ANNEE JUDICIAIRE 2009-2010 - Rentrée des Cours et Tribunaux Audience Solennelle du jeudi 1er octobre 2009
Le jeudi 1er octobre 2009 a été marqué par la traditionnelle audience de rentrée des Cours et Tribunaux.
Cette audience a été précédée par la Messe du Saint-Esprit qui a été concélébrée avec l’ensemble du clergé diocésain par Monseigneur Bernard Barsi, Archevêque de Monaco.
A l’issue de la Messe du Saint-Esprit, Son Altesse Sérénissime le Prince, escorté du Colonel John Jayet, Chambellan, étaient accueillis au Palais de Justice par M. Philippe Narmino, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d’Etat.
S.A.S. le Prince Souverain était conduit par le Directeur des Services Judiciaires dans la salle d’audience de la Cour d’Appel où Il prenait place.
L’audience solennelle débutait sous la présidence de Mme Catherine Mabrut, Vice-Président de la Cour d’Appel, qui avait à ses côtés MM. Gérard Foret-Dodelin, Thierry Perriquet, Jean-François Caminade, Conseillers, M. René Vialatte, Conseiller honoraire.
M. Jean Apollis, Premier Président de la Cour de Révision, était accompagné de MM. Roger Beauvois, Vice-Président, José Chevreau, Charles Badi et Jean-Pierre Dumas, Conseillers.
Mme Brigitte Grinda-Gambarini, Président du Tribunal de Première Instance, conduisait les magistrats de sa juridiction :
Mme Muriel Dorato-Chicouras, Vice-Président,
M. Marcel Tastevin, Vice-Président,
M. Bruno Nedelec, Premier Juge d’instruction,
M. Pierre Baron, Juge d’instruction,
M. Jérôme Fougeras-Lavergnolle, Juge d’instruction et juge tutélaire,
Mme Stéphanie Vikström, Juge,
M. Emmanuel Robin, Juge,
M. Florestan Bellinzona, Juge,
M. Thierry Cabalé, Juge
M. Sébastien Biancheri, Juge,
M. Cyril Bousseron, Juge
Mme Michel Humbert, Juge
M. Morgan Raymond, Juge suppléant.
Mlle Magali Ghenassia, Juge de Paix, était également présente.
M. Jacques Raybaud, Procureur Général, représentait le Ministère Public avec à ses côtés, M. Gérard Dubes, Premier Substitut, M. Jean-Jacques Ignacio et M. Mickaël Bonnet, Substituts.
Le plumitif d’audience était tenu par Mme Béatrice Bardy, Greffier en Chef, assistée de Mmes Laura Sparacia et Liliane Beveraggi, Greffiers en Chef adjoint, entourée des greffiers en exercice.
Me Marie-Thérèse Escaut-Marquet et Me Claire Notari occupaient le banc des huissiers.
Me Rémy Brugnetti, Bâtonnier, était accompagné des membres du Barreau.
Assistaient également à cette audience des représentants des notaires, des experts-comptables, des administrateurs judiciaires et syndics.
Après avoir déclaré ouverte l’audience solennelle, Mme le Vice-Président de la Cour d’Appel s’exprimait en ces termes :
«Monseigneur,
Monsieur le Ministre d’État,
Monseigneur l’Archevêque,
Monsieur le Directeur des Services Judiciaires,
Excellences, Mesdames, Messieurs,
Chers Collègues,
Aujourd’hui, les magistrats de la Cour d’appel, du Tribunal de première instance et de la justice de paix sont assemblés pour procéder à l’installation de M. Robert Cordas.
Conscients de leurs devoirs et de la difficulté de leur tâche dans l’exercice du pouvoir judiciaire qu’ils tiennent du Souverain, tous ces magistrats comme aussi l’ensemble de la famille judiciaire sont particulièrement sensibles à l’honneur que vous leur faites, Monseigneur, d’être aujourd’hui à leur côté.
C’est avec l’émotion que nous partageons tous, que je vous exprime, Monseigneur, la respectueuse gratitude que nous inspire votre venue solennelle en ce lieu.
M. le Procureur général, ainsi qu’il est d’usage, nous allons désigner, maintenant, deux magistrats pour accompagner M. Robert Cordas jusque devant la Cour.
Qui désignez-vous à cette fin ?»
«Le Parquet Général désigne M. Gérard Dubes, Premier Substitut du Parquet Général».
«La Cour désigne Jean-François Caminade, Conseiller,
Messieurs, la Cour vous demande de bien vouloir accompagner M. Robert Cordas dans la salle d’audience». (M. Cordas est alors introduit dans la salle d’audience et se place face à la Cour).
«M. le Premier Président veuillez prendre place dans ce fauteuil.
M. le Procureur Général vous avez la parole pour vos réquisitions».
M. le Procureur Général, Jacques Raybaud prenait alors la parole.
«Monseigneur,
L’installation d’un nouveau Premier Président est toujours un moment fort de la vie d’une Cour d’appel.
Lorsque cette installation se fait en présence de Votre Altesse Sérénissime, ce moment devient exceptionnel.
Les magistrats et fonctionnaires de la Cour de révision, du Tribunal suprême, de la Cour d’appel, du Tribunal de première instance et de la Justice de paix sont également rassemblés ici afin de répondre aux prescriptions de la loi relative à l’organisation judiciaire.
A l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire,
Ils sont fiers et honorés de Vous accueillir.
Avec l’ensemble des auxiliaires de justice ici présents, permettez-moi de faire part à Son Altesse de la réelle gratitude que nous inspire Sa présence en ce moment solennel.
Acceptez le témoignage de notre profond respect et de notre entier dévouement.
M. le Ministre d’Etat,
Monseigneur l’Archevêque,
M. le représentant du Conseil National,
M. le Président du Conseil de la Couronne,
M. le Directeur des Services Judiciaires,
M. le Secrétaire d’Etat,
Excellences,
M. le Premier Président et M. le Procureur Général de la Cour d’appel de Gênes,
Messieurs les chefs de juridiction de Nice et de Grasse,
Madame le Vice-Président,
Mesdames, Messieurs,
M. le Premier Président,
dans quelques instants, il va être procédé à votre installation.
Votre arrivée, M. le Premier Président Cordas, signifie d’abord pour nous le départ de Mme Monique François au terme d’un mandat de presque quatre années à la tête de cette Cour qui lui aura permis de démontrer, s’il en était encore besoin, ses talents de juriste éminent et son engagement sans faille pour une justice efficace, moderne et dynamique.
Je me dois bien de l’avouer l’année et demi passée aux cotés de Mme François a été pour moi un réel bonheur.
Trois termes me viennent à l’esprit :
Cohésion,
Respect de l’indépendance de chacun
Et hauteur de vue.
Hauteur de vue d’abord, et très grande élégance, qui ne s’est jamais démentie et qui lui est unanimement reconnue.
Cohésion ensuite : qui a permis à cette Cour de la faire vivre au quotidien dans une action commune ayant pour socle le respect de nos attributions respectives.
Respect de l’indépendance de chacun enfin, qui a rendu possible une atmosphère de convivialité et de grande courtoisie.
Qu’il me soit permis ici de lui adresser au nom de mon Parquet Général une pensée reconnaissante et - pourquoi ne pas le dire - affectueuse.
Bien que vous soyez nouveau venu en Principauté, M. Cordas, l’examen complet de vos hautes fonctions passées permet de se rendre compte que vous y êtes sûrement mieux préparé que quiconque, ayant exercé pendant trente-trois ans dans de grandes juridictions à compétence méditerranéenne si je puis dire, et le plus souvent, à leur tête.
Votre parfaite réussite dans ces postes de responsabilité est la garantie absolue du succès qui vous attend dans vos nouvelles fonctions.
Vos talents y ont été remarqués, non seulement dans le domaine juridictionnel, mais aussi dans celui de la gestion des juridictions, où il convenait de relever certains défis et non des moindres, comme celui de la restauration du Tribunal de Grande Instance de Toulouse qui a été conduite de main de maître.
Je peux l’affirmer ici, c’est vraiment une belle réussite pour l’avoir visité cet été. Mais que d’efforts et d’énergie déployés il vous a fallu pour mener ce projet et vous sachant marin, j’utiliserai volontiers cette métaphore :
Ce navire, vous l’avez mené à bon port, comme tous ceux dont vous avez pris la barre.
Comme l’a dit un de vos adjoints à l’époque : marin avisé, vous l’êtes en mer comme sur terre.
Tous deux magistrats, nous avons prêté le même serment, et je crois pouvoir dire que, bien qu’investis de rôles différents mais complémentaires, nous sommes fidèles à la même éthique et partageons le même idéal, celui d’une justice crédible, attentive, respectueuse des règles de droit qui doit allier la part de l’humain et le goût de la modernité.
Sachez que c’est dans la plus grande confiance et la plus parfaite loyauté avec vous et les magistrats du siège que le Parquet Général exercera ses fonctions.
Mme le Vice-Président, je ne saurais prolonger davantage ce propos.
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j’ai l’honneur de requérir qu’il vous plaise :
- procéder à l’installation de M. Robert Cordas dans ses fonctions de Premier Président,
- me donner acte de mes réquisitions
- et dire que du tout il sera dressé procès-verbal».
Mme le Vice-Président de la Cour d’Appel reprenait la parole :
«Mme le Greffier en chef, veuillez donner lecture de l’ordonnance souveraine de nomination de M. Robert Cordas, et de sa prestation de serment». (Cette lecture est donnée par Mme Béatrice Bardy, Greffier en chef).
Puis, Madame le Vice-Président de la Cour d’appel poursuivait en ces termes :
«Avant de faire droit aux réquisitions de M. le Procureur Général, permettez-moi, M. le Premier Président, de vous souhaiter la bienvenue dans vos nouvelles fonctions.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain vous a appelé à la tête de nos juridictions permanentes, nomination qui consacre une grande carrière de magistrat français.
Vous succédez désormais en qualité de 15ème Premier Président à Madame le Premier Président Monique François.
Comment ne pas évoquer aujourd’hui notre dernier Premier Président, même si elle a exprimé le souhait que nous évitions un tel éloge !
Partagée entre le désir de respecter son souhait et celui de lui rendre un légitime hommage, j’ai donc eu recours à nos archives et reprends à mon compte les propos tenus ici lors de son installation le 24 mars 2006 par mon prédécesseur, M. le Vice-Président Adam.
Témoignant alors de ses qualités d’humanité, de modestie et de générosité sans ostentation, il s’adressait à elle en ces termes : «Dans cette tâche difficile du juge au sein de la collégialité vous vous montrez toujours soucieuse de parvenir à la décision la plus juste, la plus humaine et la plus respectueuse de nos lois, n’ayant jamais épargné à cette fin ni votre temps ni votre peine».
On ne peut mieux dire sinon rappeler son courage face aux épreuves que la vie lui a imposées. Monique François compte de nombreux amis parmi nous. Elle conserve notre amitié et heureusement l’amitié survit à la retraite.
La Cour a poursuivi avec elle le chemin tracé par M. le Premier Président Jean-François Landwerlin, éminent juriste, qui avait su par une jurisprudence novatrice, précéder dans de nombreux domaines les avancées que l’adhésion de Monaco à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales a consacrées.
C’est avec vous, M. le Premier Président, que nous allons désormais poursuivre cette tâche, tâche à laquelle vous êtes particulièrement préparé.
En effet, toute votre carrière témoigne de vos grands talents. Nommé à Quimper le 15 mai 1974 au poste de Juge d’Instruction, vous avez rejoint aux mêmes fonctions le Tribunal de Toulon avant d’être nommé Premier Juge à Grasse le 7 août 1981, puis Vice-Président de ce tribunal.
Nommé Conseiller à la Cour d’appel de Pau en 1986, vous avez ensuite accédé au poste de Président du Tribunal de Toulon en 1993 avant de présider en 2001 aux destinées du Tribunal de Toulouse.
Vous avez, à ce poste, rencontré M. Patrice Davost, ancien Directeur des Services Judiciaires de Monaco et actuel Procureur Général de Toulouse qui, s’excusant de son absence aujourd’hui, a tenu à vous faire connaître par mon intermédiaire combien votre présidence avait été appréciée de tous.
Enfin, vous avez été nommé Premier Président de la Cour d’appel de Bourges, fonctions auxquelles vos éminentes qualités et vos responsabilités antérieures vous conduisaient naturellement.
Vous avez, au cours de votre carrière, eu l’occasion de travailler avec deux des Conseillers de cette Cour, M. Perriquet et M. Forêt-Dodelin qui gardent le meilleur souvenir de leur collaboration avec vous et se réjouissent de votre arrivée.
Vous êtes ainsi déjà en terre connue et dans une région qui vous est chère.
Votre nomination à Monaco, M. le Premier Président, est un honneur pour nous et montre l’intérêt que la France porte à notre justice puisque c’est la première fois qu’un magistrat de votre grade est détaché à des fonctions juridictionnelles dans la Principauté.
Devenant Premier Président de la Cour d’Appel, vous allez renouer avec une activité juridictionnelle dont vos dernières fonctions à la Cour d’Appel de Bourges vous avez quelque temps éloigné.
Il m’appartient, dès lors, de vous présenter brièvement l’activité des juridictions que vous allez présider et ainsi tordre le cou aux clichés réducteurs habituellement véhiculés sur notre justice et ce, encore récemment, par une émission d’une chaîne de télévision grand public.
Certes, nous ne connaissons pas ici les contentieux de masse répétitifs, mais nous embrassons toutes les matières du droit ce qui exige des magistrats une grande polyvalence, des connaissances juridiques étendues et une grande mobilité d’esprit.
La dimension internationale est toujours présente ce qui rend l’exercice judiciaire complexe parfois presque inconfortable mais c’est aussi ce qui en fait, vous le constaterez, tout l’intérêt.
Sous l’autorité naturelle et souriante de Mme Brigitte Gambarini, leur Président, les juges du premier degré produisent des décisions de qualité qui contribuent utilement à la réflexion de la Cour lorsqu’elle est saisie.
Vous serez entouré dans votre tâche par un personnel dont vous avez déjà pu apprécier, depuis votre arrivée, l’efficacité et le dévouement.
Vous exercerez donc ici, M. le Premier Président, en toute sérénité et sachez que la seule pression que vous subirez, c’est celle que nous nous imposons tous pour rendre une justice équilibrée et de qualité.
M. le Premier Président, me faisant l’interprète de tous mes collègues, je vous exprime mes plus vives félicitations.
Sur quoi, la Cour
Déclare M. Robert Cordas, Premier Président, installé dans ses fonctions,
donne acte au Ministère public de ce qu’il a été satisfait à ses réquisitions.
Et ordonne que du tout il sera dressé procès-verbal.
Je vous prie désormais, M. le Premier Président, de rejoindre le fauteuil qui vous est réservé dans cette salle d’audience».
M. le Premier Président Robert Cordas prenait alors la parole.
«Monseigneur,
La présence de Votre Altesse Sérénissime à cette audience solennelle à laquelle vous avez tenu à assister personnellement témoigne, une fois encore, de l’intérêt tout particulier que vous portez à l’œuvre de Justice.
Elle est un signe fort de Votre profond attachement à l’institution judiciaire et au pouvoir judiciaire que Vous incarnez mais dont Vous avez constitutionnellement délégué l’exercice aux magistrats des Cours et Tribunaux de la Principauté.
Cette audience solennelle revêt aujourd’hui un caractère un peu particulier puisqu’elle se déroule en deux temps.
Le premier concerne la cérémonie relative à mon installation dans mes fonctions de Premier Président de la Cour d’appel à laquelle il vient d’être procédé.
Le second, dans quelques instants, sera celui de l’audience solennelle de rentrée judiciaire des Cours et Tribunaux qui constitue l’un des moments importants, de la vie des juridictions.
Ce concours de circonstances qui fait se succéder deux cérémonies qui, en réalité, se confondent en une seule, me vaut l’insigne honneur, Monseigneur, de Votre présence à mon installation.
Je ressens donc encore plus pleinement, à cet instant, la confiance que vous avez bien voulu placer en moi en me désignant pour exercer ces fonctions.
Ces fonctions dont je sais l’exigence des devoirs qu’elles impliquent. J’en mesure l’honneur, j’en mesure tout autant la charge.
Permettez-moi, Monseigneur, de Vous exprimer ma profonde gratitude et de Vous assurer de mon entier dévouement au service de la Justice de la Principauté.
Je suis également très sensible à la présence des Hautes Autorités ici réunies qui, répondant à l’invitation pour la traditionnelle audience solennelle de rentrée, m’ont fait également l’honneur d’assister à mon installation.
M. le Ministre d’Etat,
Monseigneur l’Archevêque,
M. le Directeur des Services Judiciaires,
Excellences, Mesdames, Messieurs,
Mes Chers Collègues,
Je vous remercie de l’accueil que vous avez bien voulu me réserver lors des visites que je vous ai rendues.
Le temps m’a malheureusement manqué pour vous rencontrer tous avant ce jour.
Je ne manquerai pas de m’acquitter avec plaisir de ce devoir dans les semaines qui viennent.
Je veux également saluer toutes les hautes personnalités des pays voisins qui ont pris, un peu de leur temps pour assister à cette cérémonie et nous témoigner ainsi estime et amitié.
M. le Directeur des Services Judiciaires, soyez assuré de mon total dévouement. J’ai été très sensible à la chaleur de votre accueil lorsque vous avez guidé mes premiers pas dans ce Palais de Justice.
M. le Procureur Général vos propos de bienvenue me vont droit au cœur.
Soyez certain de ma totale et loyale collaboration dans la direction de notre Cour d’Appel.
La spontanéité de nos premiers échanges et la détermination commune qui nous anime au service de la Justice de la Principauté sont le gage d’une parfaite entente dont je me réjouis déjà.
Madame le Président Catherine Mabrut, merci à vous aussi pour la qualité de votre accueil.
Votre grande expérience et vos qualités d’éminent juriste sont appréciées de tous et ont justifié votre promotion au rang de vice-Président de la Cour d’appel le 21 novembre 2008. Ces qualités me seront une aide précieuse comme elles l’ont été à Madame le Premier Président Monique François à laquelle il convient de rendre un hommage tout particulier pour le travail minutieux et rigoureux accompli à la tête de cette Cour et plus généralement au sein des juridictions de la Principauté tout au long d’une très brillante carrière. Nous lui souhaitons une longue et paisible retraite.
Mes chers collègues de la Cour, je suis très heureux de pouvoir travailler à vos côtés et de retrouver certains d’entre vous avec lesquels j’ai eu le privilège d’exercer sous d’autres cieux. Nous formerons tous ensemble une équipe soudée au service de la Justice de la Principauté.
