Loi n° 1.567 du 12 décembre 2024 relative à la gestion des risques associés aux soins.
ALBERT II
PAR LA GRÂCE DE DIEU
PRINCE SOUVERAIN DE MONACO
Avons sanctionné et sanctionnons la loi dont la teneur suit que, le Conseil National a adoptée dans sa séance du 4 décembre 2024.
Article Premier.
Un évènement indésirable associé aux soins est un évènement qui est associé à tout acte ou traitement médical réalisé sur une personne, qui est inattendu au regard de l’état de santé et de la pathologie de cette personne et qui a des conséquences potentiellement préjudiciables pour celle‑ci.
Cet évènement est soit :
1) une infection nosocomiale, telle que définie par l’article premier de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022 relative aux infections nosocomiales ;
2) une infection associée aux soins, laquelle est une infection survenant chez une personne au cours ou au décours de sa prise en charge par un professionnel de santé en dehors d’un établissement de santé et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de cette prise en charge, sauf s’il est établi qu’elle a une autre origine que la prise en charge ;
3) tout autre évènement indésirable associé aux soins que celui mentionné au chiffre 1) ou 2).
Art. 2.
Au sens de la présente loi, on entend par :
1) professionnel de santé, toute personne qui exerce une activité professionnelle dans le secteur des soins de santé soumise à un statut législatif ou réglementaire particulier ou dont le titre est protégé, savoir toute personne exerçant la profession de médecin, de chirurgien-dentiste, de sage-femme, de psychologue ou d’ostéopathe ou une profession de la pharmacie ou d’auxiliaire médical ;
2) établissement de santé, tout établissement public ou privé qui assure le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés ou des femmes enceintes et qui délivre les soins avec hébergement et, éventuellement, sous forme ambulatoire ou à domicile, le domicile pouvant s’entendre du lieu de résidence ou d’un établissement ou service médico-social avec hébergement ;
3) établissement médico-social, tout établissement public ou privé qui assure une ou plusieurs missions d’intérêt général et d’utilité sociale relevant de l’action médico-sociale auprès d’un public vulnérable.
Art. 3.
Tout professionnel ou établissement de santé gère les risques associés aux soins.
Cette gestion vise à prévenir l’apparition de tout évènement indésirable associé aux soins affectant la personne prise en charge et, en cas de survenance d’un tel évènement, à l’identifier, à en analyser les causes, à en atténuer ou à en supprimer les effets dommageables pour cette personne et à mettre en œuvre les mesures permettant d’éviter sa réitération.
Art. 4.
Tout médecin-inspecteur de santé publique veille au respect des dispositions de la présente loi et de celles des textes réglementaires pris pour leur application.
TITRE PREMIER
DE LA GESTION DES RISQUES ASSOCIÉS AUX SOINS DANS UN ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ
Art. 5.
Tout établissement de santé élabore et met en œuvre une politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins et une politique de gestion des risques associés aux soins.
CHAPITRE I
DE L’ORGANISATION CHARGÉE DE LA LUTTE CONTRE LES ÉVÈNEMENTS INDÉSIRABLES ASSOCIÉS AUX SOINS
Art. 6.
En vue d’assurer la mise en œuvre de la politique de gestion des risques associés aux soins, tout établissement de santé se dote d’une organisation chargée de la lutte contre les évènements indésirables associés aux soins composée de professionnels exerçant au sein dudit établissement, dont au moins deux médecins affectés, lorsqu’il en existe, à des services différents, un infirmier et, le cas échéant, un pharmacien et un technicien bio‑hygiéniste.
Les membres de cette organisation sont désignés par le représentant légal de l’établissement après avis, lorsqu’elle existe, de la commission médicale d’établissement.
L’établissement de santé dispense ou fait dispenser à ces membres une formation adaptée à l’exercice de leur mission.
