TRIBUNAL SUPRÊME - EXTRAIT - Audience du 17 novembre 2023 - Lecture du 30 novembre 2023
Recours en annulation pour excès de pouvoir contre la décision du 2 mars 2023 du Ministre d’État, adressée par courrier le 3 mars et présentée le 6 mars 2023, sanctionnant M. R. d’un abaissement de classe en décidant que le demandeur au recours rangé au 1er échelon - indice majoré 457 - de l’échelle de principalat des agents de police à compter du 1er mars 2022 est placé à la classe exceptionnelle de l’échelle des agents de police - indice majoré 443 - de cette même échelle, sans ancienneté conservée, avec effet au 10 mars 2023 ; ordonner la réintégration de M. R. au 1er échelon - indice majoré 457 - de l’échelle de principalat des agents de police à compter du 1er mars 2022 et condamner l’État de Monaco au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel et à la somme de 15.000 euros pour préjudice moral ;
En la cause de :
M. D. R. ;
Ayant élu domicile en l’étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, Avocat-défenseur près la Cour d’appel de Monaco, et plaidant par Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au Barreau de Nice ;
Contre :
L’État de Monaco, représenté par le Ministre d’État, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIÉ, Avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation de France ;
LE TRIBUNAL SUPRÊME
Siégeant et délibérant en assemblée plénière,
…/…
Après en avoir délibéré :
1. Considérant que M. D. R. demande l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 2 mars 2023 du Ministre d’État lui infligeant une sanction disciplinaire ;
2. Considérant qu’aux termes de l’article 11 de la loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires : « Tout fonctionnaire, quelle que soit sa position, doit s’abstenir, soit pour son propre compte, soit pour le compte de toute autre personne physique ou morale, de toute démarche, activité ou manifestation incompatible avec la discrétion et la réserve qu’impliquent ses fonctions » ; que les dispositions de l’article 3.8 du Code de déontologie de la Direction de la Sûreté Publique énoncent que « Les personnels de la Direction de la Sûreté Publique sont tenus à une obligation de réserve et de neutralité. Ils s’abstiennent, dans l’exercice de leurs fonctions, de toute expression ou manifestation de leurs convictions religieuses, syndicales ou politiques. Lorsqu’ils ne sont pas en service, les personnels de la Direction de la Sûreté Publique s’expriment librement dans la limite de leur devoir de réserve, de la loyauté à l’égard des institutions, et de l’obligation de ne pas porter atteinte au crédit ou à la réputation de la Direction de la Sûreté Publique » ; qu’aux termes de l’article 41 de la loi du 12 juillet 1975 les sanctions qui peuvent être prononcées à l’encontre d’un agent public sont : « […] « 3° l’abaissement de classe ou d’échelon » ;
3. Considérant qu’à la suite de la séance devant le Conseil de discipline, tenue le 6 décembre 2022, le Ministre d’État a prononcé contre M. R. un abaissement de classe pour avoir porté atteinte à son devoir de réserve et à son obligation de loyauté ; que la matérialité des faits n’est pas contestée ; que l’intéressé avait déjà fait l’objet de sanctions disciplinaires, à savoir un avertissement et trois blâmes ;
4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. R. a participé, à quatre reprises et en dépit de la mise en garde qui lui a été adressée par un supérieur hiérarchique, à des manifestations non autorisées sur la voie publique, destinées à dénoncer le port du masque dans les établissements scolaires ; que ces actions avaient pour objectif de critiquer une mesure sanitaire prise par le Gouvernement ; que la circonstance que M. R. n’était pas en service au moment des faits est sans influence sur la méconnaissance des obligations qui lui incombent en tant qu’agent de police ; qu’en conséquence le Ministre d’État a pu, sans méconnaitre la liberté d’expression, sanctionner M. R. d’un abaissement de classe ; qu’au regard des faits reprochés à M. R., cette sanction ne revêt pas un caractère disproportionné ;
5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. R. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision qu’il attaque ; qu’il suit de là que ses demandes indemnitaires ne peuvent qu’être rejetées ;
Décide :
Article Premier.
La requête de M. D. R. est rejetée.
Art. 2.
Les dépens sont mis à la charge de M. R..
Art. 3.
Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d’État.
Pour extrait certifié conforme à l’original délivré en exécution de l’article 37 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963.
Le Greffier en Chef,
V. Sangiorgio.