ANNEE JUDICIAIRE 2005-2006 - Rentrée des Cours et Tribunaux Audience Solennelle du lundi 3 octobre 2005
Le lundi 3 octobre a été marqué par la traditionnelle Audience de Rentrée des Cours et Tribunaux.
Cette Audience a été précédée par la Messe du Saint-Esprit qui a été concélébrée avec l'ensemble du clergé diocésain par Monseigneur Bernard Barsi, Archevêque de Monaco. Son Excellence Monsieur René NOVELLA, Secrétaire d'Etat, a représenté Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain.
A l'issue de la Messe du Saint-Esprit, Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, escortée du Colonel Serge Lamblin, Chambellan de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, étaient accueillis au Palais de Justice par M. Alain Guillou, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d'Etat.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain était conduit par le Directeur des Services Judiciaires dans la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel où était réuni l'ensemble des magistrats. Le Directeur des Services Judiciaires L'accueillait en ces mots :
Monseigneur,
En ce jour de la Rentrée Solennelle des Cours et Tribunaux de la Principauté de Monaco, cérémonie traditionnelle qui nous est particulièrement chère, Vous avez bien voulu être parmi nous et saluer individuellement les premiers serviteurs de Votre Justice que sont les magistrats ici réunis.
Votre présence à nos côtés, en ce jour, Monseigneur, nous touche profondément.
Elle est non seulement un éclatant témoignage de Votre attachement personnel à l'Oeuvre de Justice mais aussi un formidable encouragement pour chacun d'entre nous, attaché à remplir au mieux la mission que Vous avez bien voulu nous confier individuellement.
C'est donc avec l'émotion que nous partageons tous, que je voudrais Vous exprimer notre reconnaissance et remercier respectueusement Votre Altesse pour l'honneur qui nous est ainsi fait.
L'assemblée, ici, de Vos juges et procureurs est porteuse de symboles forts, Monseigneur.
Elle est d'abord le concret et vivant témoignage de la coopération étroite, et donc de l'amitié, qui unissent deux pays : Monaco et la France dans le creuset commun de la magistrature monégasque.
Elle témoigne, aussi, de l'union des générations quand des aînés, à l'issue d'une carrière professionnelle prestigieuse, encadrent et guident les plus jeunes.
Jeune génération où il me plaît de constater, Monseigneur, l'émergence croissante en nombre de jeunes monégasques de qualité qui ont choisi de servir la Justice de leur pays.
Comment ne pas avoir en ce jour, une pensée émue et reconnaissante pour Votre vénéré Père le Prince Rainier III, infatigable bâtisseur du Droit, comme Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel nous le rappellera tout-à-l'heure ?
Comment ne pas voir dans Votre présence aujourd'hui parmi nous, le témoignage de la continuité de cette action patiente des Princes de Monaco dans la construction d'une Justice moderne et efficace ?
Sous Votre Haute Autorité, Monseigneur, un important chantier est en cours :
- nouveau statut de la Magistrature, loi sur la nouvelle organisation judiciaire, nouveau Code de Procédure Pénale, textes qui seront soumis dans les prochaines semaines au vote du Conseil National,
- réforme engagée du Code de Procédure Civile,
- transposition en droit interne de nos engagements internationaux,
- réorganisation, aujourd'hui achevée, de la Maison d'Arrêt et professionnalisation en cours des personnels,
- réorganisation et modernisation du Greffe qui seront entreprises dès le début de l'année 2006.
Dans un monde toujours plus complexe où les justiciables manifestent chaque jour davantage l'exigence légitime d'une Justice de qualité, chacun de Vos magistrats, Monseigneur, est conscient de ses devoirs.
Les nombreux engagements conventionnels de la Principauté au plan international, l'adhésion au Conseil de l'Europe et la ratification prochaine de la Convention Européenne des Droits de l'Homme mettent de plus en plus les juristes et les magistrats en particulier, en première ligne.
Daignez être assuré, Monseigneur, de notre profond et fidèle dévouement, de notre attachement sans faille à la ligne tracée par Vos illustres ancêtres pour servir le Droit, comme de notre attachement indéfectible au service des idéaux qui sont Vôtres et que Vous avez, récemment, solennellement rappelés.
A l'issue de son allocution, le Directeur des Services Judiciaires présentait à Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain les magistrats en exercice et les magistrats honoraires.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain était ensuite conduite par le Directeur des Services Judiciaires à la Salle d'Audience de la Cour d'Appel.
L'audience Solennelle débutait sous la présidence de M. le Premier Président de la Cour d'Appel qui avait à ses côtés M. René Vialatte, Premier Président honoraire, Mme Monique François, Vice-Président, M. Dominique Adam et Mme Catherine Mabrut, Conseillers, ainsi que de MM. Robert Franceschi et Philippe Rosselin, Conseillers honoraires.
M. Roland Drago, Président du Tribunal Suprême était présent.
M. Yves Jouhaud, Premier Président de la Cour de Révision était accompagné de M. Jean Apollis, Vice-Président, Mme Agnès Cavellat-Delaroche, MM. Roger Beauvois, Jean-Pierre Dumas et José Chevreau, Conseillers.
M. Philippe Narmino, Président du Tribunal de Première Instance, conduisait les magistrats de sa juridiction :
Mme Brigitte Gambarini, Premier Vice-Président,
M. Jean-Charles Labbouz, Vice-Président,
Mme Isabelle Berro-Lefevre, Premier Juge,
Mme Muriel Dorato, Premier Juge,
M. Gérard Launoy, Premier Juge,
M. Bruno Nedelec, Juge d'instruction,
M. Pierre Baron, Juge d'instruction,
Mlle Anne-Véronique Bitar-Ghanem, Juge,
M. Jérôme Fougeras-Lavergnolle, Juge tutélaire,
M. Emmanuel Robin, Juge,
Mlle Magali Ghenassia, Juge,
M. Florestan Bellinzona, Juge.
Mme Martine Castoldi, Premier Juge chargée de la Justice de Paix était également présente.
Mme Annie Brunet-Fuster, Procureur Général, représentait le Ministère Public avec à ses côtés, Mme Marie-Anne Gonelle, Premier Substitut, Mlle Sabine-Anne Minazzoli, Substitut détaché à la Direction des Services Judiciaires, Mme Stéphanie Vikström et Mlle Claire Dollmann, Substituts.
Le plumitif d'audience était tenu par Mme Béatrice Bardy, Greffier en Chef, assistée de Mme Laura Sparacia, Greffier en Chef adjoint et de Mme Liliane Zanchi, Greffier Principal, entourés des greffiers en exercice.
Me Marie-Thérèse Escaut-Marquet et Me Claire Notari occupaient le banc des huissiers.
Me Etienne Leandri, Bâtonnier, était accompagné des membres du barreau.
Etaient également présents des représentants des Notaires, des experts-comptables, des administrateurs judiciaires et syndics.
Après avoir déclaré ouverte l'Audience Solennelle, Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel s'exprimait en ces termes :
Monseigneur,
En ouvrant cette Audience Solennelle de rentrée, qui sera la dernière que je présiderai, j'éprouve une émotion profonde à y siéger en la présence personnelle de Votre Altesse Sérénissime peu après Son avènement comme Prince Souverain de Monaco.
C'est en effet au nom du Prince que les cours et tribunaux rendent la justice dans la Principauté, et aujourd'hui, Monseigneur, les magistrats ressentent comme un immense honneur l'occasion qui leur est donnée par Votre Altesse d'être solennellement réunis en présence de leur Prince, source de la justice et détenteur originaire du pouvoir judiciaire dont l'exercice se trouve entièrement délégué aux juridictions, par la Constitution.
Les magistrats de la Cour d'Appel, du Tribunal de Première Instance et de la Justice de Paix sont ici rassemblés, Monseigneur, afin de répondre aux prescriptions de l'article 51 de la loi portant organisation judiciaire du 15 juillet 1965, à l'occasion de l'ouverture de leur année judiciaire.
Ils sont entourés du Président du Tribunal Suprême, des membres de la Cour de Révision, qui inaugurent aujourd'hui leur session, ainsi que des membres du Greffe général et du Barreau, comme des notaires et des huissiers.
Conscients de la difficulté de leur tâche au service des juridictions, dans l'exercice des pouvoirs que celles-ci tiennent de leur Souverain, tous ces magistrats, leurs collaborateurs et l'ensemble des auxiliaires de justice, me permettront de faire part à Votre Altesse de la profonde gratitude que leur inspire Votre présence solennelle en ce lieu.
Ils y discernent un insigne encouragement pour la poursuite de leurs travaux, et une marque particulière de l'intérêt que Votre Altesse porte à la Justice, et à ceux qui font profession de la servir.
En leur nom et personnellement, Monseigneur, je prie Votre Altesse Sérénissime d'accepter l'hommage de notre profond respect et de notre entier et fidèle dévouement.
Excellences,
Monsieur le Directeur des Services judiciaires,
Monsieur le Bâtonnier,
Mesdames et Messieurs,
Sans doute en raison de ce qu'elle émane du Prince, incarnation de la souveraineté, la justice de la Principauté, que nous avons le privilège de servir, dispose depuis fort longtemps, déjà, des moyens humains et matériels qui lui sont nécessaires pour faire face à ses charges, et assurer son bon fonctionnent en toute indépendance, ce dont je puis personnellement témoigner.
Sans nous reporter aux époques décrites par Mme Brigitte Gambarini, Premier Vice-Président du Tribunal dans son discours prononcé le 2 octobre 1995, qui avait trait notamment à la justice déléguée, songeons que c'est à cette date qu'a été célébré le soixante cinquième anniversaire de l'inauguration de ce Palais de Justice.
C'est donc déjà 75 ans qui nous séparent, cette année, de son édification à l'initiative du Prince Louis II qui avait ainsi matérialisé son attachement à l'oeuvre de justice, de même qu'il avait inspiré le droit international humanitaire en créant la Commission médico-juridique dont découleront les conventions de Genève de 1949, et aménagé le droit interne, en instituant par voie législative les importantes juridictions que sont le Tribunal du travail et la Commission arbitrale des loyers commerciaux.
Assurément, et depuis leur création, ces juridictions ont contribué à la paix sociale et accompagné les débuts du considérable et harmonieux développement de la Principauté que nous connaissons aujourd'hui.
Comment donc ne pas évoquer à cet instant, Monseigneur, la mémoire du successeur du Prince Louis II, le Prince Rainier III, Votre Père, dont Votre Altesse, lors de Son discours solennel prononcé le 12 juillet dernier, nous a rappelé la totale dévotion à la cause et au développement de la Principauté, ainsi qu'en rendent déjà compte l'Histoire et ses principaux acteurs.
Au cours de cette audience qui permet au corps judiciaire de se réunir en son entier pour la première fois depuis le décès de Son Altesse Sérénissime le Prince Rainier III de Monaco, douloureusement survenu ce 6 avril 2005 qui nous a tant peinés, je souhaiterais, Monseigneur, être admis à perpétuer encore la reconnaissance et le respect que nous a dictés la vie de ce grand Prince.
Il ne m'appartient pas, comme magistrat, de faire Son éloge personnel, tant la confiance qu'Il a bien voulu m'accorder a seule justifié la légitimité de mon action au service des juridictions monégasques, durant de nombreuses années.
D'autres personnes plus qualifiées s'y sont d'ailleurs livrées, bien mieux que je ne saurais y parvenir.
Qu'il me soit cependant permis, Monseigneur, d'abord en tant qu'homme d'exprimer à nouveau au nom de nous tous, la profonde tristesse que nous avons éprouvée lors de la disparition du Prince Rainier III, dont Votre Altesse, au cours de Son avènement, a fait revivre en nous l'émouvant souvenir.
Comme homme de loi ensuite, et au seuil de cette année judiciaire, Monseigneur, qui marque le début du règne de Votre Altesse, je souhaiterais, pour ma part, prolonger encore ce souvenir en évoquant à l'aide de quelques uns de Ses propres mots divers éléments remarquables de l'oeuvre accomplie par le Prince Rainier III, pour l'épanouissement de la Justice et du Droit de Monaco, que nous avons mission de connaître et d'appliquer.
Depuis les réflexions de nombreux juristes et penseurs, tels Cicéron ou Saint Thomas d'Acquin, et comme l'indique la parenté des mots latins " jus et justitia " nous pressentons tous, que la Justice n'a d'autre objet que le Droit, celui-ci étant, essentiellement, lui-même axé sur la recherche de ce qui est juste, quels qu'en soient les fondements.
Dans l'expression de sa volonté politique apte à définir le bien commun devant être apporté à la Cité par les juridictions, il n'est pas douteux que le Prince Rainier III a, dès l'origine de Son règne, fait Sienne la totale conjonction de ces deux concepts.
Le 2 octobre 1978, et pour la première fois dans l'histoire des institutions judiciaires de Monaco, le Prince Souverain avait tenu à assister à l'audience solennelle de rentrée des cours et tribunaux, ainsi Monseigneur, que Votre Altesse Sérénissime a Elle-même daigné le faire, ce jour mémorable, en honorant de Sa présence notre assemblée.
Le Prince Rainier III s'est alors exprimé afin de rappeler comme suit, quel était notre rôle de juges au sein de la communauté nationale. Voici ses mots :
" Faire rendre à chacun ce qui lui est dû, garantir à chacun son bon droit, infliger aux délinquants les peines prévues par la loi, sans haine et sans passion, en toute indépendance, dans le souci de garantir la société contre toute action qui en altérerait l'ordre, est la tâche des magistrats des cours et tribunaux à qui j'ai confié, par des dispositions constitutionnelles, la mission de rendre la justice (...)
C'est une tâche de plus en plus difficile que celle du juge. Sa décision est souvent critiquée. Au plan civil, les parties, obnubilées par leurs intérêts divergents, sont mécontentes de la décision rendue qui ne consacre pas intégralement leur prétention. Au plan pénal, il supporte tout le poids du conflit constant entre le souci du maintien de l'ordre public et du reclassement du délinquant.
Cette tâche, à notre époque où les sentiments et les thèses les plus étonnantes s'expriment souvent avec violence et trouvent hélas quelque soutien dans certains esprits troublés, devient toujours plus délicate. Je suis convaincu que je pourrai toujours m'en remettre à la sagesse des tribunaux et que rien ne les empêchera de continuer leur mission avec conscience et énergie, en toute sérénité ".
Puis, le Prince Rainier III, évoquant la mission de la Cour de Révision affirmait :
" fixer l'interprétation du droit est une mission essentielle qui contribue à l'administration d'une bonne justice, à la défense des droits du citoyen et à la sauvegarde de l'organisation judiciaire.