Les membres de l’organisation ont accès aux données, notamment les plaintes et réclamations des usagers de l’établissement, qui leur sont nécessaires pour exercer leur mission. Ils sont tenus au secret sous les peines prévues à l’article 308 du Code pénal. Toutefois, ce secret ne s’applique pas entre les membres de l’organisation, ni dans le cadre de leurs échanges avec l’autorité hiérarchique et les professionnels concernés de l’établissement, pour assurer l’exercice de leurs missions.
Art. 7.
L’organisation mentionnée à l’article 6 a notamment pour missions :
1) d’établir et d’actualiser les documents mentionnés à l’article 2 de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée ; parmi ces documents, ceux concernant les signalements sont établis dans le respect des dispositions du Chapitre II du présent Titre ;
2) de s’assurer de la bonne application de ces documents et d’effectuer l’évaluation mentionnée au troisième alinéa de l’article 3 de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée ;
3) de recueillir tout constat d’un évènement indésirable associé aux soins au sein de l’établissement, de l’analyser afin de mettre en place des mesures préventives ou correctives et d’estimer s’il est ou non soumis à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8 ;
4) d’élaborer le bilan annuel des infections nosocomiales mentionné au dernier alinéa de l’article 3 de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée ; ce bilan est intégré dans le bilan mentionné au chiffre suivant ;
5) d’élaborer un bilan annuel des évènements indésirables associés aux soins ; ce bilan est transmis à la Direction de l’Action Sanitaire ;
6) de mettre en œuvre des actions de formation et de communication en direction du personnel et des usagers permettant de développer la culture de sécurité des soins dans l’établissement.
Ces missions peuvent être réparties entre les membres de l’organisation selon les règles fixées par l’établissement de santé.
CHAPITRE II
DE LA DÉCLARATION DE CERTAINS ÉVÈNEMENTS INDÉSIRABLES ASSOCIÉS AUX SOINS
Section I
De l’obligation de déclarer
Art. 8.
Tout établissement de santé qui constate soit une infection nosocomiale répondant à l’un des critères définis à l’article 10, soit un évènement indésirable grave associé aux soins défini à l’article 11 en effectue, sans délai, la déclaration au Directeur de l’Action Sanitaire. Cette déclaration est effectuée sans préjudice de toute autre obligation de déclaration ou de signalement.
Les professionnels de santé concernés analysent la cause de cette infection ou de cet évènement indésirable.
Art. 9.
Le représentant légal de tout établissement de santé désigne parmi les membres de l’organisation mentionnée à l’article 6, après avis, lorsqu’elle existe, de la commission médicale d’établissement, la personne chargée d’effectuer la déclaration prévue à l’article 8, ainsi que son suppléant.
Il en informe le Directeur de l’Action Sanitaire.
L’établissement de santé organise le recueil des données strictement nécessaires pour permettre à la personne ainsi désignée d’effectuer, sans délai, la déclaration prévue à l’article 8 dès qu’elle a été informée conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l’article 12.
Art. 10.
La déclaration d’une infection nosocomiale concerne toute infection nosocomiale qui soit :
1) est inattendue ou inhabituelle du fait de la nature ou des caractéristiques, notamment du profil de résistance aux anti-infectieux, de l’agent pathogène en cause ;
2) est inattendue ou inhabituelle du fait de la localisation ou des circonstances de survenue de l’infection chez la personne atteinte ;
3) survient sous forme de cas groupés ;
4) a provoqué un décès ;
5) relève d’une maladie à déclaration obligatoire.
Art. 11.
La déclaration d’un évènement indésirable grave associé aux soins concerne tout évènement indésirable associé aux soins mentionné au chiffre 3) de l’article premier dont la conséquence est soit le décès, soit la mise en jeu du pronostic vital, soit la survenue probable d’un déficit fonctionnel permanent y compris une anomalie ou une malformation congénitale.
Art. 12.
