont les lignes de force de l’action que j’ai engagée pour que notre pays soit toujours plus respecté à l’échelle internationale, pour qu’il poursuive la croissance dont il a bénéficié ces dernières décennies et pour que les Monégasques et ceux qui vivent ou travaillent en Principauté disposent toujours d’une qualité de vie faisant de Monaco un lieu unique.
La conduite de cette action s’inscrit dans le cadre de nos institutions et de la Constitution que le Prince Rainier, Mon Père, nous a léguée. Par Ma présence parmi vous ce jour, je veux affirmer solennellement Mon attachement à cette Constitution qui nous a définitivement placés au sein de la grande famille des Etats de droit, respectueux des libertés et des droits fondamentaux, tout en garantissant l’intangibilité de nos spécificités.
J’entends quelquefois, ici ou là, évoquer, parfois implicitement, l’éventualité d’un changement de régime politique ou constitutionnel. Il ne saurait en être question. Et les réformes engagées, dans le cadre européen en particulier, ne peuvent et ne pourront tenir lieu de prétexte à une atteinte aux fondements même de la Principauté, pas plus qu’à un quelconque renoncement à notre identité profonde.
La Constitution de 1962 a en effet assuré, vous le savez, la stabilité de nos institutions. Cette stabilité n’est cependant pas synonyme d’un repli sur nous-mêmes plus ou moins frileux : nous ne sommes pas étrangers aux changements du monde. Etat-cité cosmopolite au carrefour de l’Europe et de la Méditerranée, la Principauté a une vocation naturelle à une ouverture internationale.
C’est à cette fin que se conçoit notre récente adhésion au Conseil de l’Europe ainsi qu’à divers traités ou accords européens ou internationaux. Dans ce sillon, des avancées considérables ont été réalisées en tous domaines. Je ne puis que M’en féliciter d’autant que ce mouvement est appelé à se poursuivre.
Monaco demeure néanmoins un Etat à nul autre pareil. De subtils équilibres sont à la base d’un pacte politique et social fait de fortes spécificités et ce pacte ne saurait être sacrifié au motif d’une vision mal comprise de notre politique d’ouverture internationale.
Les Monégasques, minoritaires en leur pays, sont, comme nous le rappelle justement notre hymne national, liés à leurs Princes par une union personnelle. Cette relation exceptionnelle est un fondement de notre identité.
Ce lien s’appuie tout d’abord sur des droits : droits politiques exclusifs dont celui de suffrage à toutes les élections, nationales ou communales, droits économiques et sociaux aussi. Comme les Princes qui M’ont précédé, je m’attacherai à garantir ces droits et à les défendre chaque fois que cela sera nécessaire.
Mais ce lien se fonde aussi sur des devoirs : devoir de fidélité et de respect envers les institutions, devoir d’excellence et d’exemplarité au service du pays en toutes circonstances. L’ouverture de l’accès des nationaux à l’ensemble des fonctions de l’Etat doit, de ce point de vue, être un aiguillon stimulant l’ardeur de chacun.
J’ai eu l’occasion de M’exprimer à ce sujet dès Mon Avènement et je tiens, aujourd’hui encore, à insister sur l’interaction naturelle entre les droits et les devoirs des Monégasques, si indispensable à la pérennité et au développement du pays.
Soucieux par ailleurs de la situation des nombreux étrangers qui résident ou exercent une activité professionnelle sur notre territoire, il M’incombe aussi de les assurer de la jouissance des droits qu’ils tiennent de la Constitution.
Celle-ci leur confère en effet la totalité des droits publics et privés qui ne sont pas formellement réservés aux nationaux. Partie prenante de la vie de Monaco, leurs appartenances nationales et géographiques se diversifient, ce qui atteste de l’attractivité de la Principauté pour le monde qui l’entoure, et je M’en réjouis.
La modification constitutionnelle de 2002, couplée à la réforme électorale, a marqué une élévation vers des standards démocratiques, en affirmant notamment avec plus de force le rôle institutionnel de votre assemblée.