En quelques mots je tiens à dire à l’ensemble des professions judiciaires que je suis très heureux de pouvoir œuvrer avec elles en étroite collaboration.
Je serai particulièrement attentif à leurs préoccupations. Je serai à leur écoute afin qu’ensemble nous réfléchissions à des méthodes de travail et des schémas d’organisation propres à faciliter le traitement complet mais rapide des procédures, tant en matière civile qu’en matière pénale.
Je sais pouvoir compter sur la compétence et la disponibilité de mes collègues de la Cour et du Tribunal comme sur celles des agents du Greffe Général dont le dévouement m’apparaît déjà comme exemplaire.
M. le Bâtonnier de l’Ordre des avocats-défenseurs et avocats, le rôle du Barreau est primordial dans la conduite des procédures. Je ne doute pas que nous saurons travailler ensemble pour en faciliter le déroulement harmonieux.
Qu’il me soit enfin permis d’avoir une pensée pour ceux qui n’ont pas pu assister à cette audience mais qui m’ont adressé des messages qui me touchent beaucoup en particulier mes anciens collègues de la Cour d’Appel de Bourges que je n’oublie pas.
J’aurais encore, comme vous l’imaginez bien, beaucoup de choses à vous dire pour exprimer l’émotion et l’honneur que je ressens en prenant mes fonctions.
Mais je ne veux pas davantage empiéter sur le temps qui doit être maintenant consacré à notre traditionnelle audience de rentrée des Cours et Tribunaux qui voit le 1er octobre de chaque année l’ensemble des juridictions réunies pour cette cérémonie solennelle, en présence des plus Hautes Autorités de la Principauté, conformément aux dispositions de l’article 51 de la loi du 15 juillet 1965.
Ce texte dispose également qu’un discours doit être prononcé au cours de cette audience.
M. le Président Roger Beauvois a bien voulu cette année satisfaire à cet usage en choisissant pour thème «Le législateur et le juge monégasques face à la Convention Européenne des droits de l’homme : révolution ou évolution».
Ce sujet allait de soi puisque nous avons le très grand honneur d’accueillir à cette audience M. Jean-Paul Costa Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, accompagnée de Mme Isabelle Berro-Lefevre, magistrat monégasque élue en qualité de Juge à cette Cour.
M. le Président votre présence ici, aujourd’hui, est éminemment symbolique. Elle est ressentie par l’ensemble des magistrats des Cours et Tribunaux de la Principauté comme une marque de reconnaissance à leur égard pour l’œuvre de Justice qu’ils accomplissent.
Soyez très vivement remercié pour l’intérêt qu’en votre qualité «d’ambassadeur» des Droits de l’Homme vous leur manifestez ainsi.
Je donne maintenant la parole à M. le Président Roger Beauvois».
M. Roger Beauvois prononçait alors le discours suivant, intitulé :
LE LEGISLATEUR ET LE JUGE MONEGASQUES FACE A LA CONVENTION EUROPEENNE
DES DROITS DE L’HOMME REVOLUTION OU EVOLUTION ?
«Avant tout je voudrais dire combien je suis sensible à l’honneur qui m’est fait d’intervenir en cette audience solennelle de rentrée dont la tradition est ici plus que séculaire.
L’honneur est évident de prendre la parole en présence du Prince Souverain. C’en est un également de s’adresser au Président de la Cour européenne des droits de l’homme. Les seuls mots qui désignent cette juridiction suffisent à montrer la place primordiale qu’elle occupe dans un domaine essentiel au sein de notre continent tout entier. Enfin, être écouté par les nombreuses autorités qui sont ici présentes ne peut que flatter l’orateur.
Mais comment ne pas redouter aussi de n’être pas à la hauteur de la tâche ? Comment ne pas craindre les erreurs, les omissions ou les approximations hasardeuses dans l’exposé de questions qui touchent à la souveraineté de l’Etat, à son oeuvre législative ou aux activités de la Cour ici représentée par son Président ?
L’expression tellement usée de «redoutable honneur» m’apparaît en ce moment d’une terrible réalité.
L’an dernier, en ces lieux, un jeune magistrat nous avait entretenus brillamment de l’œuvre historique du Prince Louis 1er et plus particulièrement des statuts criminels de 1678. Cette année un autre magistrat que, par euphémisme, nous dirons plus âgé, va, par contraste, tenter d’aborder un thème tourné vers le présent et, plus encore, vers l’avenir, puisqu’il s’agit d’évoquer quelques aspects de l’application de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la Principauté de Monaco.
Ce sujet a été choisi bien sûr en raison de son actualité et de son devenir mais aussi parce que l’expérience monégasque est à bien des égards exemplaire.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, pour reprendre une expression chère à nos avocats, ce choix est également du aux observations faites en d’autres temps et d’autres lieux sur les problèmes d’ajustement des normes et des pratiques nationales avec les principes du droit européen.
Il n’est en réalité pas facile d’introduire dans une législation interne un ensemble de règles aussi fondamentales que celles qui figurent dans la Convention européenne. Même dans les pays où, de tradition, comme c’est ici le cas, les libertés fondamentales étaient respectées, l’apport de la Convention a constitué une telle novation que l’on a pu parler de véritable révolution dans le paysage juridique.
A Monaco deux institutions étaient appelées à affronter en première ligne les effets de la mise en application du traité : le pouvoir législatif, chargé d’adapter les lois aux nouvelles lignes directrices supra nationales, le pouvoir judiciaire, chargé de les appliquer.
Après un bref aperçu du contenu de ces normes il est intéressant de voir comment chacune de ces institutions a su faire face aux impératifs nés de l’adoption du traité.
***
La Convention européenne a été signée et ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l’Europe, à Rome, le 4 novembre 1950. Le projet avait été soumis à l’Assemblée consultative entre le 10 août et le 8 septembre 1949. A peu de choses près nous pourrions en commémorer le soixantième anniversaire.
Après avoir été ratifiée par dix pays elle est entrée en vigueur le 3 septembre 1953. Elle lie maintenant 47 Etats membres et a été complétée par 15 protocoles, en y incluant le protocole 14 bis qui ne sera applicable ici qu’à partir du 1er novembre prochain.
La succession de ces protocoles qui sont venus compléter et renforcer les droits garantis par le texte initial montre à quel point cette Convention est un instrument vivant qui s’adapte aux évolutions sociales et politiques et, nous le verrons, d’une application quotidienne dans nos juridictions.
Il n’est pas nécessaire de revenir plus avant sur son historique sauf à rappeler qu’elle est née à la suite des tragiques évènements de la deuxième guerre mondiale qui ont conduit un certain nombre de pays à mettre en place les moyens indispensables pour ne pas retomber dans les actes de barbarie vécus dans la période précédente.
C’était déjà l’objectif de la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée par l’assemblée générale de l’ONU en 1948 et à laquelle se réfère en premier lieu, ce n’est pas un hasard, la Convention européenne.
La seule lecture des titres des premiers articles de celle-ci permet de mieux appréhender les droits et libertés qu’elle entend protéger : droit à la vie, interdiction de la torture, interdiction de l’esclavage et du travail forcé, droit à la liberté et à la sûreté, droit à un procès équitable, pas de peine sans loi, droit au respect de la vie privée et familiale, liberté de pensée, de conscience et de religion, liberté d’expression, de réunion et d’association, droit au mariage, droit à un recours effectif, interdiction de discrimination, interdiction de l’abus de droit, limitation de l’usage des restrictions aux droits.
Parmi les protocoles venus compléter le texte initial notons ceux qui garantissent : la protection de la propriété, le droit à l’instruction, l’interdiction de l’emprisonnent pour dette, la liberté de circulation, l’interdiction de l’expulsion des nationaux et des expulsions collectives d’étrangers, l’abolition de la peine de mort, les garanties procédurales en cas d’expulsion d’étrangers, le droit à un double degré de juridiction en matière pénale, le droit d’indemnisation en cas d’erreur judiciaire, le droit de ne pas être jugé ou puni deux fois pour les mêmes faits, l’égalité entre époux.
Il est difficile de dresser un catalogue plus complet et plus précis des garanties essentielles de chacun dans un Etat de droit.
Pour assurer le respect des engagements souscrits par les Etats signataires la Convention a institué une Cour européenne des droits de l’homme, siégeant à Strasbourg.
Cette juridiction est composée d’un nombre de juges égal à celui des Etats membres et qui sont élus pour six ans par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe sur une liste de trois candidats par pays.
La Cour élit son président, ses vice-présidents, les présidents de chambre, le greffier et ses adjoints.
Elle siège soit en juge unique qui examine essentiellement la recevabilité, soit en comités de trois juges qui peuvent statuer au fond si la question posée fait déjà l’objet d’une jurisprudence bien établie de la Cour, soit en chambres de sept juges qui se prononcent sur la recevabilité et sur le fond pour les requêtes individuelles et, dans tous les cas, sur les requêtes étatiques.
Enfin, si une affaire pendante devant une chambre soulève une question grave ou s’il y a risque de contradiction avec un arrêt antérieur de la Cour, la chambre peut se dessaisir au profit de la grande chambre composée de dix sept juges. En font notamment partie : le Président de la Cour, les Vice-Présidents, les Présidents de chambre.
Il serait trop long d’examiner, voire d’énumérer, tous les domaines dans lesquels la Cour a pu intervenir. Nous reviendrons dans un instant sur son rôle. A ce stade, rappelons simplement que les règles instituées par la Convention sont intégrées dans l’ordre juridique des Etats parties avec, bien souvent, une force supérieure aux lois internes.
Or, fixer les normes qui régissent un pays, notamment en ce qui concerne les droits et garanties des habitants, constitue un aspect essentiel de la souveraineté nationale. L’adhésion à la Convention entraîne donc, sur les points qu’elle concerne, un abandon au moins partiel de cette souveraineté, ce qui n’est pas facile pour un Etat et pour les autorités qui font la loi.
Ceci explique, pour partie, les délais écoulés dans certains pays, entre le projet d’adhérer au traité et sa ratification, c’est-à-dire son application directe assortie du droit de recours individuel.
Si nous prenons l’exemple de Monaco la demande d’admission officielle au Conseil de l’Europe a été présentée le 15 octobre 1998 et les instruments de ratification ont été déposés le 30 novembre 2005, date à laquelle la Convention est entrée en vigueur dans la Principauté.
Entre les modifications qui avaient été demandées par les rapporteurs du Conseil de l’Europe pour permettre l’adhésion, je pense à la révision du traité franco-monégasque par le traité du 24 octobre 2002, ainsi qu’à la révision constitutionnelle du 2 avril 2002, il a donc fallu près de huit ans pour aboutir. Pourtant ces rapporteurs concluaient dès 1999 : «l’ordre juridique de la Principauté de Monaco est en général en mesure de garantir les droits de l’homme tels qu’énoncés par la Convention européenne» et constataient que «d’une manière ou d’une autre, tous les droits énoncés par cette Convention étaient garantis par la Constitution». Il s’agit bien entendu de la Constitution monégasque.
Néanmoins, outre les aménagements préalables à l’adhésion demandés par le Conseil de l’Europe et mis en œuvre par la Principauté, sous réserve du respect des particularités inhérentes à sa situation géographique, démographique et sociale, le législateur a ici anticipé sur l’entrée en vigueur de la Convention ou s’en est très vite inspiré. C’est un trait original qu’il est important de souligner.
A cet égard, il faut d’abord rappeler que la Principauté avait déjà adhéré au pacte international relatif aux droits civils et politiques, dit pacte de New York, rendu exécutoire le 12 février 1998. Or, ce pacte apporte pour partie des garanties de droits que l’on retrouve dans la Convention européenne.
Lors de son adhésion au Conseil de l’Europe la Principauté s’est engagée à signer douze conventions notamment celle qui fait l’objet de cet exposé et six de ses protocoles additionnels ainsi que la convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Elle a en outre souscrit la promesse d’examiner en permanence la compatibilité de sa législation avec la Convention européenne et ses protocoles permanents.
Dans ce domaine le législateur monégasque avait pris les devants. Citons, par exemple, les lois de 2003 sur l’égalité des droits entre l’homme et la femme au sein du foyer ou entre les enfants naturels et les enfants légitimes et la loi du 15 juillet 2005 sur la liberté d’expression publique.
Après la mise en œuvre de la Convention sont venues plusieurs autres lois allant dans le même sens. Je voudrais insister sur l’une d’entre elles, du 26 décembre 2007, qui porte révision du code de procédure pénale et s’inscrit parfaitement dans la lettre et dans l’esprit des dispositions conventionnelles relatives aux droits à la liberté, à la sûreté ainsi qu’au procès équitable.
L’article 1er de la loi crée un nouveau titre du code de procédure pénale qui comporte 12 articles et est consacré à la garde à vue.
Cette mesure, je le rappelle, permet à un officier de police judiciaire de maintenir une personne à sa disposition, pour les nécessités de l’enquête. Si la décision est prise par l’officier de police judiciaire la mesure s’exécute sous le contrôle du procureur général ou d’un juge qui doit en être informé aussitôt et peut la faire cesser à tout moment.
Sans mettre en cause son utilité ni même dans bien des cas sa nécessité et quoique sa durée soit limitée à vingt quatre heures avec possibilité de la prolonger d’une période égale, il ne faut pas sous-estimer le caractère traumatisant que peut revêtir cette mesure de contrainte pour les personnes qui n’en sont pas coutumières, d’autant qu’elle peut être accompagnée d’une fouille à corps, euphémisme qui le plus souvent désigne une fouille à nu, et de la privation de ceinture, lacets ou autres vêtements ou objets considérés comme dangereux pour la personne retenue ou pour des tiers.
N’oublions pas non plus que pour placer une personne en garde à vue, il suffit qu’il existe «une raison plausible de soupçonner qu’elle a commis un crime ou un délit.» L’expression employée : «raison plausible de soupçonner», laisse une large marge d’appréciation et explique pourquoi certaines personnes peuvent être totalement mises hors de cause après un séjour en garde à vue.
C’est pour éviter d’éventuels abus qui, pour d’autres pays ont été sanctionnés par la cour européenne, que la loi monégasque est venue entourer le placement en garde à vue d’un certain nombre de garanties qui résultent pour l’essentiel : du contrôle immédiat de son déroulement par l’autorité judiciaire, Procureur Général ou Juge d’instruction, de la faculté réservée au seul juge des libertés de prolonger la garde à vue au-delà de 24 heures et par ordonnance motivée, de l’obligation pour l’officier de police judiciaire qui notifie la garde à vue de faire connaître à la personne concernée, dans une langue qu’elle comprend, les faits qui font l’objet des investigations sur lesquels elle doit s’expliquer et de la nature de l’infraction, du droit de faire prévenir un proche, d’être examiné par un médecin, enfin, et si je la cite en dernier ce n’est pas, bien au contraire, parce que c’est la moins importante des notifications, du droit de s’entretenir avec un avocat.
D’autres garanties procédurales sont prévues par la loi telles que l’enregistrement audiovisuel des auditions et l’établissement d’un procès verbal détaillant les diverses phases de la mesure.
La loi qui réglemente aussi les interceptions des correspondances par téléphone, plus couramment appelées «les écoutes», ou par communications électroniques, institue également une procédure d’indemnisation pour les personnes placées en détention provisoire et ayant été reconnues non coupables par une décision judiciaire.
Selon les textes, il est statué sur la demande d’indemnité par une commission présidée par le Premier Président de la cour de révision et composée du Premier Président de la cour d’appel, du Président du Tribunal de Première Instance ou de leur représentant et d’un Conseiller d’Etat. Les décisions de cette commission, qui statue en dernier ressort, doivent être motivées.
Enfin, les derniers articles traitent du jugement des personnes poursuivies pour une infraction criminelle et qui ne sont pas présentes à l’audience. Cette procédure nouvelle qui se substitue à l’ancienne contumace est là encore conforme au texte de la Convention et à la jurisprudence de la Cour européenne, je pense sur ce point à la possibilité pour l’avocat de l’accusé d’assurer la défense de celui-ci même s’il est absent.
J’ai sans doute été trop long dans l’analyse pourtant très partielle de cette loi du 26 décembre 2007 mais elle me paraît emblématique des efforts accomplis par la Principauté, pour mettre sa législation en parfaite concordance avec les normes du Conseil de l’Europe, dans le domaine, pourtant sensible en cette période, du respect des garanties fondamentales, y compris pour les auteurs d’infractions, et pour reprendre les termes d’un arrêt de la Cour européenne «spécialement pour les droits de la défense eu égard au rôle éminent que le droit à un procès équitable, … joue dans une société démocratique.»
Face à cette capacité d’adaptation du législateur monégasque les juges ont-ils su être de fidèles interprètes du texte d’application nouvelle pour eux ?
Compte tenu du très petit nombre, sur lequel je reviendrai, de recours concernant la Principauté et qui auraient été déjà jugés, il n’est pas possible de fonder une appréciation sur les arrêts de la Cour européenne. Pourtant la Convention est très souvent invoquée devant nos tribunaux et nombreuses sont leurs décisions qui s’y réfèrent.
Les règles posées par le traité, comme tous les textes normatifs, donnent lieu à interprétation, ce qui a d’ailleurs conduit certains théoriciens du droit à soutenir qu’en réalité c’est le juge qui fait la loi, mais ceci est une autre histoire. Quoi qu’il en soit, en raison de l’application directe de la Convention la conformité à celle-ci d’une décision de justice, voire d’un texte législatif, s’est très vite posée.
La Cour européenne ne pouvant être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes les juridictions nationales ont eu à se prononcer sur des points de droit avant que la Cour de Strasbourg n’en connaisse et il est vite apparu que les interprétations données à chacun de ces niveaux n’étaient pas toujours concordantes. Or il est difficile pour une juridiction nationale qui, de tradition, statuait en dernier ressort, en d’autres termes disait le droit, sans aucune censure possible, de découvrir un jour que désormais certaines de ses décisions peuvent être remises en cause par une juridiction supérieure.
Ajoutons que le renforcement des droits de la défense au nom du principe de l’égalité des armes a pu aboutir à encadrer plus strictement les facultés d’intervention des magistrats.
Que n’a-t-on pu dire alors sur la méconnaissance par les juges de Strasbourg des réalités locales, voire sur l’incapacité d’un juriste de Common Law à comprendre le raisonnement des tribunaux appliquant le droit romano-germanique ou l’inverse ?
Il a fallu parfois, sans reprendre l’expression excessive de «guerre des juges», bien du temps et de la persuasion avant de parvenir, la sagesse aidant, à un véritable «dialogue des juges».
A ma connaissance les magistrats de la Principauté sont parvenus directement à ce stade du sage dialogue comme l’avait fait le législateur. C’est un autre trait particulier qu’il est important de relever.