Nous sommes tous conscients de l'importance et du caractère fondamental du rôle de cette juridiction suprême " (...)
Quelques années plus tard, lors de la célébration du soixante-cinquième anniversaire de la construction de ce Palais, que nous venons de rappeler, et alors que Vous même, Monseigneur, étiez présent lors de cette cérémonie solennelle, le Prince Rainier III avait une nouvelle fois tenu à évoquer la part nécessaire du droit dans notre activité judiciaire, et le rôle corrélatif du juge dans cette activité.
Après avoir rappelé que la Justice est rendue à Monaco au nom du Prince, même si elle est exercée par les cours et tribunaux, le Prince Rainier III avait alors affirmé :
" il découle de ce principe que son bon fonctionnement concerne le Prince au plus haut degré. J'en suis pleinement conscient.
Je crois profondément (...) que les juges doivent être avant tout indépendants, non seulement dans le droit mais aussi dans les faits.
Je pense aussi qu'une bonne justice doit être une justice sereine, qui sache demeurer à l'écart des remous politiques et médiatiques, tout en restant ouverte aux réalités de notre société.
La justice doit protéger les personnes tout en restant attentive à l'intérêt public.
Chargée d'appliquer la loi et rien que la loi, elle doit respecter le partage des pouvoirs organisé par notre Constitution.
C'est là une tâche lourde et délicate dont la difficulté n'échappe à personne.
De l'indépendance de la justice, je suis garant auprès des justiciables.
Quant à la sérénité des juges, je n'en suis pas maître mais cela n'est aucunement pour moi un sujet d'inquiétude car je sais que nos magistrats n'y ont jamais failli.
Je suis convaincu que je peux compter sur eux, pour maintenir dans l'intérêt de tous, ces vertus de rigueur morale et d'impartialité qui ont toujours fait l'honneur de notre corps judiciaire et la fierté de notre communauté. "
Ces mots, qui résonnent en nous comme de rigoureux préceptes de valeur et d'éthique, ont-ils toujours été entendus de la part des magistrats ?
Sans qu'il m'appartienne d'exprimer ici de réponse j'y vois, pour ma part, l'expression incontestable d'une conduite à tenir, fondamentalement destinée à prévenir une quelconque inadéquation de l'application du Droit de la part de la Justice, celle-ci étant, ainsi, inséparable du Droit.
S'agissant encore de la Justice, et indépendamment de son orientation légale, définie de la sorte par le Prince Rainier III, je ne voudrais pas manquer de rappeler ici, plus concrètement, et pour l'avoir vécu, que, sous Son règne, d'importants moyens ont été constamment octroyés aux juridictions afin de leur permettre d'accomplir leur mission dans les meilleures conditions, en fonction de l'évolution des besoins, liés au développement de la Principauté.
Sans entrer dans le détail des statistiques, rappelons simplement qu'en 1976 six postes de magistrats étaient attribués au Tribunal de Première Instance, qui ont été, depuis lors, portés à treize, de même que les effectifs du Greffe général ont, pareillement, connu une progression considérable.
C'est également à la même période que de remarquables travaux immobiliers d'aménagement, d'élévation et d'extension de notre Palais de justice ont été décidés ou approuvés par le Prince Rainier III, pour accompagner l'accroissement des effectifs, en même temps qu'était entreprise une très complète informatisation des services, actuellement en cours de perfectionnement, qui place certainement les juridictions monégasques parmi les mieux loties à ce titre, ce qui témoigne ainsi, et pour une grande part, de leur incontestable essor.
C'est probablement celui-ci, déjà manifesté, et l'attachement traditionnel des magistrats monégasques et du personnel du Greffe Général à la qualité de leur justice, qui pouvait alors conduire le Prince Rainier III à exprimer le 2 octobre 1985 à tous, la considération qu'Il leur portait.
Mais, la qualité de la justice étant intimement liée à celle de la législation, il est plus que probable que l'essor de la justice monégasque n'aurait nullement pu se réaliser, comme on l'a constaté, sans une nouvelle écriture du droit de la Principauté tel qu'il était en vigueur en 1949, à l'Avènement du Prince Rainier III, et dont l'aménagement et la modernisation devaient nécessairement conduire et aider, par la suite, le développement de cet Etat.
Cette modernisation juridique, très complète et légitimement ambitieuse, fut d'abord l'oeuvre du Prince Rainier III. Elle justifie à présent quelques rappels et réflexions que je souhaiterais vous livrer, et que l'on pourrait articuler autour du droit interne et du droit international, tant l'adaptation de chacun de ces deux droits aux réalités de la Principauté s'est révélée utile à celle-ci, si l'on songe, notamment, à l'augmentation de son territoire, de sa population, et du nombre de ses emplois, et au développement parallèle de ses activités économiques, industrielles, financières, sportives, scientifiques et culturelles, et, partant, à l'importance morale et politique accrue du rang de cet Etat dans le concert des Nations.
Il est certainement difficile de s'attacher au détail des 792 lois et 16.726 ordonnances juridiques ou nominatives que le Prince Rainier III a promulguées tout au long de son règne.
Sans pouvoir ainsi donner une vision exhaustive de Son oeuvre législative, je souhaiterais toutefois rappeler, en ce domaine, quelques unes des phrases, très significatives qu'Il a prononcées à l'occasion de la nouvelle année 1960, et qui traduisent, avec clarté, le caractère visionnaire de la volonté législative de ce Souverain.
Voici les mots du Prince Rainier III :
" les Etats, quelle que soit leur importance, se doivent, pour garantir leur oeuvre, non pas seulement de s'imposer une sage et saine gestion de leurs finances, mais aussi suivre la perpétuelle évolution que leur imposent les exigences de la vie moderne.
Ce travail incessant d'adaptation demeure, soyez en certains, ma préoccupation majeure, elle est aussi celle de mon gouvernement. On en trouve le témoignage dans le bilan substantiel qu'au terme de cette année nous pouvons dresser de nos efforts.
Sur le plan législatif, 33 ordonnances-lois adoptées et promulguées dans l'année démontrent l'activité déployée en créant, instituant et améliorant toutes les dispositions nécessaires pour assurer dans tous les domaines le développement harmonieux de la Principauté, et pour satisfaire dans toute la mesure compatible avec un juste équilibre, les aspirations légitimes de chacun. "
Le Prince Rainier III évoquait ensuite le détail des nombreux textes adoptés, dont certains revêtent une importance particulière, comme ceux concernant la location des locaux à usage d'habitation, l'urbanisme, la construction et la voirie ou encore, la retraite des salariés, la durée du travail, ou l'aide à la famille monégasque.
Au regard de ces rappels volontaires et précis, il n'est pas douteux que le Prince Rainier III entendait réaliser au plan législatif le voeu qu'Il avait six ans plus tôt annoncé aux monégasques, dans les termes suivants, à l'occasion également du Nouvel An :
" Il est de notre devoir premier - avait-Il dit - de faire tout pour que Monaco entre dans une ère nouvelle de prospérité et de richesse, mais cela ne peut se faire tout seul : il faut au préalable qu'une période d'activité intense réalise le cadre nouveau indispensable à provoquer et amener cette prospérité "
Rappelons, également, dans le même ordre d'idées ces mots du Prince Rainier III, en octobre 1955, qui unissaient encore, dans l'intérêt bien compris de la Principauté, Droit et développement :
" Depuis 30 ans, on parlait de la création du Répertoire de commerce. Toute une législation délicate a été créée et le répertoire va fonctionner ; une autre législation cohérente est établie, après plusieurs années d'étude, sur les brevets, inventions et marques. Cette importante réforme va porter ses fruits dans le domaine économique et fiscal et assurera de nouvelles recettes budgétaires ".
A la lumière de ces propos, comme à l'analyse des textes législatifs et réglementaires que le Journal de Monaco a publiés depuis l'accession au trône du Prince Rainier III, et qui recouvrent tous les domaines d'activité de l'ensemble des personnes physiques ou morales oeuvrant dans la Principauté, il ne serait nullement excessif de louer l'action législative du Prince Rainier III en étendant à la matière juridique la dénomination de " Prince bâtisseur ", qu'Il affectionnait de Son vivant, ce grand Souverain s'étant incontestablement révélé, pour nous juristes, comme un " Bâtisseur du Droit ".
A l'évidence, et alors que l'histoire des institutions rapporte combien étaient encore embryonnaires ou manquants en 1949, des pans entiers de législation interne dans la Principauté, le résultat de l'ouvrage juridique accompli de la sorte à l'initiative du Prince Rainier III, avec le concours, pour sa part, du Conseil national, a conduit en peu de temps la Principauté au fonctionnement équilibré d'un parfait Etat de Droit, dans tous les domaines de l'activité humaine.
Au-delà de la consistance des diverses législations particulières, la pierre frontale de cette réalité, se trouve incontestablement représentée par la Constitution du 17 septembre 1962, que le Prince Rainier III a donnée à son peuple et à tous les habitants de la Principauté, et qui a sans aucun doute procuré à celle-ci les moyens de son épanouissement et de sa stabilité.
Cet acte fondamental, intervenu après diverses incertitudes politiques, se révèle, en définitive, par sa nature intrinsèque, et ainsi que l'ont souligné divers auteurs, comme un acte de libre volonté du Souverain prenant la nature d'un Pacte entre celui-ci et la nation, pacte qui ne pourra être désormais modifié selon la décision du Prince, que par accord entre Lui-même et les représentants de la nation, et dont les effets ne pourront être suspendus.
Après avoir réitéré comme principe de gouvernement pour la Principauté, celui traditionnel à Monaco de la " monarchie héréditaire et constitutionnelle ", cet acte énonce encore, avec toutes les conséquences qui en découlent, que la Principauté est un Etat de Droit attaché au respect des libertés et des droits fondamentaux.
Et l'on sait que le terme Etat de Droit désigne dans la langue juridique tous les ordres étatiques qui sont fondés sur trois principes, opportunément rappelés, à propos de cette Constitution, par le doyen Vedel et par les professeurs Weil et Bridel.
Ces principes sont les suivants :
- toute source juridique trouve son fondement et sa validité dans les sources juridiques supérieures, la Constitution étant, dans l'ordre interne, la source suprême ;
- les compétences ne s'exercent que dans les conditions fixées par la Constitution et par les lois et règlements ;
- il existe des voies de droit destinées à annuler ou a paralyser les actes publics exprimés contraires au droit positif, et, le cas échéant à en réparer les conséquences dommageables.
Nous pensons pouvoir dire, sans risque d'erreur, que cet acte constitutionnel, fondateur de la sécurité juridique offerte désormais à tous par le Prince Rainier III, a été l'un des premiers instruments de la politique de développement qu'Il a assignée à l'Etat, pour assurer la modernité de celui-ci, nécessaire à cette politique.
A l'issue de la promulgation de la Constitution, une cérémonie s'est déroulée au Palais Princier, dans la salle du Trône, le lundi 17 décembre 1962. Lors de Son allocution prononcée à cette occasion, le Prince Rainier III a alors souligné que la nouvelle Constitution, devant se substituer désormais à celle de 1911, avait répondu notamment à la nécessité de perfectionner nos institutions " l'adaptation des institutions de l'Etat aux nécessités du monde moderne et à l'évolution de la pensée politique ayant en effet conduit, a-t-Il précisé, à l'organisation des pouvoirs publics dans une perspective nouvelle "
A quoi le Prince Rainier III a ajouté :
" On pourra dire que la Constitution du 17 décembre 1962, élaborée et mise au point dans un esprit de parfaite entente nationale, dans le contexte de nos traités avec la France, associe pour l'avenir des rapports confiants aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Nous pouvons nous en réjouir, comme nous pouvons aussi nous féliciter du bilan économique de ces deux dernières années ; car la prospérité de la Principauté n'a cessé de s'accroître régulièrement pour le bien général. Ainsi par une situation financière assainie et la constitution de réserves financières d'investissements pour l'équipement de la Principauté, un important programme de travaux de modernisation a pu être entrepris dans les domaines hospitalier, scolaire, sportif, social et technique. Tout ceci prouve, s'il en était besoin, la conscience que nous avons de notre avenir, qu'il soit proche ou lointain.
Pour ma part, ma préoccupation constante est de bâtir, pour mon successeur une Principauté, stable, prospère et heureuse ".
En rapportant, Monseigneur, ces propos qui désignaient déjà Votre Altesse il y a quarante trois ans, nous ne pouvons manquer d'être émus par le caractère foncièrement prémonitoire du dessein que s'assignait Votre Père, et qui se trouve aujourd'hui réellement accompli, pour une grande part, assurément, en raison de l'application même du Droit interne que le Prince Rainier III avait préalablement construit...
Une telle construction juridique n'a pas non plus été absente de la volonté politique du Prince Rainier III, s'agissant du Droit international auquel ce Souverain s'est, très tôt, consacré en ses réflexions, pour le bonheur et la prospérité de son peuple.
A l'occasion de la Fête nationale du 19 novembre 1957, et après avoir relevé que l'intérêt de la Principauté dans tous les domaines justifiait les raisons d'envisager l'avenir avec espoir et confiance, le Prince Rainier III avait affirmé :
" La Principauté se doit d'évoluer avec son temps et se montrer capable d'efforts de modernisation mais elle doit aussi affirmer sa présence dans la vie internationale et je suis heureux et fier de constater que Monaco participe à des sessions qui s'étendent aux domaines les plus divers - entre autres dans des institutions dépendant de l'ONU " (...).
Lors d'une session du Comité Régional de l'Europe de l'Organisation mondiale de la Santé, le 3 septembre 1958, le Prince Rainier III mentionnait en outre :
" Certains Etats, petits par leur étendue et par le nombre de leurs habitants peuvent, dans les domaines humanitaires se hisser au niveau des grands. Seules comptent la pensée et les réalisations. Or la Principauté de Monaco a toujours eu une dilection particulière pour la coopération internationale. Elle est heureuse d'être un des membres de votre Organisation selon ses moyens et ses ressources " (...)
Dans cet ordre d'idées nous ne pouvons, à l'évidence, passer sous silence les déclarations du Prince Souverain à l'occasion de l'admission de la Principauté de Monaco au sein de l'Organisation des Nations Unies, laquelle, intervenue le 28 mai 1993, illustre magnifiquement le succès de la volonté inlassable du Prince Rainier III d'asseoir sur les meilleures bases le statut de la Principauté.
