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EXTRAIT - TRIBUNAL SUPREME de la Principauté de Monaco Audience du 15 octobre 2013 Décision du 25 octobre 2013

  • N° journal 8146
  • Date de publication 08/11/2013
  • Qualité 98.51%
  • N° de page 2256
Recours tendant à déclarer que la C.C.I.N. a fait une interprétation restrictive et, partant, inconstitutionnelle de l’article 18 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 relative à la protection des informations nominatives, dans sa rédaction issue de la loi n° 1.353 du 4 décembre 2008 ;
En la cause de :
- M. DC,
Ayant Maître Régis BERGONZI pour avocat-défenseur et plaidant par Maître Hélène LEBON, avocat au barreau de Paris ;
Contre :
- COMMISSION DE CONTROLE DES INFORMATIONS NOMINATIVES, (C.C.I.N.),
Ayant pour avocat-défenseur Maître Evelyne KARCZAG-MENCARELLI et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIÉ, Avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation.
LE TRIBUNAL SUPREME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,
et statuant en matière constitutionnelle,
Après en avoir délibéré ;
Statuant et délibérant en matière constitutionnelle ;
Considérant que M. DC, administrateur délégué de société, a été poursuivi et condamné par le Tribunal correctionnel pour avoir contrevenu aux dispositions de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée relative à la protection des informations nominatives ;
Considérant que, sur appels du prévenu et du Ministère Public, la Cour d’Appel de Monaco, par arrêt du 18 mars 2013, a relevé « que le conseil du prévenu entend voir examiner la conformité à la Constitution des dispositions de l’article 18 de la loi n° 1.165 en ce qu’elles prévoient :
- l’accès par les organes d’investigation aux locaux de la personne physique ou morale dans des conditions constitutives de perquisitions domiciliaires à caractère administratif, l’exécution de toute opération de vérification nécessaire, l’accès aux documents de toute nature susceptibles de s’y trouver et le droit d’en demander communication ou d’en prendre copie,
- sans que ces mesures d’investigation n’aient été préalablement judiciairement autorisées ou sans que le responsable des locaux (ou son représentant) n’ait été informé ou mis à même d’exercer son droit de s’y opposer » ; qu’elle a jugé que « le moyen de nullité développé par DC est constitutif d’une exception préjudicielle d’inconstitutionnalité de l’article 18 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 au regard du titre III et des articles 19, 21 et 22 de la Constitution » ; qu’elle s’est déclarée incompétente pour statuer sur cette exception et a sursis à statuer sur les appels dont elle était saisie jusqu’à ce que le Tribunal Suprême ait définitivement statué sur cette exception préjudicielle sur saisine préalable de DC, auquel elle a imparti un délai de deux mois pour procéder à la saisine à cette fin du Tribunal Suprême, ce qu’a fait M. DC;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que le requérant n’est pas recevable à joindre à son recours en appréciation de validité formé en exécution de cet arrêt des conclusions tendant à la déclaration d’inconstitutionnalité, par voie de «constatations» et de «déclarations», des modalités d’application par la Commission de Contrôle des Informations Nominatives des dispositions de l’article 18 de la loi n° 1.165 précitée ;
Sur la validité de l’article 18 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée au regard des articles 19, 21 et 22 de la Constitution :
Considérant que l’article 19 de la Constitution dispose : « La liberté et la sûreté individuelle sont garanties. Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, devant les juges qu’elle désigne et dans les formes qu’elle prescrit. Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu’en vertu de l’ordonnance motivée du juge, laquelle doit être signifiée au moment de l’arrestation ou, au plus tard dans les vingt-quatre heures. Toute détention doit être précédée d’un interrogatoire » ; que la procédure instaurée par l’article 18 de la loi n° 1.165 n’affecte ni la liberté ni la sûreté individuelle ; que par suite le grief tiré de la violation de l’article 19 de la Constitution est inopérant ;