Toutefois, la nature profonde de notre monarchie constitutionnelle n’a pas été pour autant altérée, qu’il s’agisse des principes fondamentaux de répartition des compétences ou de la nature des relations entre les pouvoirs constitués. Garant ultime de la Constitution, il M’appartient de veiller à ce qu’elle soit respectée sous tous ces points de vue.
Pour ce qui est de notre vie politique intérieure, elle doit demeurer caractérisée par la collaboration harmonieuse entre les pouvoirs.
Telle est la signification à retenir de l’une des dispositions les plus importantes de notre Constitution selon laquelle la loi implique l’accord des volontés du Prince et du Conseil National.
C’est pourquoi j’ai, dans l’esprit de la réforme constitutionnelle de 2002, demandé au Gouvernement d’étudier les propositions de loi de même que les amendements affectant les projets de loi dans un esprit constructif. Les cas d’infaisabilité technique, d’impossibilité juridique, d’origine constitutionnelle notamment, sont en revanche de nature à légitimer des appréciations divergentes du Gouvernement. Il en est de même en cas de dénaturation des textes par rapport à leur contenu initial.
En contrepartie, j’apprécie les efforts de négociation, de compréhension et de dialogue faits par les différentes commissions ayant en charge l’étude des textes, leurs présidents et rapporteurs, pour parvenir à l’accord requis par la Constitution. Ainsi, quand chacun – Gouvernement et Conseil National – fait un pas vers l’autre, aucune des deux institutions n’est perdante et c’est, en définitive, notre législation, et donc notre pays, qui en retirent le plus grand profit.
L’exemple de la récente loi sur la motivation des actes administratifs est l’illustration patente des bienfaits de ces fructueux échanges. A leur terme, un texte capital pour la modernisation de l’Etat a, en l’occurrence, pu être voté à l’unanimité des conseillers nationaux. Il Me tient particulièrement à cœur de féliciter tous ceux qui ont concouru à l’obtention de ce résultat.
Je n’ignore pas pour autant que ces allers-retours prennent du temps et que d’aucuns peuvent en concevoir quelque frustration. Ce temps d’étude concertée, témoignant d’un débat d’idées que je souhaite le plus riche et élevé possible, est toutefois une garantie de la qualité de la loi à laquelle je suis extrêmement attaché.
Bien évidemment, je n’entends pas aujourd’hui évoquer ici des aspects particuliers de la politique législative ou budgétaire dont il vous incombe de débattre, à d’autres moments, avec Mon Gouvernement.
Par ailleurs, la collaboration harmonieuse entre les pouvoirs suppose aussi une claire délimitation entre la fonction législative et l’action gouvernementale. Le Gouvernement, sous Mon autorité et sur la base des orientations que je définis, a en effet, seul, la charge de l’administration du pays.
Mais je ne voudrais pas clore ce propos sans évoquer l’une des institutions cardinales de l’Etat de droit, en l’occurrence la Justice. J’entends ici affirmer avec force le principe constitutionnel de l’indépendance des juges, dans le cadre du système de justice déléguée, sous le contrôle de nos hautes juridictions. Là aussi, il importe de rechercher l’harmonie de la vie publique et sociale, à laquelle le concours du juge est si précieux, en manifestant à l’autorité judiciaire le respect légitime qui lui est dû.
Aux mêmes fins, un tel respect doit également être témoigné à l’endroit de notre religion d’Etat dont les enseignements, dans le respect de la liberté des cultes et d’expression, sont, conformément à la Constitution, appelés à faire l’objet d’une attention particulière de la part de l’ensemble des autorités et des pouvoirs constitués.
En conclusion, comment ne pas reconnaître que le régime politique que nous tenons de la Constitution est sans doute la spécificité monégasque la plus remarquable.
En raison des garanties qu’il offre, il est la clef de voûte de notre système économique et social, source de sécurité et de bien-être pour tous.
Envisageons l’avenir avec confiance dans ce que nous sommes et ce que nous voulons devenir ! ».
Le Président du Conseil National remerciait S.A.S. le Prince Souverain par ces mots :
« Permettez-moi, Monseigneur, de Vous exprimer à nouveau en mon nom personnel et en celui de toutes et tous les Conseillers Nationaux, Femmes et Hommes de cette Assemblée, notre profonde gratitude pour Votre venue, aujourd’hui, dans cette enceinte.