Mon expérience personnelle se limite ici à la Cour de révision mais je peux affirmer que dans cette juridiction le souci premier a toujours été de prendre en compte la jurisprudence de la Cour de Strasbourg sans mettre en cause sa légitimité et, à défaut de précédent transposable sur une question déterminée de rechercher dans quel sens cette Cour pourrait se prononcer.
Bien que nous ne puissions connaître la teneur des délibérés des autres formations de la Principauté, je pense, à la lecture de leurs décisions, que l’attitude de nos collègues est proche de la nôtre même si, pour autant que l’on puisse le supposer, la première tendance a pu aller vers une approche plus restrictive qui peut trouver sa cause dans une confrontation directe avec les faits.
L’application fidèle de la Convention par les juridictions explique sans doute pourquoi, à ce jour, la très grande majorité des requêtes individuelles contre l’Etat monégasque devant la Cour européenne ont fait l’objet de radiations. Pour les autres, l’une s’est terminée par un désistement et une autre a été déclarée irrecevable pour tardiveté. En définitive une seule condamnation a été prononcée. Elle sanctionne la durée excessive d’une détention provisoire, l’Etat devant réparer le dommage moral subi de ce fait. Dans cette même affaire la cour a écarté l’existence d’un traitement inhumain ou dégradant.
Un survol de la jurisprudence de la cour d’appel, de la cour de révision et du tribunal suprême permet de voir concrètement comment ont réagi ces juridictions.
Dès le 7 avril 2006, soit quelques mois seulement après l’entrée en vigueur du texte, la Cour d’appel a eu à connaître d’un jugement qui avait ordonné la mise en liberté d’une personne détenue depuis six mois et demi et non encore jugée, en faisant directement application de l’article 5 § 3, de la Convention, en ce qu’il est confère à une personne arrêtée le droit d’être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure.
Le 5 juillet suivant un autre arrêt rejetait la communication d’une procédure d’instruction, réclamée en application de l’article 6 de la Convention, qui concerne le droit à un procès équitable, à une personne qui n’était ni visée dans le réquisitoire introductif, ni inculpée, solution reprise plusieurs fois par la suite, la cour donnant ainsi un contour précis à la notion d’accusé bénéficiaire des garanties définies par la Convention.
Il serait trop long d’examiner en détail toute la jurisprudence de la Cour d’appel en la matière. Permettez-moi cependant d’évoquer quelques autres décisions de principe.
Les dispositions les plus souvent invoquées par les parties notamment dans la matière pénale qui est surtout concernée, sont celles de l’article 6 qui vient d’être cité et qui a trait au droit à un procès équitable. A cet égard la Cour d’appel s’est prononcée, par exemple, sur la conformité à ces dispositions de l’impossibilité pour les victimes indirectes d’infractions d’agir en réparation devant la juridiction pénale, l’absence de publicité des débats de la chambre du conseil lorsqu’elle n’a pas à statuer sur le fond, l’irrecevabilité d’un appel formé hors délai par un prévenu, condamné en première instance, la désignation d’un expert alors que celui ci n’était pas sans lien avec les faits poursuivis.
La Cour d’appel a eu également à statuer en mai dernier dans une affaire où il était soutenu qu’une personne ne pouvait valablement faire l’objet d’un mandat d’arrêt décerné par un magistrat du parquet général, celui-ci n’étant ni un juge ni un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires au sens de l’article 5 de la Convention, en raison de son absence d’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif. Ce moyen reprenait les termes d’un arrêt rendu contre la France par la cour européenne mais actuellement remis en cause devant la grande chambre de cette juridiction.
L’arrêt de la Cour d’appel de Monaco faisant l’objet d’un pourvoi en révision, je ne peux le commenter.
Comme dans l’affaire que je viens d’évoquer, la cour de révision a naturellement eu à connaître des mêmes moyens que ceux qui avaient été présentés devant la cour d’appel mais elle a eu aussi à innover.
Ainsi avons-nous estimé que les juges du fond avaient pu condamner un prévenu à une peine d’emprisonnement ferme pour des faits qualifiés de diffamation et injures publiques, sans contrevenir à l’article 10 de la Convention, relatif à la liberté d’expression, en retenant que ce prévenu avait confirmé son intention de troubler la paix publique et d’alimenter dans la population le rejet à l’encontre d’une certaine catégorie de personnes, au-delà du légitime souci d’information et de la liberté d’expression.
En revanche nous avons jugé qu’il était contraire à l’article 6 de renvoyer un inculpé devant la juridiction de jugement, sans que ni lui, ni son avocat n’aient pu avoir connaissance du dossier, encore cet inculpé, résidant à l’étranger, n’aurait-il pas déféré aux convocations du juge d’instruction mais alors qu’il pouvait être entendu par commission rogatoire.
De même la cour de révision a considéré, toujours en application de l’article 6, qu’un inculpé d’origine étrangère mais reconnu comme ayant une certaine connaissance de la langue française était néanmoins fondé à réclamer un interprète pour être soumis à une expertise mentale et psychologique.
Enfin, la cour de révision a donné une interprétation des dispositions de l’article 6, §3, de la Convention selon lesquelles toute personne accusée a droit de se défendre elle-même ou d’avoir l’assistance d’un défenseur de son choix.
Comme il se devait le Tribunal suprême a eu, lui aussi, à répondre à des moyens se référant à la Convention européenne. Il apparaît que le problème s’est posé principalement dans des affaires relatives à des refoulements d’étrangers.
Ainsi a été invoqué l’article premier du protocole n° 7, lequel précise qu’un étranger ne peut être expulsé sans avoir eu la possibilité de faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion, de faire examiner son cas et de se faire représenter à ces fins devant l’autorité compétente.
A ce moyen, soulevé par une personne en situation irrégulière, la haute juridiction a pu opposer que les dispositions du même article réservent les garanties précédemment rappelées aux étrangers résidant régulièrement sur le territoire de l’Etat d’expulsion. Dans d’autres affaires il a également été jugé que, toujours selon le même article, l’étranger peut être expulsé avant l’exercice des droits dont il s’agit, lorsque l’expulsion est nécessaire dans l’intérêt de l’ordre public, ce qui était le cas en l’espèce.
Le Tribunal suprême a de la même façon décidé, dans la ligne de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, que la présomption d’innocence inscrite à l’article 6 de la Convention ne s’appliquait pas aux mesures administratives que sont les décisions de refoulement, qu’une telle décision n’est pas une peine au sens de l’article 7 de la Convention et que les garanties dont doit bénéficier un accusé ne concernent pas les mesures de police administrative.
Enfin à une partie qui invoquait, en se fondant sur l’article 8, une ingérence de l’autorité publique ayant ordonné son refoulement dans sa vie privée et familiale, il a été répondu que cette ingérence était autorisée par ledit article lorsqu’elle est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure nécessaire à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales.
Pour en terminer avec les conséquences concrètes de la mise en application de la Convention je voudrais dire un mot de la visite, au début de l’année 2006, du comité européen pour la prévention de la torture et des peines et traitements inhumains ou dégradants, dit CPT, cette visite faisant suite à l’entrée du traité relatif à ces questions dans l’ordre juridique monégasque. Rappelons que chacun des Etats signataires désigne un membre pour la composition du comité. Celui ci a pour mission, par le moyen de visites, d’aller vérifier sur place que les personnes retenues contre leur volonté dans un lieu tel qu’un commissariat de police, une prison, un établissement psychiatrique et même, dans certains cas, une maison pour personnes âgées, ne sont pas victimes de mauvais traitements, ceux-ci pouvant résulter aussi bien de violences délibérées que des conditions de détention.
A l’issue de chaque visite le comité établit un rapport confidentiel, contenant des critiques et des recommandations, qui est transmis aux autorités de l’Etat concerné. Celui-ci répond en indiquant notamment les mesures qu’il compte prendre pour remédier aux défauts constatés et, dans la très grande majorité des cas, consent à ce que les documents échangés soient publiés. Dans l’hypothèse d’un défaut de coopération le comité peut décider, à la majorité des deux tiers, de faire une déclaration publique.
Il est bien évident que les constatations lors de ces visites et la teneur des recommandations peuvent être très différentes d’un pays à l’autre. Ainsi la situation pénitentiaire varie beaucoup entre les pays qui considèrent que la période de privation de liberté doit être utilisée pour une préparation à la réinsertion sociale du détenu et ceux qui ont hérité encore récemment de systèmes uniquement fondés sur la répression. Quoi qu’il en soit, dans tous les cas les recommandations du CPT, si elles varient dans leur gravité, sont nombreuses.
Monaco n’a pas échappé à la règle d’autant qu’ici une seule visite d’une délégation permet de contrôler l’ensemble des établissements relevant des attributions du CPT, c’est-à-dire tous ceux où sont retenues des personnes contre leur gré.
Les autorités monégasques ont répondu point par point aux recommandations, commentaires et demandes d’information du comité. Il ressort de cette réponse que la plupart des recommandations ont été suivies d’effet, que dans d’autres cas il est apparu impossible ou inopportun de modifier la réglementation ou les pratiques compte tenu notamment des particularités géographiques locales, qu’enfin certaines critiques reposaient sur des informations inexactes.
Nous constatons là encore dans un domaine très proche de l’activité judiciaire, un exemple d’application loyale de la Convention ou des textes qui lui sont liés et de collaboration avec les organismes du Conseil de l’Europe.
***
Au début de cet exposé je me suis interrogé sur les conséquences de l’introduction de la Convention européenne des droits de l’homme dans l’activité législative et judiciaire monégasque. Il est bien entendu que mon propos n’avait pas pour objectif de traiter de manière exhaustive de l’application de la Convention dans ces deux domaines. Une telle étude relèverait d’une thèse ou d’un vaste colloque.
J’ai seulement tenté de démontrer comment grâce aux adaptations entreprises par le législateur et au souci des juges d’appliquer les normes nouvelles, qu’elles soient conventionnelles ou internes, dans leur lettre et leur esprit, les changements nécessaires avaient pu intervenir rapidement mais sans à coups.
Je ne connais pas de pays où l’application de la Convention n’a pas apporté de progrès dans la garantie des droits et libertés de chacun. Il suffit de lire la jurisprudence de la Cour de Strasbourg pour découvrir les manquements des uns ou des autres, manquements que la plus grande majorité des Etats s’appliquent à corriger.
Il en va de la Principauté de Monaco comme des autres pays ayant eux aussi une longue tradition de respect des droits.
Constatons cependant, sans tomber pour autant dans une auto satisfaction béate, qu’ici l’adaptation s’est faite et continue de se faire sans heurts pour le plus grand avantage des institutions et des habitants.
Dans une révolution il y a généralement des gagnants et des perdants, dans une évolution comme celle que nous connaissons les progrès réalisés profitent à tous.
Permettez-moi d’adresser une amicale invitation à mes collègues pour que nous poursuivions dans la même voie.
Avant d’en terminer je voudrais remercier M. le Premier Président de la Cour de révision et Mme François, alors Premier Président de la Cour d’appel, de m’avoir fait l’honneur de me confier cette intervention. Mes remerciements vont aussi à M. le Directeur des Services Judiciaires et à M. le Professeur Renucci pour l’aide qu’ils m’ont apportée. Je tiens également à témoigner ma reconnaissance à Mme Bardy, Greffier en chef, pour sa précieuse collaboration».
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M. Robert Cordas reprenait ensuite la parole :
«M. le Président Beauvois, votre exposé mérite de vifs compliments qu’au nom de la Cour j’ai plaisir à vous adresser.
Vous avez fait une analyse des principaux textes et des décisions jurisprudentielles les plus remarquables qui démontrent que le législateur et le juge monégasques se sont adaptés, en très peu de temps, aux normes Européennes relatives aux droits et libertés.
Loin de manifester réticence voire hostilité, ils ont intégré dans le droit interne et l’interprétation qui en est faite l’essentiel des préceptes supérieurs que la Convention Européenne des Droits de l’Homme impose, et ce, sous le contrôle vigilant des juridictions suprêmes. Il est vrai qu’ils y étaient déjà sensibilisés puisque dès 1911 la Constitution Monégasque comportait une déclaration des Droits de l’Homme et des Libertés, ce qui était à l’époque un cas unique en Europe.
Il était bon de le dire ou de le rappeler comme vous l’avez fait pour éclairer ceux qui considéreraient que tel n’est pas le cas en Principauté.
Trop souvent, le législateur et le juge monégasques ont été observés au travers d’un prisme déformant qui ne laissait apparaître que le seul impératif de la sécurité. Votre exposé rétablit la juste réalité des choses.
Faut-il d’ailleurs rappeler à cet égard que parmi les droits et libertés que la Convention Européenne des Droits de l’Homme entend protéger, figurent en tout premier rang : «le droit à la vie» et «le droit à liberté et à la sûreté».
Il n’y a donc rien de choquant ni d’extravagant à vouloir assurer de façon efficace et dissuasive, la sécurité des personnes et des biens, en sanctionnant comme il convient ceux qui y portent atteinte.
Ne doit-on pas en effet faire en sorte pour citer Pascal que «ce qui est fort soit juste mais aussi que ce qui est juste soit fort.»
Il m’appartient maintenant d’évoquer parmi les évènements marquants de l’année judiciaire écoulée ceux qui nous ont attristés, M. le Procureur Général se réservant de relater ceux qui nous ont réjouis.
En mai 2009, M. le Professeur Roland Drago nous quittait.
Professeur agrégé des facultés de droit, Roland Drago a enseigné à Tunis et à Lille avant d’intégrer, en 1965, la Faculté de Droit de Paris II (Panthéon-Assas). Publiciste éminent, le Professeur Drago a particulièrement excellé dans le domaine du droit administratif où son nom reste lié à un célèbre traité de contentieux et de recours.
A Monaco, Roland Drago a exercé de hautes fonctions judiciaires. Nommé membre du Tribunal suprême en 1975, il en est en effet devenu Vice-Président puis Président, en 1998, succédant à ce siège à d’illustres prédécesseurs tels les Professeurs Louis Trotabas et René-Jean Dupuy. Sous sa présidence, ont été rendues d’importantes décisions qui, faisant jurisprudence, comptent parmi les plus belles pages du droit public monégasque auquel elles ont donné corps. Ainsi, pourra se perpétuer sa mémoire en Principauté.
Titulaire de hautes distinctions françaises et étrangères, le Professeur Drago avait été élevé à la dignité de Grand Officier de l’Ordre de Saint-Charles à l’occasion de la fête nationale de l’année 2000.
Cette année a également été marquée par la disparition de Mme de la Roche.
Juriste éminente elle a été membre de la Cour de Révision où ses qualités humaines et professionnelles étaient reconnues et appréciées de tous.
Elle manquera elle aussi à la Justice de la Principauté.
L’année judiciaire qui se termine a connu des mouvements d’effectifs de magistrats. C’est ainsi que Mme Soileux, Juge au Tribunal de Première Instance, dont les qualités humaines ont été appréciées a rejoint son corps d’origine en France.
Dans quelques jours, M. Cabalé nous quittera puisqu’il a été promu en qualité de Vice-Président au Tribunal de Grande Instance de Nice.
Nous avons eu le plaisir d’accueillir en tout début d’année Judiciaire au Tribunal de Première Instance Mme Humbert, M. Bousseron, Et M. Raymond auxquels nous renouvelons nos compliments très cordiaux.
Très rapidement je dois maintenant rendre compte de l’activité civile des juridictions, M. le Procureur Général ayant le soin d’évoquer l’activité pénale.
La Justice de Paix a rendu toutes activités confondues 87 jugements et 335 ordonnances.
Le Tribunal du Travail a connu une activité soutenue :
- 119 affaires examinées en bureau de conciliation (107 non conciliées) ;
- 82 affaires traitées par le Bureau de Jugement dont 18 ayant donnée lieu à un appel devant le Tribunal de Première Instance qui n’en a totalement infirmée aucune.
Le Tribunal de Première Instance a rendu au total 4954 décisions dont :
- 652 jugements,
- 1014 ordonnances,
- 1040 ordonnances en matière d’accident du travail et 15 décisions touchant aux loyers commerciaux ou d’habitation.
La Cour d’Appel a rendu en matière civile :
- 88 arrêts en chambre du Conseil,
- 127 arrêts en chambre Civile.
Le nombre des affaires en attente d’être jugée est actuellement de 212.
La Cour de Révision a rendu 30 arrêts civils pour 21 l’année précédente. (dont 3 cassations)
Cette activité soutenue de l’ensemble des juridictions est à porter au crédit de l’ensemble des magistrats et fonctionnaires du Greffe dont le travail minutieux et rigoureux est à souligner.
Rien n’aurait non plus été possible sans le concours talentueux du Barreau et sans la coopération efficace des huissiers et des notaires.
Je tiens à saluer à cet égard l’arrivée au Barreau de Me Sarah Filippi nommée avocat stagiaire le 20 janvier dernier et à lui adresser nos plus vifs compliments ainsi qu’à Me Aureglia-Caruso qui a été nommée notaire.
M. le Procureur Général vous avez la parole pour vos réquisitions».
M. le Procureur Général s’exprimait en ces termes :
«M. le Président,
C’est toujours avec le même plaisir que nous profitons de vos enseignements
Haut magistrat, juriste incontesté, vous avez présidé la 3ème chambre civile de la Cour de cassation.
Ici même, et en votre qualité de Vice-Président de la Cour de révision, vous faites bénéficier cette juridiction suprême de vos grandes qualités juridiques et de votre rigueur
Merci d’avoir bien voulu choisir ce thème d’une très grande actualité et également, pour la Principauté, d’une grande acuité,
Il me plaît particulièrement, en cet instant, de me tourner vers M. le Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour lui exprimer - je n’hésite pas à le lui dire - toute notre fierté de le voir participer à cette audience.
Vous nous témoignez ainsi de la plus belle façon votre attachement à des valeurs que la Principauté fait siennes.
Le temps nous manque mais qu’il nous suffise de rappeler quelques textes nationaux pris en 2009 rendant exécutoires par exemple la Convention pour la Protection à l’égard du Traitement Automatisé des Données à Caractère Personnel ou encore la Convention Européenne d’Extradition et enfin s’agissant plus particulièrement de votre Cour le protocole 14bis à la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Toutes ces questions sont bien d’une actualité brûlante - puisque - si je ne me trompe - c’est aujourd’hui que les parlementaires du Conseil de l’Europe doivent décider de l’issue de la procédure de suivi concernant Monaco, avec a priori, semble-t-il, un avis plutôt favorable de l’assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe.
Merci donc, M. le Président et Mme Berro-Lefevre, Juge à la Cour Européenne d’être avec nous en ce jour.
Il est important en effet de souligner combien votre Cour contribue fortement, par son travail d’harmonisation, à favoriser l’évolution de nos droits nationaux.
