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TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco – extrait - Audience du 27 mai 2021 - Lecture du 11 juin 2021

  • N° journal 8544
  • Date de publication 25/06/2021
  • Qualité 100%
  • N° de page

Recours en appréciation de validité de l'article 560 du Code de commerce.

En la cause de :
La société civile immobilière (SCI) KIKA, ayant son siège social 2, boulevard Charles III à Monaco, prise en la personne de ses gérants, Mme L. O-B. et M. M-A. M. ;

M. M-A. M. ;
Mme L. O-B. ;


Ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit Avocat-défenseur ;

Contre :

L'État de Monaco représenté par le Ministre d'État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;


LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,



…/…

Après en avoir délibéré :

1\. Considérant que, dans le cadre d'une procédure devant le Tribunal de première instance engagée par le syndic à la liquidation des biens de la SAM B.M.B., M. M-A. M., Mme L. O-B. et la SCI KIKA ont soulevé par voie d'exception le moyen tiré de l'inconstitutionnalité de l'article 560 du Code de commerce ; que par jugement du 9 janvier 2020, le Tribunal de première instance a sursis à statuer sur les demandes des parties et a renvoyé la partie la plus diligente à se pourvoir devant le Tribunal Suprême en appréciation de la constitutionnalité de l'article 560 du Code de commerce ;

Sur la méconnaissance des droits de la défense

2\. Considérant que l'article 2 de la Constitution dispose : « Le principe du Gouvernement est la monarchie héréditaire et constitutionnelle. La Principauté est un État de droit attaché au respect des libertés et droits fondamentaux. » ; que dans l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée par le Prince en vertu de l'article 90 de la Constitution, il appartient au Tribunal Suprême de garantir un exercice effectif des libertés et droits consacrés par le titre III de la Constitution et d'en préciser la portée ; que le droit à un recours juridictionnel effectif est inhérent à l'affirmation constitutionnelle de la Principauté de Monaco en tant qu'État de droit ; que le respect de ce droit participe à la garantie des droits fondamentaux consacrés par le titre III de la Constitution ; que le droit à un recours juridictionnel effectif implique le respect des droits de la défense et le droit à l'exécution des décisions de justice ;
3\. Considérant que l'article 560 du Code de commerce dispose que : « Lorsqu'à la suite d'un jugement constatant la cessation des paiements d'une personne morale, il apparait que l'actif est insuffisant pour faire face au passif, le tribunal peut décider que les dettes de la personne morale seront supportées en tout ou partie, avec ou sans solidarité, par les dirigeants, sauf pour ceux-ci à justifier qu'ils ont apporté à la gestion toute l'activité et la diligence convenables » ; qu'il résulte de cette disposition qu'il appartient aux dirigeants sociaux de justifier que, par leur comportement et leur gestion, ils ont apporté toute l'activité et la diligence convenables dans l'intérêt de la personne morale ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, la présomption instituée par l'article 560 du Code de commerce est réfragable ; qu'il est loisible aux dirigeants concernés de demander au juge d'ordonner la communication de pièces détenues par l'autre partie afin d'apporter la preuve des diligences positives effectuées en faveur de la personne morale ; qu'au demeurant, le juge a toujours la faculté, au regard des circonstances de l'espèce, d'exonérer le dirigeant, en tout ou partie, de l'obligation d'assurer le comblement du passif ; qu'ainsi, l'article 560 du Code de commerce ne méconnaît pas le principe du respect des droits de la défense ;

Sur la méconnaissance du principe d'égalité

4\. Considérant que le principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 17 de la Constitution et dont découle le principe d'égalité devant la justice, ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit ;
5\. Considérant qu'en instituant une présomption de responsabilité des dirigeants en cas de cessation des paiements d'une personne morale, le législateur a entendu assurer le règlement effectif des dettes sociales ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, cette présomption est réfragable ; qu'il en résulte que la différence de traitement entre les justiciables n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi par le législateur ; que par suite, l'article 560 du Code de commerce ne méconnaît pas le principe d'égalité ;

Sur la méconnaissance de la présomption d'innocence

6\. Considérant que la procédure prévue par l'article 560 du Code de commerce n'a pas de caractère répressif ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe constitutionnel de la présomption d'innocence doit être écarté ;

Décide :


Article Premier.


L'article 560 du Code de commerce est déclaré conforme à la Constitution.


Art. 2.


Les dépens sont mis à la charge de la SCI KIKA, de M. M-A. M. et de Mme L. O-B..


Art. 3.


Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.
Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,
V. SANGIORGIO.

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