Je voudrais aussi remercier toutes les Hautes personnalités qui ont accepté notre invitation et se sont jointes à nous aujourd’hui pour cette séance privée solennelle.
Merci à toutes et à tous ».
La visite officielle s’est poursuivie par la présentation du personnel du Conseil National à S.A.S. le Prince Souverain et s’est achevée par un cocktail servi sur la terrasse à l’ensemble des invités.
A cette occasion, S.A.S. le Prince Albert II a inauguré la Salle des Anciens Présidents du Conseil National, dans laquelle sont présentées leurs photographies.
S.A.S. le Prince Souverain a été accueilli en ces termes par M. Stéphane VALERI, Président du Conseil National :
« Monseigneur,
C’est un immense honneur et une grande joie pour moi, de présider aujourd’hui cette séance privée solennelle, à l’occasion de la première visite officielle de Votre Altesse, en qualité de Prince Souverain, au Conseil National.
Le souhait que Vous avez manifesté, moins d’un an après Votre accession au Trône, de Vous rendre auprès de notre Assemblée, nous comble et nous honore.
Tous les Conseillers Nationaux ici présents sont profondément heureux de pouvoir prendre part à cet événement exceptionnel dans la vie du Conseil National. Tous se joignent à moi pour Vous exprimer la joie et l’émotion qui sont les nôtres, de Vous accueillir aujourd’hui dans l’enceinte de notre Parlement.
Vous connaissez, Monseigneur, l’attachement profond qui a de tous temps uni le peuple monégasque à ses Princes. Permettez-moi, au nom de notre Institution, de Vous en apporter un nouveau témoignage en Vous assurant de l’indéfectible fidélité de la représentation nationale à Votre Personne et à la Famille Princière. La symbiose entre les Monégasques et leur Souverain a toujours été et sera toujours le ferment et la force de notre Pays.
Par cette visite officielle, Vous avez tenu à manifester l’estime dans laquelle Vous tenez l’institution parlementaire et l’importance que Vous accordez au rôle et à l’action du Conseil National.
Nous sommes particulièrement sensibles à ce geste qui témoigne de Votre attachement à l’esprit démocratique de nos Institutions. Celles-ci, sans ressembler aux autres modèles européens, assurent dans la fidélité à nos traditions, le respect de cette valeur fondamentale que nous partageons avec tous les Etats de droit. Notre Parlement en est la preuve : il existe à Monaco une vie publique démocratique, dont le Conseil National est à la fois l’expression et le garant, à laquelle les Monégasques sont attachés et qui s’exerce pleinement, dans le respect et la fidélité au Prince.
Cette réalité, souvent ignorée de l’extérieur, nous avons réussi depuis 2003, à la faire connaître et reconnaître.
L’action des Conseillers Nationaux, dans toutes les instances interparlementaires où ils sont présents, y a contribué, que ce soit au sein de l’UIP, de la Francophonie, de l’OSCE, du Conseil de l’Europe, ou au travers de ma participation aux Conférences mondiale et européenne des Présidents de Parlement, de l’organisation à Monaco de la première Conférence des Parlements des Petits Etats d’Europe, ou bien encore des rencontres régulières avec nos homologues français et italiens.
Le récent accueil chaleureux les 12 et 13 juin dernier, de notre délégation, à Paris, et le salut reçu en séance publique de tous les groupes politiques de l’Assemblée Nationale française, sont la preuve que ce travail porte ses fruits.
Comment ne pas se féliciter également de l’adhésion en octobre 2004, de Monaco au Conseil de l’Europe, voulue par nos Souverains, défendue par notre Conseil National et intervenue dans le respect de nos spécificités, alors que tant de sceptiques, après 6 ans d’attente, n’y croyaient plus. Je n’ai rien à ajouter à la conclusion de l’article de notre quotidien local, le 17 juin dernier, je le cite : « Les Rapporteurs du Conseil de l’Europe s’affirment satisfaits de l’évolution du pays et lui décernent une bonne note. On est passé au stade de l’apriori favorable. On y aurait guère cru il y a quatre ans ».
