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Ordonnance Souveraine n° 8.664 du 26 mai 2021 relative aux procédures de gel des fonds et des ressources économiques en application de sanctions économiques internationales.

  • No. Journal 8541
  • Date of publication 04/06/2021
  • Quality 100%
  • Page no.

ALBERT II
PAR LA GRÂCE DE DIEU
PRINCE SOUVERAIN DE MONACO


Vu la Constitution et notamment son article 68 ;
Vu la Charte des Nations Unies et notamment son article 25 et son chapitre VII ;
Vu la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, modifiée ;
Vu l'Ordonnance Souveraine n° 15.319 du 8 avril 2002 rendant exécutoire la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme du 9 décembre 1999 ;
Vu l'Ordonnance Souveraine n° 15.321 du 8 avril 2002 relative aux procédures de gel des fonds aux fins de lutte contre le terrorisme, modifiée ;
Vu Notre Ordonnance n° 621 du 4 avril 2006 relative à la délégation de signature du Ministre d'État, modifiée ;
Vu Notre Ordonnance n° 1.675 du 10 juin 2008 relative aux procédures de gel des fonds mettant en œuvre des sanctions économiques, modifiée ;
Vu Notre Ordonnance n° 3.559 du 5 décembre 2011 rendant exécutoire l'Accord monétaire conclu le 29 novembre 2011 entre l'Union européenne et la Principauté de Monaco ;
Vu Notre Ordonnance n° 7.386 du 8 mars 2019 rendant exécutoire l'Accord par échange de lettres des 3 et 12 décembre 2018 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la réglementation bancaire applicable dans la Principauté de Monaco ;
Vu la délibération du Conseil de Gouvernement en date du 19 mai 2021 qui Nous a été communiquée par Notre Ministre d'État ;
Avons Ordonné et Ordonnons :


Article Premier.


Le Ministre d'État peut prendre les mesures de gel des fonds et des ressources économiques nécessaires pour l'application des sanctions économiques qui sont décrétées par l'Organisation des Nations Unies, par l'Union européenne ou par la République française et sont destinées à faire respecter des normes et principes consacrés par le droit international public, notamment les droits de l'homme, la démocratie, la paix et la sécurité internationales.


Art. 2.


Les mesures de gel des fonds et des ressources économiques visées à l'article premier sont édictées sous la forme de décisions du Ministre d'État.
Elles entrent en vigueur à compter de leur publication au sein d'une rubrique dédiée accessible depuis le site Internet du Gouvernement princier.


Art. 3.


Les établissements de crédit, et autres institutions financières, les entreprises d'assurance et tout organisme, entité ou personne sont tenus de procéder, sans délai et sans notification préalable, au gel des fonds et des ressources économiques appartenant, possédés, détenus ou contrôlés intégralement ou conjointement, directement ou indirectement, par des personnes physiques ou morales, entités ou organismes, désignés par décision du Ministre d'État prise dans les formes prévues à l'article 2.
Cette mesure est également applicable :
1.         Aux fonds et aux ressources économiques provenant de ou générés par des fonds ou des ressources économiques appartenant, possédés, détenus ou contrôlés, directement ou indirectement, par ces personnes physiques ou morales, entités ou organismes ;
2.         Aux fonds et aux ressources économiques détenus par des entités appartenant à ou contrôlées directement ou indirectement par ces personnes physiques ou morales, entités ou organismes ou par toute personne agissant pour leur compte ou sur leurs ordres.


Art. 4.


Les personnes et entités visées à l'article 3 ne peuvent mettre, directement ou indirectement, intégralement ou conjointement, de quelque manière que ce soit, des fonds ou des ressources économiques à la disposition d'une ou des personnes physiques ou morales, entités ou organismes désignés par décision du Ministre d'État prise dans les formes prévues à l'article 2, des entités appartenant à ou contrôlées directement ou indirectement par ces personnes physiques ou morales, entités ou organismes ou de toute personne agissant pour leur compte ou sur leurs ordres, ou de les utiliser à leur bénéfice.
Les établissements de crédit, toute autre institution financière, et entreprises d'assurance, ne peuvent fournir ou continuer de fournir des services à ces mêmes personnes, entités ou organismes.
Ces personnes et entités ne peuvent réaliser ou participer, sciemment, et intentionnellement, à des opérations ayant pour but ou effet de contourner, directement ou indirectement, les dispositions de l'article 3 et des premier et deuxième alinéas du présent article.