Devant le Conseil National réuni en séance privée le 2 juin 1993, le Prince Rainier III s'exprimait ainsi :
" Le 28 mai dernier a été effectivement pour moi un jour de grande, très grande satisfaction. S'il a marqué la reconnaissance universelle de la Principauté comme Etat souverain et indépendant, il est aussi pour moi la conclusion, très satisfaisante d'un des axes de la politique que je m'étais fixé dès mon accession au trône : affirmer sur le plan international, l'existence, la présence, le rôle de Monaco.
Le Prince Louis II, Mon Grand-Père, avait ressenti avec tristesse comme tous les monégasques, le refus de la société des Nations d'admettre Monaco parmi ses membres. Aussi, dès 1949 me suis-je efforcé d'obtenir l'adhésion de Monaco aux Organisations créées à l'issue de la guerre, dont le but essentiel, au-delà de leurs aspects techniques et spécialisés, était de développer la coopération internationale ".
Après avoir rappelé l'adhésion de Monaco à de nombreuses organisations internationales, le Prince Rainier III relevait à ce propos :
" Au-delà de son activité internationale dont je viens de souligner l'appréciation favorable qu'elle suscite, la Principauté ne possède-t-elle pas depuis des siècles, les éléments qui, en droit international caractérisent un Etat souverain indépendant ; un territoire avec les compléments que sont les eaux territoriales et un espace aérien, une population, une organisation politique et administrative spécifique " (...).
Le Prince Rainier III concluait ensuite :
" La foi dans les destinées de la Principauté confortée par la sagesse, la rigueur et l'imagination créatrice de ses gouvernants et de son peuple ont permis à Monaco de survivre depuis des siècles aux tempêtes de l'histoire.
Nous-mêmes et nos enfants avons aujourd'hui de nouvelles raisons de croire en notre avenir si intimement partie de celui de notre Patrie ".
Je ne puis, hélas, décrire ici, même l'essentiel seulement de l'action du Prince Rainier III lors de l'adhésion de la Principauté aux quatorze institutions spécialisées de l'ONU auxquelles cet Etat est partie, non plus qu'aux vingt-cinq organisations intergouvernementales ou aux trente-sept organisations internationales non gouvernementales auxquelles la Principauté apporte encore un fructueux concours.
Il est toutefois significatif que cette participation de Monaco à la vie internationale, fortement accentuée par le Prince Rainier III depuis les débuts de son règne, révèle combien ce Souverain a été le partisan infatigable et convaincu d'une étroite coopération entre les nations.
Celle-ci, par sa durée et sa constance, a permis à Monaco, l'édification juridique d'un ensemble de normes de droit conventionnel qui ont, chacune, complété ou même supplanté, des éléments antérieurs du droit interne, plus imparfaits ou simplement moins modernes.
Evoquant à nouveau la Constitution de 1962, dont l'article premier implique la reconnaissance à Monaco de la primauté du droit international sur le droit interne, ainsi que l'impossibilité corrélative pour la Constitution de soustraire la Principauté à ses obligations de nature internationale, nous devons certainement penser, à ce titre, aux modifications du droit interne, légales ou même constitutionnelles, qui ont été commandées par la récente adhésion de Monaco au statut du Conseil de l'Europe, au cours d'une cérémonie qui a eu lieu le 4 octobre 2004 à Strasbourg.
Lors de cette cérémonie, Monseigneur, Votre Altesse avait lu un message du Prince Souverain que nous tous avons encore présent à l'esprit, et dont je souhaiterais rappeler ces quelques phrases, qui confirment, une nouvelle fois, la farouche détermination du Prince Rainier III d'obtenir pour Monaco prospérité et reconnaissance :
" (...) Ce jour est pour moi un jour de très grande satisfaction comme il l'est, j'en suis convaincu, pour tous les monégasques et les habitants de la Principauté. Je le ressens avec émotion et fierté car il est l'aboutissement positif de l'initiative que j'ai prise en 1998 pour inscrire notre Pays dans une nécessaire solidarité avec son environnement européen.
Si notre adhésion au Conseil de l'Europe répond dans cet esprit à une exigence de notre temps, elle s'inscrit aussi dans l'action que j'ai menée de longue date pour affirmer le statut international de Monaco et prendre en compte ses intérêts à long terme (...).
Loin de constituer des contraintes ou de mettre en péril un dispositif éprouvé, comme certains ont pu le craindre, les réformes entreprises vont dans le sens d'une modernisation de nos institutions et de notre législation pour les adapter aux réalités d'aujourd'hui. "
A la lecture de ces pensées, comment pourrions-nous ne pas relever la constance avec laquelle le Prince Rainier III a conçu la modernité du droit comme un facteur de développement.
Cette modernité, Monseigneur, Votre Altesse, Elle-même, l'a définie dans le discours fondateur de son règne comme étant " la capacité à comprendre son époque en profondeur, à repérer les lignes de force qui la traversent et à se mettre à l'unisson de ses tendances profondes ".
Sans que nous ne sachions, naturellement, quelle sera à terme l'évolution du droit positif monégasque, qu'il soit de source interne ou internationale, je prie Votre Altesse de croire que, dans le respect des préceptes d'éthique énoncés par le Prince Rainier III, et auxquels nous souscrivons, nous tous, gens de justice et de droit, resterons attentifs à l'évolution du monde qui nous entoure, afin d'édifier de notre mieux la Jurisprudence, de même que le Prince Rainier III a su bâtir le Droit.
Madame le Procureur Général,
Vous avez la parole pour vos réquisitions,
L'Audience Solennelle de rentrée est plus qu'un formalisme, c'est d'abord une obligation légale prévue par la loi portant organisation judiciaire.
C'est aussi un temps particulier qui nous offre un instant de pause pour un bilan public mais également une réflexion partagée.
L'institution judiciaire doit être un miroir fidèle de notre société.
L'immense variété des hommes entraîne des relations, des situations d'interdépendance sources de conflits.
Dans les difficultés qui se font jour, dans les contentieux qui naissent, il importe que l'intérêt supérieur soit préservé ou représenté.
Il est normal qu'il le soit, en l'état des institutions de ce pays par la voie du ministère public remplissant ainsi son rôle de représentant du corps entier de la société.
Si, en application de l'ordonnance organisant la Direction des Services Judiciaires, le Directeur desdits services administre l'action publique et la dirige, le Procureur Général avec tout le Parquet Général exerce l'action publique aux termes des articles 70 et suivants du même texte.
De telles dispositions impliquent cohérence, unité d'action et d'organisation.
Pour autant les membres du Parquet Général ne voient pas leur rôle confiné à celui d'exécutants passifs.
D'abord parce que la mise en oeuvre des orientations de la politique judiciaire exige initiative et créativité personnelle.
Surtout parce que le magistrat du Parquet est un magistrat, il n'est pas un interlocuteur extérieur aux juridictions, il est l'interface entre le juge, le politique au sens de la gestion publique et la société civile.
Il est amené au-delà de l'application générale de la politique judiciaire définie à se prononcer à l'audience dans l'intérêt de la loi et dans un esprit d'équilibre entre toutes les parties et tous les intérêts en présence.
Dans ce cadre l'action du Parquet Général s'inscrit également dans une vision globale de l'organisation judiciaire. Il s'agit de dire le droit, d'assurer la conformité de l'application du droit à la volonté de celui qui l'édicte.
Avocat de la loi, le Parquet ne peut parler que d'une seule voix devant toutes les juridictions auprès de qui il est établi, l'unité et l'indivisibilité du Ministère public doivent en conséquence se traduire par une exigence de solidarité, un travail d'équipe, une éthique de responsabilité.
Il m'est apparu nécessaire de mettre l'accent sur ces quelques exigences professionnelles car il s'agit de conduire ensemble une politique pour une justice, rendue au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, au service de notre pays.
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Puisqu'il m'incombe d'exercer l'action publique, il m'appartient de déterminer les bases de mon action, de dresser une espèce d'état des lieux :
- quelle délinquance sévit sur le territoire, quelle est sa nature, quelles en sont ses particularités,
- et d'envisager les moyens de la réduire à défaut de l'anéantir, ce qui serait vaine utopie ; quelles solutions adoptées aujourd'hui et quelles solutions pour l'avenir.
En égard à l'éclat que revêt particulièrement cette année, notre Audience Solennelle, et par crainte d'être trop prosaïque, je ne veux pas me transformer en " épileur de chenille " selon le mot de René Char en analysant une à une les données statistiques de l'année judiciaire, je formulerai seulement quelques observations et commentaires.
La délinquance
La délinquance, toutes infractions considérées, est demeurée stable par rapport à l'année 2004.
En masse :
- les atteintes aux biens représentent à elles seules 45 % de la délinquance globale,
- les infractions à la sécurité routière 12 % de la délinquance générale,
- les atteintes aux personnes représentent 8 % de la délinquance générale,
- Les infractions à la législation sur les stupéfiants constituent 4 % de la délinquance générale.
Ces données appellent de ma part les commentaires suivants :
Le territoire de la Principauté est un territoire sûr.
Nul doute que la rigueur de la loi strictement appliquée par les services de police et les services de la justice porte ses effets et répond à l'exigence de sécurité réclamée par tous.
La vigilance devra être toujours soutenue pour contenir et réprimer les comportements associaux constitutifs d'infractions pénales.
Quant aux infractions à la législation sur les stupéfiants, elles seront relevées et réprimées quelle qu'en soit la nature.
Fort heureusement le temps où la consommation de drogues dites douces était considérée comme un plaisir banalisé pour les uns voire revendiquée comme un comportement social normal pour les autres est dépassé, le monde de la médecine s'étant enfin insurgé à l'encontre de telles considérations non seulement dangereuses en termes de santé publique mais encore encourageantes pour le trafic qu'elles révèlent.
Les atteintes aux biens telles que précédemment entendues comportent les infractions économiques et financières y compris l'infraction de blanchiment.
Elles sont évidemment la préoccupation du Parquet.
Monseigneur, j'ai bien entendu le discours que vous avez prononcé lors de votre Avènement le 12 juillet 2005.
Vous avez affirmé votre exigence d'éthique, " argent et vertu " doivent se conjuguer en permanence sur l'importante place financière de Monaco avez-vous dit.
Le Parquet suivra votre exigence ; il y va en effet non seulement de l'intégrité de la Principauté de Monaco mais encore, de sa survie même au plan économique et financier.
De plus quelle serait notre légitimité à lutter contre toutes les autres formes de délinquance si nous ne luttions pas aussi contre la délinquance économique et financière dont les intérêts sont souvent colossaux.
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Les remèdes
Clémenceau disait " le gouvernement a pour mission de faire que les bons citoyens soient tranquilles, que les mauvais ne le soient pas " - quels moyens pour y parvenir...
Je suis convaincue que rien n'est jamais acquis et qu'il n'est pire chose en matière judiciaire que de s'en remettre aux seules habitudes. L'imagination produit de nos réflexions collectives doit avoir la première place.
Nos méthodes de travail devront évoluer pour s'adapter au plus près et au plus vite de l'évolution de la délinquance.
Au bénéfice d'un inventaire que je dresserai plus précisément au fil des prochaines semaines, je mettrai au point avec les services de police un traitement en temps réel des infractions, total ou partiel selon mon appréciation.
Le traitement en temps réel consiste à apporter une réponse judiciaire dans le temps où l'enquête est conclue qu'elle soit en flagrance ou en préliminaire.
Outre qu'elle permet au Parquet de disposer d'un observatoire privilégié de la délinquance commise dans le ressort ainsi que de l'activité des services d'enquête, cette pratique permet d'apporter une solution concrète aux affaires de moindre importance qui, traitées en différé plusieurs semaines après les faits, se soldent souvent par une décision de classement pur et simple ou au cas de poursuites parfois par un jugement par défaut.
La victime à laquelle l'on ne porte pas assez d'égards en l'état de notre droit positif bénéficiera de cette pratique puisqu'elle sera, elle aussi, immédiatement informée de la décision prise, de la date des débats où elle pourra faire valoir ses droits.
Au contradictoire, tant de l'inculpé que de la victime, les décisions seront encore mieux adaptées à la situation des personnes concernées et leur exécution sera facilitée sur le plan pénal comme sur le plan civil.
La mise en oeuvre de la méthode sera concomitante à l'application du nouveau Code de Procédure Pénale en projet aujourd'hui mais, en vigueur, j'espère, dans les prochains mois.
Cette nouvelle législation, conforme à la convention européenne des droits de l'homme, en harmonie avec la législation européenne induira des changements notables dans la conduite des enquêtes et des procédures.
Associée à l'adaptation des méthodes, elle conduira l'institution judiciaire, au plan pénal, à la modernité qui sied à un pays dont la place en Europe et dans le monde est reconnue.
Pour ce qui concerne la délinquance économique et financière, celle organisée à l'échelon international, je veillerai à la célérité des procédures et à leur suivi rigoureux dans le respect des traités et conventions d'entraide signés par Monaco, et ce alors même que Monsieur le Directeur des Services Judiciaires, aux termes de l'ordonnance portant organisation de la Direction des Services Judiciaires en son article 27, veille à l'application des traités d'extraditions et des conventions internationales, aux envois et réceptions des commissions rogatoires.
Le strict respect de la règle internationale participe de l'intégrité que doit revendiquer la Principauté de Monaco et que sont en droit d'exiger d'elle ses partenaires, puissances européennes et internationales.
Pour combattre ces infractions par nature complexes et réprimer leurs auteurs mobiles pour ne pas dire volatiles, il faut en appeler à la vigilance de tous, acteurs publics et économiques, simples citoyens aussi et collaborer avec les services spécialisés dont la mission pour certains est de les détecter et par suite d'alerter.
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Monseigneur, Votre Avènement et plus modestement ma nomination, dont vous m'avez honorée, nous lient au moins quelques temps dans une même volonté celle de préserver la paix publique dans un état de droit, au service de notre pays.
Qu'il me soit permis de souligner le dévouement, l'efficacité et la loyauté des forces de police, sans elles point d'action publique ; de remercier aussi tous ceux qui contribuent à l'oeuvre de justice, mes collègues magistrats, les membres du Tribunal du Travail, les avocats, greffiers, fonctionnaires du Palais de justice et ceux de la
Maison d'Arrêt, notaires, huissiers de justice - sans eux point de justice.