Monseigneur, je Vous suis très reconnaissant d’avoir accepté, avant l’ouverture de la présente séance solennelle, d’inaugurer la salle située à l’entrée de cet hémicycle, qui portera désormais le nom de « Salle d’Honneur des Anciens Présidents ». Par cette initiative, j’ai tenu à rendre hommage à ces hommes qui, tout au long du XXe siècle, ont contribué à faire de notre Institution ce qu’elle est aujourd’hui.
Il nous revient, à mes collègues et à moi-même, depuis 2003, de poursuivre cet héritage. Nous le faisons avec la volonté que le Conseil National s’acquitte du rôle qui est le sien, en exerçant pleinement ses prérogatives, dans le respect de celles du Gouvernement Princier, au mieux des intérêts des Monégasques et de Monaco.
Ni chambre d’enregistrement, ni chambre d’opposition, le Conseil National se doit d’être un partenaire indépendant et d’entretenir avec le Gouvernement, tout en défendant ses convictions avec fermeté, un dialogue basé sur la recherche permanente du consensus sans lequel, à Monaco, rien n’est possible.
Nous sommes convaincus que l’équilibre de nos Institutions, tel que nous le pratiquons aujourd’hui, constitue le bon équilibre pour Monaco. Il consacre la prééminence de la Personne du Prince et son rôle essentiel en tant que Chef de l’Etat. Il implique parallèlement, pour l’élaboration de la loi, un accord des volontés du Gouvernement, représentant le Prince, et du Conseil National, élu par les Monégasques. Cet accord des volontés découle aussi naturellement de ce qui est notre objectif commun : l’intérêt général du Pays.
Pour que cet équilibre fonctionne, il faut que chacun soit dans son rôle. Cela signifie que certaines velléités qui ont pu s’exprimer ça et là, d’imposer par l’affrontement au Gouvernement Princier le programme du Conseil National, n’ont évidemment pas lieu d’être dans notre système institutionnel. Cela signifie aussi que dans un souci de meilleure concertation, le Gouvernement doit accepter d’associer plus étroitement le Conseil National au choix et à la mise en œuvre des grandes orientations politiques, sur lesquelles notre Assemblée est naturellement amenée à se prononcer au moment de la discussion budgétaire.
Dans ce domaine, le Conseil National peut être une force de propositions pour permettre au Gouvernement d’améliorer ses projets, en prenant davantage en compte la dimension sociale et humaine à laquelle le Conseil National, assemblée élue, est par nature plus sensible. Pour qu’il puisse jouer ce rôle de façon constructive, il faut que son droit à l’information, et son avis, soient respectés.
Les Monégasques nous ont élus pour défendre certaines valeurs et mener à bien certaines priorités qui se reflètent parfaitement dans les grandes orientations que Votre Altesse a définies pour notre Pays.
Ainsi, Vous avez émis le souhait que le développement et la prospérité économique de Monaco ne constituent pas une fin en soi mais profitent à tous. Nous avons toujours eu à cœur, dans le cadre de notre dialogue institutionnel avec le Gouvernement, de défendre ces valeurs humaines de solidarité et de justice sociale, sans lesquelles notre Pays risquerait de devenir une nation sans âme.
D’abord et avant tout dans le domaine du logement de nos compatriotes, dont Vous savez combien il constitue une question essentielle pour la population face aux problèmes que posent les contraintes géographiques de notre petit Pays.
Dans ce domaine plus que tout autre, l’Etat doit jouer son rôle pour garantir que tous les Nationaux aient droit de cité et droit de vie à Monaco. L’effort de construction sans précédent entrepris par le Gouvernement depuis trois ans et dont on peut voir déjà les premiers résultats, témoigne que, sous l’impulsion du Conseil National, les besoins légitimes des Monégasques ont été pris en compte.
Reste la question du logement de ceux que nous appelons les « enfants du Pays », et envers lesquels Votre Altesse a maintes fois manifesté par le passé Son affection.