Art. 5.


Il est créé une liste nationale des personnes physiques ou morales, entités ou organismes, faisant l'objet d'une mesure de gel des fonds et des ressources économiques en application des dispositions de la présente ordonnance.
Cette liste nationale, tenue par la Direction du Budget et du Trésor, est destinée à l'information du public et est publiée au sein d'une rubrique dédiée accessible depuis le site Internet du Gouvernement princier.
Sont mentionnés à la liste nationale les noms et prénoms, les alias, la date et le lieu de naissance, la raison ou la dénomination sociale, ainsi que toute autre information relative à l'identification de la personne physique ou morale, entité ou organisme, ou à la mesure de gel.
Ces mentions sont supprimées de la liste nationale à l'expiration de la mesure de gel.


Art. 6.


Les listes relatives à des personnes physiques ou morales, groupes et entités que le Conseil de sécurité des Nations Unies ou son Comité compétent a établies ou actualisées sont reprises automatiquement.
En application de l'alinéa premier, la publication de ces listes par le Conseil de sécurité des Nations Unies ou son Comité compétent fait naître une décision implicite de gel du Ministre d'État.
Les établissements de crédit, et autres institutions financières, les entreprises d'assurance et tout organisme, entité ou personne, sont tenus, dès cette publication, de mettre en œuvre les mesures de gel des fonds et des ressources économiques en application des dispositions prévues aux articles 3 et 4.
Les fonds et ressources économiques sont gelés pour une période de dix jours ouvrables, ou, si elle intervient avant le terme de cette période, jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la décision du Ministre d'État, prise dans les formes prévues à l'article 2, qui désigne les personnes physiques ou morales, groupes et entités visés au premier alinéa.


Art. 7.


Les personnes qui commettent, ou tentent de commettre, des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent, désignées par décision du Ministre d'État prise dans les formes prévues à l'article 2, sont désignées de sa propre initiative, ou après avoir examiné la demande d'un autre État, dès lors que le Ministre d'État a l'assurance que la demande de désignation est étayée par des motifs raisonnables ou par une base raisonnable permettant de suspecter ou de penser que ces personnes physiques ou morales, entités ou organismes commettent, ou tentent de commettre, des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent.


Art. 8.


Nonobstant les règles du secret professionnel, les établissements de crédit, les autres institutions financières, les entreprises d'assurances et les autres organismes, entités ou personnes sont tenus de fournir au Directeur du Budget et du Trésor toutes les informations nécessaires pour assurer le respect des dispositions de la présente ordonnance.
Les informations fournies ou reçues conformément au présent article ne sont utilisées qu'aux fins pour lesquelles elles ont été fournies.
Le présent article s'applique sans préjudice des dispositions de l'article 42 de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, susvisée, imposant aux organismes et personnes visés aux articles premier et 2 de ladite loi de déclarer au Service d'Information et de Contrôle des Circuits Financiers les opérations et les faits concernant les personnes physiques ou morales visées par des mesures de gel des fonds et des ressources économiques.


Art. 9.


Une autorisation de déblocage ou d'utilisation de fonds ou de ressources économiques gelés peut être délivrée par décision du Ministre d'État, dans le respect des conditions prévues par les sanctions économiques décrétées par l'Organisation des Nations unies, par l'Union européenne ou par la République française.
La décision du Ministre d'État entre en vigueur à compter de sa publication au sein d'une rubrique dédiée accessible depuis le site internet du Gouvernement Princier.


Art. 10.


Dans le respect des conditions prévues par les sanctions économiques décrétées par l'Organisation des Nations unies, par l'Union européenne ou par la République française :
1° Les intérêts, autres rémunérations et paiements peuvent être versés aux comptes gelés, à condition que ces intérêts, autres rémunérations et paiements soient gelés conformément à l'article 3 ;
2° Les comptes gelés peuvent être crédités, à condition que toute somme supplémentaire versée sur ces comptes soit gelée conformément à l'article 3. L'établissement financier ou de crédit en informe sans délai le Service d'Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers.


Art. 11.


Le gel des fonds et des ressources économiques ou le refus d'en autoriser la mise à disposition, opéré de bonne foi au motif qu'une telle action est conforme aux dispositions de la présente ordonnance, n'entraîne, pour la personne morale ou physique ou l'entité qui y procède, sa direction ou ses employés, aucune responsabilité de quelque nature que ce soit, à moins qu'il soit établi qu'il y a eu négligence.