La justice précisément, en son activité juridictionnelle pénale, le Ministère Public a exercé devant le Tribunal Correctionnel :
- 499 poursuites par voie de citation directe,
- 90 poursuites selon la procédure de flagrant délit,
- 50 poursuites selon la procédure de comparution sur notification,
Le Parquet Général a saisi les deux Cabinets d'instruction de 67 réquisitoires aux fins d'informer et le Cabinet du Juge tutélaire de 37 procédures impliquant des mineurs de 18 ans.
Cinq informations ont été ouvertes du chef d'infractions criminelles.
Le Parquet a en outre transmis aux Cabinets d'instruction en vue de leur exécution 77 commissions rogatoires internationales, en provenance de nombreux pays étrangers.
Le Tribunal Correctionnel a prononcé 703 jugements dont 504 contradictoires, qui ont concerné au total 759 personnes, infligeant en particulier 171 peines d'emprisonnement ferme.
La Cour d'Appel a prononcé 48 arrêts en matière correctionnelle et la Cour de Révision a rendu 16 arrêts sur des pourvois formés à l'encontre de décisions pénales.
Il convient de mentionner également 72 arrêts de la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel statuant sur appels d'ordonnances du Juge d'instruction.
Enfin la Maison d'Arrêt a procédé au total à 176 écrous dont 31 au titre de la détention préventive et 1 pour extradition.
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S'agissant de l'activité juridictionnelle civile :
Madame le Juge de Paix a rendu 429 décisions.
Le Tribunal du Travail, présidé également par Madame le Juge de paix a rendu 73 décisions ; le Bureau de Conciliation du Tribunal du Travail a examiné 163 affaires.
Le Tribunal de Première Instance a jugé, toutes matières confondues, 4365 procédures.
La Cour d'Appel a prononcé 104 arrêts en matière civile et 45 arrêts ont été rendus par la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel statuant sur appels d'ordonnances du Juge tutélaire.
La Cour de Révision a prononcé 34 arrêts sur des pourvois formés à l'encontre de décisions civiles.
Enfin le Tribunal Suprême a rendu 12 arrêts.
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Je ne saurais achever mon intervention sans respecter l'usage selon lequel le Procureur Général en cette audience rappelle les évènements qui ont marqué notre vie judiciaire durant l'année écoulée.
Le corps judiciaire a connu d'importants mouvements.
- A la Cour de Révision Judiciaire
M. Thierry Cathala ayant été admis sur sa demande à cesser ses fonctions, a été nommé Conseiller honoraire.
A été nommée Mme Cécile Petit, Conseiller à ladite Cour.
- Au Parquet Général
M. Daniel Serdet, Procureur Général et Mlle Catherine Le Lay, Premier Substitut du Procureur Général, ont réintégré la magistrature française.
Mme Marie-Anne Gonelle a été nommée Premier Substitut du Procureur Général.
Mme Claire Philippoteaux épouse Dollmann a été nommée Substitut du Procureur Général.
- Au Tribunal de Première Instance
M. Pierre Baron, Juge d'Instruction au Tribunal de Grande Instance de Tulle, a été nommé Juge chargé de l'instruction.
Mlle Magali Ghenassia et M. Florestan Bellinzona ont été nommés Juges.
- Au barreau
Me Arnaud Zabaldano a été nommé Avocat près la Cour d'Appel.
Messieurs Régis Bergonzi et Olivier Marquet, ont été nommés Avocats stagiaires.
- A la Maison d'Arrêt
M. Marcel Cuq a été nommé Directeur adjoint.
Nous leur adressons nos vifs compliments et nos souhaits de parfaite réussite dans l'exercice de leurs nouvelles fonctions, comme nous félicitons M. Pierre Delvolvé, Vice-Président du Tribunal Suprême promu au grade de Commandeur dans l'Ordre de Saint Charles par Son Altesse Sérénissime le Prince Rainier III.
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Clémenceau déjà cité disait aussi " un discours long de plus d'une demi-heure n'est plus un discours mais une prise d'otages ".
J'espère que tel n'est pas le cas, sinon en égard à Votre présence Monseigneur, à celles des hautes autorités civiles et religieuses, j'encourrai des sanctions gravissimes puisqu'il s'agirait de peines criminelles.
Monsieur le Premier Président,
Permettez-moi avant toutes réquisitions de vous féliciter pour ce très bel hommage que vous venez de rendre à cette éminente personnalité qu'était Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain Rainier III.
Je regrette que ce soit pour moi la seule, et pour tous la dernière Audience Solennelle de rentrée que vous présidiez.
Nous avions vous et moi déjà lié des relations de confiance nécessaires au fonctionnement harmonieux des juridictions de la Principauté.
Monseigneur,
Je fais miens les remerciements qui Vous ont été adressés par Monsieur le Premier Président d'avoir bien voulu honorer de Votre présence cette Audience Solennelle de rentrée judiciaire.
Alors que Vous présidez désormais aux destinées de la Principauté de Monaco, elle est assurément le signe fort de l'intérêt que Vous portez à l'institution judiciaire.
Toute la communauté judiciaire Vous en est reconnaissante.
Excellences,
Monsieur le Directeur des Services Judiciaires,
Monsieur le Bâtonnier,
Mesdames et Messieurs,
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j'ai l'honneur de requérir qu'il plaise à la Cour
- Me donner acte de ce qu'il a été satisfait aux prescriptions des articles 51 et 52 de la loi du 25 juillet 1965 portant organisation judiciaire,
- Déclarer close l'année judiciaire 2004-2005 et ouverte l'année judiciaire 2005-2006,
- Ordonner la reprise des travaux judiciaires,
- Me donner acte de mes réquisitions,
et dire que du tout il sera dressé procès-verbal sur les registres des actes de la Cour d'Appel.
Monsieur le Président reprenait ensuite la parole en ces termes :
Madame le Procureur Général,
Avant qu'il ne soit fait droit par la Cour à vos réquisitions, je souhaiterais m'associer avec tous nos collègues du siège, aux pensées et compliments que vous avez exprimés à l'adresse des magistrats, fonctionnaires et avocats qui ont connu les nominations que vous avez rappelées.
Je souhaiterais à ce propos également rappeler pour ma part que c'est par ordonnance du 24 août 2005 que Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain vous a confié les fonctions de Procureur général, dans lesquelles vous avez été installée le 12 septembre 2005.
Au nom du corps judiciaire je vous renouvelle nos félicitations.
Je vous sais gré, aussi, Madame le Procureur Général, d'avoir bien voulu retracer les grands traits de l'activité civile des juridictions.
En incluant les matières administrative et commerciale ainsi que le droit social et le droit international privé, cette activité représente en effet, à Monaco, l'essentiel du travail de la plupart des magistrats, qualitativement très important.
Au terme de cette audience, il convient donc de reprendre sans plus tarder l'ensemble de nos occupations.
A cet effet,
- la Cour,
- faisant droit aux réquisitions de Madame le Procureur Général,
- déclare close l'année judiciaire 2004-2005, et ouverte l'année judiciaire 2005-2006,
- ordonne la reprise intégrale des travaux de la Cour d'Appel et des Tribunaux de la Principauté de Monaco, qui ont été partiellement suspendus au cours des vacations d'été,
- donne acte à Madame le Procureur Général de ce qu'il a été satisfait aux prescriptions de la loi,
- et ordonne que, du tout, il sera dressé procès-verbal sur le registre des actes de la Cour d'Appel.
Puis, Madame le Procureur Général ayant déclaré qu'elle n'avait pas d'autres réquisitions à formuler, Monsieur le Premier Président s'exprimait ainsi :
Monseigneur,
Qu'il me soit permis, avant de lever l'Audience Solennelle, de renouveler à Votre Altesse Sérénissime, l'expression de notre très vive reconnaissance pour avoir bien voulu honorer de Sa présence, lors de notre cérémonie de rentrée, la Justice et l'ensemble du corps judiciaire.
Je remercie également toutes les hautes autorités et personnalités qui ont assisté à cette cérémonie, en marquant ainsi l'intérêt qu'elles portent à nos travaux, de même que les hauts magistrats français et italiens qui nous ont une nouvelle fois accompagnés à l'occasion de notre rentrée.
Je les convie, maintenant, à se rendre dans la salle des pas perdus de la Cour d'Appel, à l'invitation de Monsieur le Directeur des Services Judiciaires.
L'audience solennelle est levée.
A l'issue de l'Audience Solennelle, Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain accompagné par M. Alain Guillou, Directeur des Services Judiciaires, S'est rendue dans la Salle des Pas Perdus de la Cour d'Appel.
De nombreuses personnalités avaient tenu à assister à cette Audience Solennelle, aux premiers rangs desquelles on notait :
S.E.M. Jean-Paul Proust, Ministre d'Etat,
M. Charles Ballerio, Président du Conseil de la Couronne,
M. Stéphane Valéri, Président du Conseil National,
S. Exc. Mgr Barsi, Archevêque de Monaco,
M. René Novella, Secrétaire d'Etat,
M. Jean Grether, Directeur du Cabinet de S.A.S. le Prince,
M. Serge Telle, Consul Général de France, représenté par Mme Christiane Galland, Consul Adjoint,
M. Mario Polverini, Consul Général d'Italie,
M. le Contre-Amiral Alexandros Maratos, Président du Bureau Hydrographique International,
S.E.M. Raoul Biancheri, Ministre Plénipotentiaire,
S.E.M. Georges Grinda, Ministre Plénipotentiaire, chargé auprès du Ministre d'Etat des questions européennes,
M. Philippe Deslandes, Conseiller de Gouvernement pour l'Intérieur,
M. Franck Biancheri, Conseiller de Gouvernement pour les Finances et l'Economie,
M. Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement pour l'Equipement, l'Environnement et l'Urbanisme,
S.E.M. Rainier Imperti, Délégué aux Relations Extérieures,
M. Denis Ravera, Conseiller de Gouvernement pour les Affaires Sociales et la Santé,
M. Claude Boisson, Vice-Président du Conseil National,
M. Norbert François, Vice-Président du Conseil d'Etat,
Me Henry Rey, Conseiller National,
M. Georges Lisimachio, Secrétaire Général du Cabinet de S.A.S. le Prince Souverain,
M. André Garino, Président du Conseil Economique et Social,
Me René Clerissi, Président de la Commission de Contrôle des informations Nominatives,
M. Robert Colle, Secrétaire Général du Ministère d'Etat,
M. Laurent Anselmi, Directeur des Affaires Juridiques,
M. Bernard Gastaud, Conseiller pour les Affaires Juridiques et Internationales,
Mme Marie-Noëlle Albertini, Conseiller du Ministère d'Etat en charge des recours et de la médiation,
Mme Sophie Thevenoux, Directeur Général du Département des Finances et de l'Economie,
M. Jean-Noël Veran, Directeur Général du Département de l'Equipement, de l'Environnement et de l'Urbanisme,
M. Thierry Picco, Directeur Général du Département des Affaires sociales et de la Santé,
M. Robert Fillon, Directeur Général du Conseil National,
M. Jean-François Sautier, Directeur de la Sûreté Publique, représenté par M. le Commissaire Claude Trianon,
Mme Ariane Picco-Margossian, Directeur du SICCFIN, représentée par Mme Danièle Mezzana Ghenassia,
Mme Isabelle Rosabrunetto, Directeur du Budget et du Trésor,
M. Claude Cottalorda, Directeur de la Fonction Publique et des Ressources Humaines,
M. Gérard Emmel, Directeur des Services Fiscaux, représenté par M. Vétillard,
Mme Lambin de Combremont, Commissaire général chargé de la Direction de l'Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports,
M. Franck Taschini, Administrateur des Domaines,
Mme Catherine Orechia-Matthysens, Directeur de l'Expansion Economique,
Mme Martine Provence, Secrétaire Général de la Direction des Services Judiciaires,
M. Antoine Montecucco, Greffier en Chef honoraire,
Mme Bernadette Zabaldano, Secrétaire Général du Parquet,
Mme Anne Negre, Directeur de l'Action Sanitaire et Sociale,
M. Alain Malric, Chef du Service de Contrôle des Jeux, représenté par M. Christian Ollier,
M. le Colonel Yannick Bersihand, Commandant de la compagnie des Sapeurs-Pompiers,
M. Christian Zabaldano, Directeur de la Maison d'Arrêt,
M. Marcel Cuq, Directeur-Adjoint de la Maison d'Arrêt,
M. François Chantrait, Directeur du Centre de Presse,
M. Christian Carpinelli, Commissaire Divisionnaire,
M. Jean-Pierre Torrano, Commissaire de Police,
M. Philippe Leblanc, Chef de la Division de Police Maritime et Aéroportuaire,
M. Richard Marangoni, Chef de l'Administration et de la formation à la Sûreté Publique,
M. Jacques Wolsok, Président du Tribunal du Travail,
M. Jean-Paul Hamet, Vice-Président du Tribunal du Travail,
Me Paul-Louis Aureglia, Notaire,
Mme Maud Colle Gamerdinger, Directeur de l'Environnement, de l'Urbanisme et de la Construction,
Mme Marie-Pierre Gramaglia, Conseiller technique au Ministère d'Etat,
M. Patrick Simon, Directeur du Musée d'Anthropologie Préhistorique,
M. le Professeur Jean Jaubert, Directeur du Musée Océanographique,
M. le Professeur Pierre Julien, Professeur à la Faculté de droit et de sciences économiques,
M. le Professeur Jean-François Renucci,
M. Claude Valion, Receveur Principal des Douanes,
M. Jean-Luc Delcroix, Directeur d'Etablissement principal des Postes,
Mme Corinne Querci, Assistante sociale chef,
Me Jacques Randon, Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Nice,
Mme Khaïda, Inspecteur des Pharmacies,
M. Jacques Orecchia, Administrateur judiciaire,
M. Jean-Paul Samba, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Christian Boisson, Administrateur judiciaire et syndic,
Mme Bettina Dotta, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Jean Billon, Conseil juridique,
Mme Catherine Catanèse, Secrétaire du Tribunal du Travail,
Etaient également présents :
M. Jean-Pierre Atthenont, Premier Président de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence,
M. Gabriel Bestard, Procureur Général près la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence,
M. Jean-Marc Le Gars, Président du Tribunal Administratif de Nice,
M. Ettore Criscuoli, Président de la Cour d'Appel de Gênes,
M. Lucien Dinoto, Procureur Général de la Cour d'Appel de Gênes,
M. Jacques Lameyre, Président du Tribunal de Grande Instance de Grasse,
M. Marc Desert, Procureur de la République de Grasse,
M. Gianfranco Boccalatte, Président du Tribunal de San Remo,
M. Mariano Gagliano, Procureur de la République de San Remo,
Cette Audience a été précédée par la Messe du Saint-Esprit qui a été concélébrée avec l'ensemble du clergé diocésain par Monseigneur Bernard Barsi, Archevêque de Monaco. Son Excellence Monsieur René NOVELLA, Secrétaire d'Etat, a représenté Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain.