Et il est tout particulièrement nécessaire de le rappeler cette année 2009, année de son cinquantième anniversaire.
En prenant tout à l’heure mes réquisitions pour l’installation de M. Cordas, je faisais référence aux prescriptions de la loi de 1965 qui détermine notamment la date des audiences de rentrée, selon une organisation très précise, suivant ce que l’on pourrait appeler un rite.
Rite bien spécifique qui marque l’ouverture d’une nouvelle année judiciaire.
Avec le danger immédiatement apparent, celui d’un rite qui tout au long des années, pourrait apparaître comme une routine vide de sens et tomber progressivement dans l’insignifiance.
Il convient impérativement d’éviter cet écueil et de garder à l’esprit cette belle prescription de J.J. Rousseau dans «Emile ou de l’Education» :
«La seule habitude que nous devons prendre est celle de n’en contracter aucune».
En réalité, cet instant est unique pour l’institution judiciaire.
Et cette année, tout particulièrement, en Votre présence, Monseigneur
Car il permet de dresser un état des lieux devant les plus hautes autorités de la Principauté.
Les femmes et les hommes qui composent cette institution n’en sont pas en effet propriétaires, et il apparaît dès lors bien légitime qu’ils établissent régulièrement un bilan des mois écoulés et exposent leurs perspectives.
Oh, bien sûr, nous ne sommes pas très nombreux à faire marcher cette institution pour paraphraser un hymne cher à nos cœurs - bien que tout à fait en proportion avec le nombre d’habitants de la Principauté.
J’irai même jusqu’à dire, continuant de paraphraser ce chant, nous n’apparaissons pas toujours les plus puissants.
Mais nous croyons très fermement en ce que nous faisons et nous veillons à faire en sorte de remplir parfaitement la mission qui nous est confiée.
Y parvenons-nous ? En partie, je crois pouvoir le dire car incontestablement, il serait de mauvaise foi de ne pas constater certaines avancées.
Mais pour autant, nous ne sommes pas gagnés par l’autosatisfaction.
Des avancées tout d’abord : rappelons tout d’abord en exergue que le nombre de plaintes pour l’année écoulée est à peu près identique à celui de l’année dernière : 2.859 contre 2.863.
S’agissant du nombre de poursuites, je peux dire que la réponse pénale atteint les mêmes niveaux que 2008, sachant que celle-ci, ainsi que je l’avais précisé l’année dernière, avait déjà augmenté de 16 % par rapport à 2007.
Avancée, pour ne prendre qu’un seul exemple dans un domaine sur lequel j’avais déjà mis l’accent l’année dernière, je veux parler des délits relatifs à la consultation de sites pédo-pornographiques qui a vu cette année une quasi-disparition puisque nous en dénombrons à peine deux.
Gageons que nos résultats seront encore meilleurs l’année prochaine grâce aux initiatives prises récemment par le Gouvernement, la Direction des Services Judiciaires et l’association Action Innocence avec l’instauration d’un filtrage d’accès à ce type de sites.
De telles actions méritent d’être soulignées plus particulièrement après la signature par Monaco en octobre 2008 de la convention du conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels et alors que nous allons célébrer dans quelques jours le 20ème anniversaire de la Convention des Droits de l’Enfant rendue exécutoire à Monaco le 1er septembre 1993.
L’obligation qui nous est faite de rendre compte de l’activité pénale me conduit à présent à faire état d’une légère augmentation du nombre d’ouvertures d’informations qui se situe pour 2009 à 87 contre 80 en 2008.
Parallèlement, 114 règlements ont été établis.
Mais ce qu’il y a de plus important de noter c’est la nette amélioration de la durée de traitement de ces règlements dont la moyenne depuis janvier 2009 est de moins d’un mois, soit 26 jours exactement.
Le Parquet civil a suivi cette année 795 procédures contre 700, l’année dernière, soit une augmentation de 13 %.
Le Parquet Général a par ailleurs été rendu destinataire de 90 commissions rogatoires internationales, soit une augmentation de 11 %, avec un délai de traitement moyen d’un mois et demi.
57 commissions rogatoires internationales ont été délivrées par Monaco dont 8 en matière de blanchiment.
De même l’activité du Tribunal criminel s’est trouvée renforcée avec 3 dossiers traités, l’année 2010, s’annonçant également de ce point de vue bien fournie.
Le Tribunal correctionnel a prononcé 800 jugements tandis que la Cour d’appel, de son côté, a rendu 60 décisions en chambre du conseil et 54 décisions correctionnelles, ce qui représente un taux d’appel de 7 % contre 10 % l’année dernière.
Cette même Cour a eu à connaître 7 dossiers d’extradition. A ceux-là s’ajoutent 4 demandes formulées par Monaco.
La Cour de révision a été saisie en 2009, en matière pénale, de 45 pourvois et a rendu 37 décisions soit une augmentation de plus de 42 % dont deux cassations.
Une légère augmentation du contentieux est également à constater s’agissant du Tribunal suprême qui a eu à connaître 17 requêtes, dont deux décisions en matière de sursis à exécution, c’est à dire rendues à Juge unique.
Enfin, la maison d’arrêt a procédé à 133 écrous au 28 septembre 2009.
Il convient de souligner que la durée moyenne de détention provisoire s’agissant des mineurs a été de 38 jours et que celle des majeurs a été de 96 jours, délai plus que raisonnable eu égard à la complexité des dossiers concernés.
Sommes-nous pour autant pleinement satisfaits ?
Point d’autosatisfaction ; nous sommes très conscients du chemin et des progrès qu’il nous reste à accomplir,
Notamment dans les domaines suivants :
Celui des vols, des vols simples d’objets de plus en plus répandus tels que MP3, IPOD ou téléphones portables.
Le plus souvent perpétrés par des auteurs de passage à certaines périodes de l’année. Le plus souvent commis du fait de l’inattention des propriétaires.
Je le redis une nouvelle fois, ainsi que le font régulièrement les responsables de la Sûreté Publique : il appartient à chacun de nous de prendre les précautions minimales pour éviter ce genre de désagrément.
En second lieu, des efforts complémentaires doivent être portés en matière économique notamment en matière de lutte contre le blanchiment.
Si le chiffre de 24 procédures en 2009 contre 17 en 2008 doit être relevé, il faut préciser qu’il est constitué exclusivement des signalements Sicfin qui, hélas, le plus souvent, faute de renseignements complémentaires de la part des Etats concernés, ne permettent pas de caractériser ce type d’infraction. Outre les enquêtes actuellement en cours, le nombre d’informations judiciaires ouvertes de ce chef en 2009 est de 5.
Il est inutile de rappeler ici les efforts manifestés par les autorités monégasques en ce domaine.
Ces efforts ont été soulignés, nous le savons, par le Greco et par Moneyval qui ont tous deux considéré que la Principauté dispose d’un cadre juridique suffisant pour lutter en cette matière.
Cela est encore plus vrai aujourd’hui puisque depuis le 23 juillet dernier, Monaco s’est mis en totale conformité avec les dispositifs législatifs internationaux en intégrant des obligations d’identification et de vérification précises, en renforçant le degré de vigilance des organismes financiers et en accentuant le volet répressif.
Ces efforts là, ces projets là, je sais que nous ne pouvons les conduire qu’en rassemblant les énergies déjà mobilisées en ce sens.
«Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et il dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu’à inventer» (G. Berger).
Par avance et pour tout ce que vous faites déjà, j’adresse mes remerciements, tout aussi intensément et sans ordre de gradation :
- à vous, mes chers collègues du siège, pour votre écoute de qualité aux propositions et suggestions que nous exprimons pour notre bien commun : celui de la justice.
- à vous policiers : vous êtes notre bras séculier pour l’exercice de notre police judiciaire. Vous savez combien vous devez lui apporter, au-delà de toute recherche d’efficacité, le souci constant de la rigueur procédurale et une éthique inattaquable,
- à vous membres des professions judiciaires, qui êtes plus que des auxiliaires de justice mais des partenaires avec qui nous partageons le même souci, celui de la prise en considération avant tout de l’intérêt général, celui du justiciable qui demeure notre objectif partagé,
- à vous représentants des différentes administrations dont je salue les directeurs et chefs d’établissements. Votre souci de progresser en maints domaines nous unit et nous réunit,
- remerciements encore, naturels, particuliers, je dirais d’évidence, à vous tous greffiers en chef, greffiers et fonctionnaires de justice pour votre ouvrage quotidien,
- enfin et bien évidemment à vous chers collègues et fonctionnaires du parquet général avec lesquels je partage de si longues journées.
Le ministère public, c’est le devoir impérieux et désintéressé de la défense de l’intérêt général en tous domaines : pénal, civil, commercial ou social.
Pour toutes ces facettes et toute votre énergie constamment déployée dans ces différents domaines, je vous adresse un très cordial et sincère merci.
La tradition me commande de faire état des évènements qui ont marqué la compagnie judiciaire cette année passée.
Outre ceux dont il a été question lors de cette audience, qu’il me soit permis d’ajouter que :
- Mme Catherine Mabrut a été nommée Vice-Président de la Cour d’appel à compter du 21 novembre 2008,
- M. Jean-Jacques Ignacio a été nommé Substitut du Procureur Général à compter du 23 mars 2009,
- M. Michaël Bonnet a été nommé Substitut du Procureur Général à compter du 27 juillet 2009,
- M. Morgan Raymond, a été nommé Juge-suppléant à compter du 5 janvier 2009, fonction qu’il occupe depuis le 27 septembre 2009 après avoir été affecté au Parquet Général pendant plus de neuf mois au Parquet, à la satisfaction de tous.
- Mme Marina Ceyssac a été nommée Conseiller auprès de M. le Directeur des Services Judiciaires à compter du 1er octobre 2009.
A chacun des bénéficiaires de ces nominations nous adressons nos chaleureuses félicitations et nos vœux de réussite dans leurs nouvelles fonctions.
En matière de distinctions honorifiques, d’égales félicitations seront adressées à :
- Maître Didier Escaut, avocat-défenseur qui a été promu officier dans l’Ordre de Saint-Charles ;
Au grade de chevalier :
- M. Louis Balmond, Conseiller d’Etat,
- M. José Chevreau, membre de la Cour de révision,
- M. Gérard Launoy, Premier Juge au Tribunal de première instance qui a réintégré son corps d’origine,
- Mme Béatrice Bardy, Greffier en chef,
Ces promotions et nominations viennent récompenser d’incontestables qualités professionnelles.
M. le Premier Président,
Mme le Vice-Président,
Messieurs les Conseillers,
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j’ai l’honneur de requérir :
- qu’il plaise à la Cour me donner acte de ce qu’il a été satisfait aux prescriptions des articles 51 et 52 de la loi du 25 juillet 1965 portant organisation judiciaire,
- déclarer close l’année judiciaire 2008-2009 et ouverte l’année judiciaire 2009-2010,
- ordonner la reprise des travaux judiciaires,
- me donner acte de mes réquisitions,
- et dire que du tout il sera dressé procès-verbal sur le registre des actes de la Cour d’appel».
M. le Premier Président reprenait alors la parole.
«La Cour,
Faisant droit aux réquisitions de M. le Procureur Général,
- Déclare close l’année judiciaire 2008-2009, et ouverte l’année judiciaire 2009-2010,
- Ordonne la reprise intégrale des travaux de la Cour d’appel et des Tribunaux, partiellement suspendus pendant les vacations,
- Donne acte à M. le Procureur Général de ce qu’il a été satisfait aux prescriptions de la loi du 15 juillet 1965,
- Ordonne que du tout il sera dressé procès verbal sur le registre des actes importants de la Cour d’appel.
Avant de lever cette audience, je tiens à nouveau à Vous remercier Monseigneur pour Votre présence et Votre attention ainsi que les Hautes Autorités et personnalités qui ont bien voulu suivre cette cérémonie.
Je vous convie maintenant, à l’invitation de M. le Directeur des Services Judiciaires, à vous rendre dans la salle des pas perdus pour la réception qui va suivre.
L’audience solennelle est levée».
*
* *
De nombreuses personnalités avaient tenu à assister à cette audience solennelle, aux premiers rangs desquelles on notait :
M. Jean-Paul Proust, Ministre d’Etat et Mme,
M. Michel-Yves Mourou, Président du Conseil de la Couronne,
M. Philippe Narmino, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d’Etat et Madame,
M. Jacques Boisson, Secrétaire d’Etat,
M. Georges Lisimachio, Chef de Cabinet de S.A.S. le Prince,
M. le Colonel John Jayet, Chambellan de S.A.S le Prince,
S.E. M. Georges Grinda, Ministre Plénipotentiaire,
M. et Mme Jean-Paul Costa, Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme et Madame,
S.E. M. Franck Biancheri, Ministre Plénipotentiaire, Conseiller de Gouvernement pour les Relations Extérieures et pour les Affaires Economiques et Financières Internationales,
M. René Novella, Conseiller privé de S.A.S. le Prince,
M. Paul Masseron, Conseiller de Gouvernement pour l’Intérieur,
M. Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement pour l’Equipement, l’Environnement et l’Urbanisme,
M. Jean-Jacques Campana, Conseiller de Gouvernement pour les Affaires Sociales et la Santé,
Mme Sophie Thevenoux, Conseiller de Gouvernement pour les Finances et l’Economie,
M. Franco Mistretta, Ambassadeur d’Italie,
Mme Jaffré-Baron, représentant Mme Odile Remik Adim, Ambassadeur de France à Monaco,
Mme Camille Svara, représentant M. le Maire de Monaco,
M. Richard Milanesio, Conseiller au Cabinet de S.A.S le Prince,
M. Laurent Anselmi, Délégué aux affaires juridiques,
Mme Anne-Marie Boisbouvier Ancian, Conseiller Technique après de S.A.S. le Prince,
M. Hubert Charles, Président du Tribunal Suprême,
Mme Isabelle Berro Lefevre, Juge à la Cour Européenne des Droits de l’Homme,
M. Patrick Titiun, Chef de Cabinet du Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme,
M. James Charrier, Président de la Cour supérieure des comptes,
M. Jean-François Landwerlin, Vice-Président du Conseil d’Etat,
M. Alain Sangiorgio, Membre du Conseil de la Couronne,
M. Pierre Svara, représentant M. le Président du Conseil National,
Le Chanoine César Penzo, Chapelain de la Maison Souveraine,
M. André Garino, Président du Conseil Economique,
M. Luciano Di Noto, Procureur Général près la Cour d’Appel de Gênes,
M. Gianfranco Bonetto, Président de la Cour d’Appel de Gênes,
M. Jacques Lameyre, Président du Tribunal de Grande Instance de Grasse,
M. Jean-Michel Hayat, Président du Tribunal de Grande Instance de Nice,
M. Eric De Montgolfier, Procureur de la République de Nice,
M. Marc Desert, Procureur de la République de Grasse,
Mme François Pons, représentant M. Jean-Pierre Atthenont, Premier Président de la cour d’Appel d’Aix en Provence,
M. Henri Charles, représentant M. Eric Edel, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Nice,
M. Claude Cottalorda, Contrôleur Général des Dépenses,
M. Robert Colle, Secrétaire Général du Ministère d’Etat,
M. Philippe Orengo, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Charles Sacotte, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Baptiste Donnier, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Marie Rainaud, Conseiller d’Etat,
Mme Agnès Puons, Directeur Général du Département des Affaires Sociales et de la Santé,
Mme Mireille Pettiti, Directeur Général du Département des Relations Extérieures,
M. Thierry Orsini, Directeur Général du Département des Finances et de l’Economie,
M. Jean-Luc Van Klaveren, Directeur Général du Département de l’Equipement, de l’Environnement et de l’Urbanisme,
Mme Yvette Lambin-Berti, Commissaire Général chargé de la Direction de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports,
M. François Chantrait, Directeur du Centre de Presse,
M. André Muhlberger, Directeur de la Sûreté Publique,
Mme Muriel Natali-Laure, Administrateur des Domaines,
Mme Catherine Orecchia-Mathyssens, Directeur du Service de l’Expansion Economique,
M. Antoine Dinkel, Directeur des Services Fiscaux,
Docteur Anne Negre, Directeur de l’Action Sanitaire et Sociale,
M. Jean Bissuel, Directeur des Affaires Maritimes,
M. Patrice Cellario, Directeur de la Prospective, de l’Urbanisme et de la Mobilité,
Mme Danielle Mezzana-Ghenassia, Conseiller technique, représentant,
Mme Ariane Picco-Margossian, Directeur du S.I.C.C.F.I.N,
M. Jean-François Renucci, Conseiller aux Droits de l’Homme et aux Libertés Fondamentales,
Mme Martine Provence, Secrétaire Général de la Direction des Services Judiciaires,
Mme Marina Ceyssac, Conseiller auprès du Directeur des Services Judiciaires,
M. Régis Lecuyer, Conservateur du Palais Princier,
M. Christophe Haget, Commissaire Principal, Chef de la Division de police judiciaire,
M. Christian Carpinelli, Commissaire Principal, Chef de la Division de police administrative,
M. Claude Trianon, Commissaire Principal, Chef de la division de police urbaine,
M. Richard Marangoni, Commissaire Principal, Chef de la Division de l’Administration et de la Formation,
M. Michel Sosso, Président de la Commission de Contrôle des Informations Nominatives,
M. Jean-Paul Hamet, Président du Tribunal du Travail,
M. Jacques Wolzok, Vice-Président du Tribunal du Travail,
M. Jean-François Culleyrier, Vice-Président de la Commission de Contrôle des Activités Financières,
M. Philippe Rosselin, Conseiller honoraire de la Cour d’Appel,
M. Jean Currau, Assistant Référendaire,
M. Antoine Montecucco, Greffier en Chef honoraire,
M. Jean Brych, Président de l’Ordre des Experts comptables,
Me Henry Rey, Notaire,
Me Magali Crovetto-Aquilina, Notaire,
Me Nathalie Aureglia-Caruso, Notaire,
M. Maurice Fangier, Receveur Principal des Douanes,
M. Alain Van Den Corput, Commandant Principal-Inspecteur, Chef de la Division de la Police Maritime et aéroportuaire,
M. Pierre Julien, Professeur à la Faculté de Droit et de Sciences Economiques,
Mme Bettina Ragazzoni, Administrateur Judiciaire et syndic,
M. Christian Boisson, Administrateur Judiciaire et syndic,
M. Jean-Paul Samba, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Christian Zabaldano, Directeur de la Maison d’Arrêt,
M. Robert Krommenacker, Directeur adjoint de la Maison d’Arrêt,
Mme Catherine Catanese, Secrétaire du Tribunal du Travail,
Mme Corinne Querci, Assistante sociale à la Direction des Services Judiciaires,
M. Jacques Orecchia, Administrateur judiciaire,
Mme Robert Cordas,
Mme Jean Apollis.