Tout professionnel de santé qui, dans l’exercice de ses missions au sein d’un établissement de santé, constate un évènement indésirable associé aux soins en informe sans délai et par écrit le responsable du service dans lequel il est survenu. Ce responsable informe de ce constat, sans délai et par écrit, le ou l’un des membres de l’organisation mentionnée à l’article 6 chargés d’estimer qu’un évènement indésirable associé aux soins est ou non soumis à l’obligation de déclaration prévue à l’article 8. À défaut de responsable du service, le professionnel de santé informe de son constat, sans délai et par écrit, ledit membre.
Lorsque le ou les membres de cette organisation chargés d’effectuer cette estimation estiment que l’évènement ainsi constaté constitue soit une infection nosocomiale répondant à au moins un des critères définis à l’article 10, soit un évènement indésirable grave associé aux soins défini à l’article 11, ils en informent, sans délai, la personne désignée conformément à l’article 9.
Cette personne effectue alors, sans délai, la déclaration prévue à l’article 8, puis informe de la transmission de cette déclaration :
1) le représentant légal de l’établissement de santé ;
2) le Président de la commission médicale d’établissement lorsque celle‑ci existe ;
3) le responsable du service dans lequel l’infection ou l’évènement est survenu ou, à défaut de ce responsable, le praticien responsable de la prise en charge de la personne atteinte.
Section II
Du contenu de la déclaration
Art. 13.
La déclaration d’une infection nosocomiale ou d’un évènement indésirable grave associé aux soins est effectuée par écrit et comporte :
1) la nature de l’infection ou de l’évènement indésirable et les dates et circonstances de sa survenue ou, à défaut, de sa constatation ;
2) la mention des investigations réalisées à la date de la déclaration ;
3) l’énoncé des premières mesures prises au bénéfice de la personne atteinte et en prévention de la répétition d’évènements de même nature, ainsi que, le cas échéant, pour lutter contre l’infection et prévenir sa propagation ;
4) la mention de l’information de la personne atteinte ou, le cas échéant, de la ou des personnes dont le consentement est requis pour la réalisation d’un acte ou traitement médical sur la personne atteinte conformément aux dispositions législatives en vigueur.
Art. 14.
Toute déclaration d’une infection nosocomiale ou d’un évènement indésirable grave associé aux soins est effectuée dans des conditions qui garantissent l’anonymat du patient et des professionnels de santé concernés à l’exception du déclarant. Elle ne comporte notamment ni les noms et prénoms des patients, ni leur adresse, ni leur date de naissance, ni les noms et prénoms des professionnels de santé ayant participé à leur prise en charge.
CHAPITRE III
DES MESURES CORRECTRICES VISANT À PRÉVENIR UNE RÉCIDIVE
Art. 15.
Dans les trois mois suivant la déclaration prévue à l’article 8, le déclarant communique par écrit au Directeur de l’Action Sanitaire les éléments de l’analyse mentionnée au chiffre 3) de l’article 7 et au second alinéa de l’article 8, ainsi qu’un plan d’actions correctrices visant à prévenir une récidive.
CHAPITRE IV
DE L’INFORMATION DE LA PERSONNE VICTIME D’UN ÉVÈNEMENT INDÉSIRABLE ASSOCIÉ AUX SOINS
Art. 16.
Les dispositions du Chapitre IV de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée, sont également applicables à tout évènement indésirable associé aux soins mentionné au chiffre 3) de l’article premier de la présente loi.
TITRE II
DE LA GESTION DES RISQUES ASSOCIÉS AUX SOINS EN DEHORS D’UN ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ ET D’UN ÉTABLISSEMENT MÉDICO‑SOCIAL
CHAPITRE I
DE LA DÉCLARATION DE CERTAINS ÉVÈNEMENTS INDÉSIRABLES ASSOCIÉS AUX SOINS
Art. 17.
Tout professionnel de santé exerçant en dehors d’un établissement de santé et d’un établissement médico-social qui constate soit une infection associée aux soins répondant à l’un des critères définis à l’article 18, soit un évènement indésirable grave associé aux soins défini à l’article 11 en effectue, sans délai, la déclaration au Directeur de l’Action Sanitaire.