A l'issue de la Messe du Saint-Esprit, Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, escortée du Colonel Serge Lamblin, Chambellan de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, étaient accueillis au Palais de Justice par M. Alain Guillou, Directeur des Services Judiciaires, Président du Conseil d'Etat.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain était conduit par le Directeur des Services Judiciaires dans la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel où était réuni l'ensemble des magistrats. Le Directeur des Services Judiciaires L'accueillait en ces mots :
Monseigneur,
En ce jour de la Rentrée Solennelle des Cours et Tribunaux de la Principauté de Monaco, cérémonie traditionnelle qui nous est particulièrement chère, Vous avez bien voulu être parmi nous et saluer individuellement les premiers serviteurs de Votre Justice que sont les magistrats ici réunis.
Votre présence à nos côtés, en ce jour, Monseigneur, nous touche profondément.
Elle est non seulement un éclatant témoignage de Votre attachement personnel à l'Oeuvre de Justice mais aussi un formidable encouragement pour chacun d'entre nous, attaché à remplir au mieux la mission que Vous avez bien voulu nous confier individuellement.
C'est donc avec l'émotion que nous partageons tous, que je voudrais Vous exprimer notre reconnaissance et remercier respectueusement Votre Altesse pour l'honneur qui nous est ainsi fait.
L'assemblée, ici, de Vos juges et procureurs est porteuse de symboles forts, Monseigneur.
Elle est d'abord le concret et vivant témoignage de la coopération étroite, et donc de l'amitié, qui unissent deux pays : Monaco et la France dans le creuset commun de la magistrature monégasque.
Elle témoigne, aussi, de l'union des générations quand des aînés, à l'issue d'une carrière professionnelle prestigieuse, encadrent et guident les plus jeunes.
Jeune génération où il me plaît de constater, Monseigneur, l'émergence croissante en nombre de jeunes monégasques de qualité qui ont choisi de servir la Justice de leur pays.
Comment ne pas avoir en ce jour, une pensée émue et reconnaissante pour Votre vénéré Père le Prince Rainier III, infatigable bâtisseur du Droit, comme Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel nous le rappellera tout-à-l'heure ?
Comment ne pas voir dans Votre présence aujourd'hui parmi nous, le témoignage de la continuité de cette action patiente des Princes de Monaco dans la construction d'une Justice moderne et efficace ?
Sous Votre Haute Autorité, Monseigneur, un important chantier est en cours :
- nouveau statut de la Magistrature, loi sur la nouvelle organisation judiciaire, nouveau Code de Procédure Pénale, textes qui seront soumis dans les prochaines semaines au vote du Conseil National,
- réforme engagée du Code de Procédure Civile,
- transposition en droit interne de nos engagements internationaux,
- réorganisation, aujourd'hui achevée, de la Maison d'Arrêt et professionnalisation en cours des personnels,
- réorganisation et modernisation du Greffe qui seront entreprises dès le début de l'année 2006.
Dans un monde toujours plus complexe où les justiciables manifestent chaque jour davantage l'exigence légitime d'une Justice de qualité, chacun de Vos magistrats, Monseigneur, est conscient de ses devoirs.
Les nombreux engagements conventionnels de la Principauté au plan international, l'adhésion au Conseil de l'Europe et la ratification prochaine de la Convention Européenne des Droits de l'Homme mettent de plus en plus les juristes et les magistrats en particulier, en première ligne.
Daignez être assuré, Monseigneur, de notre profond et fidèle dévouement, de notre attachement sans faille à la ligne tracée par Vos illustres ancêtres pour servir le Droit, comme de notre attachement indéfectible au service des idéaux qui sont Vôtres et que Vous avez, récemment, solennellement rappelés.
A l'issue de son allocution, le Directeur des Services Judiciaires présentait à Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain les magistrats en exercice et les magistrats honoraires.
Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain était ensuite conduite par le Directeur des Services Judiciaires à la Salle d'Audience de la Cour d'Appel.
L'audience Solennelle débutait sous la présidence de M. le Premier Président de la Cour d'Appel qui avait à ses côtés M. René Vialatte, Premier Président honoraire, Mme Monique François, Vice-Président, M. Dominique Adam et Mme Catherine Mabrut, Conseillers, ainsi que de MM. Robert Franceschi et Philippe Rosselin, Conseillers honoraires.
M. Roland Drago, Président du Tribunal Suprême était présent.
M. Yves Jouhaud, Premier Président de la Cour de Révision était accompagné de M. Jean Apollis, Vice-Président, Mme Agnès Cavellat-Delaroche, MM. Roger Beauvois, Jean-Pierre Dumas et José Chevreau, Conseillers.
M. Philippe Narmino, Président du Tribunal de Première Instance, conduisait les magistrats de sa juridiction :
Mme Brigitte Gambarini, Premier Vice-Président,
M. Jean-Charles Labbouz, Vice-Président,
Mme Isabelle Berro-Lefevre, Premier Juge,
Mme Muriel Dorato, Premier Juge,
M. Gérard Launoy, Premier Juge,
M. Bruno Nedelec, Juge d'instruction,
M. Pierre Baron, Juge d'instruction,
Mlle Anne-Véronique Bitar-Ghanem, Juge,
M. Jérôme Fougeras-Lavergnolle, Juge tutélaire,
M. Emmanuel Robin, Juge,
Mlle Magali Ghenassia, Juge,
M. Florestan Bellinzona, Juge.
Mme Martine Castoldi, Premier Juge chargée de la Justice de Paix était également présente.
Mme Annie Brunet-Fuster, Procureur Général, représentait le Ministère Public avec à ses côtés, Mme Marie-Anne Gonelle, Premier Substitut, Mlle Sabine-Anne Minazzoli, Substitut détaché à la Direction des Services Judiciaires, Mme Stéphanie Vikström et Mlle Claire Dollmann, Substituts.
Le plumitif d'audience était tenu par Mme Béatrice Bardy, Greffier en Chef, assistée de Mme Laura Sparacia, Greffier en Chef adjoint et de Mme Liliane Zanchi, Greffier Principal, entourés des greffiers en exercice.
Me Marie-Thérèse Escaut-Marquet et Me Claire Notari occupaient le banc des huissiers.
Me Etienne Leandri, Bâtonnier, était accompagné des membres du barreau.
Etaient également présents des représentants des Notaires, des experts-comptables, des administrateurs judiciaires et syndics.
Après avoir déclaré ouverte l'Audience Solennelle, Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel s'exprimait en ces termes :
Monseigneur,
En ouvrant cette Audience Solennelle de rentrée, qui sera la dernière que je présiderai, j'éprouve une émotion profonde à y siéger en la présence personnelle de Votre Altesse Sérénissime peu après Son avènement comme Prince Souverain de Monaco.
C'est en effet au nom du Prince que les cours et tribunaux rendent la justice dans la Principauté, et aujourd'hui, Monseigneur, les magistrats ressentent comme un immense honneur l'occasion qui leur est donnée par Votre Altesse d'être solennellement réunis en présence de leur Prince, source de la justice et détenteur originaire du pouvoir judiciaire dont l'exercice se trouve entièrement délégué aux juridictions, par la Constitution.
Les magistrats de la Cour d'Appel, du Tribunal de Première Instance et de la Justice de Paix sont ici rassemblés, Monseigneur, afin de répondre aux prescriptions de l'article 51 de la loi portant organisation judiciaire du 15 juillet 1965, à l'occasion de l'ouverture de leur année judiciaire.
Ils sont entourés du Président du Tribunal Suprême, des membres de la Cour de Révision, qui inaugurent aujourd'hui leur session, ainsi que des membres du Greffe général et du Barreau, comme des notaires et des huissiers.
Conscients de la difficulté de leur tâche au service des juridictions, dans l'exercice des pouvoirs que celles-ci tiennent de leur Souverain, tous ces magistrats, leurs collaborateurs et l'ensemble des auxiliaires de justice, me permettront de faire part à Votre Altesse de la profonde gratitude que leur inspire Votre présence solennelle en ce lieu.
Ils y discernent un insigne encouragement pour la poursuite de leurs travaux, et une marque particulière de l'intérêt que Votre Altesse porte à la Justice, et à ceux qui font profession de la servir.
En leur nom et personnellement, Monseigneur, je prie Votre Altesse Sérénissime d'accepter l'hommage de notre profond respect et de notre entier et fidèle dévouement.
Excellences,
Monsieur le Directeur des Services judiciaires,
Monsieur le Bâtonnier,
Mesdames et Messieurs,
Sans doute en raison de ce qu'elle émane du Prince, incarnation de la souveraineté, la justice de la Principauté, que nous avons le privilège de servir, dispose depuis fort longtemps, déjà, des moyens humains et matériels qui lui sont nécessaires pour faire face à ses charges, et assurer son bon fonctionnent en toute indépendance, ce dont je puis personnellement témoigner.
Sans nous reporter aux époques décrites par Mme Brigitte Gambarini, Premier Vice-Président du Tribunal dans son discours prononcé le 2 octobre 1995, qui avait trait notamment à la justice déléguée, songeons que c'est à cette date qu'a été célébré le soixante cinquième anniversaire de l'inauguration de ce Palais de Justice.
C'est donc déjà 75 ans qui nous séparent, cette année, de son édification à l'initiative du Prince Louis II qui avait ainsi matérialisé son attachement à l'oeuvre de justice, de même qu'il avait inspiré le droit international humanitaire en créant la Commission médico-juridique dont découleront les conventions de Genève de 1949, et aménagé le droit interne, en instituant par voie législative les importantes juridictions que sont le Tribunal du travail et la Commission arbitrale des loyers commerciaux.
Assurément, et depuis leur création, ces juridictions ont contribué à la paix sociale et accompagné les débuts du considérable et harmonieux développement de la Principauté que nous connaissons aujourd'hui.
Comment donc ne pas évoquer à cet instant, Monseigneur, la mémoire du successeur du Prince Louis II, le Prince Rainier III, Votre Père, dont Votre Altesse, lors de Son discours solennel prononcé le 12 juillet dernier, nous a rappelé la totale dévotion à la cause et au développement de la Principauté, ainsi qu'en rendent déjà compte l'Histoire et ses principaux acteurs.
Au cours de cette audience qui permet au corps judiciaire de se réunir en son entier pour la première fois depuis le décès de Son Altesse Sérénissime le Prince Rainier III de Monaco, douloureusement survenu ce 6 avril 2005 qui nous a tant peinés, je souhaiterais, Monseigneur, être admis à perpétuer encore la reconnaissance et le respect que nous a dictés la vie de ce grand Prince.
Il ne m'appartient pas, comme magistrat, de faire Son éloge personnel, tant la confiance qu'Il a bien voulu m'accorder a seule justifié la légitimité de mon action au service des juridictions monégasques, durant de nombreuses années.
D'autres personnes plus qualifiées s'y sont d'ailleurs livrées, bien mieux que je ne saurais y parvenir.
Qu'il me soit cependant permis, Monseigneur, d'abord en tant qu'homme d'exprimer à nouveau au nom de nous tous, la profonde tristesse que nous avons éprouvée lors de la disparition du Prince Rainier III, dont Votre Altesse, au cours de Son avènement, a fait revivre en nous l'émouvant souvenir.
Comme homme de loi ensuite, et au seuil de cette année judiciaire, Monseigneur, qui marque le début du règne de Votre Altesse, je souhaiterais, pour ma part, prolonger encore ce souvenir en évoquant à l'aide de quelques uns de Ses propres mots divers éléments remarquables de l'oeuvre accomplie par le Prince Rainier III, pour l'épanouissement de la Justice et du Droit de Monaco, que nous avons mission de connaître et d'appliquer.
Depuis les réflexions de nombreux juristes et penseurs, tels Cicéron ou Saint Thomas d'Acquin, et comme l'indique la parenté des mots latins " jus et justitia " nous pressentons tous, que la Justice n'a d'autre objet que le Droit, celui-ci étant, essentiellement, lui-même axé sur la recherche de ce qui est juste, quels qu'en soient les fondements.
Dans l'expression de sa volonté politique apte à définir le bien commun devant être apporté à la Cité par les juridictions, il n'est pas douteux que le Prince Rainier III a, dès l'origine de Son règne, fait Sienne la totale conjonction de ces deux concepts.
Le 2 octobre 1978, et pour la première fois dans l'histoire des institutions judiciaires de Monaco, le Prince Souverain avait tenu à assister à l'audience solennelle de rentrée des cours et tribunaux, ainsi Monseigneur, que Votre Altesse Sérénissime a Elle-même daigné le faire, ce jour mémorable, en honorant de Sa présence notre assemblée.
Le Prince Rainier III s'est alors exprimé afin de rappeler comme suit, quel était notre rôle de juges au sein de la communauté nationale. Voici ses mots :
" Faire rendre à chacun ce qui lui est dû, garantir à chacun son bon droit, infliger aux délinquants les peines prévues par la loi, sans haine et sans passion, en toute indépendance, dans le souci de garantir la société contre toute action qui en altérerait l'ordre, est la tâche des magistrats des cours et tribunaux à qui j'ai confié, par des dispositions constitutionnelles, la mission de rendre la justice (...)
C'est une tâche de plus en plus difficile que celle du juge. Sa décision est souvent critiquée. Au plan civil, les parties, obnubilées par leurs intérêts divergents, sont mécontentes de la décision rendue qui ne consacre pas intégralement leur prétention. Au plan pénal, il supporte tout le poids du conflit constant entre le souci du maintien de l'ordre public et du reclassement du délinquant.
Cette tâche, à notre époque où les sentiments et les thèses les plus étonnantes s'expriment souvent avec violence et trouvent hélas quelque soutien dans certains esprits troublés, devient toujours plus délicate. Je suis convaincu que je pourrai toujours m'en remettre à la sagesse des tribunaux et que rien ne les empêchera de continuer leur mission avec conscience et énergie, en toute sérénité ".
Puis, le Prince Rainier III, évoquant la mission de la Cour de Révision affirmait :
" fixer l'interprétation du droit est une mission essentielle qui contribue à l'administration d'une bonne justice, à la défense des droits du citoyen et à la sauvegarde de l'organisation judiciaire.