Cette audience a été précédée par la Messe du Saint-Esprit qui a été concélébrée avec l’ensemble du clergé diocésain par Monseigneur Bernard Barsi, Archevêque de Monaco.
A l’issue de la Messe du Saint-Esprit, Son Altesse Sérénissime le Prince, escorté du Colonel John Jayet, Chambellan, étaient accueillis au Palais de Justice par M. Philippe Narmino, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d’Etat.
S.A.S. le Prince Souverain était conduit par le Directeur des Services Judiciaires dans la salle d’audience de la Cour d’Appel où Il prenait place.
L’audience solennelle débutait sous la présidence de Mme Catherine Mabrut, Vice-Président de la Cour d’Appel, qui avait à ses côtés MM. Gérard Foret-Dodelin, Thierry Perriquet, Jean-François Caminade, Conseillers, M. René Vialatte, Conseiller honoraire.
M. Jean Apollis, Premier Président de la Cour de Révision, était accompagné de MM. Roger Beauvois, Vice-Président, José Chevreau, Charles Badi et Jean-Pierre Dumas, Conseillers.
Mme Brigitte Grinda-Gambarini, Président du Tribunal de Première Instance, conduisait les magistrats de sa juridiction :
Mme Muriel Dorato-Chicouras, Vice-Président,
M. Marcel Tastevin, Vice-Président,
M. Bruno Nedelec, Premier Juge d’instruction,
M. Pierre Baron, Juge d’instruction,
M. Jérôme Fougeras-Lavergnolle, Juge d’instruction et juge tutélaire,
Mme Stéphanie Vikström, Juge,
M. Emmanuel Robin, Juge,
M. Florestan Bellinzona, Juge,
M. Thierry Cabalé, Juge
M. Sébastien Biancheri, Juge,
M. Cyril Bousseron, Juge
Mme Michel Humbert, Juge
M. Morgan Raymond, Juge suppléant.
Mlle Magali Ghenassia, Juge de Paix, était également présente.
M. Jacques Raybaud, Procureur Général, représentait le Ministère Public avec à ses côtés, M. Gérard Dubes, Premier Substitut, M. Jean-Jacques Ignacio et M. Mickaël Bonnet, Substituts.
Le plumitif d’audience était tenu par Mme Béatrice Bardy, Greffier en Chef, assistée de Mmes Laura Sparacia et Liliane Beveraggi, Greffiers en Chef adjoint, entourée des greffiers en exercice.
Me Marie-Thérèse Escaut-Marquet et Me Claire Notari occupaient le banc des huissiers.
Me Rémy Brugnetti, Bâtonnier, était accompagné des membres du Barreau.
Assistaient également à cette audience des représentants des notaires, des experts-comptables, des administrateurs judiciaires et syndics.
Après avoir déclaré ouverte l’audience solennelle, Mme le Vice-Président de la Cour d’Appel s’exprimait en ces termes :
«Monseigneur,
Monsieur le Ministre d’État,
Monseigneur l’Archevêque,
Monsieur le Directeur des Services Judiciaires,
Excellences, Mesdames, Messieurs,
Chers Collègues,
Aujourd’hui, les magistrats de la Cour d’appel, du Tribunal de première instance et de la justice de paix sont assemblés pour procéder à l’installation de M. Robert Cordas.
Conscients de leurs devoirs et de la difficulté de leur tâche dans l’exercice du pouvoir judiciaire qu’ils tiennent du Souverain, tous ces magistrats comme aussi l’ensemble de la famille judiciaire sont particulièrement sensibles à l’honneur que vous leur faites, Monseigneur, d’être aujourd’hui à leur côté.
C’est avec l’émotion que nous partageons tous, que je vous exprime, Monseigneur, la respectueuse gratitude que nous inspire votre venue solennelle en ce lieu.
M. le Procureur général, ainsi qu’il est d’usage, nous allons désigner, maintenant, deux magistrats pour accompagner M. Robert Cordas jusque devant la Cour.
Qui désignez-vous à cette fin ?»
«Le Parquet Général désigne M. Gérard Dubes, Premier Substitut du Parquet Général».
«La Cour désigne Jean-François Caminade, Conseiller,
Messieurs, la Cour vous demande de bien vouloir accompagner M. Robert Cordas dans la salle d’audience». (M. Cordas est alors introduit dans la salle d’audience et se place face à la Cour).
«M. le Premier Président veuillez prendre place dans ce fauteuil.
M. le Procureur Général vous avez la parole pour vos réquisitions».
M. le Procureur Général, Jacques Raybaud prenait alors la parole.
«Monseigneur,
L’installation d’un nouveau Premier Président est toujours un moment fort de la vie d’une Cour d’appel.
Lorsque cette installation se fait en présence de Votre Altesse Sérénissime, ce moment devient exceptionnel.
Les magistrats et fonctionnaires de la Cour de révision, du Tribunal suprême, de la Cour d’appel, du Tribunal de première instance et de la Justice de paix sont également rassemblés ici afin de répondre aux prescriptions de la loi relative à l’organisation judiciaire.
A l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire,
Ils sont fiers et honorés de Vous accueillir.
Avec l’ensemble des auxiliaires de justice ici présents, permettez-moi de faire part à Son Altesse de la réelle gratitude que nous inspire Sa présence en ce moment solennel.
Acceptez le témoignage de notre profond respect et de notre entier dévouement.
M. le Ministre d’Etat,
Monseigneur l’Archevêque,
M. le représentant du Conseil National,
M. le Président du Conseil de la Couronne,
M. le Directeur des Services Judiciaires,
M. le Secrétaire d’Etat,
Excellences,
M. le Premier Président et M. le Procureur Général de la Cour d’appel de Gênes,
Messieurs les chefs de juridiction de Nice et de Grasse,
Madame le Vice-Président,
Mesdames, Messieurs,
M. le Premier Président,
dans quelques instants, il va être procédé à votre installation.
Votre arrivée, M. le Premier Président Cordas, signifie d’abord pour nous le départ de Mme Monique François au terme d’un mandat de presque quatre années à la tête de cette Cour qui lui aura permis de démontrer, s’il en était encore besoin, ses talents de juriste éminent et son engagement sans faille pour une justice efficace, moderne et dynamique.
Je me dois bien de l’avouer l’année et demi passée aux cotés de Mme François a été pour moi un réel bonheur.
Trois termes me viennent à l’esprit :
Cohésion,
Respect de l’indépendance de chacun
Et hauteur de vue.
Hauteur de vue d’abord, et très grande élégance, qui ne s’est jamais démentie et qui lui est unanimement reconnue.
Cohésion ensuite : qui a permis à cette Cour de la faire vivre au quotidien dans une action commune ayant pour socle le respect de nos attributions respectives.
Respect de l’indépendance de chacun enfin, qui a rendu possible une atmosphère de convivialité et de grande courtoisie.
Qu’il me soit permis ici de lui adresser au nom de mon Parquet Général une pensée reconnaissante et - pourquoi ne pas le dire - affectueuse.
Bien que vous soyez nouveau venu en Principauté, M. Cordas, l’examen complet de vos hautes fonctions passées permet de se rendre compte que vous y êtes sûrement mieux préparé que quiconque, ayant exercé pendant trente-trois ans dans de grandes juridictions à compétence méditerranéenne si je puis dire, et le plus souvent, à leur tête.
Votre parfaite réussite dans ces postes de responsabilité est la garantie absolue du succès qui vous attend dans vos nouvelles fonctions.
Vos talents y ont été remarqués, non seulement dans le domaine juridictionnel, mais aussi dans celui de la gestion des juridictions, où il convenait de relever certains défis et non des moindres, comme celui de la restauration du Tribunal de Grande Instance de Toulouse qui a été conduite de main de maître.
Je peux l’affirmer ici, c’est vraiment une belle réussite pour l’avoir visité cet été. Mais que d’efforts et d’énergie déployés il vous a fallu pour mener ce projet et vous sachant marin, j’utiliserai volontiers cette métaphore :
Ce navire, vous l’avez mené à bon port, comme tous ceux dont vous avez pris la barre.
Comme l’a dit un de vos adjoints à l’époque : marin avisé, vous l’êtes en mer comme sur terre.
Tous deux magistrats, nous avons prêté le même serment, et je crois pouvoir dire que, bien qu’investis de rôles différents mais complémentaires, nous sommes fidèles à la même éthique et partageons le même idéal, celui d’une justice crédible, attentive, respectueuse des règles de droit qui doit allier la part de l’humain et le goût de la modernité.
Sachez que c’est dans la plus grande confiance et la plus parfaite loyauté avec vous et les magistrats du siège que le Parquet Général exercera ses fonctions.
Mme le Vice-Président, je ne saurais prolonger davantage ce propos.
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j’ai l’honneur de requérir qu’il vous plaise :
- procéder à l’installation de M. Robert Cordas dans ses fonctions de Premier Président,
- me donner acte de mes réquisitions
- et dire que du tout il sera dressé procès-verbal».
Mme le Vice-Président de la Cour d’Appel reprenait la parole :
«Mme le Greffier en chef, veuillez donner lecture de l’ordonnance souveraine de nomination de M. Robert Cordas, et de sa prestation de serment». (Cette lecture est donnée par Mme Béatrice Bardy, Greffier en chef).
Puis, Madame le Vice-Président de la Cour d’appel poursuivait en ces termes :
«Avant de faire droit aux réquisitions de M. le Procureur Général, permettez-moi, M. le Premier Président, de vous souhaiter la bienvenue dans vos nouvelles fonctions.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain vous a appelé à la tête de nos juridictions permanentes, nomination qui consacre une grande carrière de magistrat français.
Vous succédez désormais en qualité de 15ème Premier Président à Madame le Premier Président Monique François.
Comment ne pas évoquer aujourd’hui notre dernier Premier Président, même si elle a exprimé le souhait que nous évitions un tel éloge !
Partagée entre le désir de respecter son souhait et celui de lui rendre un légitime hommage, j’ai donc eu recours à nos archives et reprends à mon compte les propos tenus ici lors de son installation le 24 mars 2006 par mon prédécesseur, M. le Vice-Président Adam.
Témoignant alors de ses qualités d’humanité, de modestie et de générosité sans ostentation, il s’adressait à elle en ces termes : «Dans cette tâche difficile du juge au sein de la collégialité vous vous montrez toujours soucieuse de parvenir à la décision la plus juste, la plus humaine et la plus respectueuse de nos lois, n’ayant jamais épargné à cette fin ni votre temps ni votre peine».
On ne peut mieux dire sinon rappeler son courage face aux épreuves que la vie lui a imposées. Monique François compte de nombreux amis parmi nous. Elle conserve notre amitié et heureusement l’amitié survit à la retraite.
La Cour a poursuivi avec elle le chemin tracé par M. le Premier Président Jean-François Landwerlin, éminent juriste, qui avait su par une jurisprudence novatrice, précéder dans de nombreux domaines les avancées que l’adhésion de Monaco à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales a consacrées.
C’est avec vous, M. le Premier Président, que nous allons désormais poursuivre cette tâche, tâche à laquelle vous êtes particulièrement préparé.
En effet, toute votre carrière témoigne de vos grands talents. Nommé à Quimper le 15 mai 1974 au poste de Juge d’Instruction, vous avez rejoint aux mêmes fonctions le Tribunal de Toulon avant d’être nommé Premier Juge à Grasse le 7 août 1981, puis Vice-Président de ce tribunal.
Nommé Conseiller à la Cour d’appel de Pau en 1986, vous avez ensuite accédé au poste de Président du Tribunal de Toulon en 1993 avant de présider en 2001 aux destinées du Tribunal de Toulouse.
Vous avez, à ce poste, rencontré M. Patrice Davost, ancien Directeur des Services Judiciaires de Monaco et actuel Procureur Général de Toulouse qui, s’excusant de son absence aujourd’hui, a tenu à vous faire connaître par mon intermédiaire combien votre présidence avait été appréciée de tous.
Enfin, vous avez été nommé Premier Président de la Cour d’appel de Bourges, fonctions auxquelles vos éminentes qualités et vos responsabilités antérieures vous conduisaient naturellement.
Vous avez, au cours de votre carrière, eu l’occasion de travailler avec deux des Conseillers de cette Cour, M. Perriquet et M. Forêt-Dodelin qui gardent le meilleur souvenir de leur collaboration avec vous et se réjouissent de votre arrivée.
Vous êtes ainsi déjà en terre connue et dans une région qui vous est chère.
Votre nomination à Monaco, M. le Premier Président, est un honneur pour nous et montre l’intérêt que la France porte à notre justice puisque c’est la première fois qu’un magistrat de votre grade est détaché à des fonctions juridictionnelles dans la Principauté.
Devenant Premier Président de la Cour d’Appel, vous allez renouer avec une activité juridictionnelle dont vos dernières fonctions à la Cour d’Appel de Bourges vous avez quelque temps éloigné.
Il m’appartient, dès lors, de vous présenter brièvement l’activité des juridictions que vous allez présider et ainsi tordre le cou aux clichés réducteurs habituellement véhiculés sur notre justice et ce, encore récemment, par une émission d’une chaîne de télévision grand public.
Certes, nous ne connaissons pas ici les contentieux de masse répétitifs, mais nous embrassons toutes les matières du droit ce qui exige des magistrats une grande polyvalence, des connaissances juridiques étendues et une grande mobilité d’esprit.
La dimension internationale est toujours présente ce qui rend l’exercice judiciaire complexe parfois presque inconfortable mais c’est aussi ce qui en fait, vous le constaterez, tout l’intérêt.
Sous l’autorité naturelle et souriante de Mme Brigitte Gambarini, leur Président, les juges du premier degré produisent des décisions de qualité qui contribuent utilement à la réflexion de la Cour lorsqu’elle est saisie.
Vous serez entouré dans votre tâche par un personnel dont vous avez déjà pu apprécier, depuis votre arrivée, l’efficacité et le dévouement.
Vous exercerez donc ici, M. le Premier Président, en toute sérénité et sachez que la seule pression que vous subirez, c’est celle que nous nous imposons tous pour rendre une justice équilibrée et de qualité.
M. le Premier Président, me faisant l’interprète de tous mes collègues, je vous exprime mes plus vives félicitations.
Sur quoi, la Cour
Déclare M. Robert Cordas, Premier Président, installé dans ses fonctions,
donne acte au Ministère public de ce qu’il a été satisfait à ses réquisitions.
Et ordonne que du tout il sera dressé procès-verbal.
Je vous prie désormais, M. le Premier Président, de rejoindre le fauteuil qui vous est réservé dans cette salle d’audience».
M. le Premier Président Robert Cordas prenait alors la parole.
«Monseigneur,
La présence de Votre Altesse Sérénissime à cette audience solennelle à laquelle vous avez tenu à assister personnellement témoigne, une fois encore, de l’intérêt tout particulier que vous portez à l’œuvre de Justice.
Elle est un signe fort de Votre profond attachement à l’institution judiciaire et au pouvoir judiciaire que Vous incarnez mais dont Vous avez constitutionnellement délégué l’exercice aux magistrats des Cours et Tribunaux de la Principauté.
Cette audience solennelle revêt aujourd’hui un caractère un peu particulier puisqu’elle se déroule en deux temps.
Le premier concerne la cérémonie relative à mon installation dans mes fonctions de Premier Président de la Cour d’appel à laquelle il vient d’être procédé.
Le second, dans quelques instants, sera celui de l’audience solennelle de rentrée judiciaire des Cours et Tribunaux qui constitue l’un des moments importants, de la vie des juridictions.
Ce concours de circonstances qui fait se succéder deux cérémonies qui, en réalité, se confondent en une seule, me vaut l’insigne honneur, Monseigneur, de Votre présence à mon installation.
Je ressens donc encore plus pleinement, à cet instant, la confiance que vous avez bien voulu placer en moi en me désignant pour exercer ces fonctions.
Ces fonctions dont je sais l’exigence des devoirs qu’elles impliquent. J’en mesure l’honneur, j’en mesure tout autant la charge.
Permettez-moi, Monseigneur, de Vous exprimer ma profonde gratitude et de Vous assurer de mon entier dévouement au service de la Justice de la Principauté.
Je suis également très sensible à la présence des Hautes Autorités ici réunies qui, répondant à l’invitation pour la traditionnelle audience solennelle de rentrée, m’ont fait également l’honneur d’assister à mon installation.
M. le Ministre d’Etat,
Monseigneur l’Archevêque,
M. le Directeur des Services Judiciaires,
Excellences, Mesdames, Messieurs,
Mes Chers Collègues,
Je vous remercie de l’accueil que vous avez bien voulu me réserver lors des visites que je vous ai rendues.
Le temps m’a malheureusement manqué pour vous rencontrer tous avant ce jour.
Je ne manquerai pas de m’acquitter avec plaisir de ce devoir dans les semaines qui viennent.
Je veux également saluer toutes les hautes personnalités des pays voisins qui ont pris, un peu de leur temps pour assister à cette cérémonie et nous témoigner ainsi estime et amitié.
M. le Directeur des Services Judiciaires, soyez assuré de mon total dévouement. J’ai été très sensible à la chaleur de votre accueil lorsque vous avez guidé mes premiers pas dans ce Palais de Justice.
M. le Procureur Général vos propos de bienvenue me vont droit au cœur.
Soyez certain de ma totale et loyale collaboration dans la direction de notre Cour d’Appel.
La spontanéité de nos premiers échanges et la détermination commune qui nous anime au service de la Justice de la Principauté sont le gage d’une parfaite entente dont je me réjouis déjà.
Madame le Président Catherine Mabrut, merci à vous aussi pour la qualité de votre accueil.
Votre grande expérience et vos qualités d’éminent juriste sont appréciées de tous et ont justifié votre promotion au rang de vice-Président de la Cour d’appel le 21 novembre 2008. Ces qualités me seront une aide précieuse comme elles l’ont été à Madame le Premier Président Monique François à laquelle il convient de rendre un hommage tout particulier pour le travail minutieux et rigoureux accompli à la tête de cette Cour et plus généralement au sein des juridictions de la Principauté tout au long d’une très brillante carrière. Nous lui souhaitons une longue et paisible retraite.
Mes chers collègues de la Cour, je suis très heureux de pouvoir travailler à vos côtés et de retrouver certains d’entre vous avec lesquels j’ai eu le privilège d’exercer sous d’autres cieux. Nous formerons tous ensemble une équipe soudée au service de la Justice de la Principauté.
En quelques mots je tiens à dire à l’ensemble des professions judiciaires que je suis très heureux de pouvoir œuvrer avec elles en étroite collaboration.
