Ordonnance Souveraine n° 15.457 du 9 août 2002 relative à la coopération internationale en matière de saisie et de confiscation dans le cadre de la lutte contre le blanchiment.
RAINIER III
PAR LA GRACE DE DIEU
PRINCE SOUVERAIN DE MONACO
Vu la Constitution et notamment son article 68 ;
Vu la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes adoptée à Vienne le 20 décembre 1988, rendue exécutoire par Notre ordonnance n° 10.201 du 3 juillet 1991 ;
Vu la Convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, signée à Strasbourg le 8 novembre 1990, rendue exécutoire par Notre ordonnance n° 15.452 du 8 août 2002 ;
Vu la délibération du Conseil de Gouvernement en date du 24 juillet 2002 qui Nous a été communiquée par Notre Ministre d'Etat ;
Avons Ordonné et Ordonnons :
Article Premier.
Les dispositions de la présente ordonnance s'appliquent à toute demande présentée en application de l'article 5 de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes adoptée à Vienne le 20 décembre 1988, par un Etat partie à cette Convention, tendant à une ou plusieurs des mesures suivantes :
1 - la recherche et l'identification de l'objet d'une infraction définie en application du premier paragraphe de l'article 3 de ladite Convention, la recherche et l'identification du produit provenant directement ou indirectement de cette infraction ainsi que des installations, matériels et biens ayant servi à la commettre ;
2 - la confiscation de ces objets, produits, installations, matériels et biens ;
3 - la prise de mesures conservatoires sur ces objets, produits, installations, matériels et biens.
Art. 2.
Les dispositions de la présente ordonnance sont également applicables à toute demande présentée en application du chapitre III de la Convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, adoptée à Strasbourg le 8 novembre 1990, par un Etat partie à cette Convention, tendant à une ou plusieurs des mesures suivantes :
1 - la recherche et l'identification du produit d'une infraction, ainsi que des choses ayant servi à la commettre ou qui étaient destinées à la commettre ou de tout bien dont la valeur correspond au produit de cette infraction ;
2 - la confiscation de ces choses, produits ou biens ;
3 - la prise de mesures conservatoires sur ces choses, produits ou biens.
Art. 3.
La demande est rejetée si :
1 - son exécution est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels de la Principauté ;
2 - les faits sur lesquels elle porte font l'objet de poursuites pénales ou ont déjà fait l'objet d'une décision définitive sur le territoire monégasque ;
3 - elle porte sur une infraction considérée comme politique ou fiscale au sens de la loi monégasque ;
4 - la décision étrangère a été prononcée dans des conditions n'offrant pas de garanties suffisantes au regard des droits de la défense ;
5 - les faits à l'origine de la demande ne constituent pas une infraction en droit monégasque.
Toutefois, ce dernier motif de rejet ne s'applique pas aux demandes présentées en application du chiffre 1 de l'article 1 et du chiffe 1 de l'article 2 qui n'impliquent pas de mesure coercitive.
Art. 4.
Pour l'exécution de la demande présentée par une autorité judiciaire étrangère, en application du chiffre 1 de l'article 1 et du chiffre 1 de l'article 2, les commissions rogatoires sont exécutées conformément au droit monégasque.
Art. 5.
L'exécution sur le territoire monégasque d'une décision de confiscation prononcée par une juridiction étrangère et faisant l'objet d'une demande présentée en application du chiffre 2 de l'article 1 ou du chiffre 2 de l'article 2 est autorisée par le Tribunal de Première Instance statuant en matière correctionnelle lorsqu'il est saisi, à cette fin, par le Procureur Général.
L'exécution est autorisée à condition d'une part, que la décision étrangère soit définitive et demeure exécutoire selon la loi de l'Etat requérant et, d'autre part, que les biens confisqués par cette décision soient susceptibles d'être confisqués dans des circonstances analogues selon la loi monégasque.
S'agissant d'une demande présentée en application du chiffre 2 de l'article 2, la décision de confiscation peut consister en l'obligation de payer une somme d'argent correspondant à la valeur d'un bien déterminé constituant le produit ou l'instrument d'une infraction.
Art. 6.
La procédure applicable devant le tribunal saisi en application du premier alinéa de l'article 5 est celle déterminée par les dispositions du Code de procédure pénale.
Le tribunal entend, le cas échéant par commission rogatoire, le condamné ainsi que toute personne ayant des droits sur les biens qui ont fait l'objet de la décision étrangère de confiscation.
Les personnes mentionnées à l'alinéa précédent peuvent se faire représenter par un Avocat-défenseur.
Le tribunal est lié par les constatations de fait de la décision étrangère. Si ces constatations sont insuffisantes, il peut ordonner un supplément d'information.
Art. 7.
L'autorisation d'exécution prévue à l'article 5 ne peut avoir pour effet de porter atteinte aux droits licitement constitués au profit des tiers, en application de la loi monégasque, sur des biens dont la confiscation a été prononcée par la décision étrangère
Toutefois, si cette décision contient des dispositions relatives aux droits des tiers, elle s'impose au tribunal monégasque à moins que les tiers n'aient pas été mis à même de faire valoir leurs droits devant la juridiction étrangère dans des conditions analogues à celles prévues par la loi monégasque.
Art. 8.
La décision autorisant l'exécution de la décision étrangère entraîne transfert à l'Etat monégasque de la propriété de bien confisqué, sauf s'il en est convenu autrement avec l'Etat requérant.
Dans le cas d'une demande présentée en application de l'article 2, si la décision étrangère prévoit la confiscation en valeur, la décision autorisant son exécution rend l'Etat monégasque créancier de l'obligation de payer la somme d'argent correspondante.
A défaut de paiement, l'Etat requis fait recouvrer sa créance sur tout bien disponible à cette fin.
Art. 9.
L'exécution sur le territoire monégasque de mesures conservatoires faisant l'objet d'une demande présentée par une autorité judiciaire étrangère, en application du chiffre 3 de l'article 1 ou du chiffre 3 de l'article 2, est ordonnée, aux frais avancés de l'Etat requérant et selon les modalités prévues par le Code de procédure civile par le Président du Tribunal de Première Instance lorsqu'il est saisi, à cette fin, par le Procureur Général, dès lors que le propriétaire des biens ne pouvait en ignorer l'origine ou l'utilisation frauduleuse.
La durée maximale de ces mesures est fixée à deux ans. Elles peuvent être renouvelées sans limitation dans les mêmes conditions avant l'expiration de ce délai.
La mainlevée totale ou partielle des mesures conservatoires peut être demandée par tout intéressé. La partie requérante en est préalablement avisée.
La décision d'autorisation d'exécuter la décision de confiscation prononcée par la juridiction étrangère vaut validation des mesures conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.
Le refus d'autoriser l'exécution de la décision de confiscation prononcée par la juridiction étrangère emporte de plein droit mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même lorsque les poursuites engagées ont pris fin.
Art. 10.
Notre Secrétaire d'Etat, Notre Directeur des Services Judiciaires et Notre Ministre d'Etat sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de la présente ordonnance.
Donné en Notre Palais à Monaco, le neuf août deux mille deux.
RAINIER.
Par le Prince,
Le Secrétaire d'Etat :
R. NOVELLA.