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REPONSE DES POUVOIRS PUBLICS DE LA PRINCIPAUTE AU RAPPORT DE LA MISSION PARLEMENTAIRE FRANÇAISE CONCERNANT LA PRINCIPAUTE FACE A LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT

  • No. Journal 7451
  • Date of publication 14/07/2000
  • Quality 100%
  • Page no.
A l'ouverture de la séance publique tenue par le Conseil National le mardi 27 juin 2000, M. Jean-Louis CAMPORA, Président de la Haute Assemblée, a lu la déclaration commune ci-après :

"Les Conseillers Nationaux sont étonnés d'avoir appris par la presse certains éléments du rapport relatif à Monaco publié par une Mission parlementaire française d'information sur les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière et du blanchiment des capitaux en Europe, le Président de cette Commission, M. Vincent Peillon et le Rapporteur, M. Arnaud Montebourg, ne leur ayant toujours pas communiqué l'intégralité de ce rapport.

Ils déplorent qu'une visite d'information de parlementaires, qui se voulait positive, et qui a été engagée sur la base de relations d'amitié entre la France et Monaco, puisse aboutir à un si violent réquisitoire contre la Principauté, aussi injustifié que surprenant.

Ils ressentent comme une agression supplémentaire les conclusions de ce rapport qui sont fondées notamment sur des raccourcis saisissants, des informations tronquées et quelques témoignages anonymes.

Ils regrettent vivement que les méthodes employées et que le remue-ménage médiatique que les deux élus français ont orchestrés, l'aient été au mépris de l'indispensable objectivité, du sérieux de la méthode et de l'impartialité que requièrent des missions d'information de ce type.

Ils ne peuvent admettre que des élus se prêtent à de telles déclarations tapageuses alors que les liens d'amitié entre la France et Monaco sont confortés par des Traités internationaux et des Conventions bilatérales, lesquels imposent à tous ceux qui exercent des responsabilités politiques dans un Pays, une obligation de réserve vis-à-vis de l'autre Pays, ainsi que pour ceux qui y exercent aussi une responsabilité politique.

Les relations diplomatiques entre les Etats permettent alors de régler les éventuels différends.

Les Conseillers Nationaux souhaitent publiquement manifester leur solidarité au Gouvernement monégasque et l'assurer de leur entière disponibilité afin que, dans les plus brefs délais, soit engagée une indispensable réflexion commune et arrêtées les actions qu'impose l'intérêt supérieur du Pays".


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* *


Lors de la même séance, S.E. M. Patrick LECLERCQ, Ministre d'Etat de la Principauté, a fait la déclaration suivante au nom du Gouvernement Princier :

"Les Autorités Monégasques ont été profondément choquées par le ton et le contenu du rapport publié la semaine dernière par une Mission parlementaire française sur la question dite du blanchiment de l'argent.

Elles dénoncent une opération de dénigrement menée au mépris des faits dans une vision délibérément orientée.

Une nouvelle fois se vérifie la méconnaissance dont est l'objet la Principauté dans ses réalités présentes d'Etat souverain, respectueux du Droit et soucieux d'entretenir une relation étroite et responsable avec son environnement européen et international. S'illustrent aussi l'arrogance et la désinvolture dont on croit pouvoir user lorsqu'un petit Etat est en cause.

Alors que la Mission parlementaire a bénéficié de toutes les facilités pour mener en Principauté un authentique travail d'information, son rapport fait clairement apparaître qu'elle a moins cherché à s'informer de la situation réelle qu'à rassembler ce qui lui paraissait de nature à conforter ses préjugés.

Une telle approche, si éloignée dans sa partialité de ce qu'on serait en droit d'attendre, sur ce sujet important, de la part de la haute Institution ayant mandaté la Mission, est d'autant plus regrettable qu'elle est le fait de parlementaires du pays avec lequel la Principauté entretient historiquement les relations les plus étroites et dont les autorités sont donc en mesure de parfaitement connaître la réalité des choses. C'est dans l'esprit de confiance et d'étroite amitié qui caractérise ces relations que la vérité doit s'imposer.

A cet effet, le Gouvernement Princier adresse aujourd'hui même une lettre ouverte aux rédacteurs en chef des journaux européens qui ont assuré l'accompagnement médiatique dont s'est assortie la publication du rapport".



Principauté de Monaco
Le Ministre d'Etat


Le 27 juin 2000.


"Monsieur le Rédacteur en Chef,

A la suite de la publication du Rapport de la mission parlementaire française concernant la Principauté de Monaco face à la lutte contre le blanchiment de l'argent d'origine criminelle et de l'exploitation qui en a été faite, je crois utile, au nom du Gouvernement Monégasque, de vous apporter les précisions suivantes.