Je serai particulièrement attentif à leurs préoccupations. Je serai à leur écoute afin qu’ensemble nous réfléchissions à des méthodes de travail et des schémas d’organisation propres à faciliter le traitement complet mais rapide des procédures, tant en matière civile qu’en matière pénale.
Je sais pouvoir compter sur la compétence et la disponibilité de mes collègues de la Cour et du Tribunal comme sur celles des agents du Greffe Général dont le dévouement m’apparaît déjà comme exemplaire.
M. le Bâtonnier de l’Ordre des avocats-défenseurs et avocats, le rôle du Barreau est primordial dans la conduite des procédures. Je ne doute pas que nous saurons travailler ensemble pour en faciliter le déroulement harmonieux.
Qu’il me soit enfin permis d’avoir une pensée pour ceux qui n’ont pas pu assister à cette audience mais qui m’ont adressé des messages qui me touchent beaucoup en particulier mes anciens collègues de la Cour d’Appel de Bourges que je n’oublie pas.
J’aurais encore, comme vous l’imaginez bien, beaucoup de choses à vous dire pour exprimer l’émotion et l’honneur que je ressens en prenant mes fonctions.
Mais je ne veux pas davantage empiéter sur le temps qui doit être maintenant consacré à notre traditionnelle audience de rentrée des Cours et Tribunaux qui voit le 1er octobre de chaque année l’ensemble des juridictions réunies pour cette cérémonie solennelle, en présence des plus Hautes Autorités de la Principauté, conformément aux dispositions de l’article 51 de la loi du 15 juillet 1965.
Ce texte dispose également qu’un discours doit être prononcé au cours de cette audience.
M. le Président Roger Beauvois a bien voulu cette année satisfaire à cet usage en choisissant pour thème «Le législateur et le juge monégasques face à la Convention Européenne des droits de l’homme : révolution ou évolution».
Ce sujet allait de soi puisque nous avons le très grand honneur d’accueillir à cette audience M. Jean-Paul Costa Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, accompagnée de Mme Isabelle Berro-Lefevre, magistrat monégasque élue en qualité de Juge à cette Cour.
M. le Président votre présence ici, aujourd’hui, est éminemment symbolique. Elle est ressentie par l’ensemble des magistrats des Cours et Tribunaux de la Principauté comme une marque de reconnaissance à leur égard pour l’œuvre de Justice qu’ils accomplissent.
Soyez très vivement remercié pour l’intérêt qu’en votre qualité «d’ambassadeur» des Droits de l’Homme vous leur manifestez ainsi.
Je donne maintenant la parole à M. le Président Roger Beauvois».
M. Roger Beauvois prononçait alors le discours suivant, intitulé :
LE LEGISLATEUR ET LE JUGE MONEGASQUES FACE A LA CONVENTION EUROPEENNE
DES DROITS DE L’HOMME REVOLUTION OU EVOLUTION ?
«Avant tout je voudrais dire combien je suis sensible à l’honneur qui m’est fait d’intervenir en cette audience solennelle de rentrée dont la tradition est ici plus que séculaire.
L’honneur est évident de prendre la parole en présence du Prince Souverain. C’en est un également de s’adresser au Président de la Cour européenne des droits de l’homme. Les seuls mots qui désignent cette juridiction suffisent à montrer la place primordiale qu’elle occupe dans un domaine essentiel au sein de notre continent tout entier. Enfin, être écouté par les nombreuses autorités qui sont ici présentes ne peut que flatter l’orateur.
Mais comment ne pas redouter aussi de n’être pas à la hauteur de la tâche ? Comment ne pas craindre les erreurs, les omissions ou les approximations hasardeuses dans l’exposé de questions qui touchent à la souveraineté de l’Etat, à son oeuvre législative ou aux activités de la Cour ici représentée par son Président ?
L’expression tellement usée de «redoutable honneur» m’apparaît en ce moment d’une terrible réalité.
L’an dernier, en ces lieux, un jeune magistrat nous avait entretenus brillamment de l’œuvre historique du Prince Louis 1er et plus particulièrement des statuts criminels de 1678. Cette année un autre magistrat que, par euphémisme, nous dirons plus âgé, va, par contraste, tenter d’aborder un thème tourné vers le présent et, plus encore, vers l’avenir, puisqu’il s’agit d’évoquer quelques aspects de l’application de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la Principauté de Monaco.
Ce sujet a été choisi bien sûr en raison de son actualité et de son devenir mais aussi parce que l’expérience monégasque est à bien des égards exemplaire.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, pour reprendre une expression chère à nos avocats, ce choix est également du aux observations faites en d’autres temps et d’autres lieux sur les problèmes d’ajustement des normes et des pratiques nationales avec les principes du droit européen.
Il n’est en réalité pas facile d’introduire dans une législation interne un ensemble de règles aussi fondamentales que celles qui figurent dans la Convention européenne. Même dans les pays où, de tradition, comme c’est ici le cas, les libertés fondamentales étaient respectées, l’apport de la Convention a constitué une telle novation que l’on a pu parler de véritable révolution dans le paysage juridique.
A Monaco deux institutions étaient appelées à affronter en première ligne les effets de la mise en application du traité : le pouvoir législatif, chargé d’adapter les lois aux nouvelles lignes directrices supra nationales, le pouvoir judiciaire, chargé de les appliquer.
Après un bref aperçu du contenu de ces normes il est intéressant de voir comment chacune de ces institutions a su faire face aux impératifs nés de l’adoption du traité.
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La Convention européenne a été signée et ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l’Europe, à Rome, le 4 novembre 1950. Le projet avait été soumis à l’Assemblée consultative entre le 10 août et le 8 septembre 1949. A peu de choses près nous pourrions en commémorer le soixantième anniversaire.
Après avoir été ratifiée par dix pays elle est entrée en vigueur le 3 septembre 1953. Elle lie maintenant 47 Etats membres et a été complétée par 15 protocoles, en y incluant le protocole 14 bis qui ne sera applicable ici qu’à partir du 1er novembre prochain.
La succession de ces protocoles qui sont venus compléter et renforcer les droits garantis par le texte initial montre à quel point cette Convention est un instrument vivant qui s’adapte aux évolutions sociales et politiques et, nous le verrons, d’une application quotidienne dans nos juridictions.
Il n’est pas nécessaire de revenir plus avant sur son historique sauf à rappeler qu’elle est née à la suite des tragiques évènements de la deuxième guerre mondiale qui ont conduit un certain nombre de pays à mettre en place les moyens indispensables pour ne pas retomber dans les actes de barbarie vécus dans la période précédente.
C’était déjà l’objectif de la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée par l’assemblée générale de l’ONU en 1948 et à laquelle se réfère en premier lieu, ce n’est pas un hasard, la Convention européenne.
La seule lecture des titres des premiers articles de celle-ci permet de mieux appréhender les droits et libertés qu’elle entend protéger : droit à la vie, interdiction de la torture, interdiction de l’esclavage et du travail forcé, droit à la liberté et à la sûreté, droit à un procès équitable, pas de peine sans loi, droit au respect de la vie privée et familiale, liberté de pensée, de conscience et de religion, liberté d’expression, de réunion et d’association, droit au mariage, droit à un recours effectif, interdiction de discrimination, interdiction de l’abus de droit, limitation de l’usage des restrictions aux droits.
Parmi les protocoles venus compléter le texte initial notons ceux qui garantissent : la protection de la propriété, le droit à l’instruction, l’interdiction de l’emprisonnent pour dette, la liberté de circulation, l’interdiction de l’expulsion des nationaux et des expulsions collectives d’étrangers, l’abolition de la peine de mort, les garanties procédurales en cas d’expulsion d’étrangers, le droit à un double degré de juridiction en matière pénale, le droit d’indemnisation en cas d’erreur judiciaire, le droit de ne pas être jugé ou puni deux fois pour les mêmes faits, l’égalité entre époux.
Il est difficile de dresser un catalogue plus complet et plus précis des garanties essentielles de chacun dans un Etat de droit.
Pour assurer le respect des engagements souscrits par les Etats signataires la Convention a institué une Cour européenne des droits de l’homme, siégeant à Strasbourg.
Cette juridiction est composée d’un nombre de juges égal à celui des Etats membres et qui sont élus pour six ans par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe sur une liste de trois candidats par pays.
La Cour élit son président, ses vice-présidents, les présidents de chambre, le greffier et ses adjoints.
Elle siège soit en juge unique qui examine essentiellement la recevabilité, soit en comités de trois juges qui peuvent statuer au fond si la question posée fait déjà l’objet d’une jurisprudence bien établie de la Cour, soit en chambres de sept juges qui se prononcent sur la recevabilité et sur le fond pour les requêtes individuelles et, dans tous les cas, sur les requêtes étatiques.
Enfin, si une affaire pendante devant une chambre soulève une question grave ou s’il y a risque de contradiction avec un arrêt antérieur de la Cour, la chambre peut se dessaisir au profit de la grande chambre composée de dix sept juges. En font notamment partie : le Président de la Cour, les Vice-Présidents, les Présidents de chambre.
Il serait trop long d’examiner, voire d’énumérer, tous les domaines dans lesquels la Cour a pu intervenir. Nous reviendrons dans un instant sur son rôle. A ce stade, rappelons simplement que les règles instituées par la Convention sont intégrées dans l’ordre juridique des Etats parties avec, bien souvent, une force supérieure aux lois internes.
Or, fixer les normes qui régissent un pays, notamment en ce qui concerne les droits et garanties des habitants, constitue un aspect essentiel de la souveraineté nationale. L’adhésion à la Convention entraîne donc, sur les points qu’elle concerne, un abandon au moins partiel de cette souveraineté, ce qui n’est pas facile pour un Etat et pour les autorités qui font la loi.
Ceci explique, pour partie, les délais écoulés dans certains pays, entre le projet d’adhérer au traité et sa ratification, c’est-à-dire son application directe assortie du droit de recours individuel.
Si nous prenons l’exemple de Monaco la demande d’admission officielle au Conseil de l’Europe a été présentée le 15 octobre 1998 et les instruments de ratification ont été déposés le 30 novembre 2005, date à laquelle la Convention est entrée en vigueur dans la Principauté.
Entre les modifications qui avaient été demandées par les rapporteurs du Conseil de l’Europe pour permettre l’adhésion, je pense à la révision du traité franco-monégasque par le traité du 24 octobre 2002, ainsi qu’à la révision constitutionnelle du 2 avril 2002, il a donc fallu près de huit ans pour aboutir. Pourtant ces rapporteurs concluaient dès 1999 : «l’ordre juridique de la Principauté de Monaco est en général en mesure de garantir les droits de l’homme tels qu’énoncés par la Convention européenne» et constataient que «d’une manière ou d’une autre, tous les droits énoncés par cette Convention étaient garantis par la Constitution». Il s’agit bien entendu de la Constitution monégasque.
Néanmoins, outre les aménagements préalables à l’adhésion demandés par le Conseil de l’Europe et mis en œuvre par la Principauté, sous réserve du respect des particularités inhérentes à sa situation géographique, démographique et sociale, le législateur a ici anticipé sur l’entrée en vigueur de la Convention ou s’en est très vite inspiré. C’est un trait original qu’il est important de souligner.
A cet égard, il faut d’abord rappeler que la Principauté avait déjà adhéré au pacte international relatif aux droits civils et politiques, dit pacte de New York, rendu exécutoire le 12 février 1998. Or, ce pacte apporte pour partie des garanties de droits que l’on retrouve dans la Convention européenne.
Lors de son adhésion au Conseil de l’Europe la Principauté s’est engagée à signer douze conventions notamment celle qui fait l’objet de cet exposé et six de ses protocoles additionnels ainsi que la convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Elle a en outre souscrit la promesse d’examiner en permanence la compatibilité de sa législation avec la Convention européenne et ses protocoles permanents.
Dans ce domaine le législateur monégasque avait pris les devants. Citons, par exemple, les lois de 2003 sur l’égalité des droits entre l’homme et la femme au sein du foyer ou entre les enfants naturels et les enfants légitimes et la loi du 15 juillet 2005 sur la liberté d’expression publique.
Après la mise en œuvre de la Convention sont venues plusieurs autres lois allant dans le même sens. Je voudrais insister sur l’une d’entre elles, du 26 décembre 2007, qui porte révision du code de procédure pénale et s’inscrit parfaitement dans la lettre et dans l’esprit des dispositions conventionnelles relatives aux droits à la liberté, à la sûreté ainsi qu’au procès équitable.
L’article 1er de la loi crée un nouveau titre du code de procédure pénale qui comporte 12 articles et est consacré à la garde à vue.
Cette mesure, je le rappelle, permet à un officier de police judiciaire de maintenir une personne à sa disposition, pour les nécessités de l’enquête. Si la décision est prise par l’officier de police judiciaire la mesure s’exécute sous le contrôle du procureur général ou d’un juge qui doit en être informé aussitôt et peut la faire cesser à tout moment.
Sans mettre en cause son utilité ni même dans bien des cas sa nécessité et quoique sa durée soit limitée à vingt quatre heures avec possibilité de la prolonger d’une période égale, il ne faut pas sous-estimer le caractère traumatisant que peut revêtir cette mesure de contrainte pour les personnes qui n’en sont pas coutumières, d’autant qu’elle peut être accompagnée d’une fouille à corps, euphémisme qui le plus souvent désigne une fouille à nu, et de la privation de ceinture, lacets ou autres vêtements ou objets considérés comme dangereux pour la personne retenue ou pour des tiers.
N’oublions pas non plus que pour placer une personne en garde à vue, il suffit qu’il existe «une raison plausible de soupçonner qu’elle a commis un crime ou un délit.» L’expression employée : «raison plausible de soupçonner», laisse une large marge d’appréciation et explique pourquoi certaines personnes peuvent être totalement mises hors de cause après un séjour en garde à vue.
C’est pour éviter d’éventuels abus qui, pour d’autres pays ont été sanctionnés par la cour européenne, que la loi monégasque est venue entourer le placement en garde à vue d’un certain nombre de garanties qui résultent pour l’essentiel : du contrôle immédiat de son déroulement par l’autorité judiciaire, Procureur Général ou Juge d’instruction, de la faculté réservée au seul juge des libertés de prolonger la garde à vue au-delà de 24 heures et par ordonnance motivée, de l’obligation pour l’officier de police judiciaire qui notifie la garde à vue de faire connaître à la personne concernée, dans une langue qu’elle comprend, les faits qui font l’objet des investigations sur lesquels elle doit s’expliquer et de la nature de l’infraction, du droit de faire prévenir un proche, d’être examiné par un médecin, enfin, et si je la cite en dernier ce n’est pas, bien au contraire, parce que c’est la moins importante des notifications, du droit de s’entretenir avec un avocat.
D’autres garanties procédurales sont prévues par la loi telles que l’enregistrement audiovisuel des auditions et l’établissement d’un procès verbal détaillant les diverses phases de la mesure.
La loi qui réglemente aussi les interceptions des correspondances par téléphone, plus couramment appelées «les écoutes», ou par communications électroniques, institue également une procédure d’indemnisation pour les personnes placées en détention provisoire et ayant été reconnues non coupables par une décision judiciaire.
Selon les textes, il est statué sur la demande d’indemnité par une commission présidée par le Premier Président de la cour de révision et composée du Premier Président de la cour d’appel, du Président du Tribunal de Première Instance ou de leur représentant et d’un Conseiller d’Etat. Les décisions de cette commission, qui statue en dernier ressort, doivent être motivées.
Enfin, les derniers articles traitent du jugement des personnes poursuivies pour une infraction criminelle et qui ne sont pas présentes à l’audience. Cette procédure nouvelle qui se substitue à l’ancienne contumace est là encore conforme au texte de la Convention et à la jurisprudence de la Cour européenne, je pense sur ce point à la possibilité pour l’avocat de l’accusé d’assurer la défense de celui-ci même s’il est absent.
J’ai sans doute été trop long dans l’analyse pourtant très partielle de cette loi du 26 décembre 2007 mais elle me paraît emblématique des efforts accomplis par la Principauté, pour mettre sa législation en parfaite concordance avec les normes du Conseil de l’Europe, dans le domaine, pourtant sensible en cette période, du respect des garanties fondamentales, y compris pour les auteurs d’infractions, et pour reprendre les termes d’un arrêt de la Cour européenne «spécialement pour les droits de la défense eu égard au rôle éminent que le droit à un procès équitable, … joue dans une société démocratique.»
Face à cette capacité d’adaptation du législateur monégasque les juges ont-ils su être de fidèles interprètes du texte d’application nouvelle pour eux ?
Compte tenu du très petit nombre, sur lequel je reviendrai, de recours concernant la Principauté et qui auraient été déjà jugés, il n’est pas possible de fonder une appréciation sur les arrêts de la Cour européenne. Pourtant la Convention est très souvent invoquée devant nos tribunaux et nombreuses sont leurs décisions qui s’y réfèrent.
Les règles posées par le traité, comme tous les textes normatifs, donnent lieu à interprétation, ce qui a d’ailleurs conduit certains théoriciens du droit à soutenir qu’en réalité c’est le juge qui fait la loi, mais ceci est une autre histoire. Quoi qu’il en soit, en raison de l’application directe de la Convention la conformité à celle-ci d’une décision de justice, voire d’un texte législatif, s’est très vite posée.
La Cour européenne ne pouvant être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes les juridictions nationales ont eu à se prononcer sur des points de droit avant que la Cour de Strasbourg n’en connaisse et il est vite apparu que les interprétations données à chacun de ces niveaux n’étaient pas toujours concordantes. Or il est difficile pour une juridiction nationale qui, de tradition, statuait en dernier ressort, en d’autres termes disait le droit, sans aucune censure possible, de découvrir un jour que désormais certaines de ses décisions peuvent être remises en cause par une juridiction supérieure.
Ajoutons que le renforcement des droits de la défense au nom du principe de l’égalité des armes a pu aboutir à encadrer plus strictement les facultés d’intervention des magistrats.
Que n’a-t-on pu dire alors sur la méconnaissance par les juges de Strasbourg des réalités locales, voire sur l’incapacité d’un juriste de Common Law à comprendre le raisonnement des tribunaux appliquant le droit romano-germanique ou l’inverse ?
Il a fallu parfois, sans reprendre l’expression excessive de «guerre des juges», bien du temps et de la persuasion avant de parvenir, la sagesse aidant, à un véritable «dialogue des juges».
A ma connaissance les magistrats de la Principauté sont parvenus directement à ce stade du sage dialogue comme l’avait fait le législateur. C’est un autre trait particulier qu’il est important de relever.
Mon expérience personnelle se limite ici à la Cour de révision mais je peux affirmer que dans cette juridiction le souci premier a toujours été de prendre en compte la jurisprudence de la Cour de Strasbourg sans mettre en cause sa légitimité et, à défaut de précédent transposable sur une question déterminée de rechercher dans quel sens cette Cour pourrait se prononcer.