Nous sommes tous conscients de l'importance et du caractère fondamental du rôle de cette juridiction suprême " (...)
Quelques années plus tard, lors de la célébration du soixante-cinquième anniversaire de la construction de ce Palais, que nous venons de rappeler, et alors que Vous même, Monseigneur, étiez présent lors de cette cérémonie solennelle, le Prince Rainier III avait une nouvelle fois tenu à évoquer la part nécessaire du droit dans notre activité judiciaire, et le rôle corrélatif du juge dans cette activité.
Après avoir rappelé que la Justice est rendue à Monaco au nom du Prince, même si elle est exercée par les cours et tribunaux, le Prince Rainier III avait alors affirmé :
" il découle de ce principe que son bon fonctionnement concerne le Prince au plus haut degré. J'en suis pleinement conscient.
Je crois profondément (...) que les juges doivent être avant tout indépendants, non seulement dans le droit mais aussi dans les faits.
Je pense aussi qu'une bonne justice doit être une justice sereine, qui sache demeurer à l'écart des remous politiques et médiatiques, tout en restant ouverte aux réalités de notre société.
La justice doit protéger les personnes tout en restant attentive à l'intérêt public.
Chargée d'appliquer la loi et rien que la loi, elle doit respecter le partage des pouvoirs organisé par notre Constitution.
C'est là une tâche lourde et délicate dont la difficulté n'échappe à personne.
De l'indépendance de la justice, je suis garant auprès des justiciables.
Quant à la sérénité des juges, je n'en suis pas maître mais cela n'est aucunement pour moi un sujet d'inquiétude car je sais que nos magistrats n'y ont jamais failli.
Je suis convaincu que je peux compter sur eux, pour maintenir dans l'intérêt de tous, ces vertus de rigueur morale et d'impartialité qui ont toujours fait l'honneur de notre corps judiciaire et la fierté de notre communauté. "
Ces mots, qui résonnent en nous comme de rigoureux préceptes de valeur et d'éthique, ont-ils toujours été entendus de la part des magistrats ?
Sans qu'il m'appartienne d'exprimer ici de réponse j'y vois, pour ma part, l'expression incontestable d'une conduite à tenir, fondamentalement destinée à prévenir une quelconque inadéquation de l'application du Droit de la part de la Justice, celle-ci étant, ainsi, inséparable du Droit.
S'agissant encore de la Justice, et indépendamment de son orientation légale, définie de la sorte par le Prince Rainier III, je ne voudrais pas manquer de rappeler ici, plus concrètement, et pour l'avoir vécu, que, sous Son règne, d'importants moyens ont été constamment octroyés aux juridictions afin de leur permettre d'accomplir leur mission dans les meilleures conditions, en fonction de l'évolution des besoins, liés au développement de la Principauté.
Sans entrer dans le détail des statistiques, rappelons simplement qu'en 1976 six postes de magistrats étaient attribués au Tribunal de Première Instance, qui ont été, depuis lors, portés à treize, de même que les effectifs du Greffe général ont, pareillement, connu une progression considérable.
C'est également à la même période que de remarquables travaux immobiliers d'aménagement, d'élévation et d'extension de notre Palais de justice ont été décidés ou approuvés par le Prince Rainier III, pour accompagner l'accroissement des effectifs, en même temps qu'était entreprise une très complète informatisation des services, actuellement en cours de perfectionnement, qui place certainement les juridictions monégasques parmi les mieux loties à ce titre, ce qui témoigne ainsi, et pour une grande part, de leur incontestable essor.
C'est probablement celui-ci, déjà manifesté, et l'attachement traditionnel des magistrats monégasques et du personnel du Greffe Général à la qualité de leur justice, qui pouvait alors conduire le Prince Rainier III à exprimer le 2 octobre 1985 à tous, la considération qu'Il leur portait.
Mais, la qualité de la justice étant intimement liée à celle de la législation, il est plus que probable que l'essor de la justice monégasque n'aurait nullement pu se réaliser, comme on l'a constaté, sans une nouvelle écriture du droit de la Principauté tel qu'il était en vigueur en 1949, à l'Avènement du Prince Rainier III, et dont l'aménagement et la modernisation devaient nécessairement conduire et aider, par la suite, le développement de cet Etat.
Cette modernisation juridique, très complète et légitimement ambitieuse, fut d'abord l'oeuvre du Prince Rainier III. Elle justifie à présent quelques rappels et réflexions que je souhaiterais vous livrer, et que l'on pourrait articuler autour du droit interne et du droit international, tant l'adaptation de chacun de ces deux droits aux réalités de la Principauté s'est révélée utile à celle-ci, si l'on songe, notamment, à l'augmentation de son territoire, de sa population, et du nombre de ses emplois, et au développement parallèle de ses activités économiques, industrielles, financières, sportives, scientifiques et culturelles, et, partant, à l'importance morale et politique accrue du rang de cet Etat dans le concert des Nations.
Il est certainement difficile de s'attacher au détail des 792 lois et 16.726 ordonnances juridiques ou nominatives que le Prince Rainier III a promulguées tout au long de son règne.
Sans pouvoir ainsi donner une vision exhaustive de Son oeuvre législative, je souhaiterais toutefois rappeler, en ce domaine, quelques unes des phrases, très significatives qu'Il a prononcées à l'occasion de la nouvelle année 1960, et qui traduisent, avec clarté, le caractère visionnaire de la volonté législative de ce Souverain.
Voici les mots du Prince Rainier III :
" les Etats, quelle que soit leur importance, se doivent, pour garantir leur oeuvre, non pas seulement de s'imposer une sage et saine gestion de leurs finances, mais aussi suivre la perpétuelle évolution que leur imposent les exigences de la vie moderne.
Ce travail incessant d'adaptation demeure, soyez en certains, ma préoccupation majeure, elle est aussi celle de mon gouvernement. On en trouve le témoignage dans le bilan substantiel qu'au terme de cette année nous pouvons dresser de nos efforts.
Sur le plan législatif, 33 ordonnances-lois adoptées et promulguées dans l'année démontrent l'activité déployée en créant, instituant et améliorant toutes les dispositions nécessaires pour assurer dans tous les domaines le développement harmonieux de la Principauté, et pour satisfaire dans toute la mesure compatible avec un juste équilibre, les aspirations légitimes de chacun. "
Le Prince Rainier III évoquait ensuite le détail des nombreux textes adoptés, dont certains revêtent une importance particulière, comme ceux concernant la location des locaux à usage d'habitation, l'urbanisme, la construction et la voirie ou encore, la retraite des salariés, la durée du travail, ou l'aide à la famille monégasque.
Au regard de ces rappels volontaires et précis, il n'est pas douteux que le Prince Rainier III entendait réaliser au plan législatif le voeu qu'Il avait six ans plus tôt annoncé aux monégasques, dans les termes suivants, à l'occasion également du Nouvel An :
" Il est de notre devoir premier - avait-Il dit - de faire tout pour que Monaco entre dans une ère nouvelle de prospérité et de richesse, mais cela ne peut se faire tout seul : il faut au préalable qu'une période d'activité intense réalise le cadre nouveau indispensable à provoquer et amener cette prospérité "
Rappelons, également, dans le même ordre d'idées ces mots du Prince Rainier III, en octobre 1955, qui unissaient encore, dans l'intérêt bien compris de la Principauté, Droit et développement :
" Depuis 30 ans, on parlait de la création du Répertoire de commerce. Toute une législation délicate a été créée et le répertoire va fonctionner ; une autre législation cohérente est établie, après plusieurs années d'étude, sur les brevets, inventions et marques. Cette importante réforme va porter ses fruits dans le domaine économique et fiscal et assurera de nouvelles recettes budgétaires ".
A la lumière de ces propos, comme à l'analyse des textes législatifs et réglementaires que le Journal de Monaco a publiés depuis l'accession au trône du Prince Rainier III, et qui recouvrent tous les domaines d'activité de l'ensemble des personnes physiques ou morales oeuvrant dans la Principauté, il ne serait nullement excessif de louer l'action législative du Prince Rainier III en étendant à la matière juridique la dénomination de " Prince bâtisseur ", qu'Il affectionnait de Son vivant, ce grand Souverain s'étant incontestablement révélé, pour nous juristes, comme un " Bâtisseur du Droit ".
A l'évidence, et alors que l'histoire des institutions rapporte combien étaient encore embryonnaires ou manquants en 1949, des pans entiers de législation interne dans la Principauté, le résultat de l'ouvrage juridique accompli de la sorte à l'initiative du Prince Rainier III, avec le concours, pour sa part, du Conseil national, a conduit en peu de temps la Principauté au fonctionnement équilibré d'un parfait Etat de Droit, dans tous les domaines de l'activité humaine.
Au-delà de la consistance des diverses législations particulières, la pierre frontale de cette réalité, se trouve incontestablement représentée par la Constitution du 17 septembre 1962, que le Prince Rainier III a donnée à son peuple et à tous les habitants de la Principauté, et qui a sans aucun doute procuré à celle-ci les moyens de son épanouissement et de sa stabilité.
Cet acte fondamental, intervenu après diverses incertitudes politiques, se révèle, en définitive, par sa nature intrinsèque, et ainsi que l'ont souligné divers auteurs, comme un acte de libre volonté du Souverain prenant la nature d'un Pacte entre celui-ci et la nation, pacte qui ne pourra être désormais modifié selon la décision du Prince, que par accord entre Lui-même et les représentants de la nation, et dont les effets ne pourront être suspendus.
Après avoir réitéré comme principe de gouvernement pour la Principauté, celui traditionnel à Monaco de la " monarchie héréditaire et constitutionnelle ", cet acte énonce encore, avec toutes les conséquences qui en découlent, que la Principauté est un Etat de Droit attaché au respect des libertés et des droits fondamentaux.
Et l'on sait que le terme Etat de Droit désigne dans la langue juridique tous les ordres étatiques qui sont fondés sur trois principes, opportunément rappelés, à propos de cette Constitution, par le doyen Vedel et par les professeurs Weil et Bridel.
Ces principes sont les suivants :
- toute source juridique trouve son fondement et sa validité dans les sources juridiques supérieures, la Constitution étant, dans l'ordre interne, la source suprême ;
- les compétences ne s'exercent que dans les conditions fixées par la Constitution et par les lois et règlements ;
- il existe des voies de droit destinées à annuler ou a paralyser les actes publics exprimés contraires au droit positif, et, le cas échéant à en réparer les conséquences dommageables.
Nous pensons pouvoir dire, sans risque d'erreur, que cet acte constitutionnel, fondateur de la sécurité juridique offerte désormais à tous par le Prince Rainier III, a été l'un des premiers instruments de la politique de développement qu'Il a assignée à l'Etat, pour assurer la modernité de celui-ci, nécessaire à cette politique.
A l'issue de la promulgation de la Constitution, une cérémonie s'est déroulée au Palais Princier, dans la salle du Trône, le lundi 17 décembre 1962. Lors de Son allocution prononcée à cette occasion, le Prince Rainier III a alors souligné que la nouvelle Constitution, devant se substituer désormais à celle de 1911, avait répondu notamment à la nécessité de perfectionner nos institutions " l'adaptation des institutions de l'Etat aux nécessités du monde moderne et à l'évolution de la pensée politique ayant en effet conduit, a-t-Il précisé, à l'organisation des pouvoirs publics dans une perspective nouvelle "
A quoi le Prince Rainier III a ajouté :
" On pourra dire que la Constitution du 17 décembre 1962, élaborée et mise au point dans un esprit de parfaite entente nationale, dans le contexte de nos traités avec la France, associe pour l'avenir des rapports confiants aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Nous pouvons nous en réjouir, comme nous pouvons aussi nous féliciter du bilan économique de ces deux dernières années ; car la prospérité de la Principauté n'a cessé de s'accroître régulièrement pour le bien général. Ainsi par une situation financière assainie et la constitution de réserves financières d'investissements pour l'équipement de la Principauté, un important programme de travaux de modernisation a pu être entrepris dans les domaines hospitalier, scolaire, sportif, social et technique. Tout ceci prouve, s'il en était besoin, la conscience que nous avons de notre avenir, qu'il soit proche ou lointain.
Pour ma part, ma préoccupation constante est de bâtir, pour mon successeur une Principauté, stable, prospère et heureuse ".
En rapportant, Monseigneur, ces propos qui désignaient déjà Votre Altesse il y a quarante trois ans, nous ne pouvons manquer d'être émus par le caractère foncièrement prémonitoire du dessein que s'assignait Votre Père, et qui se trouve aujourd'hui réellement accompli, pour une grande part, assurément, en raison de l'application même du Droit interne que le Prince Rainier III avait préalablement construit...
Une telle construction juridique n'a pas non plus été absente de la volonté politique du Prince Rainier III, s'agissant du Droit international auquel ce Souverain s'est, très tôt, consacré en ses réflexions, pour le bonheur et la prospérité de son peuple.
A l'occasion de la Fête nationale du 19 novembre 1957, et après avoir relevé que l'intérêt de la Principauté dans tous les domaines justifiait les raisons d'envisager l'avenir avec espoir et confiance, le Prince Rainier III avait affirmé :
" La Principauté se doit d'évoluer avec son temps et se montrer capable d'efforts de modernisation mais elle doit aussi affirmer sa présence dans la vie internationale et je suis heureux et fier de constater que Monaco participe à des sessions qui s'étendent aux domaines les plus divers - entre autres dans des institutions dépendant de l'ONU " (...).
Lors d'une session du Comité Régional de l'Europe de l'Organisation mondiale de la Santé, le 3 septembre 1958, le Prince Rainier III mentionnait en outre :
" Certains Etats, petits par leur étendue et par le nombre de leurs habitants peuvent, dans les domaines humanitaires se hisser au niveau des grands. Seules comptent la pensée et les réalisations. Or la Principauté de Monaco a toujours eu une dilection particulière pour la coopération internationale. Elle est heureuse d'être un des membres de votre Organisation selon ses moyens et ses ressources " (...)
Dans cet ordre d'idées nous ne pouvons, à l'évidence, passer sous silence les déclarations du Prince Souverain à l'occasion de l'admission de la Principauté de Monaco au sein de l'Organisation des Nations Unies, laquelle, intervenue le 28 mai 1993, illustre magnifiquement le succès de la volonté inlassable du Prince Rainier III d'asseoir sur les meilleures bases le statut de la Principauté.