Les Monégasques sont attachés au maintien en Principauté de ces amis et de ces frères qui sont une partie intégrante de l’identité et de l’âme de notre Pays. Une solution à long terme est nécessaire pour le logement de notre population stable. Sur ce sujet, il nous faudra encore argumenter et convaincre, et nous nous y emploierons.
Sur un autre plan, Vous connaissez, Monseigneur, l’attachement du Conseil National à faire évoluer le droit des femmes en Principauté, dans le sens de l’égalité de traitement qu’elles sont en droit d’attendre d’une société moderne. Depuis trois ans, beaucoup d’efforts ont été faits sur le plan législatif, pour rattraper certaines injustices dons les femmes étaient victimes et cette action doit se poursuivre.
Tout comme Votre Altesse, le Conseil National est très attaché au développement harmonieux de la Principauté, à la promotion de notre jeunesse et à la protection de nos aînés, qui entrent en droite ligne dans les devoirs de la société modèle que Vous appelez de Vos vœux. Dans ces domaines aussi, les avancées ont été nombreuses.
Parce que le dynamisme économique de la Principauté profite à tous, nous avons conscience de la priorité qui s’attache à continuer d’assurer et à conforter dans l’avenir, la prospérité de Monaco. Nous partageons, Monseigneur, la volonté que Vous avez exprimée de diversifier notre économie en privilégiant l’implantation d’activités à forte valeur ajoutée, la création de pôles d’excellence dans des secteurs porteurs pour la Principauté et la dynamisation de la place financière.
Pour promouvoir notre économie, il nous faut un cadre juridique que nous sommes en train de moderniser, il nous faut des hommes, mais il nous faut aussi des locaux.
Dans ce domaine aussi, l’exigüité de notre territoire rend nécessaire une intervention de l’Etat pour mettre à disposition des entreprises, par des baux à durée indéterminée, une infrastructure suffisante et adaptée au besoin de stabilité qui conditionne la vie des affaires et les investissements. C’est une priorité.
Je voudrais pour finir appeler l’attention de Votre Altesse sur l’urgence qui s’attache à moderniser les conditions de travail et les règles de fonctionnement de notre Institution, pour les adapter aux nouvelles réalités dans lesquelles s’exerce, aujourd’hui, le mandat des Conseillers Nationaux.
Les textes qui régissent notre Assemblée ont plus de quarante ans. Ils sont en complet décalage avec les profondes mutations qu’a connues le Conseil National, en particulier depuis la révision constitutionnelle d’avril 2002 et la modification de la loi électorale, qui garantit le pluralisme et qui se traduit désormais par la cohabitation de différentes sensibilités politiques dans cet hémicycle. Parallèlement, la fonction et la charge de travail des élus, dont le nombre est passé de 18 à 24, se sont développés, en proportion de l’essor de notre Pays, du dynamisme de ses activités locales et de son développement à l’international.
Ces évolutions nécessitent de doter notre Assemblée d’un cadre de gestion plus moderne, plus souple et mieux adapté au travail de l’Institution aujourd’hui, tel que nous l’avons conçu dans la proposition de loi votée par le Conseil National en juin 2005.
Dans le même ordre d’idée, tous les Conseillers Nationaux ici présents sont profondément reconnaissants à Votre Altesse de Son intervention personnelle, voici quelques mois, pour que notre Assemblée s’installe dans un nouveau bâtiment, plus grand et plus fonctionnel, à l’emplacement de l’ancienne Ecole du Rocher, dont les travaux vont démarrer avant la fin de cette année.
Je voudrais en conclusion vous dire ma foi en l’avenir de Monaco, sous la conduite de Son Altesse Sérénissime le Prince Albert II, dont nous partageons totalement la vision d’un pays ouvert sur le monde, un pays moderne, éthique, généreux, mais voulant défendre son identité, ses spécificités, tout ce qui fait que nous sommes fiers de l’exception monégasque.
Au-delà des légitimes débats au sein de notre Assemblée, qui sont le reflet de la vitalité de notre démocratie et de la diversité d’opinion des Monégasques et de leurs élus, nul ne doit douter de l’union du peuple monégasque autour de Son Prince et de nos valeurs essentielles.