Bien que nous ne puissions connaître la teneur des délibérés des autres formations de la Principauté, je pense, à la lecture de leurs décisions, que l’attitude de nos collègues est proche de la nôtre même si, pour autant que l’on puisse le supposer, la première tendance a pu aller vers une approche plus restrictive qui peut trouver sa cause dans une confrontation directe avec les faits.
L’application fidèle de la Convention par les juridictions explique sans doute pourquoi, à ce jour, la très grande majorité des requêtes individuelles contre l’Etat monégasque devant la Cour européenne ont fait l’objet de radiations. Pour les autres, l’une s’est terminée par un désistement et une autre a été déclarée irrecevable pour tardiveté. En définitive une seule condamnation a été prononcée. Elle sanctionne la durée excessive d’une détention provisoire, l’Etat devant réparer le dommage moral subi de ce fait. Dans cette même affaire la cour a écarté l’existence d’un traitement inhumain ou dégradant.
Un survol de la jurisprudence de la cour d’appel, de la cour de révision et du tribunal suprême permet de voir concrètement comment ont réagi ces juridictions.
Dès le 7 avril 2006, soit quelques mois seulement après l’entrée en vigueur du texte, la Cour d’appel a eu à connaître d’un jugement qui avait ordonné la mise en liberté d’une personne détenue depuis six mois et demi et non encore jugée, en faisant directement application de l’article 5 § 3, de la Convention, en ce qu’il est confère à une personne arrêtée le droit d’être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure.
Le 5 juillet suivant un autre arrêt rejetait la communication d’une procédure d’instruction, réclamée en application de l’article 6 de la Convention, qui concerne le droit à un procès équitable, à une personne qui n’était ni visée dans le réquisitoire introductif, ni inculpée, solution reprise plusieurs fois par la suite, la cour donnant ainsi un contour précis à la notion d’accusé bénéficiaire des garanties définies par la Convention.
Il serait trop long d’examiner en détail toute la jurisprudence de la Cour d’appel en la matière. Permettez-moi cependant d’évoquer quelques autres décisions de principe.
Les dispositions les plus souvent invoquées par les parties notamment dans la matière pénale qui est surtout concernée, sont celles de l’article 6 qui vient d’être cité et qui a trait au droit à un procès équitable. A cet égard la Cour d’appel s’est prononcée, par exemple, sur la conformité à ces dispositions de l’impossibilité pour les victimes indirectes d’infractions d’agir en réparation devant la juridiction pénale, l’absence de publicité des débats de la chambre du conseil lorsqu’elle n’a pas à statuer sur le fond, l’irrecevabilité d’un appel formé hors délai par un prévenu, condamné en première instance, la désignation d’un expert alors que celui ci n’était pas sans lien avec les faits poursuivis.
La Cour d’appel a eu également à statuer en mai dernier dans une affaire où il était soutenu qu’une personne ne pouvait valablement faire l’objet d’un mandat d’arrêt décerné par un magistrat du parquet général, celui-ci n’étant ni un juge ni un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires au sens de l’article 5 de la Convention, en raison de son absence d’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif. Ce moyen reprenait les termes d’un arrêt rendu contre la France par la cour européenne mais actuellement remis en cause devant la grande chambre de cette juridiction.
L’arrêt de la Cour d’appel de Monaco faisant l’objet d’un pourvoi en révision, je ne peux le commenter.
Comme dans l’affaire que je viens d’évoquer, la cour de révision a naturellement eu à connaître des mêmes moyens que ceux qui avaient été présentés devant la cour d’appel mais elle a eu aussi à innover.
Ainsi avons-nous estimé que les juges du fond avaient pu condamner un prévenu à une peine d’emprisonnement ferme pour des faits qualifiés de diffamation et injures publiques, sans contrevenir à l’article 10 de la Convention, relatif à la liberté d’expression, en retenant que ce prévenu avait confirmé son intention de troubler la paix publique et d’alimenter dans la population le rejet à l’encontre d’une certaine catégorie de personnes, au-delà du légitime souci d’information et de la liberté d’expression.
En revanche nous avons jugé qu’il était contraire à l’article 6 de renvoyer un inculpé devant la juridiction de jugement, sans que ni lui, ni son avocat n’aient pu avoir connaissance du dossier, encore cet inculpé, résidant à l’étranger, n’aurait-il pas déféré aux convocations du juge d’instruction mais alors qu’il pouvait être entendu par commission rogatoire.
De même la cour de révision a considéré, toujours en application de l’article 6, qu’un inculpé d’origine étrangère mais reconnu comme ayant une certaine connaissance de la langue française était néanmoins fondé à réclamer un interprète pour être soumis à une expertise mentale et psychologique.
Enfin, la cour de révision a donné une interprétation des dispositions de l’article 6, §3, de la Convention selon lesquelles toute personne accusée a droit de se défendre elle-même ou d’avoir l’assistance d’un défenseur de son choix.
Comme il se devait le Tribunal suprême a eu, lui aussi, à répondre à des moyens se référant à la Convention européenne. Il apparaît que le problème s’est posé principalement dans des affaires relatives à des refoulements d’étrangers.
Ainsi a été invoqué l’article premier du protocole n° 7, lequel précise qu’un étranger ne peut être expulsé sans avoir eu la possibilité de faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion, de faire examiner son cas et de se faire représenter à ces fins devant l’autorité compétente.
A ce moyen, soulevé par une personne en situation irrégulière, la haute juridiction a pu opposer que les dispositions du même article réservent les garanties précédemment rappelées aux étrangers résidant régulièrement sur le territoire de l’Etat d’expulsion. Dans d’autres affaires il a également été jugé que, toujours selon le même article, l’étranger peut être expulsé avant l’exercice des droits dont il s’agit, lorsque l’expulsion est nécessaire dans l’intérêt de l’ordre public, ce qui était le cas en l’espèce.
Le Tribunal suprême a de la même façon décidé, dans la ligne de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, que la présomption d’innocence inscrite à l’article 6 de la Convention ne s’appliquait pas aux mesures administratives que sont les décisions de refoulement, qu’une telle décision n’est pas une peine au sens de l’article 7 de la Convention et que les garanties dont doit bénéficier un accusé ne concernent pas les mesures de police administrative.
Enfin à une partie qui invoquait, en se fondant sur l’article 8, une ingérence de l’autorité publique ayant ordonné son refoulement dans sa vie privée et familiale, il a été répondu que cette ingérence était autorisée par ledit article lorsqu’elle est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure nécessaire à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales.
Pour en terminer avec les conséquences concrètes de la mise en application de la Convention je voudrais dire un mot de la visite, au début de l’année 2006, du comité européen pour la prévention de la torture et des peines et traitements inhumains ou dégradants, dit CPT, cette visite faisant suite à l’entrée du traité relatif à ces questions dans l’ordre juridique monégasque. Rappelons que chacun des Etats signataires désigne un membre pour la composition du comité. Celui ci a pour mission, par le moyen de visites, d’aller vérifier sur place que les personnes retenues contre leur volonté dans un lieu tel qu’un commissariat de police, une prison, un établissement psychiatrique et même, dans certains cas, une maison pour personnes âgées, ne sont pas victimes de mauvais traitements, ceux-ci pouvant résulter aussi bien de violences délibérées que des conditions de détention.
A l’issue de chaque visite le comité établit un rapport confidentiel, contenant des critiques et des recommandations, qui est transmis aux autorités de l’Etat concerné. Celui-ci répond en indiquant notamment les mesures qu’il compte prendre pour remédier aux défauts constatés et, dans la très grande majorité des cas, consent à ce que les documents échangés soient publiés. Dans l’hypothèse d’un défaut de coopération le comité peut décider, à la majorité des deux tiers, de faire une déclaration publique.
Il est bien évident que les constatations lors de ces visites et la teneur des recommandations peuvent être très différentes d’un pays à l’autre. Ainsi la situation pénitentiaire varie beaucoup entre les pays qui considèrent que la période de privation de liberté doit être utilisée pour une préparation à la réinsertion sociale du détenu et ceux qui ont hérité encore récemment de systèmes uniquement fondés sur la répression. Quoi qu’il en soit, dans tous les cas les recommandations du CPT, si elles varient dans leur gravité, sont nombreuses.
Monaco n’a pas échappé à la règle d’autant qu’ici une seule visite d’une délégation permet de contrôler l’ensemble des établissements relevant des attributions du CPT, c’est-à-dire tous ceux où sont retenues des personnes contre leur gré.
Les autorités monégasques ont répondu point par point aux recommandations, commentaires et demandes d’information du comité. Il ressort de cette réponse que la plupart des recommandations ont été suivies d’effet, que dans d’autres cas il est apparu impossible ou inopportun de modifier la réglementation ou les pratiques compte tenu notamment des particularités géographiques locales, qu’enfin certaines critiques reposaient sur des informations inexactes.
Nous constatons là encore dans un domaine très proche de l’activité judiciaire, un exemple d’application loyale de la Convention ou des textes qui lui sont liés et de collaboration avec les organismes du Conseil de l’Europe.
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Au début de cet exposé je me suis interrogé sur les conséquences de l’introduction de la Convention européenne des droits de l’homme dans l’activité législative et judiciaire monégasque. Il est bien entendu que mon propos n’avait pas pour objectif de traiter de manière exhaustive de l’application de la Convention dans ces deux domaines. Une telle étude relèverait d’une thèse ou d’un vaste colloque.
J’ai seulement tenté de démontrer comment grâce aux adaptations entreprises par le législateur et au souci des juges d’appliquer les normes nouvelles, qu’elles soient conventionnelles ou internes, dans leur lettre et leur esprit, les changements nécessaires avaient pu intervenir rapidement mais sans à coups.
Je ne connais pas de pays où l’application de la Convention n’a pas apporté de progrès dans la garantie des droits et libertés de chacun. Il suffit de lire la jurisprudence de la Cour de Strasbourg pour découvrir les manquements des uns ou des autres, manquements que la plus grande majorité des Etats s’appliquent à corriger.
Il en va de la Principauté de Monaco comme des autres pays ayant eux aussi une longue tradition de respect des droits.
Constatons cependant, sans tomber pour autant dans une auto satisfaction béate, qu’ici l’adaptation s’est faite et continue de se faire sans heurts pour le plus grand avantage des institutions et des habitants.
Dans une révolution il y a généralement des gagnants et des perdants, dans une évolution comme celle que nous connaissons les progrès réalisés profitent à tous.
Permettez-moi d’adresser une amicale invitation à mes collègues pour que nous poursuivions dans la même voie.
Avant d’en terminer je voudrais remercier M. le Premier Président de la Cour de révision et Mme François, alors Premier Président de la Cour d’appel, de m’avoir fait l’honneur de me confier cette intervention. Mes remerciements vont aussi à M. le Directeur des Services Judiciaires et à M. le Professeur Renucci pour l’aide qu’ils m’ont apportée. Je tiens également à témoigner ma reconnaissance à Mme Bardy, Greffier en chef, pour sa précieuse collaboration».
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M. Robert Cordas reprenait ensuite la parole :
«M. le Président Beauvois, votre exposé mérite de vifs compliments qu’au nom de la Cour j’ai plaisir à vous adresser.
Vous avez fait une analyse des principaux textes et des décisions jurisprudentielles les plus remarquables qui démontrent que le législateur et le juge monégasques se sont adaptés, en très peu de temps, aux normes Européennes relatives aux droits et libertés.
Loin de manifester réticence voire hostilité, ils ont intégré dans le droit interne et l’interprétation qui en est faite l’essentiel des préceptes supérieurs que la Convention Européenne des Droits de l’Homme impose, et ce, sous le contrôle vigilant des juridictions suprêmes. Il est vrai qu’ils y étaient déjà sensibilisés puisque dès 1911 la Constitution Monégasque comportait une déclaration des Droits de l’Homme et des Libertés, ce qui était à l’époque un cas unique en Europe.
Il était bon de le dire ou de le rappeler comme vous l’avez fait pour éclairer ceux qui considéreraient que tel n’est pas le cas en Principauté.
Trop souvent, le législateur et le juge monégasques ont été observés au travers d’un prisme déformant qui ne laissait apparaître que le seul impératif de la sécurité. Votre exposé rétablit la juste réalité des choses.
Faut-il d’ailleurs rappeler à cet égard que parmi les droits et libertés que la Convention Européenne des Droits de l’Homme entend protéger, figurent en tout premier rang : «le droit à la vie» et «le droit à liberté et à la sûreté».
Il n’y a donc rien de choquant ni d’extravagant à vouloir assurer de façon efficace et dissuasive, la sécurité des personnes et des biens, en sanctionnant comme il convient ceux qui y portent atteinte.
Ne doit-on pas en effet faire en sorte pour citer Pascal que «ce qui est fort soit juste mais aussi que ce qui est juste soit fort.»
Il m’appartient maintenant d’évoquer parmi les évènements marquants de l’année judiciaire écoulée ceux qui nous ont attristés, M. le Procureur Général se réservant de relater ceux qui nous ont réjouis.
En mai 2009, M. le Professeur Roland Drago nous quittait.
Professeur agrégé des facultés de droit, Roland Drago a enseigné à Tunis et à Lille avant d’intégrer, en 1965, la Faculté de Droit de Paris II (Panthéon-Assas). Publiciste éminent, le Professeur Drago a particulièrement excellé dans le domaine du droit administratif où son nom reste lié à un célèbre traité de contentieux et de recours.
A Monaco, Roland Drago a exercé de hautes fonctions judiciaires. Nommé membre du Tribunal suprême en 1975, il en est en effet devenu Vice-Président puis Président, en 1998, succédant à ce siège à d’illustres prédécesseurs tels les Professeurs Louis Trotabas et René-Jean Dupuy. Sous sa présidence, ont été rendues d’importantes décisions qui, faisant jurisprudence, comptent parmi les plus belles pages du droit public monégasque auquel elles ont donné corps. Ainsi, pourra se perpétuer sa mémoire en Principauté.
Titulaire de hautes distinctions françaises et étrangères, le Professeur Drago avait été élevé à la dignité de Grand Officier de l’Ordre de Saint-Charles à l’occasion de la fête nationale de l’année 2000.
Cette année a également été marquée par la disparition de Mme de la Roche.
Juriste éminente elle a été membre de la Cour de Révision où ses qualités humaines et professionnelles étaient reconnues et appréciées de tous.
Elle manquera elle aussi à la Justice de la Principauté.
L’année judiciaire qui se termine a connu des mouvements d’effectifs de magistrats. C’est ainsi que Mme Soileux, Juge au Tribunal de Première Instance, dont les qualités humaines ont été appréciées a rejoint son corps d’origine en France.
Dans quelques jours, M. Cabalé nous quittera puisqu’il a été promu en qualité de Vice-Président au Tribunal de Grande Instance de Nice.
Nous avons eu le plaisir d’accueillir en tout début d’année Judiciaire au Tribunal de Première Instance Mme Humbert, M. Bousseron, Et M. Raymond auxquels nous renouvelons nos compliments très cordiaux.
Très rapidement je dois maintenant rendre compte de l’activité civile des juridictions, M. le Procureur Général ayant le soin d’évoquer l’activité pénale.
La Justice de Paix a rendu toutes activités confondues 87 jugements et 335 ordonnances.
Le Tribunal du Travail a connu une activité soutenue :
- 119 affaires examinées en bureau de conciliation (107 non conciliées) ;
- 82 affaires traitées par le Bureau de Jugement dont 18 ayant donnée lieu à un appel devant le Tribunal de Première Instance qui n’en a totalement infirmée aucune.
Le Tribunal de Première Instance a rendu au total 4954 décisions dont :
- 652 jugements,
- 1014 ordonnances,
- 1040 ordonnances en matière d’accident du travail et 15 décisions touchant aux loyers commerciaux ou d’habitation.
La Cour d’Appel a rendu en matière civile :
- 88 arrêts en chambre du Conseil,
- 127 arrêts en chambre Civile.
Le nombre des affaires en attente d’être jugée est actuellement de 212.
La Cour de Révision a rendu 30 arrêts civils pour 21 l’année précédente. (dont 3 cassations)
Cette activité soutenue de l’ensemble des juridictions est à porter au crédit de l’ensemble des magistrats et fonctionnaires du Greffe dont le travail minutieux et rigoureux est à souligner.
Rien n’aurait non plus été possible sans le concours talentueux du Barreau et sans la coopération efficace des huissiers et des notaires.
Je tiens à saluer à cet égard l’arrivée au Barreau de Me Sarah Filippi nommée avocat stagiaire le 20 janvier dernier et à lui adresser nos plus vifs compliments ainsi qu’à Me Aureglia-Caruso qui a été nommée notaire.
M. le Procureur Général vous avez la parole pour vos réquisitions».
M. le Procureur Général s’exprimait en ces termes :
«M. le Président,
C’est toujours avec le même plaisir que nous profitons de vos enseignements
Haut magistrat, juriste incontesté, vous avez présidé la 3ème chambre civile de la Cour de cassation.
Ici même, et en votre qualité de Vice-Président de la Cour de révision, vous faites bénéficier cette juridiction suprême de vos grandes qualités juridiques et de votre rigueur
Merci d’avoir bien voulu choisir ce thème d’une très grande actualité et également, pour la Principauté, d’une grande acuité,
Il me plaît particulièrement, en cet instant, de me tourner vers M. le Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour lui exprimer - je n’hésite pas à le lui dire - toute notre fierté de le voir participer à cette audience.
Vous nous témoignez ainsi de la plus belle façon votre attachement à des valeurs que la Principauté fait siennes.
Le temps nous manque mais qu’il nous suffise de rappeler quelques textes nationaux pris en 2009 rendant exécutoires par exemple la Convention pour la Protection à l’égard du Traitement Automatisé des Données à Caractère Personnel ou encore la Convention Européenne d’Extradition et enfin s’agissant plus particulièrement de votre Cour le protocole 14bis à la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Toutes ces questions sont bien d’une actualité brûlante - puisque - si je ne me trompe - c’est aujourd’hui que les parlementaires du Conseil de l’Europe doivent décider de l’issue de la procédure de suivi concernant Monaco, avec a priori, semble-t-il, un avis plutôt favorable de l’assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe.
Merci donc, M. le Président et Mme Berro-Lefevre, Juge à la Cour Européenne d’être avec nous en ce jour.
Il est important en effet de souligner combien votre Cour contribue fortement, par son travail d’harmonisation, à favoriser l’évolution de nos droits nationaux.
Et il est tout particulièrement nécessaire de le rappeler cette année 2009, année de son cinquantième anniversaire.