L'objet de la démarche entreprise par ladite mission parlementaire était intéressant pour tous les pays concernés.

Malgré l'attitude délibérément provocatrice de ses animateurs, les Autorités monégasques ont accueilli cette mission avec une totale disponibilité et un esprit de coopération qui n'ont pas été relevés.

Ces autorités ont été cependant étonnées de constater, d'après les déclarations publiques de MM. Peillon et Montebourg dès leur arrivée à Monaco, que ces derniers étaient guidés par une vision préétablie alors même que leur travail d'investigation n'avait pas été engagé.

Elles ont été choquées par la forme agressive de leurs conférences de presse des 16 et 17 décembre 1999, qui leur a semblé révéler des objectifs d'une autre nature que celui officiellement annoncé.

Elles l'ont été tout autant, ces jours derniers par la campagne de presse qui a accompagné le lancement du Rapport et a porté moins sur la coopération recherchée en matière de lutte contre le blanchiment que sur une vision générale de la Principauté de Monaco manifestement orientée.

Elles ont regretté, par ailleurs, qu'il n'ait pas été suffisamment relevé que le rapport de la Mission a été contesté par une partie de ses Membres.

S'agissant du contenu du Rapport, il convient de dénoncer, en premier lieu, plusieurs contre-vérités manifestes dont on peut s'étonner de les voir figurer dans un document parlementaire.

Il en est ainsi, tout d'abord, d'affirmations de principe, telles que celles citées ci-après, aussi gratuites qu'infondées, qui affectent la crédibilité du reste du rapport :

- "Il est donc évident que si une personne vit à Monaco, c'est parce qu'elle a quelque chose à se reprocher envers les autorités de son propre pays" (p. 67 - citation anonyme).

- "Le système monégasque est simple. Tout a été organisé au plus haut niveau des autorités monégasques pour amener des fonds dans la Principauté monégasque quels que soient les moyens et l'origine des fonds" (p. 69 - citation anonyme).

- "Il y a une rumeur du marché, concernant Monaco, selon laquelle la Principauté serait aux mains des mafias siciliennes ... Le Prince a choisi cette voie délibérément sans vouloir être regardant" (p. 70 - citation anonyme).

Ces outrances semblent n'avoir d'autre but que de donner au Rapport un ton de nature à accrocher l'intérêt au mépris du sérieux avec lequel le problème considéré doit être traité.

Il en est ainsi également des allégations suivant lesquelles la Justice monégasque serait soumise aux ordres du Prince, du Cabinet Princier ou des Autorités gouvernementales.

- "Cette Justice déléguée est, avant tout, une justice retenue" (p. 24) ... "Elle obéit aux injonctions du pouvoir exécutif et monarchique".

- "A Monaco, il y a les affaires pour lesquelles le Gouvernement monégasque, pour ne pas dire le Prince, tolère l'investigation et celles pour lesquelles il ne la tolère pas" (p. 97).

- "La Justice monégasque, dépendant du Prince à travers son procureur général ... Ces pressions sur des Juges du siège" (p. 87).

- "Il semble que le réquisitoire ... ait été établi sur les instructions du Cabinet Princier" (p. 96).

- "Exigences et pressions exercées par le Parquet général de Monaco, lui-même attaché au Ministère de la Justice, lequel paraissait répondre aux impulsions du Cabinet Princier" (p. 116).

Ces allégations ne peuvent être l'objet que d'un démenti radical.

La vérité est que la Justice à Monaco, à la différence de nombreux pays, est totalement indépendante de l'Exécutif, qu'elle n'est pas placée sous la tutelle d'un ministre relevant du Gouvernement et que le rôle du Prince à son égard consiste justement à garantir son indépendance.

De ce fait, il n'appartient pas au Gouvernement de répondre, cas par cas, aux insinuations du Rapport concernant des procédures particulières mais à l'Autorité judiciaire elle-même.

De façon objective, on ne peut manquer de noter des contradictions étonnantes dans le document publié.

Ainsi, l'allusion déjà citée aux soi-disantes "pressions sur des Juges du siège" (p. 87) alors que l'on admet par ailleurs que "le siège n'est pas en cause" (p. 103).

Ainsi, l'affirmation que, faute pour la Principauté d'avoir adhéré à ce jour à la Convention Européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, "il n'y a donc, en principe, aucune commission rogatoire recevable" et que Monaco ferait les pires difficultés pour donner suite à ces démarches des Etats tiers.