Tous les Monégasques, conscients de l’importance du bien-être dont ils bénéficient, fiers de leur identité et déterminés à la faire comprendre et respecter par tous, sont particulièrement attachés à leur petite mais si chère patrie.
Conscients du bonheur que nous avons de vivre dans ce pays et des devoirs qui nous incombent envers lui, Vous savez pouvoir compter, Monseigneur, sur l’attachement indéfectible des Monégasques et de leurs élus et sur leur soutien déterminé à Votre action à la tête de l’Etat pour assurer la prospérité et préparer l’avenir de Monaco.
Vive le Prince,
Vive les Monégasques,
Et Vive Monaco ! ».
En réponse S.A.S. le Prince Souverain S’exprimait en ces termes :
« Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,
Je suis heureux de Me retrouver dans cette enceinte tant je garde en mémoire Ma dernière visite, aux côtés du Prince Rainier, Mon Père, à l’occasion du 50e anniversaire de Son règne. J’attache, vous le savez, de l’importance au rôle du Conseil National et c’est à ce titre que j’ai souhaité vous exposer l’action que j’ai engagée pour Monaco ainsi que Ma vision de nos institutions.
Il y a bientôt un an, le 12 juillet 2005, nous avons, avec l’ensemble de la famille monégasque, célébré Mon avènement. Ce jour-là, j’ai souhaité vous faire partager les principes fondamentaux qui Me guideront. Depuis, nous sommes entrés directement dans l’action et après avoir constitué Mon Cabinet, j’ai défini trois orientations majeures.
Tout d’abord, j’ai œuvré au développement de notre politique internationale. Il importait en effet que j’agisse rapidement en ce domaine vital pour la Principauté et dont j’assure l’entière responsabilité.
Ainsi, en vue de renforcer les relations diplomatiques avec nos principaux partenaires, j’ai, dès le 8 novembre dernier, rendu visite au Président de la République française puis effectué des déplacements officiels au Saint-Siège et en Italie.
En outre, dans le but de conforter la place de Monaco, Etat souverain, partout dans le monde, je me suis également rendu dans d’autres pays comme le Royaume-Uni, la Russie ou la Slovénie. Je poursuivrai ce programme tout au long de l’année 2006, puis en 2007, et je participerai aussi activement aux sessions des organisations multilatérales auxquelles nous appartenons.
Ensuite, de nombreux travaux ont été initiés, à Ma demande, pour soutenir l’essor économique de notre pays : diversification des activités de la place financière, promotion des activités touristiques, au travers notamment de la S.B.M., des ports ou d’événements culturels et d’affaires, recherche de nouvelles activités, dans les secteurs des technologies et de la santé en particulier.
Sur le plan intérieur enfin, j’ai, au cours de ces derniers mois, validé les objectifs et les caractéristiques d’un nouveau projet d’extension de notre territoire dont j’aurai, dans quelques jours, l’immense plaisir d’annoncer officiellement le lancement. Par cette opération ambitieuse, je veux exprimer Ma vision d’une Principauté en croissance, respectueuse de l’environnement et prête à promouvoir de nouvelles activités culturelles et économiques.
Je me suis également attaché à définir les axes d’une politique abordant nombre d’aspects de la vie quotidienne qu’il s’agisse de celle des enfants, des personnes âgées ou handicapées, des relations du travail ou encore de notre cadre de vie. Pour son amélioration, ont été définies avec Mon Gouvernement de nouvelles mesures allant dans le sens du développement durable et de la préservation de notre environnement.
Telles sont les lignes de force de l’action que j’ai engagée pour que notre pays soit toujours plus respecté à l’échelle internationale, pour qu’il poursuive la croissance dont il a bénéficié ces dernières décennies et pour que les Monégasques et ceux qui vivent ou travaillent en Principauté disposent toujours d’une qualité de vie faisant de Monaco un lieu unique.