En prenant tout à l’heure mes réquisitions pour l’installation de M. Cordas, je faisais référence aux prescriptions de la loi de 1965 qui détermine notamment la date des audiences de rentrée, selon une organisation très précise, suivant ce que l’on pourrait appeler un rite.
Rite bien spécifique qui marque l’ouverture d’une nouvelle année judiciaire.
Avec le danger immédiatement apparent, celui d’un rite qui tout au long des années, pourrait apparaître comme une routine vide de sens et tomber progressivement dans l’insignifiance.
Il convient impérativement d’éviter cet écueil et de garder à l’esprit cette belle prescription de J.J. Rousseau dans «Emile ou de l’Education» :
«La seule habitude que nous devons prendre est celle de n’en contracter aucune».
En réalité, cet instant est unique pour l’institution judiciaire.
Et cette année, tout particulièrement, en Votre présence, Monseigneur
Car il permet de dresser un état des lieux devant les plus hautes autorités de la Principauté.
Les femmes et les hommes qui composent cette institution n’en sont pas en effet propriétaires, et il apparaît dès lors bien légitime qu’ils établissent régulièrement un bilan des mois écoulés et exposent leurs perspectives.
Oh, bien sûr, nous ne sommes pas très nombreux à faire marcher cette institution pour paraphraser un hymne cher à nos cœurs - bien que tout à fait en proportion avec le nombre d’habitants de la Principauté.
J’irai même jusqu’à dire, continuant de paraphraser ce chant, nous n’apparaissons pas toujours les plus puissants.
Mais nous croyons très fermement en ce que nous faisons et nous veillons à faire en sorte de remplir parfaitement la mission qui nous est confiée.
Y parvenons-nous ? En partie, je crois pouvoir le dire car incontestablement, il serait de mauvaise foi de ne pas constater certaines avancées.
Mais pour autant, nous ne sommes pas gagnés par l’autosatisfaction.
Des avancées tout d’abord : rappelons tout d’abord en exergue que le nombre de plaintes pour l’année écoulée est à peu près identique à celui de l’année dernière : 2.859 contre 2.863.
S’agissant du nombre de poursuites, je peux dire que la réponse pénale atteint les mêmes niveaux que 2008, sachant que celle-ci, ainsi que je l’avais précisé l’année dernière, avait déjà augmenté de 16 % par rapport à 2007.
Avancée, pour ne prendre qu’un seul exemple dans un domaine sur lequel j’avais déjà mis l’accent l’année dernière, je veux parler des délits relatifs à la consultation de sites pédo-pornographiques qui a vu cette année une quasi-disparition puisque nous en dénombrons à peine deux.
Gageons que nos résultats seront encore meilleurs l’année prochaine grâce aux initiatives prises récemment par le Gouvernement, la Direction des Services Judiciaires et l’association Action Innocence avec l’instauration d’un filtrage d’accès à ce type de sites.
De telles actions méritent d’être soulignées plus particulièrement après la signature par Monaco en octobre 2008 de la convention du conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels et alors que nous allons célébrer dans quelques jours le 20ème anniversaire de la Convention des Droits de l’Enfant rendue exécutoire à Monaco le 1er septembre 1993.
L’obligation qui nous est faite de rendre compte de l’activité pénale me conduit à présent à faire état d’une légère augmentation du nombre d’ouvertures d’informations qui se situe pour 2009 à 87 contre 80 en 2008.
Parallèlement, 114 règlements ont été établis.
Mais ce qu’il y a de plus important de noter c’est la nette amélioration de la durée de traitement de ces règlements dont la moyenne depuis janvier 2009 est de moins d’un mois, soit 26 jours exactement.
Le Parquet civil a suivi cette année 795 procédures contre 700, l’année dernière, soit une augmentation de 13 %.
Le Parquet Général a par ailleurs été rendu destinataire de 90 commissions rogatoires internationales, soit une augmentation de 11 %, avec un délai de traitement moyen d’un mois et demi.
57 commissions rogatoires internationales ont été délivrées par Monaco dont 8 en matière de blanchiment.
De même l’activité du Tribunal criminel s’est trouvée renforcée avec 3 dossiers traités, l’année 2010, s’annonçant également de ce point de vue bien fournie.
Le Tribunal correctionnel a prononcé 800 jugements tandis que la Cour d’appel, de son côté, a rendu 60 décisions en chambre du conseil et 54 décisions correctionnelles, ce qui représente un taux d’appel de 7 % contre 10 % l’année dernière.
Cette même Cour a eu à connaître 7 dossiers d’extradition. A ceux-là s’ajoutent 4 demandes formulées par Monaco.
La Cour de révision a été saisie en 2009, en matière pénale, de 45 pourvois et a rendu 37 décisions soit une augmentation de plus de 42 % dont deux cassations.
Une légère augmentation du contentieux est également à constater s’agissant du Tribunal suprême qui a eu à connaître 17 requêtes, dont deux décisions en matière de sursis à exécution, c’est à dire rendues à Juge unique.
Enfin, la maison d’arrêt a procédé à 133 écrous au 28 septembre 2009.
Il convient de souligner que la durée moyenne de détention provisoire s’agissant des mineurs a été de 38 jours et que celle des majeurs a été de 96 jours, délai plus que raisonnable eu égard à la complexité des dossiers concernés.
Sommes-nous pour autant pleinement satisfaits ?
Point d’autosatisfaction ; nous sommes très conscients du chemin et des progrès qu’il nous reste à accomplir,
Notamment dans les domaines suivants :
Celui des vols, des vols simples d’objets de plus en plus répandus tels que MP3, IPOD ou téléphones portables.
Le plus souvent perpétrés par des auteurs de passage à certaines périodes de l’année. Le plus souvent commis du fait de l’inattention des propriétaires.
Je le redis une nouvelle fois, ainsi que le font régulièrement les responsables de la Sûreté Publique : il appartient à chacun de nous de prendre les précautions minimales pour éviter ce genre de désagrément.
En second lieu, des efforts complémentaires doivent être portés en matière économique notamment en matière de lutte contre le blanchiment.
Si le chiffre de 24 procédures en 2009 contre 17 en 2008 doit être relevé, il faut préciser qu’il est constitué exclusivement des signalements Sicfin qui, hélas, le plus souvent, faute de renseignements complémentaires de la part des Etats concernés, ne permettent pas de caractériser ce type d’infraction. Outre les enquêtes actuellement en cours, le nombre d’informations judiciaires ouvertes de ce chef en 2009 est de 5.
Il est inutile de rappeler ici les efforts manifestés par les autorités monégasques en ce domaine.
Ces efforts ont été soulignés, nous le savons, par le Greco et par Moneyval qui ont tous deux considéré que la Principauté dispose d’un cadre juridique suffisant pour lutter en cette matière.
Cela est encore plus vrai aujourd’hui puisque depuis le 23 juillet dernier, Monaco s’est mis en totale conformité avec les dispositifs législatifs internationaux en intégrant des obligations d’identification et de vérification précises, en renforçant le degré de vigilance des organismes financiers et en accentuant le volet répressif.
Ces efforts là, ces projets là, je sais que nous ne pouvons les conduire qu’en rassemblant les énergies déjà mobilisées en ce sens.
«Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et il dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu’à inventer» (G. Berger).
Par avance et pour tout ce que vous faites déjà, j’adresse mes remerciements, tout aussi intensément et sans ordre de gradation :
- à vous, mes chers collègues du siège, pour votre écoute de qualité aux propositions et suggestions que nous exprimons pour notre bien commun : celui de la justice.
- à vous policiers : vous êtes notre bras séculier pour l’exercice de notre police judiciaire. Vous savez combien vous devez lui apporter, au-delà de toute recherche d’efficacité, le souci constant de la rigueur procédurale et une éthique inattaquable,
- à vous membres des professions judiciaires, qui êtes plus que des auxiliaires de justice mais des partenaires avec qui nous partageons le même souci, celui de la prise en considération avant tout de l’intérêt général, celui du justiciable qui demeure notre objectif partagé,
- à vous représentants des différentes administrations dont je salue les directeurs et chefs d’établissements. Votre souci de progresser en maints domaines nous unit et nous réunit,
- remerciements encore, naturels, particuliers, je dirais d’évidence, à vous tous greffiers en chef, greffiers et fonctionnaires de justice pour votre ouvrage quotidien,
- enfin et bien évidemment à vous chers collègues et fonctionnaires du parquet général avec lesquels je partage de si longues journées.
Le ministère public, c’est le devoir impérieux et désintéressé de la défense de l’intérêt général en tous domaines : pénal, civil, commercial ou social.
Pour toutes ces facettes et toute votre énergie constamment déployée dans ces différents domaines, je vous adresse un très cordial et sincère merci.
La tradition me commande de faire état des évènements qui ont marqué la compagnie judiciaire cette année passée.
Outre ceux dont il a été question lors de cette audience, qu’il me soit permis d’ajouter que :
- Mme Catherine Mabrut a été nommée Vice-Président de la Cour d’appel à compter du 21 novembre 2008,
- M. Jean-Jacques Ignacio a été nommé Substitut du Procureur Général à compter du 23 mars 2009,
- M. Michaël Bonnet a été nommé Substitut du Procureur Général à compter du 27 juillet 2009,
- M. Morgan Raymond, a été nommé Juge-suppléant à compter du 5 janvier 2009, fonction qu’il occupe depuis le 27 septembre 2009 après avoir été affecté au Parquet Général pendant plus de neuf mois au Parquet, à la satisfaction de tous.
- Mme Marina Ceyssac a été nommée Conseiller auprès de M. le Directeur des Services Judiciaires à compter du 1er octobre 2009.
A chacun des bénéficiaires de ces nominations nous adressons nos chaleureuses félicitations et nos vœux de réussite dans leurs nouvelles fonctions.
En matière de distinctions honorifiques, d’égales félicitations seront adressées à :
- Maître Didier Escaut, avocat-défenseur qui a été promu officier dans l’Ordre de Saint-Charles ;
Au grade de chevalier :
- M. Louis Balmond, Conseiller d’Etat,
- M. José Chevreau, membre de la Cour de révision,
- M. Gérard Launoy, Premier Juge au Tribunal de première instance qui a réintégré son corps d’origine,
- Mme Béatrice Bardy, Greffier en chef,
Ces promotions et nominations viennent récompenser d’incontestables qualités professionnelles.
M. le Premier Président,
Mme le Vice-Président,
Messieurs les Conseillers,
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j’ai l’honneur de requérir :
- qu’il plaise à la Cour me donner acte de ce qu’il a été satisfait aux prescriptions des articles 51 et 52 de la loi du 25 juillet 1965 portant organisation judiciaire,
- déclarer close l’année judiciaire 2008-2009 et ouverte l’année judiciaire 2009-2010,
- ordonner la reprise des travaux judiciaires,
- me donner acte de mes réquisitions,
- et dire que du tout il sera dressé procès-verbal sur le registre des actes de la Cour d’appel».
M. le Premier Président reprenait alors la parole.
«La Cour,
Faisant droit aux réquisitions de M. le Procureur Général,
- Déclare close l’année judiciaire 2008-2009, et ouverte l’année judiciaire 2009-2010,
- Ordonne la reprise intégrale des travaux de la Cour d’appel et des Tribunaux, partiellement suspendus pendant les vacations,
- Donne acte à M. le Procureur Général de ce qu’il a été satisfait aux prescriptions de la loi du 15 juillet 1965,
- Ordonne que du tout il sera dressé procès verbal sur le registre des actes importants de la Cour d’appel.
Avant de lever cette audience, je tiens à nouveau à Vous remercier Monseigneur pour Votre présence et Votre attention ainsi que les Hautes Autorités et personnalités qui ont bien voulu suivre cette cérémonie.
Je vous convie maintenant, à l’invitation de M. le Directeur des Services Judiciaires, à vous rendre dans la salle des pas perdus pour la réception qui va suivre.
L’audience solennelle est levée».
*
* *
De nombreuses personnalités avaient tenu à assister à cette audience solennelle, aux premiers rangs desquelles on notait :
M. Jean-Paul Proust, Ministre d’Etat et Mme,
M. Michel-Yves Mourou, Président du Conseil de la Couronne,
M. Philippe Narmino, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d’Etat et Madame,
M. Jacques Boisson, Secrétaire d’Etat,
M. Georges Lisimachio, Chef de Cabinet de S.A.S. le Prince,
M. le Colonel John Jayet, Chambellan de S.A.S le Prince,
S.E. M. Georges Grinda, Ministre Plénipotentiaire,
M. et Mme Jean-Paul Costa, Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme et Madame,
S.E. M. Franck Biancheri, Ministre Plénipotentiaire, Conseiller de Gouvernement pour les Relations Extérieures et pour les Affaires Economiques et Financières Internationales,
M. René Novella, Conseiller privé de S.A.S. le Prince,
M. Paul Masseron, Conseiller de Gouvernement pour l’Intérieur,
M. Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement pour l’Equipement, l’Environnement et l’Urbanisme,
M. Jean-Jacques Campana, Conseiller de Gouvernement pour les Affaires Sociales et la Santé,
Mme Sophie Thevenoux, Conseiller de Gouvernement pour les Finances et l’Economie,
M. Franco Mistretta, Ambassadeur d’Italie,
Mme Jaffré-Baron, représentant Mme Odile Remik Adim, Ambassadeur de France à Monaco,
Mme Camille Svara, représentant M. le Maire de Monaco,
M. Richard Milanesio, Conseiller au Cabinet de S.A.S le Prince,
M. Laurent Anselmi, Délégué aux affaires juridiques,
Mme Anne-Marie Boisbouvier Ancian, Conseiller Technique après de S.A.S. le Prince,
M. Hubert Charles, Président du Tribunal Suprême,
Mme Isabelle Berro Lefevre, Juge à la Cour Européenne des Droits de l’Homme,
M. Patrick Titiun, Chef de Cabinet du Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme,
M. James Charrier, Président de la Cour supérieure des comptes,
M. Jean-François Landwerlin, Vice-Président du Conseil d’Etat,
M. Alain Sangiorgio, Membre du Conseil de la Couronne,
M. Pierre Svara, représentant M. le Président du Conseil National,
Le Chanoine César Penzo, Chapelain de la Maison Souveraine,
M. André Garino, Président du Conseil Economique,
M. Luciano Di Noto, Procureur Général près la Cour d’Appel de Gênes,
M. Gianfranco Bonetto, Président de la Cour d’Appel de Gênes,
M. Jacques Lameyre, Président du Tribunal de Grande Instance de Grasse,
M. Jean-Michel Hayat, Président du Tribunal de Grande Instance de Nice,
M. Eric De Montgolfier, Procureur de la République de Nice,
M. Marc Desert, Procureur de la République de Grasse,
Mme François Pons, représentant M. Jean-Pierre Atthenont, Premier Président de la cour d’Appel d’Aix en Provence,
M. Henri Charles, représentant M. Eric Edel, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Nice,
M. Claude Cottalorda, Contrôleur Général des Dépenses,
M. Robert Colle, Secrétaire Général du Ministère d’Etat,
M. Philippe Orengo, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Charles Sacotte, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Baptiste Donnier, Conseiller d’Etat,
M. Jean-Marie Rainaud, Conseiller d’Etat,
Mme Agnès Puons, Directeur Général du Département des Affaires Sociales et de la Santé,
Mme Mireille Pettiti, Directeur Général du Département des Relations Extérieures,
M. Thierry Orsini, Directeur Général du Département des Finances et de l’Economie,
M. Jean-Luc Van Klaveren, Directeur Général du Département de l’Equipement, de l’Environnement et de l’Urbanisme,
Mme Yvette Lambin-Berti, Commissaire Général chargé de la Direction de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports,
M. François Chantrait, Directeur du Centre de Presse,
M. André Muhlberger, Directeur de la Sûreté Publique,
Mme Muriel Natali-Laure, Administrateur des Domaines,
Mme Catherine Orecchia-Mathyssens, Directeur du Service de l’Expansion Economique,
M. Antoine Dinkel, Directeur des Services Fiscaux,
Docteur Anne Negre, Directeur de l’Action Sanitaire et Sociale,
M. Jean Bissuel, Directeur des Affaires Maritimes,
M. Patrice Cellario, Directeur de la Prospective, de l’Urbanisme et de la Mobilité,
Mme Danielle Mezzana-Ghenassia, Conseiller technique, représentant,
Mme Ariane Picco-Margossian, Directeur du S.I.C.C.F.I.N,
M. Jean-François Renucci, Conseiller aux Droits de l’Homme et aux Libertés Fondamentales,
Mme Martine Provence, Secrétaire Général de la Direction des Services Judiciaires,
Mme Marina Ceyssac, Conseiller auprès du Directeur des Services Judiciaires,
M. Régis Lecuyer, Conservateur du Palais Princier,
M. Christophe Haget, Commissaire Principal, Chef de la Division de police judiciaire,
M. Christian Carpinelli, Commissaire Principal, Chef de la Division de police administrative,
M. Claude Trianon, Commissaire Principal, Chef de la division de police urbaine,
M. Richard Marangoni, Commissaire Principal, Chef de la Division de l’Administration et de la Formation,
M. Michel Sosso, Président de la Commission de Contrôle des Informations Nominatives,
M. Jean-Paul Hamet, Président du Tribunal du Travail,
M. Jacques Wolzok, Vice-Président du Tribunal du Travail,
M. Jean-François Culleyrier, Vice-Président de la Commission de Contrôle des Activités Financières,
M. Philippe Rosselin, Conseiller honoraire de la Cour d’Appel,
M. Jean Currau, Assistant Référendaire,
M. Antoine Montecucco, Greffier en Chef honoraire,
M. Jean Brych, Président de l’Ordre des Experts comptables,
Me Henry Rey, Notaire,
Me Magali Crovetto-Aquilina, Notaire,
Me Nathalie Aureglia-Caruso, Notaire,
M. Maurice Fangier, Receveur Principal des Douanes,
M. Alain Van Den Corput, Commandant Principal-Inspecteur, Chef de la Division de la Police Maritime et aéroportuaire,
M. Pierre Julien, Professeur à la Faculté de Droit et de Sciences Economiques,
Mme Bettina Ragazzoni, Administrateur Judiciaire et syndic,
M. Christian Boisson, Administrateur Judiciaire et syndic,
M. Jean-Paul Samba, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Christian Zabaldano, Directeur de la Maison d’Arrêt,
M. Robert Krommenacker, Directeur adjoint de la Maison d’Arrêt,
Mme Catherine Catanese, Secrétaire du Tribunal du Travail,
Mme Corinne Querci, Assistante sociale à la Direction des Services Judiciaires,
M. Jacques Orecchia, Administrateur judiciaire,
Mme Robert Cordas,
Mme Jean Apollis.