Or, le Rapport cite, en sens contraire, des chiffres éloquents : 75 commissions rogatoires sur 80 exécutées dans le courant de l'année civile en 1998 ; 64 sur 89 en 1999 (22 arrivées en fin d'année étant alors en cours d'exécution).

Il doit être noté également que les rapporteurs estiment n'avoir plus de critiques à formuler à propos du fonctionnement de la Justice monégasque depuis la nomination d'un nouveau Directeur des Services Judiciaires, il y a deux ans.

Cette constatation rassurante ne les empêche pourtant pas d'évoquer des affaires judiciaires antérieures, ce qui illustre effectivement le fait que rien n'est à signaler depuis lors.

A ce sujet, rien ne fait obstacle à une concertation entre les gouvernements français et monégasque dans le domaine de l'entraide judiciaire, conformément aux pratiques entre Etats souverains.

Dans cet esprit, le Prince vient d'autoriser son Directeur des Services Judiciaires à rencontrer Mme le Garde des Sceaux à la demande de cette dernière.

Il est une autre contre-vérité tout à fait blessante pour les Autorités et les habitants de la Principauté de Monaco dans la mesure où elle risque de désinformer l'opinion publique française, sinon les parlementaires français eux-mêmes, en donnant de Monaco l'image d'un pays assisté budgétairement par la France : l'allusion à une "subvention annuelle des contribuables français à Monaco".

Les auteurs du Rapport dénoncent comme une faveur le versement par la France d'une somme annuelle d'environ 800 millions de francs dans le cadre du compte de partage de la TVA.

Ils négligent cependant de rappeler :

- Que cette somme n'est pas un cadeau de la France à Monaco mais la contrepartie des encaissements de TVA effectués par le Trésor français pour le compte de l'Etat monégasque du fait de l'absence de barrière douanière entre les deux Etats.

- Que ce compte de partage résulte de la Convention fiscale franco-monégasque du 18 mai 1963 et reflète donc l'accord des deux gouvernements.

- Que la croissance des versements français au cours des années récentes est liée à celle des recettes fiscales françaises résultant du développement économique monégasque.

Les considérations consacrées à cette thèse dans le Rapport dénotent soit une ignorance étonnante des réalités, soit la volonté de dresser l'opinion publique française contre la Principauté.

Il est essentiel de rectifier sur ce point les assertions du Rapport qui n'auraient d'autre objet que d'inspirer ceux qui se contenteraient de "commenter des commentaires".

Il convient aussi d'avoir à l'esprit les apports importants de l'économie monégasque à l'économie française, outre les recettes de TVA déjà évoquées qui sont totalement passés sous silence :

- Plus de 22.000 emplois pour des ressortissants français résidant hors de Monaco et bénéficiant d'un régime élevé de protection sociale à la charge des organismes monégasques compétents.

- Environ 1 milliard de francs de marchés publics attribués chaque année à des entreprises françaises.

- Les services publics de la Principauté (enseignement gratuit ; sécurité ; santé ; équipements sportifs ...) largement ouverts à des milliers de français, dont une proportion élevée ne résidant pas à Monaco.

- Participation financière à des équipements publics en territoire français (autoroutes ; échangeurs ; aéroport de Nice Côte d'Azur ; foyers sociaux d'habitation ...).

Il aurait été plus conforme à l'objectivité de rappeler, dans un document traitant largement des relations franco-monégasques, ces réalités qui soulignent l'apport de la Principauté à son environnement français.

Au delà de cette approche partiale et partielle de situations non liées directement à l'objet du Rapport, il convient d'examiner maintenant les développements consacrés à la lutte contre le blanchiment.

Nous devons constater que le document publié exprime, sur ce plan, également, une vision délibérément orientée à côté de réflexions plus positives.

Une observation liminaire s'impose, s'agissant du problème ponctuel de la lutte contre le blanchiment de l'argent d'origine criminelle : Après plusieurs mois d'enquêtes portant sur tous les aspects de cette question, le GAFI (Groupe d'Action Financière sur le blanchiment des capitaux), organisme international qualifié en la matière, a décidé que la Principauté de Monaco ne devait pas figurer sur la "liste noire" des pays non coopératifs (alors qu'une quinzaine d'Etats y ont été inscrits).

Les Autorités monégasques ont été choquées par la réaction de certains parlementaires français exprimant des doutes à propos de cette position prise par un organisme intergouvernemental.

La décision du GAFI affecte la crédibilité du Rapport de la mission parlementaire française et conforte le sentiment selon lequel celui-ci vise manifestement des objectifs plus généraux au lieu de s'en tenir à la lutte contre le blanchiment et aux moyens d'améliorer le dispositif monégasque.