La conduite de cette action s’inscrit dans le cadre de nos institutions et de la Constitution que le Prince Rainier, Mon Père, nous a léguée. Par Ma présence parmi vous ce jour, je veux affirmer solennellement Mon attachement à cette Constitution qui nous a définitivement placés au sein de la grande famille des Etats de droit, respectueux des libertés et des droits fondamentaux, tout en garantissant l’intangibilité de nos spécificités.
J’entends quelquefois, ici ou là, évoquer, parfois implicitement, l’éventualité d’un changement de régime politique ou constitutionnel. Il ne saurait en être question. Et les réformes engagées, dans le cadre européen en particulier, ne peuvent et ne pourront tenir lieu de prétexte à une atteinte aux fondements même de la Principauté, pas plus qu’à un quelconque renoncement à notre identité profonde.
La Constitution de 1962 a en effet assuré, vous le savez, la stabilité de nos institutions. Cette stabilité n’est cependant pas synonyme d’un repli sur nous-mêmes plus ou moins frileux : nous ne sommes pas étrangers aux changements du monde. Etat-cité cosmopolite au carrefour de l’Europe et de la Méditerranée, la Principauté a une vocation naturelle à une ouverture internationale.
C’est à cette fin que se conçoit notre récente adhésion au Conseil de l’Europe ainsi qu’à divers traités ou accords européens ou internationaux. Dans ce sillon, des avancées considérables ont été réalisées en tous domaines. Je ne puis que M’en féliciter d’autant que ce mouvement est appelé à se poursuivre.
Monaco demeure néanmoins un Etat à nul autre pareil. De subtils équilibres sont à la base d’un pacte politique et social fait de fortes spécificités et ce pacte ne saurait être sacrifié au motif d’une vision mal comprise de notre politique d’ouverture internationale.
Les Monégasques, minoritaires en leur pays, sont, comme nous le rappelle justement notre hymne national, liés à leurs Princes par une union personnelle. Cette relation exceptionnelle est un fondement de notre identité.
Ce lien s’appuie tout d’abord sur des droits : droits politiques exclusifs dont celui de suffrage à toutes les élections, nationales ou communales, droits économiques et sociaux aussi. Comme les Princes qui M’ont précédé, je m’attacherai à garantir ces droits et à les défendre chaque fois que cela sera nécessaire.
Mais ce lien se fonde aussi sur des devoirs : devoir de fidélité et de respect envers les institutions, devoir d’excellence et d’exemplarité au service du pays en toutes circonstances. L’ouverture de l’accès des nationaux à l’ensemble des fonctions de l’Etat doit, de ce point de vue, être un aiguillon stimulant l’ardeur de chacun.
J’ai eu l’occasion de M’exprimer à ce sujet dès Mon Avènement et je tiens, aujourd’hui encore, à insister sur l’interaction naturelle entre les droits et les devoirs des Monégasques, si indispensable à la pérennité et au développement du pays.
Soucieux par ailleurs de la situation des nombreux étrangers qui résident ou exercent une activité professionnelle sur notre territoire, il M’incombe aussi de les assurer de la jouissance des droits qu’ils tiennent de la Constitution.
Celle-ci leur confère en effet la totalité des droits publics et privés qui ne sont pas formellement réservés aux nationaux. Partie prenante de la vie de Monaco, leurs appartenances nationales et géographiques se diversifient, ce qui atteste de l’attractivité de la Principauté pour le monde qui l’entoure, et je M’en réjouis.
La modification constitutionnelle de 2002, couplée à la réforme électorale, a marqué une élévation vers des standards démocratiques, en affirmant notamment avec plus de force le rôle institutionnel de votre assemblée.
Toutefois, la nature profonde de notre monarchie constitutionnelle n’a pas été pour autant altérée, qu’il s’agisse des principes fondamentaux de répartition des compétences ou de la nature des relations entre les pouvoirs constitués. Garant ultime de la Constitution, il M’appartient de veiller à ce qu’elle soit respectée sous tous ces points de vue.
Pour ce qui est de notre vie politique intérieure, elle doit demeurer caractérisée par la collaboration harmonieuse entre les pouvoirs.
Telle est la signification à retenir de l’une des dispositions les plus importantes de notre Constitution selon laquelle la loi implique l’accord des volontés du Prince et du Conseil National.
