icon-summary icon-grid list icon-caret-left icon-caret-right icon-preview icon-tooltip icon-download icon-view icon-arrow_left icon-arrow_right icon-cancel icon-search icon-file logo-JDM--large image-logo-gppm icon-categories icon-date icon-order icon-themes icon-cog icon-print icon-journal icon-list-thumbnails icon-thumbnails

EXTRAIT - TRIBUNAL SUPRÊME de la Principauté de Monaco - Lecture du 18 février 2019

  • No. Journal 8425
  • Date of publication 15/03/2019
  • Quality 100%
  • Page no.

Recours de S.E. M. le Ministre d'État tendant à la rectification pour erreurs matérielles de la décision du Tribunal Suprême n° 2018-08 du 29  novembre 2018.
En la cause de :
L'État de Monaco représenté par S.E. M. le Ministre d'État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIÉ, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;
Contre :
La société anonyme monégasque (S.A.M.) C. ;
Élisant domicile en l'étude de Maître Arnaud ZABALDANO, Avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit Avocat-défenseur.
LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,
…/…
Après en avoir délibéré :
Sur l'incident de procédure
Considérant que la circonstance, invoquée par S.E. M. le Ministre d'État, que le procès-verbal de clôture du 8 février 2019 ne mentionne pas la réplique est sans incidence sur le respect du caractère contradictoire de la procédure ; qu'au demeurant, le procès-verbal confirmatif du 15 février 2019 atteste de l'enregistrement de la réplique au Greffe Général le 6 février 2019 ; qu'elle est visée par la présente décision ; qu'en outre, la circonstance que la réplique n'a pas été communiquée à la société C. n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard de S.E. M. le Ministre d'État et ne saurait, dès lors, être utilement invoqué par lui ; qu'en tout état de cause, l'ensemble des conclusions et moyens figurant dans les écritures des parties a été contradictoirement débattu et pris en considération au cours de l'instruction ; qu'ainsi, S.E. M. le Ministre d'État n'est aucunement fondé à demander la réouverture de l'instruction ;
Sur le recours en rectification d'erreur matérielle
Considérant qu'en application de l'article 38 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême, les parties peuvent former devant le Tribunal Suprême, dans un délai de deux mois, un recours en rectification de la décision rendue par le Tribunal pour erreur matérielle ; qu'un tel recours n'est ouvert qu'en vue de corriger des erreurs de caractère matériel qui ne sont pas imputables aux parties et qui ont pu avoir une influence sur le sens de la décision ; que les appréciations d'ordre juridique auxquelles s'est livré le Tribunal Suprême pour répondre aux conclusions et moyens dont il était saisi ne sont pas susceptibles de faire l'objet d'un recours en rectification ;
Considérant, en premier lieu, que le Tribunal Suprême a estimé, dans sa décision n° 2018-08 du 29 novembre 2018, que par des lettres du 26 avril 2016, du 22 mars 2017 et du 22 juillet 2017, S.E. M. le Ministre d'État avait déclaré, eu égard à l'importance des grands prix automobiles pour la Principauté, s'en remettre à l'appréciation de l'Automobile Club de Monaco et exiger que les schémas d'aménagement proposés par la société fussent définitivement agréés par cette association ; qu'il a jugé qu'eu égard aux conditions dans lesquelles les stipulations du contrat étaient demeurées durablement privées de tout effet et aux motifs qui avaient fondé les décisions successives de S.E. M. le Ministre d'État, celles-ci devaient être regardées comme caractérisant un retrait de la signature de l'État ;
Considérant, d'une part, que S.E. M. le Ministre d'État soutient que les lettres du 26 avril 2016 et du 22 juillet 2017 sont inexistantes ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que si les dates mentionnées sont erronées, le Tribunal s'est fondé sur deux lettres versées au dossier par la société C. ; que la première lettre a été adressée par S.E. M. le Ministre d'État le 13 mai 2016 en réponse à une lettre de la société C. en date du 26 avril 2016 ; que la deuxième lettre, par ailleurs citée à trois autres reprises dans les motifs de la décision du Tribunal, est datée du 11 juillet 2017 ; qu'ainsi, s'il y a lieu de corriger la minute de la décision en remplaçant les dates « 26 avril 2016 » et « 22 juillet 2017 » par les dates « 13 mai 2016 » et « 11 juillet 2017 », de telles erreurs de date étaient manifestement insusceptibles d'exercer une influence sur le sens de la décision du Tribunal Suprême ; que, par suite, S.E. M. le Ministre d'État n'est pas recevable à demander au Tribunal de modifier, pour ce motif, le sens de sa décision du 29 novembre 2018 ;
Considérant, d'autre part, que si S.E. M. le Ministre d'État soutient que le Tribunal Suprême a jugé que la lettre du 22 mars 2017 caractérisait un retrait de signature de l'État, il dénature le contenu de la décision du Tribunal qui retient que le retrait de la signature de l'État est caractérisé par les décisions successivement prises par S.E. M. le Ministre d'État en 2016 et 2017 ; qu'en tout état de cause, S.E. M. le Ministre d'État n'entend ainsi pas faire état d'une erreur matérielle affectant la décision du Tribunal mais remettre en cause l'appréciation portée par le Tribunal Suprême sur la portée de ses actes et leur qualification juridique ;
Considérant, en deuxième lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 32 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 : « le Tribunal peut, avant de statuer au fond, ordonner toutes les mesures d'instruction qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité » ; que le prononcé par le Tribunal Suprême d'une mesure d'instruction a pour effet de rouvrir l'instruction ; que l'article 22 de la même Ordonnance Souveraine dispose que « jusqu'à la notification aux parties de la date prévue pour l'audience, le Président peut toujours ordonner les mesures d'instruction qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité » ;