Devant le Conseil National réuni en séance privée le 2 juin 1993, le Prince Rainier III s'exprimait ainsi :
" Le 28 mai dernier a été effectivement pour moi un jour de grande, très grande satisfaction. S'il a marqué la reconnaissance universelle de la Principauté comme Etat souverain et indépendant, il est aussi pour moi la conclusion, très satisfaisante d'un des axes de la politique que je m'étais fixé dès mon accession au trône : affirmer sur le plan international, l'existence, la présence, le rôle de Monaco.
Le Prince Louis II, Mon Grand-Père, avait ressenti avec tristesse comme tous les monégasques, le refus de la société des Nations d'admettre Monaco parmi ses membres. Aussi, dès 1949 me suis-je efforcé d'obtenir l'adhésion de Monaco aux Organisations créées à l'issue de la guerre, dont le but essentiel, au-delà de leurs aspects techniques et spécialisés, était de développer la coopération internationale ".
Après avoir rappelé l'adhésion de Monaco à de nombreuses organisations internationales, le Prince Rainier III relevait à ce propos :
" Au-delà de son activité internationale dont je viens de souligner l'appréciation favorable qu'elle suscite, la Principauté ne possède-t-elle pas depuis des siècles, les éléments qui, en droit international caractérisent un Etat souverain indépendant ; un territoire avec les compléments que sont les eaux territoriales et un espace aérien, une population, une organisation politique et administrative spécifique " (...).
Le Prince Rainier III concluait ensuite :
" La foi dans les destinées de la Principauté confortée par la sagesse, la rigueur et l'imagination créatrice de ses gouvernants et de son peuple ont permis à Monaco de survivre depuis des siècles aux tempêtes de l'histoire.
Nous-mêmes et nos enfants avons aujourd'hui de nouvelles raisons de croire en notre avenir si intimement partie de celui de notre Patrie ".
Je ne puis, hélas, décrire ici, même l'essentiel seulement de l'action du Prince Rainier III lors de l'adhésion de la Principauté aux quatorze institutions spécialisées de l'ONU auxquelles cet Etat est partie, non plus qu'aux vingt-cinq organisations intergouvernementales ou aux trente-sept organisations internationales non gouvernementales auxquelles la Principauté apporte encore un fructueux concours.
Il est toutefois significatif que cette participation de Monaco à la vie internationale, fortement accentuée par le Prince Rainier III depuis les débuts de son règne, révèle combien ce Souverain a été le partisan infatigable et convaincu d'une étroite coopération entre les nations.
Celle-ci, par sa durée et sa constance, a permis à Monaco, l'édification juridique d'un ensemble de normes de droit conventionnel qui ont, chacune, complété ou même supplanté, des éléments antérieurs du droit interne, plus imparfaits ou simplement moins modernes.
Evoquant à nouveau la Constitution de 1962, dont l'article premier implique la reconnaissance à Monaco de la primauté du droit international sur le droit interne, ainsi que l'impossibilité corrélative pour la Constitution de soustraire la Principauté à ses obligations de nature internationale, nous devons certainement penser, à ce titre, aux modifications du droit interne, légales ou même constitutionnelles, qui ont été commandées par la récente adhésion de Monaco au statut du Conseil de l'Europe, au cours d'une cérémonie qui a eu lieu le 4 octobre 2004 à Strasbourg.
Lors de cette cérémonie, Monseigneur, Votre Altesse avait lu un message du Prince Souverain que nous tous avons encore présent à l'esprit, et dont je souhaiterais rappeler ces quelques phrases, qui confirment, une nouvelle fois, la farouche détermination du Prince Rainier III d'obtenir pour Monaco prospérité et reconnaissance :
" (...) Ce jour est pour moi un jour de très grande satisfaction comme il l'est, j'en suis convaincu, pour tous les monégasques et les habitants de la Principauté. Je le ressens avec émotion et fierté car il est l'aboutissement positif de l'initiative que j'ai prise en 1998 pour inscrire notre Pays dans une nécessaire solidarité avec son environnement européen.
Si notre adhésion au Conseil de l'Europe répond dans cet esprit à une exigence de notre temps, elle s'inscrit aussi dans l'action que j'ai menée de longue date pour affirmer le statut international de Monaco et prendre en compte ses intérêts à long terme (...).
Loin de constituer des contraintes ou de mettre en péril un dispositif éprouvé, comme certains ont pu le craindre, les réformes entreprises vont dans le sens d'une modernisation de nos institutions et de notre législation pour les adapter aux réalités d'aujourd'hui. "
A la lecture de ces pensées, comment pourrions-nous ne pas relever la constance avec laquelle le Prince Rainier III a conçu la modernité du droit comme un facteur de développement.
Cette modernité, Monseigneur, Votre Altesse, Elle-même, l'a définie dans le discours fondateur de son règne comme étant " la capacité à comprendre son époque en profondeur, à repérer les lignes de force qui la traversent et à se mettre à l'unisson de ses tendances profondes ".
Sans que nous ne sachions, naturellement, quelle sera à terme l'évolution du droit positif monégasque, qu'il soit de source interne ou internationale, je prie Votre Altesse de croire que, dans le respect des préceptes d'éthique énoncés par le Prince Rainier III, et auxquels nous souscrivons, nous tous, gens de justice et de droit, resterons attentifs à l'évolution du monde qui nous entoure, afin d'édifier de notre mieux la Jurisprudence, de même que le Prince Rainier III a su bâtir le Droit.
Madame le Procureur Général,
Vous avez la parole pour vos réquisitions,
L'Audience Solennelle de rentrée est plus qu'un formalisme, c'est d'abord une obligation légale prévue par la loi portant organisation judiciaire.
C'est aussi un temps particulier qui nous offre un instant de pause pour un bilan public mais également une réflexion partagée.
L'institution judiciaire doit être un miroir fidèle de notre société.
L'immense variété des hommes entraîne des relations, des situations d'interdépendance sources de conflits.
Dans les difficultés qui se font jour, dans les contentieux qui naissent, il importe que l'intérêt supérieur soit préservé ou représenté.
Il est normal qu'il le soit, en l'état des institutions de ce pays par la voie du ministère public remplissant ainsi son rôle de représentant du corps entier de la société.
Si, en application de l'ordonnance organisant la Direction des Services Judiciaires, le Directeur desdits services administre l'action publique et la dirige, le Procureur Général avec tout le Parquet Général exerce l'action publique aux termes des articles 70 et suivants du même texte.
De telles dispositions impliquent cohérence, unité d'action et d'organisation.
Pour autant les membres du Parquet Général ne voient pas leur rôle confiné à celui d'exécutants passifs.
D'abord parce que la mise en oeuvre des orientations de la politique judiciaire exige initiative et créativité personnelle.
Surtout parce que le magistrat du Parquet est un magistrat, il n'est pas un interlocuteur extérieur aux juridictions, il est l'interface entre le juge, le politique au sens de la gestion publique et la société civile.
Il est amené au-delà de l'application générale de la politique judiciaire définie à se prononcer à l'audience dans l'intérêt de la loi et dans un esprit d'équilibre entre toutes les parties et tous les intérêts en présence.
Dans ce cadre l'action du Parquet Général s'inscrit également dans une vision globale de l'organisation judiciaire. Il s'agit de dire le droit, d'assurer la conformité de l'application du droit à la volonté de celui qui l'édicte.
Avocat de la loi, le Parquet ne peut parler que d'une seule voix devant toutes les juridictions auprès de qui il est établi, l'unité et l'indivisibilité du Ministère public doivent en conséquence se traduire par une exigence de solidarité, un travail d'équipe, une éthique de responsabilité.
Il m'est apparu nécessaire de mettre l'accent sur ces quelques exigences professionnelles car il s'agit de conduire ensemble une politique pour une justice, rendue au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, au service de notre pays.
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Puisqu'il m'incombe d'exercer l'action publique, il m'appartient de déterminer les bases de mon action, de dresser une espèce d'état des lieux :
- quelle délinquance sévit sur le territoire, quelle est sa nature, quelles en sont ses particularités,
- et d'envisager les moyens de la réduire à défaut de l'anéantir, ce qui serait vaine utopie ; quelles solutions adoptées aujourd'hui et quelles solutions pour l'avenir.
En égard à l'éclat que revêt particulièrement cette année, notre Audience Solennelle, et par crainte d'être trop prosaïque, je ne veux pas me transformer en " épileur de chenille " selon le mot de René Char en analysant une à une les données statistiques de l'année judiciaire, je formulerai seulement quelques observations et commentaires.
La délinquance
La délinquance, toutes infractions considérées, est demeurée stable par rapport à l'année 2004.
En masse :
- les atteintes aux biens représentent à elles seules 45 % de la délinquance globale,
- les infractions à la sécurité routière 12 % de la délinquance générale,
- les atteintes aux personnes représentent 8 % de la délinquance générale,
- Les infractions à la législation sur les stupéfiants constituent 4 % de la délinquance générale.
Ces données appellent de ma part les commentaires suivants :
Le territoire de la Principauté est un territoire sûr.
Nul doute que la rigueur de la loi strictement appliquée par les services de police et les services de la justice porte ses effets et répond à l'exigence de sécurité réclamée par tous.
La vigilance devra être toujours soutenue pour contenir et réprimer les comportements associaux constitutifs d'infractions pénales.
Quant aux infractions à la législation sur les stupéfiants, elles seront relevées et réprimées quelle qu'en soit la nature.
Fort heureusement le temps où la consommation de drogues dites douces était considérée comme un plaisir banalisé pour les uns voire revendiquée comme un comportement social normal pour les autres est dépassé, le monde de la médecine s'étant enfin insurgé à l'encontre de telles considérations non seulement dangereuses en termes de santé publique mais encore encourageantes pour le trafic qu'elles révèlent.
Les atteintes aux biens telles que précédemment entendues comportent les infractions économiques et financières y compris l'infraction de blanchiment.
Elles sont évidemment la préoccupation du Parquet.
Monseigneur, j'ai bien entendu le discours que vous avez prononcé lors de votre Avènement le 12 juillet 2005.
Vous avez affirmé votre exigence d'éthique, " argent et vertu " doivent se conjuguer en permanence sur l'importante place financière de Monaco avez-vous dit.
Le Parquet suivra votre exigence ; il y va en effet non seulement de l'intégrité de la Principauté de Monaco mais encore, de sa survie même au plan économique et financier.
De plus quelle serait notre légitimité à lutter contre toutes les autres formes de délinquance si nous ne luttions pas aussi contre la délinquance économique et financière dont les intérêts sont souvent colossaux.
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Les remèdes
Clémenceau disait " le gouvernement a pour mission de faire que les bons citoyens soient tranquilles, que les mauvais ne le soient pas " - quels moyens pour y parvenir...
Je suis convaincue que rien n'est jamais acquis et qu'il n'est pire chose en matière judiciaire que de s'en remettre aux seules habitudes. L'imagination produit de nos réflexions collectives doit avoir la première place.
Nos méthodes de travail devront évoluer pour s'adapter au plus près et au plus vite de l'évolution de la délinquance.
Au bénéfice d'un inventaire que je dresserai plus précisément au fil des prochaines semaines, je mettrai au point avec les services de police un traitement en temps réel des infractions, total ou partiel selon mon appréciation.
Le traitement en temps réel consiste à apporter une réponse judiciaire dans le temps où l'enquête est conclue qu'elle soit en flagrance ou en préliminaire.
Outre qu'elle permet au Parquet de disposer d'un observatoire privilégié de la délinquance commise dans le ressort ainsi que de l'activité des services d'enquête, cette pratique permet d'apporter une solution concrète aux affaires de moindre importance qui, traitées en différé plusieurs semaines après les faits, se soldent souvent par une décision de classement pur et simple ou au cas de poursuites parfois par un jugement par défaut.
La victime à laquelle l'on ne porte pas assez d'égards en l'état de notre droit positif bénéficiera de cette pratique puisqu'elle sera, elle aussi, immédiatement informée de la décision prise, de la date des débats où elle pourra faire valoir ses droits.
Au contradictoire, tant de l'inculpé que de la victime, les décisions seront encore mieux adaptées à la situation des personnes concernées et leur exécution sera facilitée sur le plan pénal comme sur le plan civil.
La mise en oeuvre de la méthode sera concomitante à l'application du nouveau Code de Procédure Pénale en projet aujourd'hui mais, en vigueur, j'espère, dans les prochains mois.
Cette nouvelle législation, conforme à la convention européenne des droits de l'homme, en harmonie avec la législation européenne induira des changements notables dans la conduite des enquêtes et des procédures.
Associée à l'adaptation des méthodes, elle conduira l'institution judiciaire, au plan pénal, à la modernité qui sied à un pays dont la place en Europe et dans le monde est reconnue.
Pour ce qui concerne la délinquance économique et financière, celle organisée à l'échelon international, je veillerai à la célérité des procédures et à leur suivi rigoureux dans le respect des traités et conventions d'entraide signés par Monaco, et ce alors même que Monsieur le Directeur des Services Judiciaires, aux termes de l'ordonnance portant organisation de la Direction des Services Judiciaires en son article 27, veille à l'application des traités d'extraditions et des conventions internationales, aux envois et réceptions des commissions rogatoires.
Le strict respect de la règle internationale participe de l'intégrité que doit revendiquer la Principauté de Monaco et que sont en droit d'exiger d'elle ses partenaires, puissances européennes et internationales.
Pour combattre ces infractions par nature complexes et réprimer leurs auteurs mobiles pour ne pas dire volatiles, il faut en appeler à la vigilance de tous, acteurs publics et économiques, simples citoyens aussi et collaborer avec les services spécialisés dont la mission pour certains est de les détecter et par suite d'alerter.
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Monseigneur, Votre Avènement et plus modestement ma nomination, dont vous m'avez honorée, nous lient au moins quelques temps dans une même volonté celle de préserver la paix publique dans un état de droit, au service de notre pays.
Qu'il me soit permis de souligner le dévouement, l'efficacité et la loyauté des forces de police, sans elles point d'action publique ; de remercier aussi tous ceux qui contribuent à l'oeuvre de justice, mes collègues magistrats, les membres du Tribunal du Travail, les avocats, greffiers, fonctionnaires du Palais de justice et ceux de la
Maison d'Arrêt, notaires, huissiers de justice - sans eux point de justice.
La justice précisément, en son activité juridictionnelle pénale, le Ministère Public a exercé devant le Tribunal Correctionnel :
- 499 poursuites par voie de citation directe,
- 90 poursuites selon la procédure de flagrant délit,
- 50 poursuites selon la procédure de comparution sur notification,
Le Parquet Général a saisi les deux Cabinets d'instruction de 67 réquisitoires aux fins d'informer et le Cabinet du Juge tutélaire de 37 procédures impliquant des mineurs de 18 ans.