Il est regrettable, à cet égard, que le Rapport comporte, à côté d'observations de bon sens touchant aux mesures concrètes susceptibles d'être envisagées par la Principauté, des postulats tels que :

- L'intention délibérée de l'Etat monégasque de fonder la prospérité de ce pays sur le seul secteur financier.

- La volonté d'encourager la fraude fiscale au détriment des Etats tiers.

- L'amalgame entre l'existence d'un système fiscal modéré, adapté aux besoins budgétaires de la Principauté, et l'incitation supposée que ce système susciterait auprès des organisations criminelles.

- Une mise en garde adressée aux Autorités monégasques, d'avoir, dans le cadre du traité "d'amitié protectrice" avec la France, à rendre compte de leurs responsabilités vis-à-vis de ce Pays.

Il est aisé de répondre à ces considérations que :

- Le secteur bancaire représente 19 % du chiffre d'affaires de la Principauté en 1999, part très inférieure à celle du commerce et de l'industrie (55 %).

- Ce secteur est important, cependant, en termes d'emplois (1.700 emplois).

- Le système fiscal monégasque date de 1869 et n'a que très peu évolué depuis cette date, ce qui démontre que la Principauté n'a jamais voulu faire un objectif en soi de la concurrence fiscale au détriment des Etats tiers.

- Les contributions de nature fiscale constituent 76 % des recettes de l'Etat monégasque, ce qui est à souligner s'agissant d'un pays qualifié de "paradis fiscal".

- Le système fiscal monégasque, pour spécifique qu'il soit, ne peut être davantage contesté que ceux des autres pays européens.

- Les Autorités monégasques approuvent sans réserve les termes ci-après de la conclusion du Rapport :

"Le régime fiscal privilégié décidé par un Etat relève de sa souveraineté et n'a rien en soi de répréhensible. Ce choix témoigne d'une stratégie économique délibérée et ne suffit pas à lui seul à susciter la réprobation.

"En revanche, l'afflux inévitable de capitaux résultant de l'existence d'une fiscalité privilégiée, nécessite en contrepartie la mise en place d'un système de contrôle bancaire rigoureux, l'existence d'une législation permettant de se prémunir contre l'anonymat des transactions, la garantie d'une coopération internationale policière, judiciaire, efficace, accordée en matière pénale".

C'est exactement ce qui a inspiré la Principauté lorsqu'elle s'est dotée d'un dispositif de lutte contre le blanchiment.

- La Principauté de Monaco s'attache d'ailleurs à compléter son dispositif législatif et à renforcer sa mise en oeuvre comme le reconnaissent ses interlocuteurs les plus qualifiés.

- Elle retient les suggestions des Rapporteurs, concernant des mesures concrètes susceptibles d'être envisagées dans cet esprit, notamment en vue du renforcement du SICCFIN et du contrôle de l'activité de certaines sociétés étrangères gérées depuis Monaco.

- Le Gouvernement Princier poursuivra sa concertation avec le Gouvernement français comme avec les autres gouvernements sur les moyens susceptibles de renforcer la coopération face au fléau mondial du blanchiment de l'argent d'origine criminelle.

- L'Etat monégasque a déjà, depuis longtemps, demandé à adhérer au GAFI afin de mieux s'intégrer à l'effort international dans ce domaine et annoncé son souhait d'adhérer aux Conventions internationales anti-blanchiment.

Enfin, en ce qui concerne les responsabilités respectives des Gouvernements monégasque et français, notamment au regard de la gestion de la place financière ou de la Justice monégasques, on ne peut laisser entendre à la fois, comme le fait le Rapport, que la Principauté de Monaco serait placée sous la tutelle française et que le Gouvernement Princier ne se comporterait pas de façon loyale à l'égard de la France.

Si les rapporteurs considèrent qu'il convient de "remettre à plat" les traités franco-monégasques, c'est sans doute dans le but de clarifier les responsabilités respectives des deux gouvernements dans les secteurs évoqués.

Le Gouvernement Princier a déjà fait connaître, sur ce point, au Gouvernement français son souhait d'un réexamen concerté du Traité franco-monégasque, datant de plus de 80 ans, dans le respect et dans l'esprit du droit international moderne qui confère aux petits Etats les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux des grands Etats ...

Ne doutant pas de votre volonté de compléter l'information de l'opinion publique à la suite de la récente publication du Rapport de la Mission Parlementaire française, je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire connaître à vos lecteurs la mise au point ci-dessus.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Rédacteur en Chef, les assurances de ma considération très distinguée.


