TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco - EXTRAIT
Audience du 29 septembre 2020
Lecture du 13 octobre 2020
Recours en annulation de la décision du 21 juin 2019 du Directeur de la Sûreté Publique rejetant la demande de Mme A. B. R. de renouvellement de sa carte de séjour.
En la cause de :
Mme A. B. R. ;
Ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit Avocat-défenseur ;
Contre :
L'État de Monaco, représenté par le Ministre d'État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIÉ, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;
LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,
…/…
Après en avoir délibéré :
1. Considérant que, par une décision du 21 juin 2019, le Directeur de la Sûreté Publique a refusé à Mme B. R. le renouvellement de sa carte de séjour ; que cette dernière en demande l'annulation pour excès de pouvoir ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'Ordonnance Souveraine n° 3.153 du 19 mars 1964 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans la Principauté : « L'étranger qui sollicite, pour la première fois, une carte de séjour de résident doit présenter, à l'appui de sa requête : - soit un permis de travail, ou un récépissé en tenant lieu, délivré par les services compétents ; - soit les pièces justificatives de moyens suffisants d'existence, s'il n'entend exercer aucune profession. /La durée de validité de la carte de résident temporaire ne peut dépasser la durée de validité des documents et visas exigés pour entrer et séjourner dans la Principauté. /La carte de résident temporaire ne peut être renouvelée que si l'étranger satisfait aux conditions prévues aux alinéas ci-dessus. /Elle peut lui être retirée à tout moment, s'il est établi qu'il cesse de remplir ces mêmes conditions ou si les autorités compétentes le jugent nécessaires » ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la même Ordonnance Souveraine : « Pour obtenir une carte de séjour de résident ordinaire, l'étranger doit justifier : - de l'autorisation des autorités compétentes s'il désire occuper un emploi ou exercer une profession libérale, industrielle ou commerciale ; - de ressources suffisantes, s'il n'a pas l'intention de se livrer à une activité professionnelle. /La carte de résident ordinaire peut être renouvelée, à la demande de son titulaire, s'il remplit les conditions ci-dessus en ce qui concerne ses ressources ou l'exercice de son activité professionnelle. /La demande de renouvellement doit être souscrite au cours du mois qui précède l'expiration de la validité de la carte et doit faire mention de tout changement intervenu dans la situation de l'intéressé » ;
4. Considérant que le pouvoir d'appréciation ainsi reconnu à l'autorité administrative peut s'exercer à tout moment, que ce soit à l'occasion de la première demande d'une carte de séjour, en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement ;
5. Considérant que l'objet des mesures de police administrative étant de prévenir d'éventuelles atteintes à l'ordre public, il suffit que les faits retenus révèlent des risques suffisamment caractérisés de trouble à la tranquillité ou à la sécurité publique ou privée pour être de nature à justifier de telles mesures ;
6. Considérant qu'en se fondant sur la seule circonstance que M. G. C. a fait l'objet d'une condamnation pénale pour banqueroute frauduleuse pour en déduire que l'ensemble des revenus qu'il procure à Mme B. R. sont d'origine illicite, le Directeur de la Sûreté Publique a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B. R. est fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque ;
Décide :
Article Premier.
La décision du 21 juin 2019 du Directeur de la Sûreté Publique est annulée.
Art. 2.
Les dépens sont mis à la charge de l'État.
Art. 3.
Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.
Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.
Le Greffier en Chef,
V. SANGIORGIO.