Art. 12.


Toute méconnaissance des dispositions de la présente ordonnance est punie des peines prévues au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal.


Art. 13.


Les décisions du Ministre d'État prises dans les formes prévues à l'article 2, peuvent faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le Tribunal de première instance, dans un délai de deux mois suivant la date de leur publication au sein d'une rubrique dédiée accessible depuis le site Internet du Gouvernement princier.
Les décisions implicites de gel du Ministre d'État visées à l'article 6, peuvent faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le Tribunal de première instance, dans un délai de deux mois suivant la date à laquelle elles sont nées.


Art. 14.


Pour l'application de la présente ordonnance, sont qualifiés :
a.         « Fonds » : les actifs financiers et les avantages économiques de toute nature, et notamment, mais non exclusivement :
-           le numéraire, les chèques, les créances en numéraire, les traites, les ordres de paiement et autres instruments ou moyens de paiement ;
-           les dépôts de fonds auprès d'établissements de crédit et d'établissements de paiement tels que les fonds remboursables du public détenus ou versés sur des comptes de dépôt, les fonds versés sur un compte de paiement, les fonds investis dans des produits d'épargne ou versés dans le cadre de contrat individuel ou collectif de gestion d'actifs, les soldes de ces comptes ou contrats ;
-           les fonds versés sur des contrats d'assurance-vie ou de capitalisation ainsi que la valeur de rachat de ces contrats ;
-           les créances ;
-           les titres de créances, les titres de propriété et d'emprunt, tels que les actions, les certificats représentatifs de valeurs mobilières, les obligations, les billets à ordre, les warrants, les obligations non garanties et les contrats sur produits dérivés, qu'ils soient négociés en bourse ou fassent l'objet d'un placement privé ;
-           les intérêts, les dividendes ou autres revenus d'actifs ou plus-values perçus sur des actifs ;
-           le crédit, le droit à compensation, les garanties, les garanties de bonne exécution ou autres engagements financiers ;
-           les lettres de crédit, les connaissements, les contrats de vente ;
-           tout document attestant la détention de parts d'un fonds ou de ressources financières ;
-           tout autre instrument de financement à l'exportation.
b.         « Ressources économiques » : les avoirs, de quelque nature que ce soit, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, qui ne sont pas des fonds mais peuvent être utilisés pour obtenir des fonds, des biens ou des services.
c.         « Gel des fonds » : la mise en œuvre de toute action visant à empêcher tout mouvement, transfert, modification, utilisation ou manipulation desdits fonds qui aurait pour conséquence un changement de leur volume, de leur montant, de leur localisation, de leur propriété, de leur possession, de leur nature, de leur destination ou toute autre modification qui pourrait en rendre possible l'utilisation, notamment la gestion de portefeuilles dont les mandats sont réputés suspendus.
d.         « Gel des ressources économiques » : la mise en œuvre de toute action visant à empêcher leur utilisation pour l'obtention de fonds, de biens ou de services de quelque manière que ce soit, et notamment mais non exclusivement leur vente, leur location ou leur mise sous hypothèque.


Art. 15.


Au sein de l'article 42 de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, susvisée, les termes « procédures de gel de fonds aux fins de lutte contre le terrorisme ou mettant en œuvre des sanctions économiques, publiées par arrêté ministériel ou par décision ministérielle. Cet arrêté ministériel ou cette décision ministérielle sont publiés sur le site Internet du Service d'Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers » sont remplacés par les termes « mesures de gel des fonds et des ressources économiques nécessaires pour l'application des sanctions économiques qui sont décrétées par l'Organisation des Nations unies, par l'Union européenne ou par la République française et sont destinées à faire respecter le droit international public, notamment les droits de l'homme, la démocratie, la paix et la sécurité internationales ».


Art. 16.


Les Ordonnances Souveraines n° 15.321 du 8 avril 2002 et n° 1.675 du 10 juin 2008, modifiées, susvisées, sont abrogées.


Art. 17.


Notre Secrétaire d'État, Notre Secrétaire d'État à la Justice, Directeur des Services Judiciaires et Notre Ministre d'État sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de la présente ordonnance.
Donné en Notre Palais à Monaco, le vingt-six mai deux mille vingt-et-un.

ALBERT.


Par le Prince,
Le Secrétaire d'État :
J. BOISSON.

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