Cinq informations ont été ouvertes du chef d'infractions criminelles.
Le Parquet a en outre transmis aux Cabinets d'instruction en vue de leur exécution 77 commissions rogatoires internationales, en provenance de nombreux pays étrangers.
Le Tribunal Correctionnel a prononcé 703 jugements dont 504 contradictoires, qui ont concerné au total 759 personnes, infligeant en particulier 171 peines d'emprisonnement ferme.
La Cour d'Appel a prononcé 48 arrêts en matière correctionnelle et la Cour de Révision a rendu 16 arrêts sur des pourvois formés à l'encontre de décisions pénales.
Il convient de mentionner également 72 arrêts de la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel statuant sur appels d'ordonnances du Juge d'instruction.
Enfin la Maison d'Arrêt a procédé au total à 176 écrous dont 31 au titre de la détention préventive et 1 pour extradition.
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S'agissant de l'activité juridictionnelle civile :
Madame le Juge de Paix a rendu 429 décisions.
Le Tribunal du Travail, présidé également par Madame le Juge de paix a rendu 73 décisions ; le Bureau de Conciliation du Tribunal du Travail a examiné 163 affaires.
Le Tribunal de Première Instance a jugé, toutes matières confondues, 4365 procédures.
La Cour d'Appel a prononcé 104 arrêts en matière civile et 45 arrêts ont été rendus par la Chambre du Conseil de la Cour d'Appel statuant sur appels d'ordonnances du Juge tutélaire.
La Cour de Révision a prononcé 34 arrêts sur des pourvois formés à l'encontre de décisions civiles.
Enfin le Tribunal Suprême a rendu 12 arrêts.
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Je ne saurais achever mon intervention sans respecter l'usage selon lequel le Procureur Général en cette audience rappelle les évènements qui ont marqué notre vie judiciaire durant l'année écoulée.
Le corps judiciaire a connu d'importants mouvements.
- A la Cour de Révision Judiciaire
M. Thierry Cathala ayant été admis sur sa demande à cesser ses fonctions, a été nommé Conseiller honoraire.
A été nommée Mme Cécile Petit, Conseiller à ladite Cour.
- Au Parquet Général
M. Daniel Serdet, Procureur Général et Mlle Catherine Le Lay, Premier Substitut du Procureur Général, ont réintégré la magistrature française.
Mme Marie-Anne Gonelle a été nommée Premier Substitut du Procureur Général.
Mme Claire Philippoteaux épouse Dollmann a été nommée Substitut du Procureur Général.
- Au Tribunal de Première Instance
M. Pierre Baron, Juge d'Instruction au Tribunal de Grande Instance de Tulle, a été nommé Juge chargé de l'instruction.
Mlle Magali Ghenassia et M. Florestan Bellinzona ont été nommés Juges.
- Au barreau
Me Arnaud Zabaldano a été nommé Avocat près la Cour d'Appel.
Messieurs Régis Bergonzi et Olivier Marquet, ont été nommés Avocats stagiaires.
- A la Maison d'Arrêt
M. Marcel Cuq a été nommé Directeur adjoint.
Nous leur adressons nos vifs compliments et nos souhaits de parfaite réussite dans l'exercice de leurs nouvelles fonctions, comme nous félicitons M. Pierre Delvolvé, Vice-Président du Tribunal Suprême promu au grade de Commandeur dans l'Ordre de Saint Charles par Son Altesse Sérénissime le Prince Rainier III.
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Clémenceau déjà cité disait aussi " un discours long de plus d'une demi-heure n'est plus un discours mais une prise d'otages ".
J'espère que tel n'est pas le cas, sinon en égard à Votre présence Monseigneur, à celles des hautes autorités civiles et religieuses, j'encourrai des sanctions gravissimes puisqu'il s'agirait de peines criminelles.
Monsieur le Premier Président,
Permettez-moi avant toutes réquisitions de vous féliciter pour ce très bel hommage que vous venez de rendre à cette éminente personnalité qu'était Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain Rainier III.
Je regrette que ce soit pour moi la seule, et pour tous la dernière Audience Solennelle de rentrée que vous présidiez.
Nous avions vous et moi déjà lié des relations de confiance nécessaires au fonctionnement harmonieux des juridictions de la Principauté.
Monseigneur,
Je fais miens les remerciements qui Vous ont été adressés par Monsieur le Premier Président d'avoir bien voulu honorer de Votre présence cette Audience Solennelle de rentrée judiciaire.
Alors que Vous présidez désormais aux destinées de la Principauté de Monaco, elle est assurément le signe fort de l'intérêt que Vous portez à l'institution judiciaire.
Toute la communauté judiciaire Vous en est reconnaissante.
Excellences,
Monsieur le Directeur des Services Judiciaires,
Monsieur le Bâtonnier,
Mesdames et Messieurs,
Au nom de Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain, j'ai l'honneur de requérir qu'il plaise à la Cour
- Me donner acte de ce qu'il a été satisfait aux prescriptions des articles 51 et 52 de la loi du 25 juillet 1965 portant organisation judiciaire,
- Déclarer close l'année judiciaire 2004-2005 et ouverte l'année judiciaire 2005-2006,
- Ordonner la reprise des travaux judiciaires,
- Me donner acte de mes réquisitions,
et dire que du tout il sera dressé procès-verbal sur les registres des actes de la Cour d'Appel.
Monsieur le Président reprenait ensuite la parole en ces termes :
Madame le Procureur Général,
Avant qu'il ne soit fait droit par la Cour à vos réquisitions, je souhaiterais m'associer avec tous nos collègues du siège, aux pensées et compliments que vous avez exprimés à l'adresse des magistrats, fonctionnaires et avocats qui ont connu les nominations que vous avez rappelées.
Je souhaiterais à ce propos également rappeler pour ma part que c'est par ordonnance du 24 août 2005 que Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain vous a confié les fonctions de Procureur général, dans lesquelles vous avez été installée le 12 septembre 2005.
Au nom du corps judiciaire je vous renouvelle nos félicitations.
Je vous sais gré, aussi, Madame le Procureur Général, d'avoir bien voulu retracer les grands traits de l'activité civile des juridictions.
En incluant les matières administrative et commerciale ainsi que le droit social et le droit international privé, cette activité représente en effet, à Monaco, l'essentiel du travail de la plupart des magistrats, qualitativement très important.
Au terme de cette audience, il convient donc de reprendre sans plus tarder l'ensemble de nos occupations.
A cet effet,
- la Cour,
- faisant droit aux réquisitions de Madame le Procureur Général,
- déclare close l'année judiciaire 2004-2005, et ouverte l'année judiciaire 2005-2006,
- ordonne la reprise intégrale des travaux de la Cour d'Appel et des Tribunaux de la Principauté de Monaco, qui ont été partiellement suspendus au cours des vacations d'été,
- donne acte à Madame le Procureur Général de ce qu'il a été satisfait aux prescriptions de la loi,
- et ordonne que, du tout, il sera dressé procès-verbal sur le registre des actes de la Cour d'Appel.
Puis, Madame le Procureur Général ayant déclaré qu'elle n'avait pas d'autres réquisitions à formuler, Monsieur le Premier Président s'exprimait ainsi :
Monseigneur,
Qu'il me soit permis, avant de lever l'Audience Solennelle, de renouveler à Votre Altesse Sérénissime, l'expression de notre très vive reconnaissance pour avoir bien voulu honorer de Sa présence, lors de notre cérémonie de rentrée, la Justice et l'ensemble du corps judiciaire.
Je remercie également toutes les hautes autorités et personnalités qui ont assisté à cette cérémonie, en marquant ainsi l'intérêt qu'elles portent à nos travaux, de même que les hauts magistrats français et italiens qui nous ont une nouvelle fois accompagnés à l'occasion de notre rentrée.
Je les convie, maintenant, à se rendre dans la salle des pas perdus de la Cour d'Appel, à l'invitation de Monsieur le Directeur des Services Judiciaires.
L'audience solennelle est levée.
A l'issue de l'Audience Solennelle, Son Altesse Sérénissime le Prince Souverain accompagné par M. Alain Guillou, Directeur des Services Judiciaires, S'est rendue dans la Salle des Pas Perdus de la Cour d'Appel.
De nombreuses personnalités avaient tenu à assister à cette Audience Solennelle, aux premiers rangs desquelles on notait :
S.E.M. Jean-Paul Proust, Ministre d'Etat,
M. Charles Ballerio, Président du Conseil de la Couronne,
M. Stéphane Valéri, Président du Conseil National,
S. Exc. Mgr Barsi, Archevêque de Monaco,
M. René Novella, Secrétaire d'Etat,
M. Jean Grether, Directeur du Cabinet de S.A.S. le Prince,
M. Serge Telle, Consul Général de France, représenté par Mme Christiane Galland, Consul Adjoint,
M. Mario Polverini, Consul Général d'Italie,
M. le Contre-Amiral Alexandros Maratos, Président du Bureau Hydrographique International,
S.E.M. Raoul Biancheri, Ministre Plénipotentiaire,
S.E.M. Georges Grinda, Ministre Plénipotentiaire, chargé auprès du Ministre d'Etat des questions européennes,
M. Philippe Deslandes, Conseiller de Gouvernement pour l'Intérieur,
M. Franck Biancheri, Conseiller de Gouvernement pour les Finances et l'Economie,
M. Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement pour l'Equipement, l'Environnement et l'Urbanisme,
S.E.M. Rainier Imperti, Délégué aux Relations Extérieures,
M. Denis Ravera, Conseiller de Gouvernement pour les Affaires Sociales et la Santé,
M. Claude Boisson, Vice-Président du Conseil National,
M. Norbert François, Vice-Président du Conseil d'Etat,
Me Henry Rey, Conseiller National,
M. Georges Lisimachio, Secrétaire Général du Cabinet de S.A.S. le Prince Souverain,
M. André Garino, Président du Conseil Economique et Social,
Me René Clerissi, Président de la Commission de Contrôle des informations Nominatives,
M. Robert Colle, Secrétaire Général du Ministère d'Etat,
M. Laurent Anselmi, Directeur des Affaires Juridiques,
M. Bernard Gastaud, Conseiller pour les Affaires Juridiques et Internationales,
Mme Marie-Noëlle Albertini, Conseiller du Ministère d'Etat en charge des recours et de la médiation,
Mme Sophie Thevenoux, Directeur Général du Département des Finances et de l'Economie,
M. Jean-Noël Veran, Directeur Général du Département de l'Equipement, de l'Environnement et de l'Urbanisme,
M. Thierry Picco, Directeur Général du Département des Affaires sociales et de la Santé,
M. Robert Fillon, Directeur Général du Conseil National,
M. Jean-François Sautier, Directeur de la Sûreté Publique, représenté par M. le Commissaire Claude Trianon,
Mme Ariane Picco-Margossian, Directeur du SICCFIN, représentée par Mme Danièle Mezzana Ghenassia,
Mme Isabelle Rosabrunetto, Directeur du Budget et du Trésor,
M. Claude Cottalorda, Directeur de la Fonction Publique et des Ressources Humaines,
M. Gérard Emmel, Directeur des Services Fiscaux, représenté par M. Vétillard,
Mme Lambin de Combremont, Commissaire général chargé de la Direction de l'Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports,
M. Franck Taschini, Administrateur des Domaines,
Mme Catherine Orechia-Matthysens, Directeur de l'Expansion Economique,
Mme Martine Provence, Secrétaire Général de la Direction des Services Judiciaires,
M. Antoine Montecucco, Greffier en Chef honoraire,
Mme Bernadette Zabaldano, Secrétaire Général du Parquet,
Mme Anne Negre, Directeur de l'Action Sanitaire et Sociale,
M. Alain Malric, Chef du Service de Contrôle des Jeux, représenté par M. Christian Ollier,
M. le Colonel Yannick Bersihand, Commandant de la compagnie des Sapeurs-Pompiers,
M. Christian Zabaldano, Directeur de la Maison d'Arrêt,
M. Marcel Cuq, Directeur-Adjoint de la Maison d'Arrêt,
M. François Chantrait, Directeur du Centre de Presse,
M. Christian Carpinelli, Commissaire Divisionnaire,
M. Jean-Pierre Torrano, Commissaire de Police,
M. Philippe Leblanc, Chef de la Division de Police Maritime et Aéroportuaire,
M. Richard Marangoni, Chef de l'Administration et de la formation à la Sûreté Publique,
M. Jacques Wolsok, Président du Tribunal du Travail,
M. Jean-Paul Hamet, Vice-Président du Tribunal du Travail,
Me Paul-Louis Aureglia, Notaire,
Mme Maud Colle Gamerdinger, Directeur de l'Environnement, de l'Urbanisme et de la Construction,
Mme Marie-Pierre Gramaglia, Conseiller technique au Ministère d'Etat,
M. Patrick Simon, Directeur du Musée d'Anthropologie Préhistorique,
M. le Professeur Jean Jaubert, Directeur du Musée Océanographique,
M. le Professeur Pierre Julien, Professeur à la Faculté de droit et de sciences économiques,
M. le Professeur Jean-François Renucci,
M. Claude Valion, Receveur Principal des Douanes,
M. Jean-Luc Delcroix, Directeur d'Etablissement principal des Postes,
Mme Corinne Querci, Assistante sociale chef,
Me Jacques Randon, Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Nice,
Mme Khaïda, Inspecteur des Pharmacies,
M. Jacques Orecchia, Administrateur judiciaire,
M. Jean-Paul Samba, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Christian Boisson, Administrateur judiciaire et syndic,
Mme Bettina Dotta, Administrateur judiciaire et syndic,
M. Jean Billon, Conseil juridique,
Mme Catherine Catanèse, Secrétaire du Tribunal du Travail,
Etaient également présents :
M. Jean-Pierre Atthenont, Premier Président de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence,
M. Gabriel Bestard, Procureur Général près la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence,
M. Jean-Marc Le Gars, Président du Tribunal Administratif de Nice,
M. Ettore Criscuoli, Président de la Cour d'Appel de Gênes,
M. Lucien Dinoto, Procureur Général de la Cour d'Appel de Gênes,
M. Jacques Lameyre, Président du Tribunal de Grande Instance de Grasse,
M. Marc Desert, Procureur de la République de Grasse,
M. Gianfranco Boccalatte, Président du Tribunal de San Remo,
M. Mariano Gagliano, Procureur de la République de San Remo,