Toutefois, lorsque plusieurs professionnels de santé sont concernés, cette déclaration n’est effectuée que par l’un d’eux.
La déclaration est effectuée sans préjudice de toute autre obligation de déclaration ou de signalement.
Les dispositions des articles 13 et 14 sont applicables à la déclaration.
Les professionnels de santé concernés analysent la cause de l’infection associée aux soins ou de l’évènement indésirable grave associé aux soins faisant l’objet de la déclaration.
Art. 18.
La déclaration d’une infection associée aux soins concerne toute infection associée aux soins qui soit :
1) est inattendue ou inhabituelle du fait de la nature ou des caractéristiques, notamment du profil de résistance aux anti-infectieux, de l’agent pathogène en cause ;
2) est inattendue ou inhabituelle du fait de la localisation ou des circonstances de survenue de l’infection chez la personne atteinte ;
3) survient sous forme de cas groupés ;
4) a provoqué un décès ;
5) relève d’une maladie à déclaration obligatoire.
CHAPITRE II
DE L’INFORMATION DE LA PERSONNE VICTIME D’UN ÉVÈNEMENT INDÉSIRABLE ASSOCIÉ AUX SOINS
Art. 19.
Les dispositions du Chapitre IV de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée, sont également applicables à tout professionnel de santé exerçant en dehors d’un établissement de santé et d’un établissement médico-social pour toute infection associée aux soins et tout évènement indésirable associé aux soins mentionné au chiffre 3) de l’article premier de la présente loi.
TITRE III
DE LA GESTION DES RISQUES ASSOCIÉS AUX SOINS DANS UN ÉTABLISSEMENT MÉDICO‑SOCIAL
CHAPITRE I
DE LA DÉCLARATION DE CERTAINS ÉVÈNEMENTS INDÉSIRABLES ASSOCIÉS AUX SOINS
Art. 20.
Tout professionnel de santé qui, dans l’exercice de ses missions au sein d’un établissement médico-social, constate soit une infection associée aux soins répondant à l’un des critères définis à l’article 18, soit un évènement indésirable associé aux soins défini à l’article 11, en effectue, sans délai, la déclaration au représentant légal dudit établissement qui la transmet, sans délai, au Directeur de l’Action Sanitaire.
La déclaration est effectuée sans préjudice de toute autre obligation de déclaration ou de signalement.
Les dispositions des articles 13 et 14 sont applicables à la déclaration.
CHAPITRE II
DES MESURES CORRECTRICES VISANT À PRÉVENIR UNE RÉCIDIVE
Art. 21.
Dans les trois mois suivant la déclaration prévue à l’article 20, le représentant légal de l’établissement médico-social communique par écrit au Directeur de l’Action Sanitaire les actions correctrices visant à prévenir une récidive.
CHAPITRE III
DE L’INFORMATION DE LA PERSONNE VICTIME D’UN ÉVÈNEMENT INDÉSIRABLE ASSOCIÉ AUX SOINS
Art. 22.
Les dispositions du Chapitre IV de la loi n° 1.541 du 16 décembre 2022, susmentionnée, sont également applicables pour toute infection associée aux soins et tout évènement indésirable associé aux soins mentionné au chiffre 3) de l’article premier de la présente loi.
TITRE IV
DISPOSITIONS TRANSITOIRES
Art. 23.
Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur trois mois après sa publication au Journal de Monaco.
La présente loi est promulguée et sera exécutée comme loi de l’État.
Fait en Notre Palais à Monaco, le douze décembre deux mille vingt-quatre.
ALBERT.
Par le Prince,
Le Secrétaire d’État :
Y. Lambin Berti.
Le Dossier Législatif - Travaux Préparatoires de la loi est en annexe d’un prochain Journal de Monaco.