Considérant que l’article 22 de la Constitution prévoit : « Toute personne à droit au respect de sa vie privée et familiale et au secret de sa correspondance » ; que les nécessités de la protection des droits et liberté des personnes impliquent de pouvoir diligenter des contrôles dans les locaux professionnels de personnes physiques ou morales afin de vérifier qu’elles respectent les dispositions législatives et réglementaires relatives à la protection des informations nominatives ; que les dispositions de l’article 18 de la loi n° 1.165 modifiée qui définissent les modalités de ce contrôle n’ont ni pour objet ni pour effet d’autoriser la Commission de Contrôle des Informations Nominatives à obtenir des personnes contrôlées des informations en méconnaissance des secrets protégés par la Constitution et par la loi, que par suite le grief tiré de la violation de l’article 22 de la Constitution est également inopérant ;
Considérant que l’article 18 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée relative à la protection des informations nominatives dispose : « La Commission de Contrôle des Informations Nominatives (cf. texte de l’article 18)» ;
Considérant que l’article 21 de la Constitution énonce : « Le domicile est inviolable. Aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu que dans les cas prévus par la loi et dans les conditions qu’elle prescrit » ;
Considérant que l’inviolabilité du domicile, protégée par l’article 21 de la Constitution, s’applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leur activité ; qu’elle doit être conciliée avec les finalités légitimes du contrôle par les autorités publiques du respect des règles qui s’imposent à ces personnes morales dans l’exercice de leurs activités ;
Considérant que la faculté de mise en œuvre par une autorité publique de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels nécessite des garanties effectives et appropriées tenant compte de l’ampleur et de la finalité de ces pouvoirs ;
Considérant que la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993, modifiée par la loi n° 1.353 du 6 décembre 2008 créant la Commission de Contrôle des Informations Nominatives, autorité chargée de contrôler et vérifier le respect des dispositions législatives et réglementaires en matière de protection des informations nominatives et la dotant à cette fin de pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels a pour but de renforcer la protection des droits et libertés des personnes face à l’expansion des nouvelles technologies et aux atteintes potentielles inhérentes à leur exploitation ; qu’elle poursuit ainsi un but d’intérêt général ;
Considérant que les dispositions de l’article 18 de la loi n° 1.165 permettent à la Commission de Contrôle des Informations Nominatives d’accéder à des locaux professionnels en dehors des heures normales de fonctionnement de l’organisme contrôlé, en présence de l’occupant des lieux, du responsable du traitement ou de son représentant ou, à défaut, d’un officier de police judiciaire requis à cet effet, et lui confère des pouvoirs d’investigation étendus ; qu’en application des dispositions de l’article 22, 3°) de la même loi ceux qui volontairement empêchent ou entravent ces investigations ou ne fournissent pas les renseignements ou documents demandés peuvent faire l’objet de sanctions pénales ;
Considérant que, eu égard à l’ampleur de ces pouvoirs d’investigation et des sanctions pénales prévues par l’article 22, 3°) précité, en l’absence d’aucune des garanties évoquées dans la question jugée préjudicielle par la Cour d’appel ou de garanties équivalentes, les dispositions de l’article 18 de la loi n° 1.165 portent au principe de l’inviolabilité du domicile consacré par l’article 21 de la Constitution une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but d’intérêt général poursuivi par cette loi ; que par suite l’article 18 de la loi n° 1.165 n’est pas conforme à la Constitution ;
Décide :
ARTICLE PREMIER.
L’article 18 de la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 n’est pas conforme à la Constitution.
ART. 2.
Les dépens sont mis à la charge du président de la Commission de Contrôle des Informations Nominatives.
ART. 3.
Expédition de la présente décision sera transmise au Président de la Commission de Contrôle des Informations Nominatives et à M. DC.
Pour extrait certifié conforme à l’original délivré en exécution de l’article 37 de l’ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.


Le Greffier en Chef,
B. BARDY.
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