Délibération n° 2025‑7 du 9 avril 2025 de l'Autorité de Protection des Données Personnelles portant avis sur le projet d'Ordonnance Souveraine portant application de la loi n° 1.547 du 22 juin 2023 relative au don de congés.
Vu la Constitution ;
Vu la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales du Conseil de l’Europe du 4 novembre 1950 ;
Vu la Convention n° 108 du Conseil de l’Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel et son Protocole d’amendement adopté par le Comité des Ministres le 18 mai 2018 ;
Vu la loi n° 1.567 du 22 juin 2023 relative au don de congés ;
Vu la loi n° 1.565 du 3 décembre 2024 relative à la protection des données personnelles ;
Vu la loi n° 1.566 du 3 décembre 2024 portant approbation et ratification du Protocole d’amendement à la Convention 108 pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;
Vu l’Ordonnance Souveraine n° 6.365 du 17 août 1978, modifiée, fixant les conditions d’application de la loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l’État, modifiée ;
Vu l’Ordonnance Souveraine n° 11.002 du 19 décembre 2024 modifiant l’Ordonnance Souveraine n° 6.365 du 17 août 1978, modifiée, fixant les conditions d’application de la loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l’État, modifiée ;
Vu la saisine du Ministre d’État en date du 11 mars 2025 concernant le projet d’Ordonnance Souveraine portant application de la loi n° 1.547 du 22 juin 2023 relative au don de congés ;
L’Autorité de Protection des Données Personnelles,
Paragraphe unique
À titre liminaire, il convient de rappeler que la loi n° 1.547 du 23 juin 2023 relative au don de congés est composée de trois articles identiques pour ouvrir et/ou harmoniser le don de congés pour le secteur privé, les personnels de l’État et ceux de la Commune.
En application de l’article 38 de la loi n° 1.565 relative à la protection des données personnelles, l’APDP est saisie pour avis sur le projet d’Ordonnance Souveraine portant application de la loi n° 1.547, susvisée, appelée à « préciser l’application du dispositif dans le secteur privé » et se justifie par la communication à l’employeur de données potentiellement sensibles de la part du salarié souhaitant bénéficier d’un congé en application de l’article premier de la loi n° 1.547.
L’APDP relève dès lors que le certificat médical ayant vocation à justifier que la demande s’inscrit bien dans les conditions légales et réglementaires permettant de bénéficier du don de congés est transmis à l’employeur « sans toutefois qu’aucune donnée médicale ne soit communiquée ».
Elle estime cette solution protectrice et satisfaisante en matière de respect de la vie privée et de préservation du secret médical.
L’APDP souhaite toutefois appeler l’attention du Gouvernement sur les dispositions relatives au don de congés et à l’obtention d’un congé de soutien familial introduites par l’Ordonnance Souveraine n° 11.002 du 19 décembre 2024, publiée au Journal de Monaco du 31 janvier 2025, modifiant l’Ordonnance Souveraine n° 6.365 du 17 août 1978, modifiée, fixant les conditions d’application de la loi n° 975 portant statut des fonctionnaires de l’État.
Les articles 23‑4 et 33‑6 de l’Ordonnance Souveraine n° 6.365 du 17 août 1978, modifiée, sur lesquels l’APDP, ni avant elle la CCIN, n’ont pas été consultées préalablement pour avis, précisent en effet que le certificat médical fourni à l’appui d’une demande doit être détaillé, et doit comporter « explicitement les éléments ayant trait à la pathologie, la gravité, l’éventuel pronostic ainsi que les répercussions nécessitant la présence (…) ».
Si les dispositions susmentionnées prévoient que ce certificat médical doit être remis sous pli confidentiel (et non « secret médical » par exemple, pour transmission directe au médecin conseil du Service des Prestations Médicales de l’État, dans la mesure où les articles 23‑5 et 33‑7 prévoient qu’il donne son avis), il n’en demeure pas moins que ce pli, transmis par la voie hiérarchique en même temps que la demande, peut être ouvert par des personnels non médicaux, et non légalement habilités à connaître des données de santé relatives à l’entourage des personnels de l’Administration à l’origine de ces demandes.
Ceci conduirait en outre à l’enregistrement de ces données dans les bases courriers du Service au sein duquel les demandeurs sont en poste, ainsi qu’à leur Direction et Département de tutelle, et de ceux au sein desquels les demandes sont instruites.
À cet égard, l’APDP rappelle que le rapport de la Commission des Intérêts Sociaux et des Affaires Diverses sur le projet de loi n° 1073 relative au don de congé expliquait qu’« En dernier lieu, comme cela a également été exposé dans la partie générale, rien ne justifiant des différences entre les mécanismes de don de congés prévus pour les salariés du secteur privé, d’une part, et pour les fonctionnaires de l’État et de la Commune, d’autre part, la Commission a procédé à deux amendements d’ajout : le premier concerne les fonctionnaires de l’État et le deuxième les fonctionnaires de la Commune ». Ainsi, il devrait en être de même des textes d’application.
L’APDP demande donc que les textes d’application concernant les fonctionnaires soient modifiés pour être aussi protecteurs de la vie privée que le présent projet d’Ordonnance Souveraine, étant précisé qu’elle a porté ce point à l’attention du Gouvernement en date du 10 février 2025.
Enfin, s’il n’appartient pas à l’Ordonnance Souveraine dont s’agit d’encadrer cela, l’APDP appelle l’attention sur la nécessaire sensibilisation de tous les services de ressources humaines, qui devraient mettre en œuvre des procédures permettant de s’assurer de la confidentialité de la collecte des informations émanant de la personne souhaitant bénéficier de dons de congés (certificat médical, certificat de décès) ainsi que de celles relatives au(x) donateur(s).
Elle rappelle en effet que le certificat médical devant être produit à l’appui de la demande constitue à lui seul une donnée relative à la santé, conformément à l’article 2 chiffre 6 de la loi n° 1.565 relative à la protection des données personnelles.
Tel est l’avis de l’Autorité de Protection des Données Personnelles.
Le Président
de l’Autorité de Protection
des Données Personnelles.