Considérant que par sa décision du 29 novembre 2018 dont la rectification est demandée, le Tribunal Suprême a ordonné une expertise destinée à apprécier contradictoirement la réalité et le montant des différents préjudices allégués par la société C. et à fournir au Tribunal tous les éléments disponibles permettant l'évaluation de ces préjudices ; que la décision précise qu'il appartiendra aux parties, dans le délai d'un mois suivant sa notification, soit de s'accorder sur le choix d'un ou plusieurs experts, le cas échéant assistés de sapiteurs, soit de choisir chacune un expert, les deux experts choisis en désignant un troisième pour présider le collège d'experts et que le rapport d'expertise devra être déposé au Greffe Général avant le 1er septembre 2019 ;
Considérant que S.E. M. le Ministre d'État soutient que la décision du Tribunal Suprême est affectée d'une omission faisant obstacle à son exécution en ce qu'elle ne prévoirait pas comment s'organisera l'expertise si les deux experts choisis par les parties ne parviennent pas à s'accorder sur le nom du troisième expert chargé de présider le collège d'experts ;
Considérant, toutefois, qu'il n'appartient pas au Tribunal Suprême de régler par avance dans sa décision les difficultés susceptibles de naître à l'occasion de l'exécution d'une mesure d'instruction qu'il ordonne, en raison, par exemple, du refus d'une des parties d'exécuter de bonne foi cette mesure ; qu'il revient, le cas échéant, au Président du Tribunal Suprême de faire usage des pouvoirs que lui confère l'Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963 pour garantir le bon déroulement de l'instruction et de prendre ainsi les décisions permettant d'assurer, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et dans le respect des droits des parties, l'exécution des mesures d'instruction ordonnées par le Tribunal ; que, par suite, S.E. M. le Ministre d'État n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision du 29 novembre 2018 serait entachée d'une omission matérielle rendant recevable son recours en rectification ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 34 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 : « La décision du Tribunal contient les noms et conclusions des parties, le visa des pièces et textes dont elle fait application. / (…) / Elle est motivée. / (…) / Elle statue sur les dépens. / (…) » ; qu'il résulte de cette disposition qu'il appartient au Tribunal Suprême de se prononcer sur la charge des dépens dans la décision par laquelle il statue définitivement sur le litige ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient S.E. M. le Ministre d'État, le Tribunal Suprême n'avait pas, dans la décision objet de la présente requête, à se prononcer sur les conclusions des parties relatives à la charge des dépens ;
Considérant que, par la décision du 29 novembre 2018, le Tribunal Suprême a notamment décidé, avant de se prononcer sur les conclusions à fins d'annulation et d'indemnisation, d'ordonner une expertise ; que, sauf accord entre les parties, il statuera définitivement sur le litige par une décision ultérieure ; que l'article 5 du dispositif de la décision du 29 novembre 2018 prévoit que les dépens sont réservés ; qu'ainsi, S.E. M. le Ministre d'État ne saurait sérieusement soutenir que, faute d'avoir indiqué quelle partie supportera la charge définitive des frais d'expertise, la décision du 29 novembre 2018 serait entachée d'une omission faisant obstacle à la mise en œuvre de l'expertise ordonnée par le Tribunal ;
Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que S.E. M. le Ministre d'État n'a pas soulevé dans ses écritures de moyen de défense, auquel le Tribunal Suprême aurait dû répondre, tiré du caractère en principe non indemnisable des différents chefs de préjudice allégués par la société C. ; que, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, l'expertise ordonnée par le Tribunal Suprême dans sa décision du 29 novembre 2018 porte sur la réalité et le montant de l'ensemble des préjudices allégués sans préjudice de l'appréciation devant être portée par le Tribunal sur le lien de causalité entre l'illégalité qu'il a constatée et les différents chefs de préjudice ; que, contrairement à ce que soutient S.E. M. le Ministre d'État, le Tribunal Suprême a ainsi implicitement mais nécessairement admis le caractère indemnisable de l'ensemble des chefs de préjudice allégués ; que, dès lors, la contestation, présentée par la voie du recours en rectification d'erreur matérielle, n'est pas destinée à réparer une omission matérielle mais revient à mettre en cause l'appréciation d'ordre juridique à laquelle a procédé Tribunal Suprême en déterminant le champ de l'expertise qu'il a ordonnée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours en rectification formé par S.E. M. le Ministre d'État ne peut qu'être rejeté ;
Décide :

Article Premier.


Le recours de S.E. M. le Ministre d'État est rejeté.

Art. 2.


Les dépens sont mis à la charge de l'État.

Art. 3.


Expédition de la présente décision sera transmise à S.E. M. le Ministre d'État.
Pour extrait certifié conforme à l'original délivré en exécution de l'article 37 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.

Le Greffier en Chef,
V. SANGIORGIO.

Print article
Previous article Return to summary Next article

All rights reserved - Monaco 2016
Version 2018.11.07.14