Patrick LECLERCQ".



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Le 30 juin 2000, les magistrats de la Cour d'Appel, du Tribunal de Première Instance et de la Justice de Paix, réunis en assemblée générale, ont voté à l'unanimité la délibération ci-après :

Les magistrats de la Cour d'Appel, du Tribunal de Première Instance et de la Justice de Paix de la Principauté de Monaco,
réunis en assemblée générale conformément à l'article 37 de la loi du 15 juillet 1965 portant organisation judiciaire, assistés des greffiers en chef adjoints,

constatant que le rapport de la mission d'information parlementaire sur les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière et du blanchiment des capitaux met gravement en cause le fonctionnement de la justice de la Principauté de Monaco, ont voté à l'unanimité la délibération suivante :

1. - Les conditions dans lesquelles le rapport est établi leur apparaissent hautement critiquables et les accusations portées à l'encontre de la justice sont diffamatoires.

Les procédés employés par la mission démentent d'une manière flagrante la déclaration de principe selon laquelle "la mission a veillé à une permanente confrontation des points de vue".

En effet, des accusations gravissimes sont portées contre le corps judiciaire sans réserver aucune place à un débat contradictoire sur des dossiers qui sont pourtant au centre de ces accusations.

Ainsi, les auteurs du rapport ont fait preuve d'une partialité évidente laissant transparaître que leur opinion était forgée à l'avance, en affirmant, en termes péremptoires, que la justice est rendue dans la Principauté de Monaco de façon indigne : absence d'indépendance des juges, interventions de la Direction des Services Judiciaires et du Cabinet Princier dans les affaires judiciaires, obstacles dressés par le pouvoir politique au déroulement normal des procédures, décisions de circonstances selon la personnalité des individus poursuivis, mauvaise coopération judiciaire internationale ...

Les auteurs sont allés jusqu'à déformer sciemment les termes du serment prêté par les magistrats, en écrivant faussement que les juges prêtent serment d'obéissance au Prince.

2. Les juges de la Principauté apportent le démenti le plus formel à ces attaques injustes et systématiques.

Ils statuent en toute indépendance, à l'abri des pressions, avec une totale impartialité et le souci constant de rendre des décisions de justice de qualité.

Ils rappellent qu'à l'issue d'une enquête approfondie, préalable à l'entrée de la Principauté de Monaco au Conseil de l'Europe, les deux experts mandatés par le Conseil, juges de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ont récemment confirmé l'indépendance de la justice et la prééminence du droit à Monaco.

Les magistrats monégasques et français des juridictions de la Principauté doivent être rétablis dans leur honneur.

Au Palais de Justice, à Monaco, le 30 juin 2000.


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Pour sa part, M. Patrice DAVOST, Directeur des Services Judiciaires, a fait la déclaration suivante :

"Ce rapport n'est pas le reflet du fonctionnement actuel des juridictions monégasques, mais une enquête sur des "événements" du passé au cours desquels se sont opposés des magistrats qui n'exercent plus de fonctions judiciaires à Monaco, les médias s'étant fait l'écho d'une situation ancienne et depuis lors révolue.

Je tiens à vous confirmer que j'ai constaté, depuis ma prise de fonctions, que tous les magistrats exerçant actuellement à Monaco, qu'ils soient monégasques ou qu'il s'agisse des magistrats français détachés, dont près de la moitié a été nommée au cours de l'année écoulée, remplissent leurs fonctions en toute indépendance et avec impartialité.

Il en est ainsi des magistrats du siège qui, loin de rendre une "justice de pacotille", rendent une justice de qualité dans des affaires souvent très complexes, de droit international privé, de droit civil, de droit administratif, de droit fiscal, de droit commercial ou de droit du travail.

Il en est ainsi des magistrats de l'instruction, qui ont à connaître de très lourds dossiers en matière de délinquance économique et financière, et notamment de treize informations en cours du chef de blanchiment d'argent.

Il en est ainsi des magistrats du Tribunal correctionnel ou de la Chambre des appels correctionnels qui viennent de condamner très récemment des cambistes pour abus de confiance, et des dirigeants d'une banque pour omission de déclaration de soupçons.

Il en est ainsi des magistrats du Parquet qui ont toute latitude pour exercer l'action publique sans entrave ni de ma part ni du Cabinet Princier.

Les magistrats de la Principauté, qu'ils soient monégasques ou français, sont profondément meurtris, choqués et excédés d'être traînés dans la boue.

Ils souhaitent pouvoir exercer dorénavant leurs fonctions en toute sérénité et en toute transparence".
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