C’est pourquoi j’ai, dans l’esprit de la réforme constitutionnelle de 2002, demandé au Gouvernement d’étudier les propositions de loi de même que les amendements affectant les projets de loi dans un esprit constructif. Les cas d’infaisabilité technique, d’impossibilité juridique, d’origine constitutionnelle notamment, sont en revanche de nature à légitimer des appréciations divergentes du Gouvernement. Il en est de même en cas de dénaturation des textes par rapport à leur contenu initial.
En contrepartie, j’apprécie les efforts de négociation, de compréhension et de dialogue faits par les différentes commissions ayant en charge l’étude des textes, leurs présidents et rapporteurs, pour parvenir à l’accord requis par la Constitution. Ainsi, quand chacun – Gouvernement et Conseil National – fait un pas vers l’autre, aucune des deux institutions n’est perdante et c’est, en définitive, notre législation, et donc notre pays, qui en retirent le plus grand profit.
L’exemple de la récente loi sur la motivation des actes administratifs est l’illustration patente des bienfaits de ces fructueux échanges. A leur terme, un texte capital pour la modernisation de l’Etat a, en l’occurrence, pu être voté à l’unanimité des conseillers nationaux. Il Me tient particulièrement à cœur de féliciter tous ceux qui ont concouru à l’obtention de ce résultat.
Je n’ignore pas pour autant que ces allers-retours prennent du temps et que d’aucuns peuvent en concevoir quelque frustration. Ce temps d’étude concertée, témoignant d’un débat d’idées que je souhaite le plus riche et élevé possible, est toutefois une garantie de la qualité de la loi à laquelle je suis extrêmement attaché.
Bien évidemment, je n’entends pas aujourd’hui évoquer ici des aspects particuliers de la politique législative ou budgétaire dont il vous incombe de débattre, à d’autres moments, avec Mon Gouvernement.
Par ailleurs, la collaboration harmonieuse entre les pouvoirs suppose aussi une claire délimitation entre la fonction législative et l’action gouvernementale. Le Gouvernement, sous Mon autorité et sur la base des orientations que je définis, a en effet, seul, la charge de l’administration du pays.
Mais je ne voudrais pas clore ce propos sans évoquer l’une des institutions cardinales de l’Etat de droit, en l’occurrence la Justice. J’entends ici affirmer avec force le principe constitutionnel de l’indépendance des juges, dans le cadre du système de justice déléguée, sous le contrôle de nos hautes juridictions. Là aussi, il importe de rechercher l’harmonie de la vie publique et sociale, à laquelle le concours du juge est si précieux, en manifestant à l’autorité judiciaire le respect légitime qui lui est dû.
Aux mêmes fins, un tel respect doit également être témoigné à l’endroit de notre religion d’Etat dont les enseignements, dans le respect de la liberté des cultes et d’expression, sont, conformément à la Constitution, appelés à faire l’objet d’une attention particulière de la part de l’ensemble des autorités et des pouvoirs constitués.
En conclusion, comment ne pas reconnaître que le régime politique que nous tenons de la Constitution est sans doute la spécificité monégasque la plus remarquable.
En raison des garanties qu’il offre, il est la clef de voûte de notre système économique et social, source de sécurité et de bien-être pour tous.
Envisageons l’avenir avec confiance dans ce que nous sommes et ce que nous voulons devenir ! ».
Le Président du Conseil National remerciait S.A.S. le Prince Souverain par ces mots :
« Permettez-moi, Monseigneur, de Vous exprimer à nouveau en mon nom personnel et en celui de toutes et tous les Conseillers Nationaux, Femmes et Hommes de cette Assemblée, notre profonde gratitude pour Votre venue, aujourd’hui, dans cette enceinte.
Je voudrais aussi remercier toutes les Hautes personnalités qui ont accepté notre invitation et se sont jointes à nous aujourd’hui pour cette séance privée solennelle.
Merci à toutes et à tous ».
La visite officielle s’est poursuivie par la présentation du personnel du Conseil National à S.A.S. le Prince Souverain et s’est achevée par un cocktail servi sur la terrasse à l’ensemble des invités.